Il est ressuscité !

N° 197 – Avril 2019

Rédaction : Frère Bruno Bonnet-Eymard


Le Cœur Immaculé de Marie, chemin du Ciel

ATTENTIFS à la Parole de Dieu tombée de la bouche de sa divine Mère, au début du siècle dernier, nous avons entrepris de « la dire à tout le monde », selon les dernières recommandations faites à Lucie par sainte Jacinthe, avant de mourir. Parce que c’est une question de vie ou de mort ici-bas et au-delà !

Le vingtième siècle fut le champ clos du combat qui mit aux prises les deux créatures les plus antagonistes qui soient : le prince des enfers, Satan et ses armées, levés contre la toute pure et humble Immaculée Vierge Marie.

Les temps modernes, disait le Père Maximilien-Marie Kolbe, sont dominés par Satan et ils le seront encore davantage à l’avenir. L’Immaculée seule a reçu de Dieu la promesse de la victoire finale sur Satan.

La tragédie de ce grand combat fut révélée au Portugal, à Fatima en 1917. « En ces temps-là, raconte Lucie, on ne faisait plus le Mois de Marie à l’église paroissiale. Nous étions dans les premiers temps de la République. L’Église était persécutée. » Le Portugal est une Chrétienté préservée ; une nation catholique où les diaboliques ont pris le pouvoir en 1910. Les paysans y menaient une vie laborieuse, dure, mais aussi joyeuse, imprégnée d’une piété solide et d’une foi profonde. Ainsi dans les familles dos Santos et Marto.

L’année 1914 fut marquée par la mort de saint Pie X, prophète de la “ Guerre ”, la Guerrone, la Grande Guerre qu’il avait vue venir sur un monde rebelle à son Créateur et Rédempteur. L’enfer sur la terre ! Or, le mystère des révélations de Fatima a commencé de la façon la plus simple qui soit dès 1915, par la mystérieuse approche des anges, d’un Ange apparu, silencieux, à Lucie ; « bêtises d’enfant », prononça Maria Rosa en réponse à Lucie qui ne savait comment raconter.

L’ANGE PRÉCURSEUR

1916 : l’année fut marquée par trois apparitions très explicites de l’Ange à Lucie, François et Jacinthe au printemps, à l’été et à l’automne.

La première fois « nous étions en train de jouer depuis quelque temps, lorsqu’un vent violent secoua les arbres, et nous fit lever la tête pour voir ce qui arrivait, car le temps était serein. Nous aperçûmes alors, à une certaine distance, au-dessus des arbres qui s’étendaient du côté du levant, une lumière plus blanche que la neige, qui avait la forme d’un jeune homme de quatorze ou quinze ans. Elle était transparente, plus brillante qu’un cristal traversé par les rayons du soleil, et d’une grande beauté. À mesure que cette apparition approchait, nous distinguions mieux ses traits. Nous étions tout surpris, impressionnés, et nous ne disions mot.

« En arrivant près de nous, cet être mystérieux nous dit :

« “ Ne craignez pas ! Je suis l’Ange de la Paix. Priez avec moi ! ”

« Il s’agenouilla à terre et courba le front jus­qu’au sol. Poussés par un mouvement surnaturel, nous l’imitâmes, et nous répétâmes les paroles que nous lui entendions prononcer :

« “ Mon Dieu, je crois, j’adore, j’espère et je vous aime ! Je vous demande pardon pour ceux qui ne croient pas, qui n’adorent pas, qui n’espèrent pas, qui ne vous aiment pas ! ”

« Après avoir répété trois fois cette prière, il se releva et nous dit :

« “ Priez ainsi ! Les Cœurs de Jésus et de Marie sont attentifs à la voix de vos supplications. ”

« Et il disparut. »

« La deuxième apparition, écrit Lucie, a dû avoir lieu au cœur de l’été, pendant les jours de grande chaleur, alors que nous revenions avec le troupeau au milieu de la matinée, pour le sortir de nouveau sur le soir seulement. Nous passions alors les heures de la sieste à l’ombre des arbres qui entouraient le puits [de l’Arneiro]. Nous y étions en train de jouer.

« Soudain, raconte Lucie, nous vîmes le même Ange près de nous.

 Que faites-vous ? nous dit-il. Priez, priez beaucoup ! Les Saints Cœurs de Jésus et de Marie ont sur vous des desseins de miséricorde. Offrez sans cesse au Très-Haut des prières et des sacrifices.

 Comment devons-nous nous sacrifier ? de­mandai-je.

 De tout ce que vous pourrez, offrez à Dieu un sacrifice, en acte de réparation pour les péchés par lesquels Il est offensé, et de supplication pour la conversion des pécheurs. De cette manière, vous attirerez la paix sur votre patrie. Je suis son Ange gardien, l’Ange du Portugal. Surtout, acceptez et supportez avec soumission les souffrances que le Seigneur vous enverra.

