Méditations quotidiennes

Mardi 30 septembre

Saint Jérôme

« Je voudrais être missionnaire non seulement pendant quelques années, mais je voudrais l’avoir été depuis la création du monde et l’être jusqu’à la consommation des siècles... Mais je voudrais par-dessus tout, ô mon Bien-Aimé Sauveur, je voudrais verser mon sang pour toi jusqu’à la dernière goutte... »

Depuis la création du monde ? oui : ab initio et ante sæcula, comme dit la liturgie, mettant à l’indicatif ces paroles dans la bouche de la Sainte Vierge, comme l’affirmation d’un fait, non pas comme un vœu. Une âme humaine peut-elle vouloir que Dieu l’ait créé depuis le commencement du monde, afin d’aider Jésus à répandre ses grâces sur tous les hommes, depuis Adam et Ève jusqu’au jugement dernier ? oui, assurément : sainte Thérèse en est une preuve vivante. Si donc une “ miniature de l’Immaculée Conception ” ressentait ce désir dans son cœur assoiffé d’amour et dévoré de zèle, qu’a donc éprouvé le Cœur de Marie ? et si Marie était consumée de ce désir, comment Dieu n’aurait-il pas comblé son vœu, puisqu’il l’a inspiré à sainte Thérèse ?


Les bouquets spirituels du mois d'Octobre
évoquent brièvement la dévotion des saints à Notre-Dame de Lourdes.

Mercredi 1er octobre

Sainte Thérèse de l’Enfant-Jésus, Saint Remi, Notre-Dame de Maylis

Pèlerinage d’Hermann Cohen, père Augustin-Marie du Très Saint-Sacrement (1821-1871) :

Au matin du 20 septembre 1858, le Père Hermann et le curé de Tarasteix, l’abbé Roziès, partaient pour la première fois en pèlerinage à la Grotte : « nous arrivâmes à Lourdes, raconte l’abbé Roziès, le curé Peyramale nous offrit l’hospitalité (...). Nous arrivâmes à la Grotte au point du jour [Elle était barricadée], mais déjà nous rencontrâmes des pèlerins qui en revenaient, égrenant pieusement le chapelet en route, emportant des carafes et des cruches d’eau. Une particularité bien étrange survint au Père Augustin. En se baissant pour boire à la source de la Grotte, il laissa tomber son bréviaire dans le bassin. Une femme s’empressa de s’incliner pour retirer de l’eau le livre submergé. Avec non moins d’empressement le Père regarda si les feuilles n’étaient pas mouillées. Entre plusieurs images, il y en avait une de la Sainte Vierge, fort belle ; il s’attendait à la trouver endommagée par l’eau. Quelle surprise en ouvrant le bréviaire : non seulement l’image de Marie n’avait souffert aucune atteinte, mais le côté colorié de sa chère gravure s’était imprimés sur la page blanche du bréviaire, donnant une copie parfaitement semblable à l’original, avec la finesse du dessin et le brillant du coloris. Transporté de joie à cette vue et pénétré de reconnaissance, le Père s’écria : « Ô Sainte Vierge, vous me faites une faveur signalée, au lieu d’une image de vous, vous m’en donnez deux ! » J’entonnai le Magnificat et toute la foule le chanta avec nous (...). Il fut le premier à avoir entonné le Magnificat devant un rassemblement de deux cents personnes ! Le rapport du commissaire Jacomet le confirme officiellement !

Flèche de feu, le père Augustin-Marie du très Saint-Sacrement Hermann Cohen,
1821-1871, dom Jean-Marie Beaurin

Jeudi 2 octobre

Bx Antoine Chevrier, Saints Anges gardiens

En 1868, le Père Augustin-Marie est atteint d’une « ophtalmie si grave, que l’obéissance me fit partir pour Bordeaux, afin d’y consulter un célèbre oculiste. Déjà, depuis un mois avant mon départ, on avait dû m’interdire toute lecture, même celle du saint Bréviaire (...). Le savant oculiste conclut à l’existence d’une maladie que la science appelle le glaucome ; il me déclara que nul remède ne pourrait empêcher l’inflammation d’y survenir (...). Cependant, mon mal empirait chaque jour. Sur ces entrefaites, on me suggéra l’idée d’une neuvaine à Notre-Dame de Lourdes, qui avait déjà guéri miraculeusement plusieurs personnes atteintes de cécité (...). La neuvaine fut commencée le 24 octobre, fête de l’ange Raphaël qui, lui aussi, avait guéri Tobie de sa cécité. Chaque jour j’imprégnai mes yeux dans l’eau salutaire puisée à la Grotte miraculeuse, et chaque jour je priai la Vierge Immaculée, et un grand nombre de saintes âmes la priaient avec moi. Le sixième jour de la neuvaine, je me rendis à pied de notre couvent de Bagnères à Lourdes, désirant accomplir ce pèlerinage dans les conditions qui me donneraient le plus de chances de succès. Déjà, à Bagnères, j’avais éprouvé chaque jour de la neuvaine, un soulagement dans l’ophtalmie dont je souffrais, et cela au moment où l’eau de la Grotte était venue baigner mes yeux. (...) Enfin, le dernier jour, fête de la Toussaint, me trouvant dans la Grotte même et auprès de la fontaine, je n’éprouvai plus aucun des symptômes du mal (...). J’ai obtenu ce que je désirais avant tout : c’est-à-dire de pouvoir continuer la vie érémitique dans notre cher Désert ; en un mot, je suis radicalement guéri et, dans ma conviction intime, cette guérison est un miracle dû à l’intercession de la Sainte Vierge.

L’enfant de Notre-Dame du Mont Carmel, Hermann Cohen, carme déchaussé, fut le premier Juif miraculé de Lourdes.

Flèche de feu, le père Augustin-Marie du très Saint-Sacrement Hermann Cohen,
1821-1871, dom Jean-Marie Beaurin

Vendredi 3 octobre

Premier Vendredi du mois, Bse Émilie de Villeneuve, Ste Thérèse de l’Enfant-Jésus, Sainte Blanche

Pèlerinage de Zélie Martin, avec Marie, Pauline et Léonie, pour demander sa guérison, en juin 1877 :

À cinq heures du matin nous arrivions à Lourdes (...). Les enfants avaient faim, j’ai commandé un bon tapioca ; moi, je n’ai rien pris, voulant aller d’abord à la Grotte, puis à la piscine, bien que je fusse à bout de forces. Arrivée à la Grotte, j’avais le cœur si serré que je ne pouvais même pas prier ; pendant la Messe, j’étais tout près de l’autel, mais j’étais si prostrée que je n’ai pu me rendre compte de rien. Je suis sortie dans un état complet d’anéantissement et de là, je me suis rendue à la piscine. Je regardai avec terreur cette eau glacée et ce marbre froid comme la mort. Mais il fallait bien s’exécuter et je m’y suis jetée avec courage. Oui, mais... j’ai manqué d’étouffer, j’ai été obligée de me retirer presque aussitôt, j’aurais dû aller plus doucement (...).

