Il est ressuscité !
N° 248 – Octobre 2023
Rédaction : Frère Bruno Bonnet-Eymard
Illuminisme synodal !
«RAREMENT l’Église catholique ne s’est remise en cause à ce point », s’est exclamé Jean-Marie Guénois dans Le Figaro à propos de L’instrumentum laboris publié le 20 juin 2023 en prévision de la session qui se tient actuellement à Rome depuis le 4 octobre dans le cadre du synode « pour une Église synodale : communion – participation – mission ». Ce document a été rédigé à mi-parcours de ce “ fantastique ” processus de consultation universelle du “ Peuple de Dieu ” lancé sur trois années par le pape François, après une première étape au niveau des conférences épiscopales du monde entier et une deuxième marquée par des débats au sein des sept assemblées ecclésiales continentales dont la synthèse des sept rapports produits et envoyés à Rome constitue le texte de cet instrumentum laboris.
Ce document est censé ne pas préjuger des décisions finales qui seront adoptées par le pape François à l’issue de ce processus synodal sans précédent depuis Vatican II. Mais il est bien destiné à encadrer, orienter les discussions des deux prochaines sessions romaines et il est très remarquable de retrouver sous la plume de ses auteurs – anonymes – les grands thèmes abordés d’une manière constante par le pape François au cours de ses homélies, discours et textes. « Les requêtes de fond ne sont pas une surprise », fait remarquer de son côté Jean-Marie Guénois. « Elles recoupent tous les accents du pontificat du pape François. » C’est dire que la pratique pastorale du Saint-Père, soutenue avec une incroyable énergie depuis ces dix dernières années, c’est-à-dire dès son accession au trône de Saint Pierre, a déjà profondément marqué les esprits au point d’en être devenue, au fil des ans, une doctrine bien arrêtée, parfaitement cohérente dans ses différentes composantes et qui conduira immanquablement l’Église vers l’achèvement de sa ruine, si du moins elle n’avait pas les promesses de Notre-Seigneur selon lesquelles les portes de l’enfer ne pourront prévaloir sur Elle.
UNE MUTATION PROGRESSISTE DE L’ÉGLISE.
Dans son Livre d’accusation contre le prétendu Catéchisme de l’Église catholique, publié en 1993 sous l’autorité du pape Jean-Paul II par le cardinal Joseph Ratzinger alors préfet de la Congrégation pour la doctrine de la foi, l’abbé de Nantes, notre Père, rappelait les très exactes définitions de l’Église qui constituaient à elles seules, à la condition évidemment de les conserver, un rempart à la fois canonique et dogmatique contre toute forme d’hérésie et de schisme.
L’Église de la Contre-Réforme, donc au sortir du concile de Trente, pour faire pièce à l’hérésie luthéro-calviniste, se définissait « comme la société parfaite, visible et hiérarchique, fondée par Jésus-Christ, dont les membres adhèrent à la même doctrine dans la soumission à la même autorité romaine, en vue d’obtenir par la grâce des sacrements la vie éternelle. Le pape Pie XII compléta cette définition canonique par cette autre, profondément dogmatique, allégorique et spirituelle de “ corps mystique du Christ ” ; c’était le 29 juin 1943, aux applaudissements de l’univers. La balance était faite des deux parties substantielles de ce mystère, par la considération du Saint-Esprit comme “ l’Âme incréée ” de ce Corps social, et celle de sa hiérarchie comme son “ âme créée ” toute dépendante du Christ, son Fondateur et Chef souverain » de qui elle a reçu cet ordre : « Allez dans le monde entier, proclamez l’Évangile à toute la création. Celui qui croira et sera baptisé sera sauvé, celui qui ne croira pas sera condamné. » (Mc 16, 15-16)
Après l’Ascension, les pauvres Galiléens que Jésus s’était choisis comme Apôtres demeurèrent écrasés par cet ordre, paralysés qu’ils étaient par la crainte des représailles de la part des juifs. « Mais dix jours après, alors qu’ils se trouvent enfermés dans le Cénacle, le Saint-Esprit descend sur eux, comme Notre-Seigneur l’avait prédit », explique notre Père. « C’est arrivé au moment et comme il l’avait prédit et les Apôtres en ont été transformés par une force intime. Le Saint-Esprit les a pénétrés, les a retournés, les a embrasés d’amour. La preuve : ils ont ouvert les portes et sont sortis, ils ont commencé à prêcher et cela ne s’est plus arrêté jusqu’à aujourd’hui. C’est une étape absolument décisive [...]. Saint Pierre, qui ne valait pas Jésus, devait prendre la suite et il l’a prise. » (sermon des vêpres du 15 août 1993) C’est de cette manière que l’Église de Notre-Seigneur Jésus-Christ, de siècle en siècle, s’est étendue sous la motion du Saint-Esprit distribuant ses dons de deux sortes.
D’abord l’Esprit-Saint distribue ses dons de pouvoir au Pape, aux évêques et même aux prêtres pour qu’ils aient la force d’exercer leurs fonctions hiérarchiques. « Ils sont faits pour nous commander, ils sont faits pour nous prêcher, nous instruire, nous nourrir (...). Ils ont une force de l’Esprit-Saint, une assistance de l’Esprit-Saint qui ne viendra jamais à leur manquer, fussent-ils pécheurs, fussent-ils indignes. » (sermon de notre Père du 24 août 1980) Mais le même Esprit-Saint distribue surtout et à tous ses dons de charité. Pour qu’il y ait de la sainteté, pour que l’amour brûle dans toute l’Église, le Saint-Esprit distribue à tous ses dons et non pas selon une hiérarchie. « La charité est beaucoup plus importante que tout le reste. » (ibid.)
Mais au milieu des Apôtres, comme nous l’indiquent les Actes des Apôtres avec autant de discrétion que de précision (cf. Ac 1, 14), se tenait la Sainte Vierge, Mère de Notre-Seigneur, pour être une médiatrice puissante, un modèle de foi, une source d’énergie constante, non pas pour commander, mais pour encourager les Apôtres, d’abord dans l’attente de la Pentecôte. « C’est une femme forte, une femme sage ; elle a la sagesse parce qu’elle est accompagnée, elle a quelqu’un, son avocat, comme dit Jésus, son Paraclet, son assistant perpétuel, son ami intime, son conseiller, source de sa force intime et c’est l’Esprit-Saint, la troisième Personne de la Sainte Trinité. » (oraison de notre Père du 19 mai 1991) « Le Saint-Esprit, venu sur la Vierge Marie le jour de l’Annonciation pour la couvrir de son ombre et la prendre sous la puissance de ses ailes protectrices (Lc 1, 35), avait pris figure de colombe le jour du baptême de Jésus (Lc 3, 22). Mais le jour de la Pentecôte, point de “ forme ” de colombe, puisque Marie est là, en personne, communiquant aux Apôtres l’Amour, la Lumière et la Pureté irradiés de son Cœur Immaculé en la forme de “ langues qu’on eût dites de feu ” (Ac 2, 3), et leur donnant pleine assurance. » (La Contre-Réforme catholique n° 352, janvier 1999)
Voilà le grand mystère de l’Église. La Sainte Vierge est le Temple du Saint-Esprit, c’est dans son Cœur Immaculé que le Paraclet, annoncé par Jésus, manifeste sa toute-puissance. C’est pour cette raison que l’on dit de la Sainte Vierge qu’Elle est la personnification de l’Église qui, réciproquement, en est venue à exalter, la sainteté et donc la beauté de la divine Marie.
« Du dogme de la Maternité divine proclamé par le concile d’Éphèse en 431, à celui de l’Immaculée Conception, défini par le bienheureux Pie IX en 1854, confirmé à Lourdes le 25 mars 1858 par l’Immaculée Conception en Personne, quatorze siècles se sont écoulés, au cours desquels Pères de l’Église, théologiens et poètes ont salué à l’envi en Marie l’idéal parfait, mais vrai, réel, substantiel, d’une Sagesse créée, vierge, épouse et mère, bénie entre toutes les femmes, prédestinée par la seule volonté amoureuse de Dieu, volonté créante, épousante et fécondante. Dieu l’a établie gardienne, ou mieux, sauvegarde de l’Église et des chrétiens. C’est la très Sainte Vierge Marie qui nous sauve des mirages de l’Antichrist en lui écrasant la tête. C’est pourquoi il est dit : “ Elle seule vaincra les hérésies dans le monde entier. ” » (Point 16)
C’est en 1917 que, dans le conseil de sa Sainte Trinité, Dieu notre Père décide d’envoyer sa Très Sainte Mère dans le ciel de Fatima se porter au secours de l’Église, et pour préparer le retour de son Fils, Notre-Seigneur Jésus-Christ. Fatima n’est pas simplement un Message. C’est une Apocalypse – c’est-à-dire une Révélation – un Évangile même : une Bonne Nouvelle. Jésus veut que sa Très Sainte Mère passe “ première ”. Il veut tout lui donner, conduire tout à Elle, à son Cœur Immaculé, pour tout recevoir d’Elle, pour tout lui donner, afin qu’Elle distribue Elle-même ses bienfaits, toutes ses grâces à tous. De Fatima, au Portugal, la Sainte Vierge exerce une véritable régence, une médiation pour assurer le salut des âmes, celui des nations et, en définitive et surtout, celui de l’Église... qui n’en veut pas, prise par la tentation de se rallier à l’esprit du monde.
Convoqués en concile entre 1962 et 1965, les évêques du monde entier, conduits sous la férule de fer de Jean XXIII puis de Paul VI, connurent une première et prodigieuse expérience “ d’Église synodale ”. À l’issue de tumultueux débats au cours desquels furent librement écoutées, discutées sans la moindre censure, toutes les opinions y compris celles les plus clairement hérétiques, les Pères, lassés de combattre pour préserver les âmes de l’enfer et les gagner au Ciel, votèrent à des majorités écrasantes, au nom d’un Esprit, mais sans la moindre autorité d’infaillibilité, une paix unilatérale avec le Monde pourtant sous l’emprise de Satan et qu’ils s’engageaient désormais à servir. Pire, ils reconnaissaient à chacun la liberté sociale en matière de religion, acte pratique d’apostasie que confirma en personne Paul VI par la proclamation insensée du “ culte de l’homme ”. Le cœur de cette révolution fut une mutation de l’Église édictée principalement par la constitution dogmatique Lumen gentium et reléguant la Sainte Vierge à un simple rôle “ subordonné ”.