« Ces paroles, raconte Lucie, étaient comme une lumière qui nous faisait comprendre qui est Dieu, combien Il nous aime et veut être aimé de nous, la valeur du sacrifice et combien celui-ci Lui est agréable, comment, par égard pour lui, Dieu ­convertit les pécheurs. C’est pourquoi, dès ce moment, nous avons commencé à offrir au Seigneur tout ce qui nous mortifiait, mais sans chercher à nous imposer d’autres mortifications ou pénitences, à l’exception des heures que nous passions, prosternés jusqu’au sol, à répéter la prière que l’Ange nous avait apprise. Nous restions longtemps prosternés, répétant cette prière parfois jusqu’à tomber de fatigue. »

La troisième apparition les trouva le visage contre terre, récitant la prière de l’Ange : “ Mon Dieu, je crois, j’adore, j’espère et je vous aime ! ” etc., raconte Lucie.

« Je ne sais combien de fois, nous avions répété cette prière lorsque nous vîmes briller au-dessus de nous une lumière inconnue. Nous nous sommes relevés pour voir ce qui se passait et nous avons revu l’Ange qui tenait dans sa main gauche un calice sur lequel était suspendue une Hostie de laquelle tombaient quelques gouttes de Sang dans le calice.

« Laissant le Calice et l’Hostie suspendus en l’air, il se prosterna près de nous jusqu’à terre et répéta trois fois cette prière :

« “ Très Sainte Trinité, Père, Fils et Saint-Esprit, je vous adore profondément, et je vous offre le très précieux Corps, Sang, Âme et Divinité de Jésus-Christ, présent dans tous les tabernacles de la terre, en réparation des outrages, sacrilèges et indifférences par lesquels Il est lui-même offensé. Par les mérites infinis de son très Saint Cœur et du Cœur Immaculé de Marie, je vous demande la conversion des pauvres pécheurs. ”

« Puis, se relevant, il prit de nouveau dans ses mains le Calice et l’Hostie. Il me donna la Sainte Hostie et partagea le Sang du calice entre François et Jacinthe en disant en même temps :

“ Mangez et buvez le Corps et le Sang de Jésus-Christ, horriblement outragé par les hommes ingrats. Réparez leurs crimes et consolez votre Dieu. ” »

L’année suivante, les six grandes apparitions de la Vierge Marie se succédèrent de mai à octobre 1917 :

DIMANCHE 13 MAI 1917

« La première apparition de Notre-Dame, raconte sœur Lucie, vint de nouveau nous plonger dans le surnaturel, mais d’une manière beaucoup plus suave que les apparitions de l’Ange. Au lieu de cet anéantissement en la divine présence, qui nous prostrait, même physiquement, celle-ci nous laissa une paix, une joie expansive qui ne nous empêchait pas de parler ensuite de ce qui s’était passé », comme d’un Évangile nouveau, une “ Bonne Nouvelle ” : promesse à Lucie et Jacinthe d’aller au Ciel, et François aussi, à condition qu’il « récite beaucoup de chapelets ». Promesse aussi d’avoir « beaucoup à souffrir », mais avec le réconfort de « la grâce de Dieu » (Il est ressuscité n° 196, mars 2019 p. 24).

Précédée d’un “ éclair ” qui brilla à deux reprises, « sur un petit chêne-vert, une Dame, toute vêtue de blanc, plus brillante que le soleil », apparut à Lucie, François et Jacinthe. Lucie prit la parole :

« D’où vient Votre Grâce ?

 Je suis du Ciel.

 Et que veut de moi Votre Grâce ?

 Je suis venue vous demander de venir ici pendant six mois de suite, le 13, à cette même heure. Ensuite, je vous dirai qui je suis et ce que je veux. Après, je reviendrai encore ici une septième fois.

 Et moi aussi, est-ce que j’irai au Ciel ?

 Oui, tu iras.

 Et Jacinthe ?

 Aussi.

 Et François ?

 Aussi, mais il devra réciter beaucoup de chapelets. »

Le lendemain, Lucie, s’aperçoit avec stupeur que Jacinthe a tout raconté à la table familiale.

« Qu’est-ce que tu leur as dit ?

 J’ai dit que Notre-Dame nous a promis de nous emmener au Ciel.

 Et tout de suite, tu es allée dire cela ?

 Pardonne-moi, je ne dirai plus rien à personne ! »

Et elle tiendra parole... Mais ce n’est pas encore cela “ le secret ” !

« Voulez-vous vous offrir à Dieu pour supporter toutes les souffrances qu’Il voudra vous envoyer, en acte de réparation pour les péchés par lesquels Il est offensé, et de supplication pour la conversion des pécheurs ?

 Oui, nous le voulons.

 Vous aurez alors beaucoup à souffrir, mais la grâce de Dieu sera votre réconfort.