J’ai mis un beau cierge pour vous à la Grotte de Lourdes. Je me suis plongée quatre fois dans la piscine, la dernière fois, deux heures avant de partir. J’avais de l’eau glacée jusqu’au-dessus des épaules, mais elle n’était pas si froide que le matin ; j’y suis restée plus d’un quart d’heure, espérant toujours que la Sainte Vierge allait me guérir. Pendant que j’y étais, je ne ressentais plus aucune douleur, mais aussitôt retirée, cela recommençait à m’aiguillonner comme d’habitude (à suivre).

Lettre de Zélie à son frère et sa belle-sœur, 24 juin 1877

Samedi 4 octobre

Premier Samedi du mois, Saint François d’Assise

Je vais continuer les neuvaines avec de l’eau de Lourdes que j’appliquerai tous les jours. J’en ai rapporté trois litres, mais que j’ai eu du mal avec les bidons ! J’en ai acheté un qui coulait encore, nous avons dû retourner chez le marchand ; il m’est arrivé que des malheurs et des misères sans nombre.

La Sainte Vierge en a laissé d’autres que moi dans l’épreuve. J’ai vu beaucoup d’infirmes, entres autres, une petite fille de treize ans et demi que sa pauvre père portait sur ses épaules pendant les processions et toute la journée. Elle était dans un état lamentable, les jambes mortes, avec une plaie affreuse qui lui couvrait tout le dos et que je n’ai eu le courage de regarder que de loin. Elle est partie de Lourdes sans être guérie, ainsi que deux pauvres infirmes qui y venaient pour la seconde fois. J’ai vu l’enterrement d’un homme de soixante-douze ans, mort presque subitement mardi, pour avoir bu, la veille, étant en sueur, de l’eau de la Grotte en trop grand abondance (...).

Bien sûr, il y a de grandes grâces cachées au fond de tout cela, et qui me dédommageront de ces misères. J’ai mis, avec foi, de l’eau miraculeuse, sur le front de ma Léonie. J’aurais été doublement heureuse d’être guérie, à cause de vous. Hélas ! La Sainte Vierge nous a dit, comme à Bernadette : « Je vous rendrais heureux, non pas en ce monde mais en l’autre. »

Je ne me repens pas d’être allée à Lourdes, quoique la fatigue m’ait rendue plus malade, du moins, je ne me reprocherai rien, si je ne guéris pas. En attendant, espérons.

Dimanche 5 octobre

Solennité de Notre-Dame du Rosaire, Saint Placide et ses compagnons

Dévotion du général de Sonis avant la guerre de 1870 :

Le général de Sonis, blessé grièvement à Loigny, le 2 décembre 1870, avant d’avoir atteint ce bois, déposé à terre par deux officiers, dut assister, impuissant, à la fin de la mêlée. Alors commença pour lui une nuit atroce sous la neige par un froid de moins vingt degrés, sa jambe fracturée en vingt-cinq morceaux ! Offrant sa vie en sacrifice expiatoire pour le salut de la France. Il révélera plus tard ce que fut cette nuit d’agonie et de délices : « Cette nuit si longue et si noire, je l’ai passée dans la tranquillité la plus douce avec le secours de l’Immaculée, ayant remis mon âme entre les mains du Créateur, lui offrant ma vie pour la patrie si malheureuse. (...) J’étais là, seul, immobile, étendu sur la terre et la neige. Autour de moi gisaient de nobles victimes qui n’avaient point marchandé leur vie, mais qui l’avaient libéralement donnée pour la grande cause de la patrie et de l’honneur... J’abandonnai tout espoir de salut et je me résignai à mon sort. La pensée des douleurs que ma mort allait causer aux miens vint navrer mon âme de tristesse, mais je fus tiré de mon abattement par la contemplation de l’image de Notre-Dame de Lourdes ; elle ne me quitta plus. Avant la guerre, j’avais fait un pèlerinage à la Grotte miraculeuse et j’en avais rapporté les plus vives et les plus salutaires impressions. Depuis ce moment, je ne voyais la Sainte Vierge que sous l’aspect de la statue de Lourdes. Je puis dire que cette douce image me fut constamment présente pendant toute la nuit que j’ai passée sur ce sol sanglant où j’ai attendu la mort pendant des heures. »

Lundi 6 octobre

Saint Bruno, Sainte Foy, Bse Marie-Rose Durocher (Canada)

Pèlerinage de la famille Bruno de Nantes au mois de septembre 1966 :

« La pluie tombait à torrents à notre arrivée à Lourdes. Je me souviens du goûter, et du biberon réchauffé sous un hangar métallique. Assourdis par le bruit des cataractes sur le métal, nous ne restâmes pas longtemps. C’était le dernier jour du pèlerinage des prisonniers de guerre et il n’y avait plus une place dans les hôtels, nous fut-il dit au Syndicat d’initiative.

« Et nous voilà, laissant les dix enfants dans la voiture, partis chacun de notre côté à la recherche d’un toit. Votre Père revint ; il avait trouvé un hôtel dont la patronne, trop âgée, était en train de fermer les portes pour prendre sa retraite : les prisonniers de guerre étaient ses derniers clients, et elle venait de renvoyer son personnel. Devant l’insistance de votre père, elle accepta de nous recevoir “ pour une nuit ”, dit-elle. Il fallut défaire les lits, changer les draps, vider les eaux usées, laver les lavabos... mais nous étions à l’abri.

« Ce pèlerinage fut, pour moi, pour nous, accablant tant physiquement que spirituellement. J’en garde un souvenir de désolation totale. C’était la fête, si belle pourtant, de l’Exaltation de la Sainte Croix, et ce mot de Croix, sans cesse répété dans les textes liturgiques, m’épouvantait. Je me souviens avoir prié pour que ce jour se termine vite. Nous étions venus, j’étais venue, pour demander la guérison de Papa et il n’était question que de Croix, de mort ; tout cela me laissait dans un grand effroi.