Par l’expression “ lumen gentium ”, l’Église de Vatican II souligne le service qu’elle entend rendre au Monde dans son progrès profane. Non plus seulement préoccupée du salut des âmes – et en vérité elle ne l’est aujourd’hui plus du tout – elle veut diffuser « une force de générosité, de liberté, de fraternité qui aidera les hommes à la transformation du monde ». Elle se présente par ailleurs comme “ Peuple de Dieu ”, présentation démocratique d’un Peuple « donné tout vivant, tout illuminé, sanctifié, rassemblé avant qu’intervienne le moins du monde la hiérarchie par l’action directe, invisible, gratuite, inattendue, illuminée de... l’Esprit-Saint ! », présentation permettant à son tour le renversement de ladite Hiérarchie, en particulier par l’introduction de la “ collégialité ”, principe subversif de dilution de toute forme d’autorité.
Pour les tenants de la Collégialité, il s’agissait de « dépersonnaliser l’autorité dans un sens collectiviste et parlementaire, écrivait notre Père. Auparavant, le Pape était le Chef suprême et immédiat de tous, évêques et fidèles. Chaque évêque, soumis au Pape, était Pasteur d’un territoire et du peuple qui y vivait (La Contre-Réforme catholique n° 52, janvier 1972). La constitution Lumen gentium devait faire du Collège épiscopal le fait premier, les novateurs voulant que le pouvoir de l’évêque ait pour domaine l’Église universelle, et non plus seulement son diocèse particulier et le troupeau qui lui est attaché, ce pouvoir devant par ailleurs s’exercer selon un mode “ collégial ”. Ce contre quoi s’est élevé notre Père : « Aucun pouvoir ecclésiastique dans l’Église n’est proprement collégial. Il n’y a, en effet, dans l’Église que des pouvoirs personnels exercés par chacun, Pape ou évêque, de manière libre et responsable. » (ibid.)
Et de cette collégialité devait résulter un délitement du pouvoir de chaque évêque noyé à dessein au sein du Synode et surtout des conférences épiscopales, échelon hiérarchique créé de toute pièce sans le moindre fondement traditionnel et qui devait rapidement prendre le pas sur leur autorité personnelle et responsable. Tandis que les laïcs, constitués « peuple de dieux », devaient connaître une irrésistible “ promotion ”. Considérés d’emblée par le Concile, du fait de leur baptême comme “ prophètes, prêtres et rois ”, ils se voyaient ainsi conférer une dignité outrée qui les égalait en autorité et en pouvoir à celle des prêtres pourtant revêtus du sacrement de l’Ordre ! Et, de droit, cette dignité leur confèrerait une mission tout à fait spécifique et immense. « Non seulement ils doivent remplir dans l’Église des ministères propres, où soit mise à profit leur “ sécularité ”, mais encore ils doivent, dans le monde, “ bien construire l’ordre temporel et l’orienter vers Dieu par le Christ ”. Construire le monde et bénir la tour de Babel ! » Inutile d’insister sur les conséquences dramatiques d’une telle promotion : l’orgueil insensé des laïcs prenant toute la place dans les paroisses, les prêtres priés de s’effacer, d’obéir et en définitive mal défendus par leurs propres évêques à la première dénonciation vindicative de leurs ouailles.
Alors qu’il « y aura toujours une distinction d’être entre le sacerdoce hiérarchique qui a reçu du sacrement de l’ordre le pouvoir d’enseigner, de consacrer et sanctifier, de gouverner en lieu et place du Seigneur, et le peuple fidèle qui ne peut être premièrement que bénéficiaire d’un tel ministère, explique notre Père. Il n’y a donc aucunement “ sacerdoce ” des laïcs, pris en corps ni individuellement. Point de sacerdoce au rabais, ni a fortiori de sacerdoce distinct, égal ou supérieur à celui des prêtres. Cela s’aperçoit au fait que le caractère propre du ministre sacerdotal est d’être efficace “ ex opere operato ”, en vertu du pouvoir ontologique et quelle que soit la valeur de l’homme qui l’exerce. Tandis que le culte des fidèles n’a de valeur que dans les conditions de grâce sanctifiante et dans la mesure des vertus morales qui les tiennent unis au Christ. » (La Contre-réforme catholique n° 55, avril 1972)
Mais rien n’y fait, les partisans de la prétendue nécessaire réforme de l’Église entendent se prévaloir des innombrables désordres contre la Loi, pourtant libératrice, de la chasteté de la part de certains clercs et qui leur fournirait aujourd’hui le prétexte “ providentiel ” pour poursuivre le “ grand bond en avant ” de la “ révolution cultuelle ” initiée par le concile Vatican II.
FRANÇOIS, SUCCESSEUR DE QUI ?
Paul VI, Jean-Paul II et Benoît XVI furent tous des papes “ doctrinaires ”, intellectuels, c’est-à-dire préoccupés de développer et d’imposer à toute l’Église en guise d’enseignement, leurs doctrines à eux. Paul VI recherchait cette gloire illusoire de présider ce mouvement d’animation spirituelle de la démocratie universelle (MASDU) et d’y entraîner derrière lui toute l’Église par la transposition de sa prédication religieuse chrétienne en termes d’humanisme profane. Jean-Paul II avait la prétention intellectuelle de réaliser « la synthèse de la Religion ancienne et de l’Athéisme contemporain », c’est-à-dire « leur accomplissement final en l’Homme vivant, riche en avoir et en être, parachevé dans le sentiment sacré de son existence et dans la gloire de sa liberté ». Et avec ce Pape, c’était, comme disait notre Père, la “ surchauffe ” surtout avec les jeunes, mais sans lendemain. La grande ambition de Benoît XVI, quant à lui, fut d’imposer sa dialectique, une dialectique allemande, moderniste, pour rationaliser les mystères de la foi catholique dont les représentations anciennes n’auraient prétendument aucun sens pour l’homme moderne.
Avec le pape François, il en est différemment... apparemment.
Dès son élection au souverain pontificat, le 13 mars 2013, il s’est d’emblée présenté avec aisance et autorité comme un pape ayant gardé le cœur d’un vrai pasteur, celui qui connaît ses brebis, qui les aime et sait leur parler. Pour s’en convaincre, il suffit de relire l’une de ses toutes premières allocutions, très spontanée, absolument charmante, apparemment digne d’un Jean-Paul Ier, prononcée place Saint-Pierre à l’occasion de l’Angélus du 17 mars 2013 : « C’est beau, la miséricorde ! Je me souviens, à peine devenu évêque, en l’année 1992, est arrivée à Buenos Aires la Vierge de Fatima et l’on a fait une grande messe pour les malades. Je suis allé confesser, lors de cette messe. Et presque à la fin de la messe, je me suis levé, je devais administrer une confirmation. Est venue à moi une femme âgée, humble, très humble, elle avait plus de quatre-vingts ans. Je l’ai regardée et je lui ai dit : “ Grand-mère (...) vous voulez vous confesser ? ”. “ Oui ! ”, m’a-t-elle dit. “ Mais si vous n’avez pas péché... ” Et elle m’a dit : “ Nous avons tous péché... ! ” “ Mais peut-être le Seigneur ne les pardonne pas... ” “ Le Seigneur pardonne tout ! ”, m’a-t-elle dit : sûre d’elle. “ Mais comment le savez-vous, vous, Madame ? ” “ Si le Seigneur ne pardonnait pas tout, le monde n’existerait pas. ” Il m’est venu l’envie de lui demander : “ Dites-moi, Madame, vous avez étudié à la Grégorienne ? ” parce que cela est la sagesse que donne l’Esprit-Saint ; la sagesse intérieure vers la miséricorde de Dieu. N’oublions pas cette parole : Dieu ne se fatigue jamais de nous pardonner, jamais ! “ Eh, mon père, quel est le problème ? ” Eh, le problème est que nous, nous nous fatiguons ! Nous ne voulons pas ! Nous nous fatiguons de demander pardon ! Lui ne se fatigue pas de pardonner, mais nous, parfois, nous nous fatiguons de demander pardon. Ne nous fatiguons jamais, ne nous fatiguons jamais ! Lui est le Père plein d’amour qui toujours pardonne, qui a ce cœur de miséricorde pour nous tous. Et nous aussi apprenons à être miséricordieux avec tous. Invoquons l’intercession de la Vierge qui a eu entre ses bras la Miséricorde de Dieu fait homme. »
Allocution charmante... mais c’est tout de même curieux qu’une simple fidèle se voie dans la nécessité de rappeler à son évêque les effets du péché originel qui obligent les âmes, à tous les âges de la vie, à s’approcher du tribunal de la confession pour faire l’aveu de leurs péchés qui font tant de peine au Bon Dieu, pour en exprimer une sincère contrition et recevoir, par le pouvoir du prêtre concédé par Notre-Seigneur et transmis de génération en génération par la succession apostolique, le pardon de l’Église. Et si cette fidèle a demandé à se confesser, c’est sans doute attirée, poussée, inspirée par la Sainte Vierge, par Notre-Dame de Fatima en visite dans la capitale argentine. Le Pape la mentionne au passage, mais sans lui témoigner de grands égards alors qu’elle est la protagoniste de cette scène...