« C’est en prononçant ces dernières paroles (la grâce de Dieu, etc.) que Notre-Dame ouvrit les mains pour la première fois et nous communiqua, comme par un reflet qui émanait d’elles, une lumière si intense que, pénétrant notre cœur et jusqu’au plus profond de notre âme, elle nous faisait nous voir nous-mêmes en Dieu, qui était cette lumière, plus clairement que nous nous voyons dans le meilleur des miroirs.

« Alors, par une impulsion intime qui nous était commu­niquée, nous tombâmes à genoux et nous répétions intérieu­rement : “ Ô Très Sainte Trinité, je Vous adore. Mon Dieu, mon Dieu, je Vous aime dans le Très Saint-Sacrement. ” »

Cette prière résume toute notre religion révélée par les trois apparitions de l’Ange en 1916. Depuis, les enfants vivent en présence du Père, du Fils et du Saint-Esprit, et brûlent d’amour du Corps et du Sang de Jésus auxquels ils ont communié.

« Les premiers moments passés, Notre-Dame ajouta :

 Récitez le chapelet tous les jours afin d’obtenir la paix pour le monde et la fin de la guerre. »

MERCREDI 13 JUIN 1917

Le mois suivant, « après avoir récité le chapelet avec Jacinthe, François et une cinquantaine d’autres personnes qui étaient présentes, raconte Lucie, nous vîmes de nouveau le reflet de la lumière qui s’approchait, ce que nous appelions “ l’éclair ”, et ensuite, Notre-Dame sur le chêne-vert, tout comme au mois de mai ». Un témoin dira que « les branches de l’arbuste ployèrent en rond de tous les côtés, comme si le poids de Notre-Dame avait réellement porté sur elles ». Plutôt que “ comme si ”, il vaudrait mieux dire parce que le poids du corps glorieux de Notre-Dame pesait en toute vérité sur ces branches du chêne-vert où Elle posait les pieds.

La différence entre l’impression d’ « anéantissement » laissée aux enfants par l’apparition de l’Ange et ses révélations, et la « paix », la « joie expansive » laissées par celle de Notre-Dame, est comparable à la différence entre le jour et la nuit, dans notre vie religieuse, entre l’office de nuit, à matines, et celui du lever du jour, à laudes et prime.

À matines, Dieu est présent, mais dans la nuit de la foi, dont témoigne notre Père pour l’avoir vécue lui-même en récitant l’office divin :

« Quel soleil noir que le tien ! Que tu existes, voilà certes la chose du monde la mieux avérée. Le mystère de ton être, dans cette certitude, pénètre et envahit tout l’univers. Tu es le soleil à la lumière duquel se trouvent manifestées toutes les beautés et les vérités du monde.

« Mais Toi-même, pourquoi demeures-tu caché au sein de ta Nuée, pourquoi cette absence, ce silence, cette cruelle, cette mortelle indifférence à nos maux, à nos cris, à nos larmes ? » (Georges de Nantes, Page mystique n° 64, février 1974)

Le 13 juin 1917, parut une lumière nouvelle sur notre monde. Le « reflet de cette lumière immense » qui est Dieu « avait pour but principal de mettre en nous une connaissance et un amour spécial envers le Cœur Immaculé de Marie », explique Lucie.

Qu’est donc ce culte nouveau ?

« Que veut de moi Votre Grâce ? demandai-je.

– Je veux que vous veniez ici le 13 du mois prochain, que vous disiez le chapelet tous les jours et que vous appreniez à lire. Ensuite, je vous dirai ce que je veux.

« Je demandai la guérison d’un malade.

– S’il se convertit, il sera guéri durant l’année.

– Je voudrais vous demander de nous emmener au Ciel.

– Oui, Jacinthe et François, je les emmènerai bientôt, mais toi, Lucie, tu resteras ici pendant un certain temps. Jésus veut se servir de toi afin de me faire connaître et aimer. Il veut établir dans le monde la dévotion à mon Cœur Immaculé. À qui embrassera cette dévotion, je promets le salut, ces âmes seront chéries de Dieu, comme des fleurs placées par moi pour orner son trône.

– Je vais rester ici toute seule ? demandai-je avec peine.

– Non, ma fille. Tu souffres beaucoup ? Ne te décourage pas, je ne t’abandonnerai jamais ! Mon Cœur Immaculé sera ton refuge et le chemin qui te conduira jusqu’à Dieu.

« Ce fut au moment même où Elle prononça ces dernières paroles qu’Elle ouvrit les mains et nous communiqua, pour la deuxième fois, le reflet de cette lumière immense. En Elle, nous nous vîmes comme submergés en Dieu. Jacinthe et François paraissaient être dans la partie de cette lumière qui s’élevait vers le Ciel, et moi dans celle qui se répandait sur la terre.

« Devant la paume de la main droite de Notre-Dame se trouvait un Cœur entouré d’épines qui s’y enfonçaient. Nous avons compris que c’était le Cœur Immaculé de Marie, outragé par les péchés de l’humanité, qui demandait réparation.