« Et le lendemain je me souviens de mon effondrement (je connaissais bien mal le calendrier liturgique) : c’était la fête de Notre-Dame des Sept-Douleurs ! ! Comment peut-on être aussi aveugle ! ! Je n’avais qu’une envie, c’était de quitter Lourdes le plus tôt possible ; je n’ai même pas eu le courage de vous emmener aux piscines, ce que Papa aurait fait volontiers malgré sa grande fatigue.

« Je suis sûre que c’est la Sainte Vierge qui nous a obtenu la grâce de supporter l’épreuve qui nous attendait ; sûre aussi que maintenant encore, il nous attend auprès d’Elle, veillant sur chacun de nous. »

Lettre de Ghislaine de Nantes à ses enfants

Mardi 7 octobre

Très Saint Rosaire de la Très Sainte Vierge Marie, Sainte Justine, Saint Serge

Pèlerinage de Varvara Komaroff, russe convertie, entrée chez les Bénédictines de Dourgne :

« Mon premier voyage à Lourdes, décisif pour ma conversion, a eu lieu le 1er septembre 1906. » Le trajet se passe en prières. Varvara supplie la Vierge de lui permettre de communier chacun des jours qu’elle va passer à Lourdes. Aussitôt débarquée, elle se rend à la Grotte. La nuit est tombée. Elle s’agenouille derrière la grille, dans le scintillement des cierges, face à “ l’apparition blanche et céleste qui se dresse dans la cavité ” du rocher. Après deux heures d’intense recueillement, elle gagne son hôtel.

(...) « Dès 5 heures, j’étais debout. J’assistais à la messe de 6 heures, mais je ne m’approchais pas de la grille (de la Grotte). Je voulais tout d’abord aller me confesser. À 7 heures, j’étais dans la crypte. Il y avait foule autour des confessionnaux. Je m’approchais de celui au-dessus duquel est placée une icône de la Sainte Vierge. Cela me donnait du courage. J’attendis mon tour en tremblant. Ce n’était pourtant pas la première fois de ma vie que je me confessais ; mais je ne crois pas qu’on puisse éprouver un sentiment de sainte ferveur plus grand lorsqu’on devra se présenter, après la mort, devant le tribunal de Dieu. Je commençai ma confession hâtivement, comme une personne qui se jette à l’eau, la tête la première et sans respirer, de peur de se noyer. Le prêtre qui m’écoutait parut fortement intéressé et me dit : Je vous donne l’absolution. Allez communier. Mais revenez à 10 heures ici. Il y a trop de monde : je ne peux vous donner le temps nécessaire. Je me relevai dans un état indescriptible... » (à suivre)

Fougue tartare et paix bénédictine, Varvara Tourgueniev-komaroff, 1856-1934 
Par le R. P. Jacques Pignal, s. j.

Mercredi 8 octobre

Sainte Brigitte

« Quand je reçus la Sainte Hostie et que je retournai à ma place et que je me mis à genoux... Qu’était-ce, grand Dieu ? C’était cela, et pourtant tout autre chose que ce que j’éprouvais en communiant dans l’autre Église. C’était Jésus aussi, mais combien plus parfaitement ! Là-bas, c’était la joie et, comme qui dirait, l’image entrevue, insaisissable et fuyante ; ici, c’était une douceur, une sûreté, une possession réelle, tout d’abord ressentie à peine, et ensuite toujours croissante, qui envahissait l’âme, la détenait et l’inondait d’une lumière inconcevable ! Cette douceur était si grande, elle était si touchante, si pénétrante que, durant les trois jours que je passai à Lourdes, je n’ai cessé de pleurer. Je pleurais en marchant à travers Lourdes, je pleurais en lisant, en mangeant, en dormant. Je pleurais et aurais voulu pleurer ainsi toujours. Cette première et parfaite rencontre de l’âme avec son Dieu ne peut être racontée qu’imparfaitement. À 10 heures, j’étais agenouillée dans le confessionnal, et je racontais à celui qui m’écoutait l’histoire des dernières années de ma vie, Jamais aussi jusqu’alors aucun prêtre ne me parla comme le prêtre auquel je m’adressais, d’union avec le Sauveur. Je me disais : C’est peut-être un ange... Il me dit aussi : Communiez chaque jour. Dites chaque jour le chapelet. Vivez cœur à cœur avec Jésus ; vouez-vous au Cœur de Jésus. Je croyais rêver. Communier chaque jour ! » (à suivre)

Jeudi 9 octobre

Saint Denis et ses compagnons, Saint Jean Léonardi, Saint Ghislain

Il me dit encore : Ne demandez jamais la santé pour vous-même. Demandez-la pour les autres : la Sainte Vierge vous exaucera toujours. Ne demandez la santé pour vous que si vous êtes poussée par une voix intérieure irrésistiblement, et en vue de la gloire de Dieu. Oh ! Quelle bonté ! Il me permettait de prier pour les autres et me donnait le don d’être exaucée !...

Le soir j’assistai à la procession aux flambeaux. Je ne sais pas même raconter ce que j’ai éprouvé en voyant cette foule de plusieurs milliers de personnes tomber à genoux et chanter le Credo. Je me suis dit : Le voilà le miracle, le grand miracle de Lourdes, le miracle de foi !

J’allais m’agenouiller aux pieds de la Sainte Vierge dans la Grotte et là je laissai, dans une oraison que la Sainte Vierge et mon Seigneur seuls connaissent, déborder mon cœur reconnaissant et ravi. Je leur demandai bien des choses pour mes enfants, mes parents, mes amis. Mais pour moi, j’implorai la communion quotidienne, ce Pain du ciel duquel mon âme était affamée. Et puisque le prêtre m’avait permis de tout oser, je dis : Sainte Vierge, ma Mère et ma Souveraine, ce n’est pas seulement la communion de chaque jour que je vous supplie de me donner, mais, ma bien-aimée Souveraine, faites que je puisse servir la cause de l’Union des deux Églises, laissez-moi y vouer tout le reste de ma vie, m’y dévouer, ne vivre que pour cela. Et, puisque je puis tout oser, tout obtenir, Sainte Vierge Marie, intercédez auprès de votre Fils afin que je meure martyre pour la foi, que je donne mon sang pour sceller les vérités de la foi...