Et lors de son homélie prononcée le 23 mai 2013 à l’occasion de la profession de foi des évêques de la Conférence épiscopale italienne, François a su alors leur dire des mots à la fois paternels et fraternels, chaleureux, réconfortants et conformes à la dignité de leur ministère sacerdotal... bref dans un esprit tout aussi pastoral : « Oui, être pasteurs signifie croire chaque jour dans la grâce et dans la force qui nous vient du Seigneur, malgré notre faiblesse, et assumer jusqu’au bout la responsabilité de marcher devant le troupeau, libérés des poids qui entravent le saint zèle apostolique, et sans hésitations en le guidant, pour rendre notre voix reconnaissable, aussi bien par ceux qui ont embrassé la foi, que par ceux qui “ ne sont pas [encore] de cet enclos ” (Jn 10, 16) : nous sommes appelés à faire nôtre le rêve de Dieu, dont la maison n’exclut aucune personne ni aucun peuple, comme l’annonçait prophétiquement Isaïe dans la première lecture (cf. Is 2, 2-5).
« C’est pour cela qu’être pasteurs signifie également se disposer à marcher au milieu et derrière le troupeau : capables d’écouter le récit silencieux de celui qui souffre et de soutenir le pas de celui qui craint de ne pas y arriver ; attentifs à relever, à rassurer et à donner de l’espérance. Notre foi sort toujours renforcée du partage avec les humbles : mettons donc de côté toute forme d’arrogance, pour nous pencher sur ceux que le Seigneur a confiés à notre sollicitude. Parmi eux, nous devons réserver une place particulière, bien particulière, à nos prêtres : que pour eux en particulier, notre cœur, notre main et notre porte restent ouverts en toutes circonstances. Ce sont les premiers fidèles que nous avons, nous les évêques : nos prêtres. Aimons-les ! Aimons-les de tout cœur ! Ce sont nos enfants et nos frères ! »
Là encore, sermon paternel et charmant plein de sollicitude pour les évêques, leurs prêtres et les fidèles, en particulier pour ceux qui peinent à suivre... mais ce « rêve de Dieu dont la maison n’exclut personne »... de quoi s’agit-il ?
LE RÊVE DU PAPE FRANÇOIS.
C’est en fait le rêve du pape François dont le cœur s’est petit à petit révélé comme celui d’un mauvais pasteur animé par un amour infini, déréglé, désordonné, anarchique même en faveur du troupeau commis à sa charge – particulièrement en faveur des mauvaises brebis bien contentes de recevoir caresses et encouragements en lieu et place de bonnes et salutaires admonestations – lui assurant d’avance, mais sans jamais en indiquer les conditions, une miséricorde du Bon Dieu qu’il finira par étendre au nom de sa bonté à lui, mais sans la moindre autorité, en faveur de tous les pécheurs, les hérétiques et schismatiques de toutes confessions chrétiennes dissidentes, et finalement au monde entier. Cela le conduira, lui le Vicaire du Christ, à signer d’égal à égal avec le Grand Imam d’Al-Azhar, Ahmad Al-Tayyeb, le document sur la fraternité humaine pour la paix et la coexistence commune le 4 octobre 2019 à Abou Dhabi. Cela le conduira le 3 octobre 2020 à produire une encyclique, un “ monument ” sans précédent « parce qu’il ne se veut pas catholique. Les deux premiers mots sont repris de saint François d’Assise : “ Fratelli tutti ”, « mais sans faire appel à l’amour du Cœur de Jésus-Marie qui est la source de cette fraternité universelle chez saint François », a écrit notre frère Bruno (Il est ressuscité n° 215, novembre 2020).
Et pourtant, au cœur de cette encyclique, l’amour, voire même une écologie – faut-il le souligner – très relationnelle. « Personne ne peut expérimenter ce que vaut la vie sans des visages concrets à aimer. Il y a là un secret de l’existence humaine authentique, car la vie subsiste où il y a un lien, la communion, la fraternité ; et c’est une vie plus forte que la mort quand elle est construite sur de vraies relations et des liens de fidélité. » Et cet amour authentique pousse chacun à “ sortir de lui-même ”, à dépasser les cercles restreints de ses relations initiales, pour se rendre aux “ périphéries ”, pour nouer sans cesse de nouvelles relations avec les autres pour, au final, accueillir tout le monde, aimer tout le monde, vouloir le bien de tous et s’y dévouer.
Ce n’est pas tant la liberté qui conduit à l’individualisme et qu’il réprouve, ni même l’égalité plus théorique que réelle qui préoccupent François, mais la fraternité. C’est cette « ouverture de l’amour » qui inciterait chacun à rejoindre « ceux que je ne considère pas spontanément comme faisant partie de mon centre d’intérêt (...), chaque sœur ou frère souffrant, abandonné ou ignoré par ma société (...) étranger existentiel, même s’il est natif du pays ».
Ainsi cet amour authentique s’épanouit d’abord au sein d’une communauté de relations à partir de laquelle, de proche en proche, elle peut et doit connaître une ouverture qui doit aboutir à une fraternité universelle fondée sur la valeur, la dignité reconnue à chaque personne, sur une solidarité qui n’oublie pas de prendre soin des membres fragiles de nos familles, de notre société, de notre peuple et contre laquelle ne doivent s’interposer des frontières d’aucune sorte.
« Si toute personne a une dignité inaliénable, si chaque être humain est mon frère ou ma sœur et si le monde appartient vraiment à tous, peu importe que quelqu’un soit né ici ou vive hors de son propre pays. Ma nation est également coresponsable de son développement, bien qu’elle puisse s’acquitter de cette responsabilité de diverses manières : en l’accueillant généreusement en cas de besoin urgent, en le soutenant dans son propre pays, en se gardant d’utiliser ou de vider des pays entiers de leurs ressources naturelles par des systèmes corrompus qui entravent le développement digne des peuples. »
D’où cette compassion incroyable de François pour les migrants, en dehors de toute prudence écologique, de toute sagesse politique, de toute charité catholique, qui lui a fait faire son premier voyage, le 8 juillet 2013, sur l’île de Lampedusa, qui lui a inspiré cette folie de se déplacer sur l’île de Lesbos, le 16 avril 2016, et d’en ramener, dans son avion, douze migrants, tous musulmans, et qui l’a poussé encore à se rendre, non pas en France... mais à Marseille.
Voilà, la merveilleuse, la prestigieuse charité fraternelle catholique comme démembrée, c’est-à-dire coupée de son Auteur – Jésus-Christ, son Sacré-Cœur et la Croix – et détournée de sa fin – la conversion et le salut des pauvres pécheurs par la Médiation universelle du Cœur Immaculé de Marie – pour en faire une fraternité universelle laïque et maçonnique, au service de laquelle serait cantonnée une Église dont il n’est sérieusement question qu’à la toute extrême fin du document. « Il s’agit, non pas de prêcher la foi, la morale, la pratique de notre sainte religion ; ça, c’est courageux, c’est aidé par Notre-Seigneur, et donc profitable », écrivait notre Père en 1996 durant son exil à Hauterive. « Tandis que prêcher de telles théories, nous chrétiens, à tous les hommes, sans les tirer de leurs erreurs et sans les appeler d’abord à se convertir, c’est nous-mêmes pratiquer un naturalisme contraire à notre foi. Jésus dit : “ Sans moi, vous ne pouvez rien faire. ” Donc ces gens qui vous écoutent, s’ils ne viennent pas à la vraie foi, n’arriveront pas à la charité fraternelle, même habillée de neuf par vos soins en “ communion des personnes ” ! et vous, en leur prêchant cette si belle “ communion ” en si brillants habits, vous ne ferez rien et vous serez châtiés au dernier jour d’avoir rougi de Lui devant les hommes. » (Vatican II autodafé p. 379)
Un État a tout de même toisé le pape François dans son rêve de fraternité universelle en lui rappelant les réalités, les devoirs politiques auxquels ses propres citoyens doivent d’abord se soumettre avant de vouloir faire “ ami-ami ” avec le monde entier : la République populaire de Chine avec laquelle le Vatican s’est soumis à un accord pour concéder à la première un droit de regard déterminant pour ne pas dire décisif dans la nomination des évêques chinois qui tiennent désormais leur pouvoir de juridiction à la fois du Vicaire du Christ et du vicaire de Satan, c’est-à-dire du secrétaire général du Parti communiste chinois !
Donc ce projet de fraternité universelle, dans lequel le pape François englobe l’Église comme simple élément d’un dispositif universel, est un asservissement du Corps mystique du Christ au Monde et qui le conduit à ne plus vouloir distinguer ce qui est dans l’Église de ce qui est dehors. Mais il se trouve que l’Église par sa constitution divine même, demeure encore aujourd’hui, un obstacle à ce projet de fraternité universelle. D’où cette volonté, soixante années après le concile Vatican II, de poursuivre sa réforme pour l’ouvrir de façon plus vaste encore, s’il était possible, à ce nouvel esprit prétendument évangélique, l’adapter à ces liens fraternels universels et en faire « une famille parmi les familles, – c’est cela, l’Église –, prétend François, ouverte pour témoigner au monde d’aujourd’hui de la foi, de l’espérance et de l’amour envers le Seigneur et envers ceux qu’il aime avec prédilection. Une maison avec les portes ouvertes. L’Église est une maison qui a les portes ouvertes. » (Fratelli tutti, n° 276)
Cela est d’ailleurs parfaitement conforme à l’esprit du concile Vatican II. Une fois admis dans son principe, suivant en cela l’enseignement progressiste du Père Congar, que tout illuminé peut à sa guise réformer l’Église pour la rendre conforme à sa conception à lui, il n’y a plus de limite, une première réforme en appelant d’autres et ainsi de suite... jusqu’à la destruction.
Si Jean-Paul II et surtout Benoît XVI étaient préoccupés de maintenir leur grande œuvre du concile Vatican II par un sage réformisme selon une “ herméneutique de la continuité ”, il n’en est rien pour François que rien n’arrête pour suivre ce rêve d’une fraternité universelle, comme il l’a montré sans ambages dans son exhortation apostolique Evangelii gaudium, datée du 24 novembre 2013 à laquelle il conféra explicitement une « signification programmatique ».