« Il me semble que ce jour-là, écrit Lucie, ce reflet avait pour but principal de mettre en nous une connaissance et un amour spécial envers le Cœur Immaculé de Marie ; de même que les deux autres fois, il avait eu ce même but, mais par rapport à Dieu et au mystère de la très Sainte Trinité. Depuis ce jour, nous sentîmes au cœur un amour plus ardent envers le Cœur Immaculé de Marie. »

Ce que les enfants ont reçu de manière “ infuse ”, nous pouvons, nous aussi, le recevoir de manière “ acquise ”, à leur école, et éprouver alors « un plus grand amour envers le Cœur Immaculé de Marie ». Qu’est donc cette nouveauté ?

Tout commence par un acte de foi, celui-là même que l’Ange apprit aux enfants lors de la première apparition, au printemps 1916 : « Mon Dieu, je crois, j’adore, j’espère et je vous aime. »

« Père très bon, je crois ! Ce matin radieux, la joyeuse lumière de votre Parole infaillible illumine tous les êtres de votre création et les transfigure. Au-delà de la matérialité comme inerte de leur nature ordinaire, un amour nouveau les revêt pour moi de splendeur. C’est une vie de l’au-delà qui les emplit, au point qu’elles me paraissent près de tressaillir, comme chante le psaume, pour votre unique louange. C’est trop de joie... Leur être, leur beauté m’assurent de votre nécessaire existence, et tandis qu’elles toutes auraient pu ne pas être, ni moi, puisque vous existez nous sommes conduits à cette écrasante vérité que, de toute éternité, vous êtes nécessairement, et tel que vous voulez être, ô Vous, le seul Être qui soit à lui-même Cause de sa propre nature et de sa propre vie ! Déjà cette certitude me jette dans l’ado­ration. » (Georges de Nantes, Pages mystiques : “ Mon Dieu, c’est trop de joie ! ” juin 1971)

Lucie, François et Jacinthe aussi ! avec l’Ange agenouillé à terre et courbant le front jusqu’au sol : « Poussés par un mouvement surnaturel, nous l’imitâmes, et nous répétâmes les paroles que nous lui entendions prononcer :

« Mon Dieu, je crois, j’adore, j’espère et je vous aime. Je vous demande pardon pour ceux qui ne croient pas, qui n’adorent pas, qui n’espèrent pas, qui ne vous aiment pas. »

« Après avoir répété trois fois cette prière, il se releva et nous dit : “ Priez ainsi ! Les Cœurs de Jésus et de Marie sont attentifs à la voix de vos supplications. ” »

Pourquoi « les Cœurs de Jésus et de Marie » ? Soyons attentifs à notre tour. L’amour premier que notre Créateur nous porte lorsqu’il nous pose dans l’être par amour, « s’obstine » en se faisant pardon et miséricorde, pour nous réconcilier avec lui, nous misérables pécheurs. Il nous envoie son propre Fils dans une nature semblable à la nôtre et fraternelle, “ cordiale ”.

« Dès ce moment de sa conception, écrit l’abbé de Nantes en s’adressant à “ notre très chéri Père Céleste ”, un cœur d’homme bat au rythme de votre Amour infini et ce Cœur Sacré désolé par nos ingratitudes nous rend votre Paternité sensible au cœur. Ce divin Cœur porte, par la violence de ses pulsations, le Sang de sa vie et la grâce de son Amour jusqu’où il veut, de son vouloir d’homme fraternel, aller. C’est, au centre du monde, une source jaillissante de vie éternelle. Vidi aquam egredientem a latere dextro...

« Où vont la première tendresse et le premier flot du Sang de ce Cœur ? Ce Dieu fait homme aime une femme. La rencontre des mots, de ces très vieux mots usés, malmenés, d’amour d’homme et de femme, nous ramène au premier paradis de l’humanité, avant toutes nos misères, comme aux premiers jours candides de notre vie quand l’univers était pour nous le visage et le sein d’une mère. Ô dessein merveilleux de votre Sagesse paternelle, Jésus voit d’abord et il verra toujours, jusqu’à l’heure suprême de sa mort sur la Croix, l’humanité tout entière et toute sa création qu’il vient sauver à travers ce visage féminin, comme baignées dans cette tendresse virginale et maternelle.