Fougue tartare et paix bénédictine, Varvara Tourgueniev-komaroff, 1856-1934
Par le R. P. Jacques Pignal, s. j.

Vendredi 10 octobre

Saint Clair, Saint François Borgia

Pèlerinage de Mère Marie du Divin Cœur le 2 février 1896 :

« Ici tout est beau, s’empressa-t-elle d’écrire le même jour à dom Schober, j’ai beaucoup prié, mais pas encore assez, tant s’en faut ! Alba a été le lieu de la jouissance, Lourdes est celui de la demande, mais aussi de l’action de grâces pour le Bon-Pasteur, Cucujaes, et tant de faveurs reçues [...]. Quelle joie pour un cœur catholique de voir à Lourdes la Sainte Vierge honorée, nuit et jour, à longueur d’année, sans interruption ! Je suis plus tranquille ici que dans ma cellule de Porto ! [...] C’est un petit armistice, pendant lequel les forces se retrempent. »

Pourtant, une plaie restait encore bien vive dans son cœur : « Les adieux avec vous me furent extrêmement pénibles ; oui, ce fut la séparation d’avec le Père, dans tout le sens du mot, mais j’ai fait à Dieu le sacrifice qu’il me semblait que vous attendiez de moi et je me suis cramponnée d’autant plus fort à mon divin Époux. »

Le souvenir de ce pèlerinage demeura si profondément gravé dans l’âme de mère Marie du Divin Cœur que ses filles témoigneront après sa mort : « Son bonheur de prier sur le lieu des apparitions fut indicible. Son amour pour la Vierge Marie était tellement brûlant ! nous parla souvent des heures bénies qu’elle avait passées dans la sainte Grotte. »

Sœur Muriel du Divin Cœur, Le secret de la Bse Marie du Divin Cœur

Samedi 11 octobre

Maternité divine de la Bienheureuse Vierge Marie

Dévotion d’Antonia Droste zu Vischering pendant sa dernière maladie :

La petite sœur de Maria, souffrait de tuberculose pulmonaire qui la conduisit, lentement mais sûrement, à la mort. Âgée de quinze ans, elle édifiait tout son entourage par sa patience. Lorsque les intolérables douleurs se calmèrent, elle s’affligea de moins penser au Bon Dieu et en conclut qu’il était meilleur de souffrir. Surtout, elle éprouvait une immense pitié pour les malades qui ne savent pas pourquoi ils souffrent et n’offrent pas leurs peines.

Chaque jour, la petite buvait de l’eau de Lourdes : « Maintenant, j’aime encore bien plus notre Mère du Ciel ! » disait-elle ensuite.

Elle entra dans la Congrégation des Enfants de Marie. Lors de la cérémonie, on chanta le cantique Aimer Marie, que la petite affectionnait particulièrement, en raison des paroles : “ Vous êtes bien notre Mère, je veux être votre enfant. ” Elle s’écria alors : « Voilà que le démon est furieux ! »

Le 16 octobre 1890, après avoir reçu Jésus-Hostie en viatique, elle s’exclama : « Voici qu’Il vient ! » Et elle mourut dans un bienheureux sourire.

Sœur Muriel du Divin Cœur, Le secret de la Bse Marie du Divin Cœur

Dimanche 12 octobre

Saint Wilfrid, Bx Louis Brisson

Pèlerinage de Guillaume Von Galen, cousin de mère Marie du Divin Cœur, au mois de septembre 1896 :

Au cours d’une visite au Bon-Pasteur de Porto, Guillaume de Galen ouvrit son âme à mère Marie, sa cousine : le comte de Galen, son père, voulait le voir devenir prêtre. Or, il n’y était pas disposé. Mère Marie promit d’intervenir auprès de son oncle à ce sujet. Rentrant en Allemagne, Guillaume passa par Lourdes : « Dans mon enthousiasme, j’offris à Notre-Dame un cierge de huit livres pour ma future épouse ! »

Peu après, la comtesse Droste organisa une rencontre entre son neveu et une excellente jeune fille. Le jeune homme commença alors à éprouver un grand dégoût pour la vie du monde. Il se réfugiait souvent à la chapelle où il soutenait de violentes luttes intérieures. Les exhortations de sa cousine l’encouragèrent : « Que notre Divine Mère, qui t’a accordé tant de grâces à Lourdes, continue à rester fidèlement à tes côtés ; prends donc sa main, Elle te conduira sûrement. »

L’Immaculée inclina son enfant vers l’amour des vrais biens. Un soir, poussé dans ses derniers retranchements, il s’exclama : « Mon Dieu, si vraiment vous le voulez, alors moi aussi je le veux. »

Il entra chez les bénédictins le 15 décembre 1897, et la jeune fille embrassa la vie religieuse !

Sœur Muriel du Divin Cœur, Le secret de la Bse Marie du Divin Cœur

Lundi 13 octobre

6e Apparition de Notre-Dame de Fatima, St Édouard, roi d’Angleterre

Grâce reçue par saint Maximilien-Marie Kolbe en 1914 :

Pendant son séjour au Collège international, à Rome, pour ses études, saint Maximilien-Marie Kolbe, est toujours aussi maladif. De fortes migraines l’accompagnent durant les longues années d’études philosophiques et théologiques, qui sont cependant couronnées de succès. En 1914, peut-être en raison de sa constitution anémique et lymphatique, il tombe si gravement malade à la suite d’une gangrène à l’index de la main droite que le médecin qui le soignait décide de recourir à l’amputation. Un tel défaut physique l’aurait exclu du sacerdoce, à moins d’une dispense apostolique. Il guérit, au contraire, sans opération, presque instantanément, en une seule nuit, après avoir versé sur la plaie quelques gouttes d’eau de Lourdes que le Recteur lui avait donnée à cet effet.