UNE DESTRUCTION PROGRAMMÉE DE L’ÉGLISE.
Le premier chapitre de ce texte est consacré à la nécessaire « réforme de l’Église en sortie missionnaire », à « la transformation missionnaire de l’Église », avec d’ailleurs référence à « la réforme permanente » de l’Église initiée par le concile Vatican II et Paul VI. « J’espère que toutes les communautés feront en sorte de mettre en œuvre les moyens nécessaires pour avancer sur le chemin d’une conversion pastorale et missionnaire qui ne peut laisser les choses comme elles sont (...). La réforme des structures, qui exige la conversion pastorale, ne peut se comprendre qu’en ce sens : faire en sorte qu’elles deviennent toutes plus missionnaires, que la pastorale ordinaire en toutes ses instances soit plus expansive et ouverte, qu’elle mette les agents pastoraux en constante attitude de “ sortie ” et favorise ainsi la réponse positive de tous ceux auxquels Jésus offre son amitié. » Et le Saint-Père de passer en revue les différentes “ structures ecclésiales ” pour toutes les engager à « se réformer » et en particulier l’Église diocésaine.
« L’évêque doit toujours favoriser la communion missionnaire dans son Église diocésaine en poursuivant l’idéal des premières communautés chrétiennes, dans lesquelles les croyants avaient un seul cœur et une seule âme (cf. Ac 4, 32). Par conséquent, parfois il se mettra devant pour indiquer la route et soutenir l’espérance du peuple, d’autres fois il sera simplement au milieu de tous dans une proximité simple et miséricordieuse, et en certaines circonstances il devra marcher derrière le peuple, pour aider ceux qui sont restés en arrière et – surtout – parce que le troupeau lui-même possède un odorat pour trouver de nouveaux chemins. Dans sa mission de favoriser une communion dynamique, ouverte et missionnaire, il devra stimuler et rechercher la maturation des organismes de participation proposés par le Code de droit canonique et d’autres formes de dialogue pastoral, avec le désir d’écouter tout le monde, et non pas seulement quelques-uns, toujours prompts à lui faire des compliments. Mais l’objectif de ces processus participatifs ne sera pas principalement l’organisation ecclésiale, mais le rêve missionnaire d’arriver à tous. » ( n° 31)
Rien de plus évangélique apparemment que cette image pastorale donnée à l’évêque, celle d’un berger à la tête ou bien au milieu de son troupeau voire même en arrière pour aider ceux qui peinent à suivre. Rien de plus révolutionnaire en réalité que de tels propos. On y retrouve la contradiction classique dans laquelle se mettent systématiquement les réformateurs qui prétendent faire faire “ un bond en avant ” à l’Église en lui imposant “ une marche arrière ” – en l’occurrence de deux mille ans – pour renouer avec l’idéal perdu – par défaut sans doute de fidélité – des premières communautés chrétiennes, pour imposer en fait à leurs contemporains leur idéal à eux et pour lequel ils ne peuvent se prévaloir d’aucun fondement dans la Tradition. « L’idyllique souvenir de la première communauté de Jérusalem (Actes des Apôtres 2, 42 ; 4, 32-35 ; 5, 12-16), ne peut passer sans abus pour une définition de l’Église des siècles », a écrit notre Père dans son troisième Livre d’accusation.
Et cet idéal que décrit déjà le Pape autour des mots clés de “ communion ”, “ mission ” et “ participation ” ne serait-il pas celui d’une “ Église synodale ” qui ne dit pas encore son nom ?
Et comment se pourrait-il qu’en certaines circonstances un évêque serait bien avisé de se mettre “ en arrière ” au motif que « le troupeau lui-même possède un odorat pour trouver de nouveaux chemins » ? Qu’est-ce que cela veut dire ? Le numéro 119 de l’Exhortation semble donner l’explication : « Dans tous les baptisés, du premier au dernier, agit la force sanctificatrice de l’Esprit qui incite à évangéliser. Le Peuple de Dieu est saint à cause de cette onction qui le rend infaillible “ in credendo ”. Cela signifie que quand il croit il ne se trompe pas, même s’il ne trouve pas les paroles pour exprimer sa foi. L’Esprit le guide dans la vérité et le conduit au salut. Comme faisant partie de son mystère d’amour pour l’humanité, Dieu dote la totalité des fidèles d’un instinct de la foi – le sensus fidei – qui les aide à discerner ce qui vient réellement de Dieu. La présence de l’Esprit donne aux chrétiens une certaine connaturalité avec les réalités divines et une sagesse qui leur permet de les comprendre de manière intuitive, même s’ils ne disposent pas des moyens appropriés pour les exprimer avec précision. »
Cette présentation du “ peuple de Dieu ” saint, absolument parfait, infaillible, démocratique, aux contours insaisissables, doté d’un instinct inné et collectif de la foi que lui accorderait directement et assurément le Saint-Esprit, avec ou sans la médiation nécessaire de la Hiérarchie, en dehors des frontières parfaitement définies du Magistère solennel ou ordinaire, par la seule grâce du baptême, relève d’un “ pur ” illuminisme qui n’est pas catholique et ne correspond pas au sensus fidei, dans son acception traditionnelle. Le “ sens de la foi ” des fidèles, c’est le sens de l’accueil des vérités de la foi « reçu au baptême comme une raison et une conscience surnaturelles, incapable en temps normal de rien découvrir de neuf et encore moins d’enseigner, mais capable de s’enthousiasmer à la parole d’un membre de l’Église enseignante », a précisé notre Père en 1996 dans le manuscrit que nous publierons en 2008 sous le titre Vatican II autodafé. Mais François a pour lui le concile Vatican II et même le prétendu Catéchisme de l’Église catholique publié en 1993 et dans lequel notre Père a relevé et dénoncé justement dans son troisième Livre d’accusation cette première hérésie, d’ « une extension abusive de l’infaillibilité et de l’indéfectibilité de l’Église en son chef, en ses pasteurs et en son peuple ».
Partant de là, tout commence à s’éclairer sur le projet de réforme du pape François, à la lecture de la partie consacrée à l’annonce de l’Évangile par le “ Peuple de Dieu ” (cf. nos 111 à 134). Le Pape parle de tout à propos de la “ Bonne nouvelle ”, de la joie que chaque baptisé serait appelé à faire connaître à tous, de ce salut que Dieu réalise et que l’Église annonce joyeusement et qui serait destiné à tous. Il ne manque pas de souligner la force évangélisatrice de la dévotion populaire. Mais rien quant au contenu proprement dit de l’Évangile, quant à son appel à se convertir, à faire pénitence, à recevoir les sacrements pour imiter et suivre Jésus... jusqu’à la croix... pour en définitive gagner le Ciel et échapper à l’enfer. Rien de tout cela. Et le plus incroyable est que cette merveilleuse et idéale mission d’évangélisation à laquelle nous serions tous appelés, quel que soit d’ailleurs notre état de grâce, se fait apparemment en l’absence de la Hiérarchie. Dans tous ces développements, pas la moindre mention des religieux, des prêtres, des évêques, d’une quelconque institution de l’Église.
Donc autant dire une évangélisation sans l’Église. Et notre Père en avait bien compris le ressort : « La grande raison de l’animosité sourde ou déclarée partout répandue contre la société visible, historique et hiérarchique qu’est l’Église, c’est l’exaltation de l’Évangile, mais de l’Évangile “ selon l’Esprit ”. C’est une Bonne Nouvelle, un Message de libération, de joie et d’espoir qui doit être annoncé à tous les hommes pour que réussisse leur vie (...). Chacun construit son Église, se crée sa communauté, sans que plus personne ne conçoive la nécessité de l’unique Église comme médiation entre Dieu et les hommes. Nul besoin désormais de Magistère, ni de culte, ni de gouvernement ecclésiastique. L’institution est périmée. » (La Contre-Réforme catholique n° 52 de janvier 1972) Il y a cinquante ans !
En conséquence, le Saint-Père préconise que soit réservé aux laïcs qui « sont tout simplement l’immense majorité du peuple de Dieu » et aux femmes en particulier plus d’espace au sein des églises particulières « afin de pouvoir s’exprimer et agir », ce qui suppose de combattre un « cléricalisme excessif » (cf. nos 102-104).
Voilà en germe le cléricalisme dénoncé comme le mal principal dont souffrirait actuellement l’Église et dont François en impute les innombrables désordres qui l’éclaboussent à grand renfort de publicité. S’adressant aux jésuites d’Irlande, le 25 août 2018, il osa déclarer : « Il y a, derrière ce drame de la violence, surtout quand il atteint de vastes proportions et suscite un grand scandale – pensons au cas du Chili et ici en Irlande ou aux États-Unis – une situation de l’Église marquée par l’élitisme et le cléricalisme : un échec de la proximité avec le peuple de Dieu. L’élitisme et le cléricalisme favorisent toutes les sortes d’abus. Et l’abus sexuel n’est pas le premier. Le premier est l’abus de pouvoir et de conscience. » (La civiltà cattolica [éd. fr.] 0918 [2018], p. 15). Désordres prétendus d’un cléricalisme débridé et auquel “ l’Église synodale ” porterait remède. De quoi s’agit-il ?
UNE ÉGLISE SYNODALE.