« Ô joie, notre race malheureuse eut d’abord pour votre Fils bien-aimé la douceur et le charme de cette fille de Sion et ce regard chaste et joyeux dont elle enveloppait cet enfant qu’elle allaitait de son sein. Et lui, pressant ce sein de sa menotte en un geste gracieux, choisissait d’instinct cette Mère pour coadjutrice future de toute son œuvre et pour reine de tout son domaine éternel. Un Dieu fait homme, et qui reçoit de son Père une Vierge Immaculée pour lui être une aide sem­blable à lui, Ève supérieure, en voilà assez pour reconstruire l’œuvre de la première création d’une manière plus admi­rable et plus sûre. J’adore et j’aime ce mystère trinitaire qui affleure en nos existences. » (“ Mon Dieu, c’est trop de joie ! ” p. 162-163)

Les voyants de Fatima, eux, sont jetés dans la profondeur de ce mystère dès la troisième apparition de l’Ange à l’automne 1916, jusqu’où ? Jusque dans son prolongement eucharistique et rédempteur, par l’Immaculée Conception qui a donné « Corps » et « Sang » rédempteurs au Verbe « fait chair » :

« Très Sainte Trinité, Père, Fils et Saint-Esprit, je vous adore profondément, et je vous offre le très précieux Corps, Sang, Âme et Divinité de Jésus-Christ, présent dans tous les tabernacles de la terre, en réparation des outrages, sacrilèges et indifférences par lesquels Il est lui-même offensé. Par les mérites infinis de son très Saint Cœur et du Cœur Immaculé de Marie, je vous demande la conversion des pauvres pécheurs. » Soyez attentifs à la voix de nos supplications selon la parole de l’Ange...

Mais c’est lors de sa deuxième apparition, du mercredi 13 juin 1917, que Marie révèle à Lucie le dessein divin et lui annonce sa vocation, qui est aujourd’hui la nôtre :

« Tu resteras ici pendant un certain temps. Jésus veut se servir de toi afin de me faire connaître et aimer. Il veut établir dans le monde la dévotion à mon Cœur Immaculé. À qui embrassera cette dévotion, je promets le salut », c’est-à-dire de les emmener au Ciel, comme François et Jacinthe.

« Ces âmes seront chéries de Dieu, comme des fleurs placées par moi pour orner son trône. »

Et moi, pendant ce temps-là :

« Je vais rester ici toute seule ?

 Non, ma fille. Tu souffres beaucoup ? Ne te décourage pas. Je ne t’abandonnerai jamais ! Mon Cœur Immaculé sera ton refuge et le chemin qui te conduira jusqu’à Dieu.

« Ce fut au moment où elle prononça ces dernières paroles qu’elle ouvrit les mains et nous communiqua, pour la deuxième fois, le reflet de cette lumière immense » qui est Dieu et l’amour de ce Dieu dans le Très Saint-Sacrement de l’autel.

« Devant la paume de la main droite de Notre-Dame se trouvait un Cœur entouré d’épines qui semblaient s’y enfoncer. Nous avons compris que c’était le Cœur Immaculé de Marie, outragé par les péchés de l’humanité, qui demandait réparation. »

Le fruit de cette vision du 13 juin fut donc une connaissance intime et un ardent amour du Cœur Immaculé de Marie entrant dans l’humanité pécheresse, révoltée contre son Créateur :

« Jacinthe me disait de temps en temps : “ Notre-Dame a dit que son Cœur Immaculé serait ton refuge et le chemin qui te conduirait jusqu’à Dieu. N’aimes-tu pas cela beaucoup ? Moi, j’aime tant son Cœur. Il est si bon ! ” »

PREMIERES ATTAQUES DU DÉMON.

Dès le lendemain de la révélation du Cœur Immaculé de Marie, le 14 juin, le démon contre-­attaquait... d’une flèche qui transperçait le cœur de Lucie.

Le curé de Fatima, après avoir interrogé les enfants, prononçait :

« Cela pourrait être une tromperie du démon. Nous allons voir. L’avenir nous dira ce que nous devons en penser. »

Pour Jacinthe, c’était tout vu : « Non, ce n’est pas le démon, non ! On dit que le démon est très laid et qu’il est en dessous de la terre, en enfer. Cette Dame est si belle ! Et nous l’avons vue monter au Ciel ! »

Mais Lucie n’imaginait pas que monsieur le Curé pût se tromper ! « Je commençais à éprouver des doutes au sujet de ces manifestations. Serait-ce le démon qui essayait par ces moyens de me perdre ? »

Pour mettre le comble à son tourment, celui-ci lui apparut dans un rêve :

« Je vis le démon qui, riant de m’avoir trompée, faisait des efforts pour m’entraîner en enfer. En me voyant entre ses griffes, je commençai à crier si fort en appelant Notre-Dame que je réveillai ma mère. »

Première agonie de Lucie qui en connaîtra bien d’autres.