Saint Maximilien Kolbe, prêtre et martyr, A Ricciardi

Mardi 14 octobre

Saint Callixte Ier

Pèlerinage de saint Maximilien-Marie Kolbe en janvier 1930 :

Avant la fondation d’une nouvelle cité de l’Immaculée, saint Maximilien-Marie fit un pèlerinage à Lourdes où Notre-Dame voulut éprouver sa fidélité et son ardeur à la veille du départ pour les missions : « Messe à un autel latéral de la crypte. Signé le registre et puis à la Grotte où une petite pluie tombe doucement et continuellement... des béquilles témoignent des grâces reçues, les cierges symbolisent les prières... une partie du Rosaire. Après, tristesse, comme souvent. De nouveau sous la pluie. Nulle part où se reposer un moment, je vais au bureau où au lieu des médecins je trouve un guichet pour les offrandes de messe (...). Encore à jeun sous la pluie (...). Je retourne saluer ma Petite Mère. Même dans les missions, beaucoup de nostalgie. Mais cela aussi est nécessaire. Pourquoi chercher des joies ? Le Père Jérôme Biasi aussi est parti de Lourdes très triste. Le retour au contraire a été consolant : j’ai bu de l’eau miraculeuse, j’ai plongé mon doigt dans l’eau, j’ai salué ma Petite Mère... Je lui ai rappelé tout, et tout le monde... J’ai embrassé le rocher. Adieu, Petite Mère ! » (à suivre)

Mercredi 15 octobre

Sainte Thérèse d’Avila

Quelques cartes postales, puis tram jusqu’à la gare où je réussis à changer l’argent et à manger quelque chose au restaurant pour 4, 50 F puis dans le train. Dès que le train part, je commence à écrire, tandis que le train me ramène à la Grotte, tout le long de la Grotte et de la Basilique, de l’autre côté du Gave. Je parle avec la Petite Mère, je lui dis que je suis entièrement à Elle, d’âme et de corps. Entre-temps, le Gave où s’écoulent les eaux de la source miraculeuse m’accompagne comme pour me dire adieu. Quelle gentille pensée de l’Immaculée ! Si je n’avais pas pris le train de Bordeaux, je n’aurais pas eu ces consolations ! Pendant que je me remets à écrire, les montagnes, qui gardent en leur sein ces lieux bénis, me saluent une dernière fois de leurs cimes blanches de neige. Le Gave court encore une fois le long de la voie ferrée puis se perd définitivement dans le lointain ; entre-temps un doux soleil s’est mis à briller. Gloire à l’Immaculée ! Je n’aurais pas cru à un adieu comme celui-là, quand mouillé et fatigué, je m’étais éloigné tristement de la Grotte. Mais c’est toujours ce que veut l’Immaculée qui est le meilleur.

Saint Maximilien Kolbe, prêtre et martyr, A Ricciardi

Jeudi 16 octobre

Sainte Marguerite-Marie, Sainte Edwige, Saint Gérard Majella, Apparition de saint Michel au Mont Tombe, Sainte Marguerite-Marie d’Youville

Pèlerinage d’Edouard Poppe :

Le 10 septembre 1913, départ pour Lourdes du bx Edouard Poppe, séminariste, en train ! Les intentions qu’il veut confier à Marie :

« Je demande à ma Mère :

- un sage directeur spirituel ;
- de la persévérance dans la recherche de la perfection ;
- une dévotion très solide à Marie, ma Mère ;
- amour et zèle dans la prière ;
- une chasteté totale ;
- une réelle obéissance envers tous mes supérieurs ;
- les vertus de ma Mère. »

La seule carte postale conservée de ce pèlerinage est celle qu’il envoya à sœur Marie-Désirée : « Salutations affectueuses de Notre-Dame de Lourdes ! Selon ma promesse, j’ai bien prié pour toi ; aujourd’hui c’est spécialement ta journée. Toi, appuie notre prière d’une confiance simple et ferme. Que notre Mère est puissante et généreuse à Lourdes ! Qu’elle est vénérée et aimée ici ! Les gens sont ici entre eux comme les membres d’une grande famille. Je t’enverrai un journal avec toutes les guérisons de notre pèlerinage. Il y a des milliers et des milliers de pèlerins, aussi bien d’Irlande que de France et de Belgique. Bientôt je te raconterai tout. »

Le 8 septembre, il lui avait écrit : « » À Lourdes, je penserai à toi et je dirai à notre Mère tous tes désirs les plus chers. Je déposerai également à ses pieds, un à un, tous tes soucis, toutes tes tristesses et tes croix (la croix est bienheureuse), afin qu’elle t’obtienne courage et consolation et que, pas un seul instant, le démon du découragement ne prenne le dessus. Tout découragement, tout abattement, toute angoisse viennent du démon ; toute joie, toute alacrité, toute tranquillité viennent de la confiance, la confiance filiale en Dieu, par sa bonne Mère. Je le dis pour moi et pour toi. Je le demanderai à Lourdes, pour moi et pour toi. J’en ai besoin, peut-être pas toi...

Édouard considéra la semaine passée en ce lieu saint comme une des plus belles de sa vie. Y avait-il meilleur endroit que la Grotte pour pratiquer la Vraie Dévotion et pour renouveler sa Consécration ?

Mère godelieve de l’Eucharistie, ouvrage en préparation

Vendredi 17 octobre

Saint Ignace d’Antioche, Sainte Marguerite-Marie

Pèlerinage de Lucie-Christine au mois de septembre 1884 :

Aujourd’hui, d’après le conseil intérieur de mon Dieu, je dois prier pour le recueillement du pèlerinage, pour qu’au moins la pensée religieuse en domine tous les instants.

Départ. Journées d’amour et d’oraison. Jésus tient mon âme unie à Lui, spécialement aux heures de mes oraisons régulières que j’ai pu remplir fidèlement malgré le voyage. J’ai tâché aussi de pratiquer les petites vertus dont l’exercice est amené par ces circonstances, et j’ai beaucoup prié pour le pèlerinage.

Nous arrivons à Lourdes... Que j’ai eu l’âme saisie en voyant cette grotte choisie par ma Mère Immaculée pour apparaître à notre terre de France ! Ce pays de Lourdes est comme à mi-chemin entre le Ciel et la terre. Huit mille pèlerins sont là, chantant les louanges de Marie. Quel acte de foi et d’amour ! Mon âme était transportée de voir ainsi louer et aimer Jésus et sa Mère ! (à suivre)

Journal spirituel de Lucie-Christine

Samedi 18 octobre

Saint Luc

Perdue au milieu de cette foule immense, je me sentis presque aussitôt attirée à l’union divine. Jésus me pénétrait de son regard et de son amour, par sa Mère Immaculée qui m’était présente en même temps que Lui, et comme un lien entre Lui et mon âme. On ne peut dire ce que c’est que d’être uni en même temps à Jésus et à Marie. Quelle douceur ! quelle suave société !