C’est sans doute dans un discours prononcé le 17 octobre 2015 à l’occasion de la commémoration du cinquantième anniversaire de l’institution du synode des évêques, que le pape François a personnellement expliqué de la façon la plus complète ce qu’il entend par “ Église synodale ”. Lui-même vient de souligner l’importance de ce texte : « Quand, à l’occasion du cinquantième anniversaire de la création du Synode, les théologiens ont préparé à mon intention une lettre que j’ai signée, ce fut un grand pas en avant. » (discours du 4 octobre 2023)
Il reprend cette idée clef selon laquelle « le Peuple de Dieu est saint à cause de cette onction qui le rend infaillible “ in credendo ” », il invoque à nouveau le sensus fidei qui ferait obstacle, selon lui, à « une séparation rigide entre Ecclesia docens et Ecclesia discens, puisque le Troupeau possède aussi son propre “ flair ’’ pour discerner les nouvelles routes que le Seigneur ouvre à l’Église » et il en conclut qu’ « une Église synodale est une Église de l’écoute, avec la conscience qu’écouter “ est plus qu’entendre ”. C’est une écoute réciproque dans laquelle chacun a quelque chose à apprendre. Le peuple fidèle, le Collège épiscopal, l’Évêque de Rome, chacun à l’écoute des autres ; et tous à l’écoute de l’Esprit-Saint, l’ “ Esprit de Vérité ” (Jn 14, 17), pour savoir ce qu’il dit aux Églises (Ap 2, 7) ».
Le chemin synodal commencerait donc par l’écoute du Peuple de Dieu et s’il culmine avec l’écoute de l’Évêque de Rome, c’est bien le Synode des évêques qui se trouve être « le point de convergence de ce dynamisme d’écoute à tous les niveaux de la vie de l’Église (...). À travers les pères synodaux, les évêques agissent comme d’authentiques gardiens, interprètes et témoins de la foi de toute l’Église, qui doivent savoir discerner avec attention parmi les mouvements souvent changeants de l’opinion publique. » Et le Saint-Père d’achever en “ apothéose ” cet illuminisme délirant où le Peuple de Dieu est fait roi : « Nous demandons tout d’abord à l’Esprit-Saint, pour les pères synodaux, le don de l’écoute : écoute de Dieu jusqu’à entendre avec Lui le cri du peuple ; écoute du peuple jusqu’à y respirer la volonté à laquelle Dieu nous appelle. »
Le pape François a donc dans le collimateur le pouvoir personnel des évêques qu’il entend affaiblir par une « valorisation » des « organismes de communion » qui les assistent (le conseil presbytéral, le conseil des consulteurs, le chapitre des chanoines et le conseil pastoral) et de telle manière que ces « organismes restent reliés avec la “ base ” et partent des gens, des problèmes de chaque jour ».
Le Pape a également dans le collimateur l’exercice de son propre pouvoir. Mais là il avance à pas bien comptés, se sachant personnellement tenu par la constitution divine de l’Église et en particulier par les paroles mêmes de Notre-Seigneur qui a constitué saint Pierre comme le chef des Apôtres pour confirmer ses frères dans la foi.
Il rappelle que « l’évêque de Rome, appelé à se prononcer comme “ pasteur et docteur de tous les chrétiens ”, non à partir de ses convictions personnelles, mais comme témoin suprême de la fides totius Ecclesiæ, est “ garant de l’obéissance et de la conformité de l’Église à la volonté de Dieu, à l’Évangile du Christ et à la Tradition de l’Église ” ». Mais aucune mention explicite, dans le discours de François, de son pouvoir personnel, exorbitant, extraordinaire, d’enseignement solennel et infaillible, lorsqu’il daigne y recourir. Renoncement intentionnel à son titre de “ Vicaire du Christ ” rappelant sans doute à ses yeux de façon trop autoritaire, pas assez synodale, qu’il est le chef souverain et suprême de son unique Église, de ce qu’il tient son pouvoir de Notre-Seigneur et de Lui seul, à la différence des autres évêques et surtout à la différence de n’importe quel patriarche schismatique ; d’où ce recours systématique à ce titre d’ “ évêque de Rome ” ou à cette expression de “ ministère pétrinien ”.
Autant de subterfuges terminologiques pour introduire une réforme de l’exercice du ministère pontifical : « Je suis persuadé que, dans une Église synodale, même l’exercice du primat pétrinien pourra recevoir une plus grande lumière. Le pape ne se trouve pas, tout seul, au-dessus de l’Église, mais en elle comme baptisé parmi les baptisés et dans le Collège épiscopal comme évêque parmi les évêques, appelé en même temps – comme successeur de l’apôtre Pierre – à guider l’Église de Rome qui préside dans l’amour de toutes les Églises. »
François n’en dit pas plus, mais en attendant il veut que certaines charges incombant au Pape soient transférées aux provinces, aux régions ecclésiastiques, aux conciles particuliers et tout spécialement aux Conférences épiscopales. « Le souhait du Concile que de tels organismes puissent contribuer à accroître l’esprit de la collégialité épiscopale ne s’est pas encore pleinement réalisé. » Notre Père lui-même le reconnaissait en janvier 1972, à propos de la collégialité, que la bataille n’était pas terminée. « Nous sommes à mi-chemin, à une partie du chemin. Dans une Église synodale, comme je l’ai déjà affirmé, “ il n’est pas opportun que le Pape remplace les épiscopats locaux dans le discernement de toutes les problématiques qui se présentent sur leurs territoires. En ce sens, je sens la nécessité de progresser dans une ‘ décentralisation ‘ salutaire ”. » Mais cette décentralisation affichée au profit des conférences épiscopales ne serait-elle pas une manière élégante de décharger une encombrante et paralysante Curie contre laquelle François n’a jamais voulu cacher son animosité personnelle et sa méfiance au point de l’avoir soumise à un plan de réforme dès son accession sur le trône de saint Pierre ?
LA RÉFORME DE LA CURIE.
Les cardinaux en avaient longuement parlé en 2013, lors des congrégations générales qui précédèrent le conclave : Rome, la Curie, ne pouvait prétendument rester en l’état. « François a été choisi sur sa réputation d’homme d’action, autoritaire, qui a su gérer un énorme diocèse, celui de Buenos Aires. Il a reçu ce mandat lors de son élection : réformer la gouvernance de l’Église catholique, et il s’y emploie », expliquait en 2017 Isabelle de Gaulmyn (Pouvoirs – 162. 2017, p. 35 et s.) De fait, dès le 8 avril 2013, il nomme un conseil des cardinaux tous choisis en dehors de la Curie, pour l’aider. Ce fut le fameux C9 dont les travaux aboutirent à la promulgation par François le 19 mars 2022 – solennité de saint Joseph choisie pour souligner l’importance du texte – de la constitution apostolique Predicate evangelium « sur la Curie romaine et son service à l’Église dans le monde ».
C’est la constitution Immensa æterni dei adoptée par Sixte V en 1588 qui posa les fondements modernes de la Curie romaine, organisant de façon permanente et cohérente l’ensemble des services, offices, commissions cardinalices et congrégations chargés d’assister le Souverain Pontife d’une part dans l’exercice de son ministère sur son diocèse et sur l’Église universelle et d’autre part dans l’administration des États pontificaux. Saint Pie X adoptera en 1908 la constitution Sapienti consilio qui ramena le nombre des congrégations de vingt à onze, simplifiant et clarifiant considérablement les procédures et qui rétablit la juridiction de la Rote romaine dans le souci d’établir une claire distinction dans l’exercice des fonctions administratives des fonctions judiciaires au sein de la Curie. À la suite du concile Vatican II, Paul VI promulgua en 1967 la constitution Regimini ecclesiæ universæ et Jean-Paul II Pastor bonus en 1988. Donc avec le pape François, en moins de soixante ans, la Curie romaine en est à sa troisième réforme générale lorsqu’en quatre siècles l’institution n’en connut que deux.
En préambule, la constitution part toujours de cette idée selon laquelle l’Église a reçu le mandat du Seigneur Jésus de prêcher l’Évangile, de sa nécessaire conversion missionnaire dans le souci de se renouveler « à l’image de la mission d’amour du Christ lui-même ».
Aussi, le dicastère pour l’Évangélisation se trouve placé en tête de liste des seize ministères de la Curie et reçoit l’insigne honneur d’être présidé en personne par le Souverain Pontife (cf. art. 54). En guise de feuille de route, tout un projet « d’inculturation de la Bonne Nouvelle de Jésus-Christ dans les différentes cultures et ethnies et de leur évangélisation » (art. 56 § 1). Mais évidemment pas un mot, aucun rôle réservé à la Sainte Vierge devenue pourtant au fil des siècles la grande évangélisatrice des temps modernes avec les innombrables sanctuaires qu’elle s’est elle-même choisis pour y attirer les pauvres âmes ployant sous leurs misères et leurs péchés, mais demandant humblement grâce et miséricorde pour se convertir et mener une vie meilleure. Ce silence est d’autant plus injurieux qu’il revient précisément à ce dicastère « d’ériger les sanctuaires internationaux » et de « promouvoir une pastorale organique des sanctuaires comme centres moteurs de l’évangélisation permanente » (art. 56 § 2), dont beaucoup sont précisément dédiés à Notre-Dame par une volonté toute spéciale de notre Très Chéri Père du Ciel.
Cette promotion de cette « pastorale organique » ne serait-elle pas plutôt une mainmise, un contrôle de la dévotion, de l’enthousiasme du bon peuple fidèle qu’il témoigne en faveur de la Sainte Vierge dans les sanctuaires privilégiés qui lui sont dédiés ? Le pèlerinage du Saint-Père au sanctuaire de Fatima, le 5 août dernier, en est encore une saisissante preuve avec l’occultation pure et simple, dans son allocution adressée à la foule de pèlerins venus l’acclamer avec enthousiasme, des moindres paroles prononcées par Notre-Dame lors de ses apparitions en 1917. Sur le lieu même où Dieu a fait connaître sa volonté d’établir la dévotion au Cœur Immaculé de Marie, le Saint-Père s’est contenté, lui, de souligner le rôle simplement “ accompagnateur ” c’est-à-dire subordonné de la Sainte Vierge, dans la droite ligne du chapitre 8 de Lumen gentium, en lui concédant ces titres sans relief tels que : « la Vierge “ qui part en vitesse ”, chaque fois qu’il y a un problème » ou bien « la Vierge attentionnée ! » pour n’avoir à mentionner aucun de ses glorieux privilèges. Ça, c’est le bout de la queue du Diable qui la frappe au talon. Mais Elle lui écrasera la tête !