Tandis que Jacinthe disait : « Ah ! si je pouvais mettre dans tous les cœurs le feu que j’ai là, dans ma poitrine, et qui me brûle et me fait tant aimer le Cœur de Jésus et le Cœur de Marie ! »

Cet incendie allumé sur la terre n’est pas éteint malgré tous les efforts du démon, et il nous atteint aujourd’hui :

« Moi-même, écrit notre Père, perdu comme un néant et un misérable parmi des milliards de frères humains, lointainement lié par la parenté universelle des fils d’Adam à Jésus et à Marie, voilà que parvient jusqu’à moi l’onde d’un Sang vermeil émanée de ce Cœur d’homme sauveur et de ce Cœur de femme virginal et maternel, oui ! jusqu’à moi, en vertu de cette parenté dans la chair qui les lie à moi, voilà que m’atteint cette grâce de salut, cet amour, que dans leur esprit de famille ils me gardent comme à un fils et à un frère. Oh, que je suis heureux, je n’ai pas été oublié ! Par eux, mon Rédempteur et son admirable coadjutrice, me voici remis en union avec vous, ô Père très clément. Par eux me voici rempli de l’Esprit-Saint et devenu membre vivant de ce Corps mystique que leur grâce entraîne sur le chemin de la résurrection bienheureuse. Mais ce qui me bouleverse, c’est ce toucher divin, d’une Chair et d’un Sang précieux, dans ma chair. Un feu m’a envahi. Purification par ce feu, illumination par ce feu, immolation par ce feu, béatitude dans ce feu ! » (“ Mon Dieu, c’est trop de joie ! ” p. 163-164)

Ce n’est donc pas fini, ce n’est que le commencement d’une mort et d’une renaissance de l’Église et de la Chrétienté tout entière, au prix du terrible combat qui s’engage.

VENDREDI 13 JUILLET 1917 :

Le vendredi 13 juillet 1917, la Très Sainte Vierge descendait du Ciel une troisième fois, fidèle au rendez-vous. Monsieur le curé de Fatima ayant dit que « ce pouvait être le démon », Lucie était bien décidée à ne pas y aller... cédant ainsi à la tentation qui aurait précisément fait les affaires du démon ! Mais le matin, « quand approcha l’heure à laquelle je devais partir, rapporte Lucie, je me sentis soudainement poussée à y aller par une force étrange à laquelle il m’était très difficile de résister. Je me mis alors en chemin et je passai par la maison de mon oncle pour voir si Jacinthe était encore là. Je la trouvai dans sa chambre avec son petit frère François, à genoux au pied du lit et pleurant.

« Vous n’y allez pas ? demandai-je.

 Sans toi, nous n’osons pas y aller. Allons, viens !

 Eh bien ! j’y vais, leur répondis-je.

« Alors, le visage joyeux, ils partirent avec moi. »

Ti Marto, lui, avait résolu de se trouver auprès de ses enfants. La chaleur était torride, et l’on se protégeait du soleil avec les parapluies. « Je me trouvai donc tout près de ma Jacinthe. Lucie, agenouillée un peu plus en avant, récitait le chapelet, et tous répondaient à haute voix. Le chapelet terminé, elle se leva si rapidement qu’elle ne sembla pas agir d’elle-même. Elle regarda vers le levant et s’écria :

 Fermez les parapluies ! Fermez les parapluies ! »

Ils servaient d’ombrelles, car il était midi et la chaleur était accablante...

« Notre-Dame arrive ! »

« Pour moi, avoue Ti Marto, j’avais beau regarder, je ne voyais rien. Cependant, en faisant plus attention, je vis comme un léger nuage cendré, qui planait sur le chêne-vert. Le soleil s’obscurcit, et l’on sentit un souffle frais, agréable. Il ne semblait plus que nous étions au plus fort de l’été. La foule était tellement silencieuse qu’on en était impressionné.

« Alors, je commençai à entendre un son, un bourdonnement, quelque chose comme le bruit que ferait une grosse mouche dans une cruche vide. Mais je n’entendais aucune parole. »

Tous purent constater que le jour s’assombrissait, comme au moment d’une éclipse, tout le temps que dura l’extase des enfants. Tandis que la température diminuait sensiblement et que la teinte de la lumière se modifiait, l’atmosphère devint jaune d’or et une nuée blanchâtre, fort agréable à voir, enveloppa les voyants.

Lucie demeurait absorbée dans sa contemplation, comme en extase. Alors, Jacinthe intervint :

« Allons, Lucie, parle ! Ne vois-tu pas qu’Elle est déjà là et qu’Elle veut te parler ? »

Humblement, comme pour implorer son pardon d’avoir douté, Lucie demanda une fois de plus :

« Que veut de moi Votre Grâce ?

– Je veux que vous veniez ici le 13 du mois qui vient, que vous continuiez à réciter le chapelet tous les jours en l’honneur de Notre-Dame du Rosaire, pour obtenir la paix du monde et la fin de la guerre, parce qu’Elle seule pourra vous secourir. »

C’est dire que cette Première Guerre mondiale est une Croisade, car le nom de « Notre-Dame du Rosaire » fut donné par Grégoire XIII à Notre-Dame de la Victoire dont la fête avait été instituée par saint Pie V en action de grâces pour la victoire de Lépante contre les Turcs (7 octobre 1571).

Pensant à sa mère et à monsieur le Curé qui doutaient, Lucie dit :

« Je voudrais vous demander de nous dire qui vous êtes, et de faire un miracle afin que tous croient que Votre Grâce nous apparaît.