Ce fut là l’oraison de tout mon pèlerinage. Je retrouvais cette double union chaque fois et tout le temps que je pensais à Dieu : à l’église, à la grotte, aux piscines, dans les rues, au couvent. Partout cette union très simple et très puissante, et par moments, il est vrai, beaucoup plus intense. Ce fut une oraison de deux jours avec bien peu d’interruptions. Dans la sainte Communion même, mon âme toute perdue en Jésus sentait qu’elle était portée en Lui par Marie.

À Lourdes, je fus dans un sentiment profond et habituel d’actions de grâces. Jésus tenait mes puissances fixées en Lui, et je ne pouvais rien que de le contempler, Lui et sa Mère bénie. Dieu m’a fait connaître en diverses fois que cette manière d’oraison touche son Cœur et obtient beaucoup de Lui. (à suivre)

Dimanche 19 octobre

Saints Martyrs canadiens, Saint Paul de la Croix, Saint Pierre d’Alcantara, Bse Agnès de Langeac

Le soir, nous avons chanté, à dix ou douze mille pèlerins, le Credo et le Magnificat devant la statue couronnée de Marie Immaculée. Quel grandiose acte de foi public ! Jamais je ne l’oublierai. Gloire à mon Dieu ! !

Le dernier soir, comme nous approchions de la Grotte après avoir fait la prière en commun avec notre bon pasteur, je voulus continuer à dire des dizaines de chapelet avec la famille paroissiale, mais mon âme fut saisie d’un transport soudain et ineffable en voyant intérieurement la Vierge Immaculée de Lourdes. Je voyais intellectuellement cette Mère chérie : je vis et sentis sa céleste douceur, son incomparable pureté, qui imprégnaient mon âme. Je sentis aussi son amour pour nous, pauvres pécheurs... Elle me montra son vouloir miséricordieux de sauver la France... mais il faut que nous y correspondions par plus de foi et de prières, et que nous implorions sans relâche ce secours qui ne demande qu’à se donner (...). Lourdes m’a donné une force nouvelle pour souffrir.

Journal spirituel de Lucie-Christine

Lundi 20 octobre

Sainte Adeline, bx Martyrs d’Angers, St Jean de Kenty

Pèlerinage de Léon Bourjade en 1908, avant son entrée au noviciat de la congrégation du Sacré-Cœur d’Issoudun, exilée en Espagne.

Il arriva à Lourdes le soir tombant. Sans se préoccuper des questions terrestres de nourriture, il alla se jeter à genoux au pied du rocher de l’Apparition, illuminé du fourmillement des innombrables lumières priantes des cierges. Après une courte nuit, quelle belle journée de dévotion ! Il communia, servit plusieurs messes, suivit en chantant les processions des pèlerins, aida à transporter des malades, poussa les voitures où sont étalées tant de souffrances ! tard dans la nuit, la voix brisée à force de chanter, les pieds et les genoux meurtris, les derniers cierges éteints, il s’endormit pour un bref repos car il voulait, après cette journée d’intenses prières, partir à l’aube. Dans la joie de l’aurore, après une messe matinale, il roulait sur la route du retour, insouciant et léger, oublieux des saintes fatigues de la veille, certain de revenir chargé de protections et de bénédictions au seuil de son départ pour le noviciat. La tête pleine de musiques sacrées, il fredonnait en pédalant et saluait au passage les grosses bornes du chemin. Arrêté par un gendarme, il répondit à ses questions : « J’arrive de Lourdes, mon capitaine, où je suis allé en pèlerinage avant de quitter la France qui a chassé les congrégations et me refuse la liberté de suivre dans mon pays ma vocation religieuse et devenir missionnaire. Je voulais avant l’exil auquel je suis condamné, prier, pour que la Sainte Vierge me protège, ainsi que ma patrie. »

Vie de Léon Bourjade par Henriette Benoist de St Ange

Mardi 21 octobre

Bx Nicolas Barré, Saint Hilarion, Sainte Célinie

Pèlerinage d’Alessandra di Rudini au août 1910, elle se convertit et entra au carmel de Paray-Le-Monial en 1911.

Le film des quatre journées qu’elle vécut à Lourdes dit la puissance de la grâce qui fondit sur elle. Dès l’abord, elle se sent comme projetée dans une atmosphère surnaturelle dont elle n’a pas l’expérience, elle prie « dans un recueillement profond. » Elle participe aux grandes cérémonies du pèlerinage. La procession du Très Saint-Sacrement, avec l’atmosphère de charité qui entoure les malades « la touche aux larmes ». « Toute ma vie ils vivront dans mon âme ces cris de foi et d’espoir qui jaillissent de cette foule croyante, vers le Saint-Sacrement comme si le Christ Homme-Dieu était visiblement devant les multitudes, bénissant et guérissant ! » Le choc intérieur s’accroît à la vue de deux malades qui au cours de cette procession se lèvent subitement de leurs brancards. D’autres témoignages sollicitent son attention : le dévouement des brancardiers et infirmières bénévoles, la sérénité des malades dans leurs souffrances, l’espérance inébranlable de ceux qui se laissent plonger aux piscines et s’en retournent joyeux, même non guéris. (à suivre)

Alessandra di Rudini Carmélite, par une Moniale,
introduction du RP François de Sainte-Marie OCD DDB 1961

Mercredi 22 octobre

Bienheureuse Alix Le Clerc

4 août : journée décisive. Demeurée jusqu’ici spectatrice, Alessandra s’engage. Dans la soirée, elle demande à l’abbé Gorel de l’entendre en confession. Celui-ci put alors mesurer la profondeur du travail de la grâce : « toutes les hésitations, tous les atermoiements, toutes les résistances étaient vaincues, et cette fois pour toujours. »

« Dieu m’a fait maintenant la grande grâce de ne plus avoir cet éloignement que je ressentais autrefois pour les sacrements (confession et communion). Après la confession que je vous ai faite à Lourdes, ce sentiment a cessé. »

Dans le recueillement de la chapelle du carmel de Lourdes, Alessandra « rayonnante de paix et de joie surnaturelles » reçut son Dieu. Elle lui demanda « la grâce du dédain et de l’oubli du monde. Et certes, j’ai été exaucée, c’est-à-dire puissamment aidée en ce sens. » (à suivre)

Jeudi 23 octobre

Saint Jean de Capistran, Saint Romain, ND de la Sainte Espérance, Saint Antoine-Marie Claret