Le dicastère pour la doctrine de la foi se retrouve relégué en deuxième position. Dans une lettre datée du 1er juillet 2023, François a exposé sans détour à son nouveau préfet, Mgr Victor Manuel Fernandez, ce qu’il attendait désormais de l’ancien Saint-Office : « Son objectif central est de veiller sur l’enseignement qui découle de la foi afin de donner des raisons à notre espérance, mais pas comme un ennemi qui critique et condamne. »
Ces propos rendus à dessein publics sont terribles. En interdisant formellement au dicastère pour la doctrine de la foi de rechercher, poursuivre et condamner les erreurs, François se porte garant de toutes les hérésies qui pullulent dans l’Église. Il se présente a priori comme le défenseur, le protecteur donc le complice de tous les hérétiques dont l’Église meurt aujourd’hui. Cet apparent libéralisme est en fait une effroyable injustice commise à l’encontre de tous les évêques et prêtres, prêts à n’enseigner que la sainte doctrine à la seule condition d’être eux-mêmes maintenus, soutenus avec bonté et fermeté dans la stricte ligne de l’orthodoxie. « Toute la question est de savoir si l’Église de toujours avait raison, justice et charité, dans sa proscription systématique de toute hérésie et de tout schisme », écrivait notre Père en 1973 à Paul VI dans son Livre d’accusation daté des 27 et 28 mars. « Sa foi était ainsi assurée, confirmée, protégée par cette loi souveraine : toute erreur, toute attaque contre le dogme, la morale, la liturgie des sacrements, les institutions ecclésiastiques devait être poursuivie et réprimée, sans aucune exception. Et la foi devait être garantie, conservée, soutenue par la loi. Oui, la loi de l’Église et la loi de l’État catholique ! »
François pense exactement le contraire : « Le Dicastère que vous allez présider a connu d’autres époques où il a utilisé des méthodes immorales. Il s’agissait d’époques où, au lieu de promouvoir la connaissance théologique, on poursuivait d’éventuelles erreurs doctrinales. Ce que j’attends de vous est certainement très différent. » Ce qu’attend le Saint-Père n’est manifestement plus la défense du dogme de la foi sans laquelle pourtant toute évangélisation est absolument vaine, sans laquelle on ne peut plaire à Dieu. « Nous avons besoin que la théologie soit attentive à un critère fondamental : considérer que toutes les notions théologiques qui remettent en cause la toute-puissance même de Dieu, et en particulier sa miséricorde, sont inadéquates. » C’est précisément pour contrecarrer une telle folie théologique qui nie tout simplement la damnation possible des pécheurs que la Sainte Vierge, lors de son apparition du 13 juillet 1917 à Fatima, a montré à Lucie, François et Jacinthe l’enfer, un « océan de feu » dans lequel étaient plongés, se trouvent encore aujourd’hui et pour l’éternité, non seulement les démons, mais également les âmes des damnés.
« Nous avons besoin d’une pensée capable de présenter de manière convaincante un Dieu qui aime, qui pardonne, qui sauve, qui libère, qui promeut les personnes et les appelle au service fraternel. » Le Bon Dieu aime, pardonne à sa chétive et pécheresse créature que nous sommes tous au point de lui avoir envoyé son Fils pour mourir sur la croix en rançon de ses péchés, au point de lui avoir envoyé, en dernier recours, sa très sainte Mère dans le ciel de Fatima pour annoncer qu’Il veut établir dans le monde la dévotion à son Cœur Immaculé à Elle. Mais le Saint-Père est-il prêt à enseigner aux fidèles de l’Église l’amour de la croix, folie aux yeux des hommes, et dont l’amour du Cœur Immaculé est le secret ? Il ne l’enseigne jamais.
Voilà un dicastère pour la doctrine de la foi neutralisé afin que liberté soit donnée au nouveau principe de la synodalité pour régir les institutions supérieures de l’Église. Car d’emblée est affirmée, toujours dans le préambule de la constitution Predicate evangelium, la vie de communion qui donne à l’Église « un visage de synodalité » qui impliquerait une écoute mutuelle « dans laquelle chacun a quelque chose à apprendre. Le peuple fidèle, le Collège épiscopal, l’évêque de Rome, chacun à l’écoute des autres ; et tous à l’écoute de l’Esprit-Saint ». Dans cette écoute réciproque, la Curie n’a pas à s’interposer entre le Pape et les évêques, mais elle doit se mettre « plutôt au service des deux selon les modalités propres à la nature de chacun ».
Le principe est donc clairement posé et imposé par le pape François et donne lieu à des règles très concrètes pour modifier le fonctionnement des institutions curiales dans le sens d’un abaissement général de leur autorité, pour que d’institutions de gouvernement elles deviennent des institutions de soutien, de collaboration et de service. C’est l’esprit de cette réforme qui se concrétise en plusieurs points.
Instauration de la règle générale de la “ réunionite ” « intradicastérielle » et « interdicastérielles ». De façon très insidieuse, c’est le régime de la discussion qui va s’instaurer et avec lequel les dicastères vont se neutraliser les uns les autres et d’où ne résulteront en définitive que des décisions de consensus sans force, sans autorité.
Renforcement des compétences des conférences épiscopales auxquelles il est fait référence soixante fois dans la Constitution. Aide et assistance dues aux conférences épiscopales, travail en collaboration, sur proposition ou après consultation des mêmes conférences épiscopales sont désormais les leitmotives incessants dès qu’il est question des compétences reconnues aux différents dicastères et des sujets d’importance qu’ils sont conduits à traiter. C’est un renversement complet de l’autorité au sommet même de l’Église au profit de ces assemblées parlementaires, bruyantes et impotentes, mais compétentes pour toutes les médiocrités voire les hérésies.
Omniprésence des laïcs. « Tout chrétien, en vertu de son baptême, est un disciple missionnaire “ dans la mesure où il a rencontré l’amour de Dieu en Jésus-Christ ”. Il est impossible de ne pas en tenir compte dans la mise à jour de la Curie. Sa réforme doit donc prévoir la participation de laïcs, hommes et femmes, y compris dans des rôles de gouvernement et de responsabilité. » En conséquence de quoi, il est désormais explicitement prévu qu’un dicastère peut être présidé par un fidèle, qu’il soit d’ailleurs homme ou femme.
Toutes ces mesures n’auront pas d’autre effet que de renforcer le sentiment général d’insécurité des responsables de la Curie, saper leur stabilité dans leur charge ainsi que leur indépendance vis-à-vis du Souverain Pontife, devenu tout-puissant pour réformer l’Église, mais impuissant, lorsque l’Heure de Dieu viendra, pour la redresser, à cause des mafias des assemblées épiscopales et autres qui finiront par noyauter toutes les institutions de l’Église au nom d’une participation de tous, de tous les baptisés à la vie de l’Église comme il est bien expliqué dans L’instrumentum laboris que suivent méthodiquement les participants au synode qui se tient actuellement à Rome sur la synodalité de l’Église.
LE SYNODE SUR LA SYNODALITÉ DE L’ÉGLISE.
L’Instrumentum laboris se réfère sans cesse à la synodalité, en décrit certains traits caractéristiques, mais en se gardant bien d’en donner une définition précise. On finit quand même par comprendre que l’Église synodale c’est un esprit, c’est une méthode, c’est une organisation ministérielle des charismes, dans une confusion totale des pouvoirs d’ordre, d’enseignement et de gouvernement, suivant trois priorités sans cesse répétées de “ communion ”, de “ mission ” et de “ participation ” et dont l’unique et réel but recherché est le laminage complet et en profondeur, au sein de l’Église, de toute forme d’autorité.
Une Église synodale peut être définie comme l’antithèse d’une Église hiérarchique et monarchique et non plus seulement comme le renversement de la pyramide de sa Hiérarchie. C’est l’achèvement du processus initié en 1964 par l’adoption du principe de “ collégialité ”, premier coup dévastateur porté à l’Église, pour parvenir à la “ participation ” de tous, de tous les baptisés « à la vie de l’Église et à sa mission ».
« Une Église synodale est fondée sur la reconnaissance de la dignité commune qui découle du Baptême, lequel fait de ceux qui le reçoivent des fils et des filles de Dieu, des membres de sa famille, et donc des frères et des sœurs en Christ. Habités par l’unique esprit, ils et elles sont envoyés pour accomplir une mission commune (...). Le Baptême crée ainsi une véritable coresponsabilité entre les membres de l’Église qui se manifeste dans la participation de tous à la mission et à l’édification de la communauté ecclésiale, chacun et chacune selon ses charismes. » Une Église synodale « désire être humble. Elle sait qu’elle doit demander pardon et qu’elle a beaucoup à apprendre » notamment dans ses relations « avec les autres Églises et communautés ecclésiales, auxquelles nous sommes unis par le lien d’un unique Baptême (...) ».
Voilà pour ce qui est de l’esprit d’une Église synodale qui est « une Église de l’écoute (...). Pour beaucoup de personnes, la grande surprise a été précisément l’expérience d’être écoutée par la communauté, dans certains cas pour la première fois, recevant ainsi une reconnaissance de leur valeur unique et par là un témoignage de cet amour singulier du Père pour chacun de ses fils et de ses filles. » C’est une Église de la rencontre et du dialogue, ouverte et accueillante, au sein de laquelle tous et toutes se sentent les bienvenus, peuvent participer à « la conversation dans l’Esprit » qui relève du plus pire illuminisme. Il s’agit « d’une prière partagée en vue d’un discernement en commun ».
Concrètement, la “ dynamique ” se déroule en trois étapes. La première : la prise de parole de chacun et de chacune, les autres écoutant, convaincus que « chaque personne a une contribution précieuse à apporter ». La deuxième : chacun reprend la parole « non pas pour réagir et contrer ce qui a été entendu, en réaffirmant sa propre position, mais pour exprimer ce qui, au cours de l’écoute, l’a touché le plus profondément ». Enfin troisième et dernière étape : « identifier les points clés... pour dégager un consensus » bien convaincu que « le Seigneur est la pierre angulaire qui permettra à la “ construction ” de tenir debout » et que « l’Esprit, maître de l’harmonie, aidera à passer de la cacophonie à la symphonie ».