– Continuez à venir ici tous les mois. En octobre, Je dirai qui Je suis, ce que Je veux, et Je ferai un miracle que tous verront pour croire.

« Sacrifiez-vous pour les pécheurs, et dites souvent à Jésus, spécialement lorsque vous ferez un sacrifice :

« “ Ô Jésus, c’est par amour pour vous, pour la conversion des pécheurs, et en réparation des péchés commis contre le Cœur Immaculé de Marie. ” »

« L’ENFER OÙ VONT LES ÂMES DES PAUVRES PÉCHEURS »

« En disant ces dernières paroles, elle ouvrit de nouveau les mains, comme les deux derniers mois. Le reflet de la lumière parut pénétrer la terre et nous vîmes comme un océan de feu. Nous voyions les démons et les âmes des damnés plongés dans ce feu. »

Comment douter de cette révélation terrifiante de l’enfer éternel ? Ce qu’ils ont vu, de leurs yeux vu, saint Jean l’a décrit dans l’Apocalypse (19, 20 ; 20, 10). La description de Lucie est implacable :

Les âmes damnées « étaient comme des braises transparentes, noires ou bronzées, ayant formes humaines. Elles flottaient dans cet incendie, soulevées par les flammes qui sortaient d’elles-mêmes, avec des nuages de fumée. Elles retombaient de tous côtés, comme les étincelles dans les grands incendies, sans poids ni équilibre, au milieu des cris et des gémissements de douleur et de désespoir qui horrifiaient et faisaient trembler de frayeur. C’est à la vue de ce spectacle que j’ai dû pousser ce cri : “ Aïe ! ” que l’on dit avoir entendu de moi. Les démons se distinguaient des âmes des damnés par des formes horribles et répugnantes d’animaux effrayants et inconnus, mais transparents comme de noirs charbons embrasés. »

La description est conforme à ce que vit Benoîte Rencurel, au dix-septième siècle :

« Une fois, les démons portèrent Benoîte dans les enfers, où elle vit une infinité de personnes de sa connaissance, qu’elle voyait depuis l’estomac, le reste du corps étant dans les flammes. » (Père Ludovic Frère, Suivez le chemin du Laus, 2014, p. 52)

À Fatima, « cette vision ne dura qu’un moment, grâce à notre bonne Mère du Ciel qui, à la première apparition, nous avait promis de nous emmener au Ciel. Sans quoi, je crois que nous serions morts d’épouvante et de peur. »

Jadis, au Laus, Benoîte « y était peu demeurée que deux anges vinrent la retirer de là et l’emporter chez elle, ce qui la consola grandement. Ils lui dirent que Dieu avait permis cela afin qu’elle eût de la compassion pour les pécheurs. L’Ange lui dit aussi : “ Vous avez vu, ma fille, ces flammes et ces feux ! Cette personne que vous savez, viendra là, ma fille. Avertissez-la bien de cela afin qu’elle en profite et qu’elle évite ces peines. ” » (ibid.)

À Fatima, c’est la Reine des anges en Personne qui, de ses mains lumineuses, a ouvert l’abîme aux yeux de Lucie, François et Jacinthe.

« Effrayés, et comme pour demander secours, nous levâmes les yeux vers Notre-Dame qui nous dit avec bonté et tristesse », et une expression douloureuse du regard qui impressionna Lucie plus vivement encore que la vision terrifiante elle-même :

« “ Vous avez vu l’enfer où vont les âmes des pauvres pécheurs. Pour les sauver, Dieu veut établir dans le monde la dévotion à mon Cœur Immaculé. ” »

LE SALUT.

« Si l’on fait ce que je vais vous dire, beaucoup d’âmes se sauveront et l’on aura la paix. »

Une note récente de la Congrégation pour la doctrine de la foi révèle que le Vatican ne sait plus de quoi l’homme doit être « sauvé » ! C’est pourquoi la Sainte Vierge descend du Ciel pour le rappeler par cette terrifiante vision de l’enfer dont trois enfants furent les témoins il y a cent ans, en prévision de cette formidable apostasie de la fin des temps. Il est donc urgent d’écouter ce que propose la belle Dame, d’en faire le plus grand cas. Ceux qui nous en ont dissuadés sont responsables des épouvantables malheurs du siècle dernier, annoncés en toutes lettres ce 13 juillet 1917, en pleine guerre :

« La guerre va finir. Mais si l’on ne cesse d’offenser Dieu, sous le règne de Pie XI, en commencera une autre pire. Quand vous verrez une nuit illuminée par une lumière inconnue, sachez que c’est le grand signe que Dieu vous donne qu’il va punir le monde de ses crimes, par le moyen de la guerre, de la famine et des persécutions contre l’Église et le Saint-Père.