6 août : La seconde communion d’Alessandra eut lieu à la Grotte. À genoux par terre, la tête appuyée contre un arbre, les yeux clos « et comme extasiée dans l’action de grâces la plus fervente ». Le soir, elle assistait pour la dernière fois à la procession aux flambeaux, puis, comme si elle n’eût pu s’en détacher, elle retourna à la Grotte pour une « veillée de profond silence. À Lourdes où j’allai prier la Sainte Vierge, j’eus un très vif sentiment que ma prière était enfin exaucée et que Dieu me demandait l’accomplissement de ma promesse. Je répétai alors plusieurs fois la promesse... de donner ma vie à Notre-Seigneur dans la forme la plus parfaite et complète qu’il me serait possible de concevoir, s’il daignait me faire cette grâce du retour à la foi. Je dirai seulement que j’ai reçu là une impression de pardon et d’appel très vive (...). Cela est tellement vrai que la pensée que Dieu m’appelle à la vie religieuse ne m’a plus abandonnée, même pendant les pires aridités, et renaît plus vivement chaque fois que je reçois la sainte communion, ou que je prie Notre-Seigneur de me donner un peu de lumière sur ma vocation. »

Alessandra di Rudini Carmélite, par une Moniale,
introduction du RP François de Sainte-Marie OCD DDB 1961

Vendredi 24 octobre

Saint Antoine-Marie Claret, Saint Raphaël archange

Pèlerinage de sœur Winifred en 1926 :

En Angleterre, au monastère des Chanoinesses de Saint-Augustin, sœur Winifred était une remarquable enseignante, très aimée de ses élèves. Une paralysie quasi totale la cloua subitement au lit à vingt-huit ans. Elle qui désirait tant se dépenser au service de sa communauté pour l’œuvre de Dieu n’accepta pas cette croix. Elle demanda à se rendre à Lourdes afin d’obtenir sa guérison. Ses supérieurs le lui permirent.

Après un voyage très pénible, « les brancardiers vinrent nous chercher pour la Grotte. J’étais fatiguée et douloureuse, prier semblait impossible. Mais Notre-Dame le savait bien, cela n’avait pas d’importance... Je lui offrais mes souffrances ! Je croyais, ô notre Mère du Ciel, que vous alliez me prendre avec vous et je me sentais en paix. Notre-Dame était tout. »

Elle demanda au malade qui était à ses côtés, un jeune aveugle, de prier pour sa guérison ! Ce dernier lui répondit :

« Ma sœur, j’ai commencé à vivre le jour où j’ai commencé à souffrir... La vraie vie, c’est de souffrir. Je ne viens pas pour guérir. Je viens pour l’amour de Notre-Dame, tous les ans. Lourdes, ma sœur, c’est ravissant. »

La petite sœur changea en un instant : « Quelle leçon ! Il m’apprit à supporter les souffrances que Dieu m’avait envoyées. Je me répète très souvent ses paroles. » (à suivre)

Sœur Winifred (1895-1945), édité en 1951

Samedi 25 octobre

Notre-Dame de la Victoire, Saints Chrysanthe et Darie

Sœur Winifred revint de Lourdes transformée. Elle ne cessa plus d’étudier sainte Bernadette, d’imiter ses vertus simples, de partager son amour pour “ sa Dame ”.

« Ô Marie, je vous donne mon âme et mon pauvre corps, je m’abandonne à vous, donnez-moi à Jésus. Je n’ai pas une minute à perdre, tant j’ai d’âmes qui m’attendent. Celles des prêtres ont ma prédilection. Chaque fois que j’entends parler d’un prêtre à aider, je l’adopte. »

La malade conservait le mouvement de trois doigts à la main droite et deux à la main gauche. Elle offrait chaque jour mille Ave pour les pauvres pécheurs. Ne pouvant les dire les bras en croix, comme elle l’avait vu faire à Lourdes, elle les récitait les bras non appuyés à son lit, de façon à joindre la pénitence à la prière.

« Mes bras me font bien mal, alors j’ai l’espoir d’être exaucée... J’aime à penser que ma vie ressemble à celle de Notre-Seigneur au Tabernacle. Je suis prisonnière. Si je veux aller quelque part, je dois attendre qu’on vienne me prendre. Et si l’on m’oublie, j’attends. Je ne puis faire un mouvement. »

« Mon cher Seigneur, vous m’avez fait comprendre qu’il n’y a rien de triste dans la vraie souffrance, celle qui vient tout droit de votre sainte volonté, mais au contraire quelque chose de merveilleux... Que je la porte allègrement. Qu’il ne soit pas question d’une douloureuse résignation, mais d’une active acceptation. Puisse mon sourire être mon “ Merci, mon Jésus ! ” »

Sœur Winifred (1895-1945), édité en 1951

Dimanche 26 octobre

Saint Dimitri, Fête du Christ-Roi, Saint Évariste

Pèlerinage du Père Miguel Pro en juin 1926, avant son retour au Mexique où il mourra martyr le 23 novembre 1927 :

Le Père Pro prend le train de Lourdes, dans la soirée du 16 juin. Le matin, il est à genoux devant la Vierge des miracles : « ce que l’on ressent ici ne peut s’exprimer. Ce fut l’un des jours les plus heureux de ma vie. À 9 heures, j’ai dit la messe. J’ai passé une heure à la Grotte. J’ai pleuré comme un enfant. J’ai récité le Rosaire (...). Je touche immédiatement du doigt l’assistance maternelle de notre Mère : la Grotte ! un petit morceau de Ciel où j’ai vu une Vierge qui a inondé mon âme d’un bonheur immense, d’une consolation intense, d’une joie divine (...). Une fois, en levant les yeux pour contempler ma bonne Mère, j’ai vu aux pieds de la Vierge une malade couchée dans sa voiture ; elle récitait le chapelet les bras en croix. Ce spectacle m’acheva ; quelle foi et quelle confiance ! Mon cœur devint tout embrasé et je me mis à parler intimement avec notre très sainte Mère, qui suscita dans mon âme des transports jusque-là inconnus de moi. » (à suivre).