Voilà pour ce qui est de la méthode, cette “ conversation dans l’Esprit ” qu’une consultation synodale menée au niveau universel, toute nouvelle, découverte après deux mille ans d’existence d’une Église “ balbutiante ” qui commence enfin à comprendre ce que Notre-Seigneur attend d’Elle et de ses ministres et qui serait à mettre en œuvre à tous les niveaux pour toute décision à prendre. Mais dans ces discussions et bavardages, quid de la foi, de la doctrine, de la Tradition, des lois de l’Église, de la discipline catholique, etc ?
Tout cela est absolument hors du champ d’application de cette “ conversation dans l’Esprit ” où n’y seront sans doute pas les bienvenus les tenants de ce que le Saint-Père désigne par “ néo-pélagianisme ” et qu’il décrit comme « ceux qui, en définitive, font confiance uniquement à leurs propres forces et se sentent supérieurs aux autres parce qu’ils observent des normes déterminées ou parce qu’ils sont inébranlablement fidèles à un certain style catholique justement propre au passé. C’est une présumée sécurité doctrinale ou disciplinaire qui donne lieu à un élitisme narcissique et autoritaire, où, au lieu d’évangéliser, on analyse et classifie les autres, et, au lieu de faciliter l’accès à la grâce, les énergies s’usent dans le contrôle. » (Evangelii gaudium, n° 94) Quant à ceux qui disent : « On a toujours fait ainsi », François les condamne sans appel : « Cette parole est un venin dans la vie de l’Église. » (discours du 9 octobre 2021 avec référence au n° 33 de Evangelii gaudium)
Autant dire de nous, de ceux qui voudraient rendre témoignage à Notre-Seigneur au point de demeurer « inébranlablement fidèles » à la foi catholique pour cause de « perfection divine » et que leur a enseignée une Église que le Saint-Père juge d’un temps passé et révolu, se sentiront d’eux-mêmes exclus de cette Église aujourd’hui synodale pratiquant l’auto-excommunication pour qui, prétendument, serait privé des lumières de “ l’Esprit ”.
De la méthode, il faut maintenant passer à une nouvelle organisation des ministères. Ce sera tout l’enjeu des discussions au sein de l’Assemblée synodale convoquée à Rome cet automne.
En premier lieu, L’instrumentum laboris réaffirme sans la moindre autorité le principe d’égalité entre “ ministres ordonnés ”, c’est-à-dire les évêques, prêtres diacres et les “ ministres baptismaux ”, c’est-à-dire l’ensemble des laïcs qui reçoivent directement leur mission du Christ par le baptême. « Il y a un appel clair à dépasser une vision qui réserve aux seuls ministres ordonnés toute fonction active dans l’Église, réduisant la participation des baptisés à une collaboration subordonnée. Sans relativiser l’importance du don du sacrement de l’ordre, les ministères sont compris à partir d’une conception ministérielle de toute l’Église. » Non, ce principe d’égalité « aboutit à la destruction des élites religieuses et à la paralysie systématique des grandes influences spirituelles, expliquait notre Père en 1972. Il n’y a rien d’étonnant à cela. La “ rentrée sensationnelle des charismes à Vatican II ”, imposée par le cardinal Suenens, exaltée par Congar, fut toute théorique. Parce qu’elle niait toute condition de sainteté préalable, toute supériorité mystique et morale, elle donne pouvoir à tous sur tous, et aboutit donc à combattre toute supériorité réelle, à paralyser toute influence et tout bienfait des uns aux autres. L’égalité tua l’ “ édification ” ! » (La Contre-Réforme catholique n° 55, avril 1972)
Bien plus, aujourd’hui L’instrumentum laboris pose une revendication claire, celle de créer de nouveaux ministères « pour fournir des moyens et des opportunités pour une participation effective des femmes à la réflexion théologique et dans les organes de discernement et de prise de décision ». Avec cette présence de femmes partout dans les paroisses et dans les évêchés pour commander, c’est sûr nous allons au-devant de drames. En tout cas cette présence féminine pose déjà beaucoup de difficultés que ne peut cacher L’instrumentum laboris : « Les contributions reçues au cours de la première phase font état de tensions existantes avec les ministres ordonnés en l’absence de dynamiques de coresponsabilité et de processus décisionnels partagés. »
Ensuite, L’instrumentum laboris pose la question de la réforme du ministère de l’épiscopat pour intégrer le principe de “ collégialité ” à celui, plus large, de “ synodalité ” et pour concilier la constitution hiérarchique de l’Église avec cette synodalité de Satan. Nous sommes au cœur de cette révolution préparée depuis dix ans maintenant par le pape François. Il s’agit de reprendre la bataille de la collégialité, là où elle s’était arrêtée en 1964, pour la poursuivre et l’achever !
Les évêques seraient requis de participer au processus synodal aussi bien lorsque chacun « initie, guide et conclut la consultation du Peuple de Dieu qui lui est confié » que lorsque réunis ensemble ils « exercent conjointement le charisme de discernement (...) dans les conférences épiscopales, dans les Assemblées continentales et, sous une forme particulière, dans l’Assemblée synodale ». À noter que le Concile n’est pas évoqué et ce n’est certainement pas un oubli. C’est donc une révolution qui se prépare pour laquelle les évêques sont d’ores et déjà pressés de vivre ce processus synodal avec « une confiance radicale dans l’action de l’Esprit dans leurs communautés, sans considérer la participation de tous comme une menace pour leur ministère de gouvernement ». Certains revendiquent ouvertement un rôle « moins exclusif du rôle des évêques » tandis que « d’autres expriment des doutes et craignent le risque d’une dérive inspirée par les mécanismes de la démocratie politique ».
Voilà le mot lâché... pour nier la chose évidemment, comme le fait régulièrement le pape François dans ses recommandations à propos des discussions synodales, convaincu que chacun peut discuter même pour soutenir des thèses clairement hérétiques ou contraires aux lois de l’Église comme la bénédiction de couples de personnes de même sexe. Il n’y a pas à s’en inquiéter : du moment que la prière n’est pas oubliée et que chacun est écouté avec intérêt et bienveillance, le Saint-Esprit ou plutôt “ l’Esprit ” est bien présent et s’occupe du reste c’est-à-dire, à partir de la diversité des idées, d’assurer entre tous l’unité et l’harmonie... mais sans souci de la Vérité ! C’est hérétique à hurler ! C’est complètement dingue ! Et c’est bien l’idée du Saint-Père qui l’a encore redite dans l’avion, le 4 septembre dernier, au retour de son voyage en Mongolie, à propos de la manière avec laquelle chaque séance synodale sera organisée : « Il ne s’agit pas d’une émission de télévision où l’on parle de tout. Non. Il y a un moment religieux, un moment d’échange religieux. Dans les introductions au synode, il y aura trois à quatre minutes pour trois prises de paroles puis il y aura trois à quatre minutes de silence pour la prière. Puis trois autres, et la prière. Sans cet esprit de prière, il n’y a pas de synodalité. Ce serait de la politique, du parlementarisme. Le synode n’est pas un parlement. »
Mais Notre-Seigneur Jésus-Christ, Lui, que pense-t-il de tout cela ?
« ESPRIT ! ES-TU LÀ ? »
Pas plus que sa Très Sainte Mère à Fatima, Jésus n’est pas protagoniste dans la salle Paul VI où se déroulent, autour de tables rondes, les séances du Synode car son Vicaire semble l’avoir complètement oublié. C’est du moins ce qui ressort de son discours d’ouverture de la session synodale prononcé le 4 octobre dernier. Il ne l’a pas mentionné une seule fois alors qu’il s’est référé à cinquante et une reprises à l’Esprit-Saint. « J’aime dire que le Synode n’est pas un parlement, c’est autre chose ; que le Synode n’est pas une réunion d’amis pour résoudre certaines questions d’actualité ou donner des avis, c’est autre chose. N’oublions pas, frères et sœurs, que le protagoniste du Synode, ce n’est pas nous : c’est l’Esprit-Saint. Et si nous avons l’Esprit-Saint parmi nous pour nous guider, ce sera un beau Synode. Si, en notre sein, il existe d’autres manières d’avancer pour des intérêts humains, personnels, idéologiques, ce ne sera pas un Synode, ce sera une réunion plus parlementaire, ce qui est une autre chose. Le Synode est un chemin que le Saint-Esprit conduit. Quelques documents vous ont été remis avec des textes patristiques qui nous aideront dans l’ouverture du Synode. Ils sont tirés de saint Basile, qui a écrit ce beau traité sur le Saint-Esprit. Pourquoi ? Parce que nous avons besoin de comprendre cette réalité qui n’est pas facile. » “ Réalité ” qui n’est peut-être pas facile à comprendre, mais qui a peut-être, aux yeux du Pape, le singulier avantage d’entraîner cette assemblée synodale vers un certain esprit, celui des confessions orthodoxes... schismatiques !
Là encore, c’est notre Père qui nous donne la clef de compréhension des vraies intentions du Saint-Père. Dans son troisième Livre d’accusation dressé en 1993, il écrit à l’encontre du relativisme dogmatique dont fait preuve, par « flagornerie œcumaniaque », le prétendu Catéchisme de l’Église catholique à propos du filioque : « Notre CEC n’apprécie pas cette théologie trinitaire, tellement importante, d’où résulte que les missions du Verbe et du Saint-Esprit ne sont point conjointes ni identiques, mais complémentaires dans leur succession et subordination. Selon notre pure foi catholique et son expression latine explicite, l’Esprit-Saint agit suivant en tout Jésus-Christ, selon les lois et les progrès de l’évangélisation toujours gouvernée et réalisée par Lui dans les Apôtres et les Chefs de l’Église investis de son Pouvoir.