Lundi 27 octobre

« Comment ai-je pu demeurer agenouiller si longtemps, moi qui d’ordinaire n’en peux plus, après cinq minutes passées à genoux ? Je ne sais. Ne me demandez pas ce que j’ai fait ou ce que j’ai dit. Je n’en sais rien ; je n’étais pas hier le misérable de toujours ! un abbé s’approcha de moi et me dit : si vous persistez à demeurer ici, vous tomberez de faiblesse. Je vous conseillerais de vous rendre aux piscines où il y a de l’ombre. Pourquoi m’a-t-il dit cela ? quelle figure et quel maintien avais-je ? encore une chose que j’ignore. Je sais seulement que j’étais aux pieds de ma Mère et que je sentais très profondément en moi sa présence bénie et son action. Aux piscines, j’ai vu des centaines de pauvres malades qui venaient chercher la santé. Un père capucin prêchait après chaque dizaine du rosaire. J’ai fait comme les autres ; j’ai chanté, prié, baisé la terre. Les bras en croix j’invoquai la Sainte Vierge... J’ai donc été à Lourdes (...). Pour moi, aller à Lourdes, c’était rencontrer ma Mère du Ciel, c’était lui parler, la prier. Et je l’ai rencontrée, je lui ai parlé, je l’ai priée. La Vierge de Lourdes m’a donné du courage ! »

Vie intime du Père Pro, Antonio Dragon

Mardi 28 octobre

Saints Simon et Jude

Dévotion des portugais à Notre-Dame de Lourdes :

La grande famille aristocratique des Cezimbra, au Portugal, manifestait une vive dévotion pour la Vierge de Lourdes. Son image se trouvait sur toutes les tables de chevet de la maison.

Quand un de ses enfants était malade, la marquise lui donnait à boire de l’eau de la source miraculeuse. Si la maladie était grave, elle promettait de l’habiller pendant un an avec des vêtements blancs et bleus, comme ceux de l’Apparition. L’une de ses filles s’appelait Marie de Lourdes. Au Portugal, ce prénom était communément donné à cette époque.

L’aînée, dona Eugénia, entra dans la congrégation des dorothées. Devenue en 1907 supérieure du collège de Quelhas, elle obtenait des grâces spéciales pour ses élèves par ses neuvaines continuelles à Notre-Dame de Lourdes. Elle y associait une ou plusieurs dorothées, leur demandant de prier avec elle à la petite grotte, au fond du parc.

Un jour d’été, comme la chaleur était accablante, une sœur suggéra d’aller plutôt prier dans la chapelle puisque l’Immaculée y était aussi honorée par une belle statue.

« Eh bien ! lui répondit mère Monfalim, c’est parce que c’est une petite pénitence de marcher par cette chaleur que j’aime sortir à cette heure-là. Toute prière accompagnée de sacrifice, même s’il est petit comme celui-là, incite davantage le Cœur de Notre-Dame à prendre soin de nous. » (à suivre)

Mercredi 29 octobre

La reine Amélie, bienfaitrice des dorothées, partageait la dévotion de mère Monfalim. En février 1910, deux ans après l’assassinat de son époux Carlos Ier, elle se rendit à Lourdes « prier de toute mon âme la Sainte Vierge ». Elle lui confia son fils, le roi Manuel II, de plus en plus menacé par le complot républicain.

Sept ans après, l’Immaculée se faisait voir et entendre à Fatima. Près du chêne-vert, les pèlerins chantaient l’Ave Maria... de Lourdes !

En 1921, le Portugal tomba dans une anarchie effroyable. C’est la Vierge de Lourdes que le futur président Salazar, le député Dr. Dinis da Fonseca, le “ saint ” Père Cruz, le Dr. Tomao de Gamboa et le professeur Gonçalves Cerejeira (qui deviendra cardinal de Lisbonne) supplièrent une nuit entière, à genoux dans la Grotte, pour leur patrie.

« On aurait dit qu’ils pleuraient plus qu’ils ne priaient », raconta un témoin.

La Mère de Dieu les exauça : la paix et le redressement politique sauva le Portugal.

Jeudi 30 octobre

Pèlerinage du Maréchal Pétain à Lourdes, le 21 avril 1941 :

La Grotte de Massabielle était redevenue « domaine de l’Église », par décision du chef de l’État français (décret du 10 février 1941), mettant fin à trente-cinq ans de spoliation par la République. Pour avoir été moins solennel et plus rapide que son pèlerinage au Puy, son pèlerinage à Lourdes n’en a pas été moins touchant. C’est lui qui a voulu faire ce pèlerinage à la Grotte, où Mgr Choquet l’a magnifiquement reçu. Entre le Puy et Lourdes, il y a toujours eu des liens mystérieux. Toujours “ la Dentellière ” qui croise ses fils dans l’ombre avec soin ! Depuis le temps lointain où le comté de Bigorre payait tribut à Notre-Dame du Puy qu’il reconnaissait comme suzeraine, Notre-Dame qui voit loin ayant voulu s’associer longtemps à l’avance le haut domaine du coin de France où Elle se réservait d’apparaître un jour...

À Lourdes, le Maréchal a dit “ qu’on demande à la Vierge qu’Elle lui fasse la faveur de l’aider dans la tâche entreprise qui est rude et difficile ”. Le 15 août, dans son Message à la Jeunesse du Puy, après avoir évoqué les pèlerinages des rois, il a parlé de “ prière fervente ” et de “ protection de la Vierge ”.

Frère Thomas de Notre-Dame du perpétuel secours et du divin Cœur,
IER n° 267, juin 2025

Vendredi 31 octobre

Dévotion du cardinal Albino Luciani :

Le grand chagrin de notre Mère du Ciel bouleversait le cardinal Albino Luciani, patriarche de Venise : « La Madone est, depuis toujours, vierge et toute pure. À la vue de notre société, appelée permissive parce qu’elle permet tout et excuse tout en matière d’immoralité, la Vierge Marie devient une “ Madone aux larmes ”. Elle pleure à cause du mal que nous commettons et tolérons, et à cause des châtiments vers lesquels nous nous acheminons. »

Le futur pape Jean-Paul Ier faisait grand cas des interventions extraordinaires et des aides du Ciel : « À Lourdes, à Fatima, à La Salette et ailleurs, la Madone nous guide et nous aide en ne disant presque qu’une seule chose : Prière et Pénitence. Elle fait écho à l’admonestation de Jésus : “ Si vous ne faites pénitence, vous périrez tous... Il faut prier sans cesse. ” »

Lorette, Santa Maria do Sul, Lourdes où il se rendit en 1971, furent pour lui comme autant de stations préparatoires à son pèlerinage à Fatima et à sa rencontre avec sœur Lucie, la messagère de Notre-Dame.