« Tandis que la théologie orthodoxe (schismatique) permet de prendre beaucoup de liberté dans la conception des œuvres de l’Esprit, sans doute entièrement dépendantes du Dieu-Père invisible, mais libérées des étroites limites visibles et historiques de la mission et de l’œuvre de Jésus-Christ, et de “ Jésus-Christ répandu et communiqué ” (Bossuet), à savoir l’Église. La vision grecque favorise le “ spontanéisme ”. »
Et c’est sans doute à ce spontanéisme tout à l’écoute d’un “ Esprit ”, libéré de l’œuvre de Jésus-Christ, que le Saint-Père invite tous les participants à ce synode pour jouer ensemble et joyeusement au “ peuple de Dieu ” – évêques, prêtres, pape, cardinaux, mais également religieux et laïcs, hommes et femmes confondus – pour revivre en toute liberté, égalité et communion fraternelle l’expérience des premiers chrétiens et retrouver l’idée prétendue perdue par « l’Église d’Occident » (sic !) de la synodalité.
Voilà où est rendu ce processus synodal commencé en 2021 et qui s’achèvera en 2024 ou en 2025 avec une nouvelle Exhortation apostolique dans laquelle le Saint-Père prendra en définitive seul – ce qui paradoxalement demeure notre espérance ! – les décisions pour toute l’Église. Il est inutile d’épiloguer sur le détail, par définition hypothétique, de ce qu’il décidera. En revanche, les funestes principes d’une Église synodale ont déjà été posés tout au long de ces dix dernières années et nous en aurons les conséquences, c’est certain... d’abord parce que la Sainte Vierge est outrageusement et ostensiblement mise de côté. Or il est impossible de dissocier l’Église de la Sainte Vierge pour prétendument mieux la réformer... sans violemment la lacérer... et la détruire. C’est ce qu’il nous faut maintenant bien comprendre.
CONCLUSIONS.
Dans une Lettre à mes amis numérotée 204 et datée du 13 mai 1965, notre Père écrivait : « L’Église est une communauté de foi, formée par l’œuvre d’autorité du magistère infaillible ; c’est précisément ce qui distingue cette société humaine de toute autre, qu’elle repose uniquement sur le lien sacré de la foi ecclésiastique. En dehors de la hiérarchie, d’autorité rivale ou ennemie il n’y a rien que le schisme et l’hérésie : les frontières du peuple chrétien sont d’abord et visiblement celles de la foi, enseignée par la hiérarchie et ouvertement tenue par les fidèles. C’est dire la nécessité, la dignité, la responsabilité de nos Pasteurs : tout l’être, la vie, l’ordre et la beauté de la communion catholique sont l’effet de leur ministère, vigilant, pur de tout alliage, lumière dans les ténèbres. Et je veux bien qu’au-delà de ses frontières, des multitudes soient invisiblement atteintes par le retentissement de la Parole de Dieu ou même éclairées directement par Lui. Mais cela ne change rien à un tel ordre, et la hiérarchie n’a rien à apprendre des “ Autres ” car elle seule interprète la Parole de Jésus sous l’assistance infaillible du Saint-Esprit. Et tous ceux que Dieu attire viennent à l’Église comme à la source même de la Lumière. Une telle doctrine – que nous professons – fait dépendre tout le sort de l’Église de l’enseignement dogmatique et moral, traditionnel, du Pape et des évêques. »
La première conclusion est d’abord de souligner l’enchaînement des conséquences logiques et prévisibles qu’entraînerait cette réforme synodale de l’Église si elle devait être confirmée par le Pape, ce qui demeure hypothétique. Ce serait la poursuite de la désacerdotalisation et de la déclergification au sein même de l’Église : la mission au lieu de la messe ! Le “ ministère ” du laïc au lieu du prêtre. Mais surtout, cette nouvelle hiérarchie faite d’assemblées collégiales aux niveaux paroissial, diocésain, national et universel et au sein desquelles serait pratiquée cette “ conversation dans l’Esprit ” marquerait l’arrêt de mort de la vérité de la foi catholique. Celle-ci cesserait d’être enseignée d’autorité par une hiérarchie qui seule jouit des dons du Saint-Esprit pour l’accomplissement d’une telle fonction. Tous les points de la doctrine catholique et de la discipline ecclésiastique seraient susceptibles d’être librement discutés démocratiquement, collégialement, collectivement, sous la motion d’un esprit qui ne pourrait qu’être celui de Satan, sous la férule de petites minorités agissantes et bien organisées pour faire chorus et avec lesquelles l’esprit de parti le plus sectaire, le compromis, la frénésie du changement, l’erreur et finalement l’hérésie l’emporteraient systématiquement sur la vertu, l’esprit de sacrifice et de pénitence, la vérité, la Tradition... et finalement sur la foi tout entière. Une Église synodale annulerait toute forme d’autorité, effacerait toute forme de frontière claire entre la vérité et l’erreur, anéantirait toute communauté de foi avec à la clef une confusion totale entre ceux qui sont dans l’Église de ceux qui sont en dehors d’elle... Bref ce serait la désintégration, la destruction de l’Église qui aujourd’hui ouverte à tous n’aurait demain plus aucune raison d’être.
La deuxième conclusion, elle, n’est pas hypothétique. Elle n’est pas un jugement, mais le constat objectif et motivé de ce que le pape François s’est clairement solidarisé et en toute connaissance avec les hérésies, schismes et scandales que notre Père avait dénoncés à l’encontre du cardinal Ratzinger promoteur du prétendu catéchisme publié en 1993, de Jean-Paul II et surtout de Paul VI avec lequel le parallèle est saisissant. Très différent pour ce qui est des caractères, François prolonge avec son rêve de fraternité universelle cet idéal de mouvement d’animation de la démocratie universelle. C’est l’hérésie personnelle du pape François, « la transposition en termes humanistes des merveilles de la grâce, de l’adoption filiale et de la Communion des Saints », écrivait notre Père à Paul VI dans son Livre d’accusation. Il ajoutait : « Vous dépouillez de tous ses biens l’Église du Christ pour en orner l’humanité “ civilisée ” d’aujourd’hui ”. »
Et cette hérésie conduit au schisme. D’abord le schisme affectif avec le mépris ouvert de François envers les catholiques fidèles à la foi traditionnelle de l’Église en les traitant, par exemple, de « marche-arriéristes » ou d’être « la foi morte des vivants ». Ensuite le schisme effectif contre l’Église elle-même avec ce voyage en 2022 au Canada où il a demandé pardon pour ce qu’il a ensuite qualifié de « génocide » et dont se seraient rendus coupables les saints missionnaires vis-à-vis des populations autochtones pour lesquelles, pourtant, ils ont consacré leurs vies entières pour le salut de leurs pauvres âmes. Et ce synode que conduit le Saint-Père montre qu’il ne discerne plus clairement le sacerdoce, ni même l’Église.
Que faut-il faire ? Dresser un nouveau livre d’accusation pour hérésie, schisme et scandale à l’encontre du Pape ? C’est absolument inutile.
En se solidarisant avec les papes Paul VI, Jean-Paul II et Benoît XVI, ce qui ne fait aucun doute, François est personnellement visé par les accusations portées de son vivant par notre Père. Et nous qui nous réclamons de l’abbé de Nantes, nous sommes en droit, sans “ autre forme de procès ”, de dénoncer le pape François dans ce funeste projet d’Église synodale qui la conduit à sa ruine. Dénoncer son erreur, comme nous le faisons, refuser son rêve d’Église synodale... et prier et se sacrifier pour lui pour obtenir sa conversion. Il demeure le Saint-Père !
Mais celui qui acquerrait aujourd’hui la conviction que le Pape est hérétique se doit de l’en accuser ouvertement. « Car du jour où il est intimement rebelle au Pape, explique notre Père, il est en rupture avec le Chef de l’Église et, s’il a tort, en péril de damnation. S’il se tait, par crainte ou par respect, mais persiste dans sa révolte occulte, il se damne sans bruit ! S’il a raison, sa charité envers l’Église lui fait un devoir d’en avertir ses frères. En toute hypothèse il doit parler ! » (La Contre-Réforme catholique n° 69, juin 1973, p. 11) À nul autre pareil, ce devoir appartient à tout évêque convaincu de l’hérésie et du schisme du Pape. « Il faut qu’un évêque, lui aussi successeur des Apôtres, membre de l’Église enseignante, rompe sa communion avec Lui tant qu’il n’aura pas fait la preuve de sa fidélité aux charges de son Suprême Pontificat. » Cinquante-huit années après la fin du concile Vatican II sans la moindre opposition de quiconque à l’exception remarquable de notre Père, se trouverait-il encore dans l’Église un évêque à la foi suffisamment vive pour se lever et mener un vrai combat de contre-réforme qui l’engagerait non pas seulement à adresser des dubia à l’attention du Saint-Père, mais à lui notifier une accusation canonique en hérésie, schisme et scandale ?
Notre espérance, à nous aujourd’hui, c’est le Cœur Immaculé de Marie, « sauvegarde de l’Église et des chrétiens ». Prier pour le Pape, prier pour sa conversion, c’est d’abord embrasser la dévotion réparatrice. Dévotion qui ne nous éloigne pas de notre combat de contre-réforme parce que cette dévotion, le Pape, beaucoup d’évêques et de prêtres n’en veulent pas alors que Dieu le veut. Notre Père était très impressionné par cette volonté de Dieu exprimé par Notre-Dame à Fatima le 13 juin 1917. « Dieu veut établir dans le monde la dévotion à mon Cœur Immaculé. »
Prions beaucoup pour le Saint-Père et embrassons résolument cette dévotion réparatrice au Cœur Immaculé par le triomphe duquel les portes de l’enfer ne pourront prévaloir sur notre Mère l’Église !
frère Pierre-Julien de la Divine Marie.