« Pour empêcher cela, je viendrai demander la consécration de la Russie à mon Cœur Immaculé et la Communion réparatrice des premiers samedis. Si l’on écoute mes demandes, la Russie se convertira et l’on aura la paix»

Mais Pie XI n’a rien voulu entendre.

« Sinon elle répandra ses erreurs à travers le monde, provoquant des guerres et des persécutions contre l’Église. Les bons seront martyrisés, le Saint-Père aura beaucoup à souffrir, plusieurs nations seront anéanties. »

« Notre-Dame nous a proposé ce jour-là, écrit l’abbé de Nantes, théologien de Fatima après le Père Alonso, une alliance de son Fils Jésus-Christ, Dieu, avec les hommes, alliance fille de la nouvelle et éternelle alliance scellée à jamais dans le Sang de l’Agneau et dans la foi indéfectible de son Église-Épouse, vraie fille d’Abraham et légitime détentrice de ses promesses.

« Alliance contractuelle, traité inégal où il est peu demandé à la créature et beaucoup promis, si toutefois elle se montre fidèle à son Sauveur et dévouée à la Médiatrice de cet accord, appliquée à satisfaire toutes leurs demandes et loyale dans ce service. C’est un minimum ! en échange duquel paix sur terre et gloire dans le Ciel seront notre récompense. »

La révélation du 13 juillet 1917 marque une nouvelle étape dans l’histoire de l’Église. Désormais, les affaires de ce siècle sont conduites d’En-Haut par Dieu selon les engagements de cette alliance, comme les avatars du peuple hébreu le furent selon l’Alliance mosaïque, et comme les bonheurs et les malheurs de la Chrétienté, de la France “ fille aînée de l’Église ”, résultent de leur fidélité ou de leurs manquements au pacte de Reims, loi de Jésus-Christ leur Chef et leur mystique Époux.

Ce contrat d’alliance est scellé par le plus extraordinaire miracle de tous les temps, annoncé le 13 juillet, trois mois à l’avance, « un miracle que tous verront pour croire ». Désormais, c’est une course de vitesse entre la Vierge et le démon qui ne se laisse pas écraser la tête sans la “ mordre au talon ”...

« À la fin mon Cœur Immaculé triomphera. Le Saint-Père me consacrera la Russie qui se convertira, et il sera donné au monde un certain temps de paix. Au ­Portugal se conservera toujours le dogme de la foi. »

Mais auparavant, avant « la fin », si l’on n’écoute pas les demandes de Notre-Dame ? Voici ce qui arrivera. Les enfants en ont eu la vision prophétique ce même 13 juillet 1917 :

« Nous vîmes à gauche de Notre-Dame, un peu plus haut, un Ange avec une épée de feu à la main gauche ; elle scintillait, émettait des flammes qui paraissaient devoir incendier le monde ; mais elles s’éteignaient au contact de l’éclat que, de sa main droite, Notre-Dame faisait jaillir vers lui ; l’Ange, désignant la terre de sa main droite, dit d’une voix forte :

“ Pénitence, Pénitence, Pénitence ! ”

« Et nous vîmes dans une lumière immense qui est Dieu “ quelque chose de semblable à l’image que renvoie un miroir quand une personne passe devant ” : un Évêque vêtu de Blanc. “ Nous eûmes le pressentiment que c’était le Saint-Père. ”

« Plusieurs autres Évêques, prêtres, religieux et religieuses gravissaient une montagne escarpée, au sommet de laquelle était une grande Croix de troncs bruts comme si elle était en chêne-liège avec l’écorce [« Sur la Croix, il y avait le Christ », précisera sœur Lucie]. Le Saint-Père, avant d’y arriver, traversa une grande ville à moitié en ruine et, à moitié tremblant, d’un pas vacillant, affligé de douleur et de peine, il priait pour les âmes des cadavres qu’il trouvait sur son chemin. Parvenu au sommet de la montagne, prosterné à genoux au pied de la grande Croix, il fut tué par un groupe de soldats qui lui tirèrent plusieurs coups et des flèches. Et de la même manière moururent les uns après les autres les Évêques, prêtres, religieux et religieuses, et divers laïcs, des messieurs et des dames de rangs et de conditions différentes.

« Sous les deux bras de la Croix, il y avait deux Anges, chacun avec un vase de cristal à la main, dans lequel ils recueillaient le sang des martyrs, et avec lequel ils arrosaient les âmes qui s’approchaient de Dieu. »

Ainsi s’achève le grand “ Secret ”.

Notre-Dame ajouta :

« Cela, ne le dites à personne. À François, oui, vous pouvez le dire. Quand vous récitez le chapelet, dites après chaque mystère :

“ Ô mon Jésus, pardonnez-nous, sauvez-nous du feu de l’enfer, attirez au Ciel toutes les âmes, surtout celles qui en ont le plus besoin. ”

« Il y eut un instant de silence et je demandai :

 Votre Grâce ne me demande-t-elle rien de plus ?

 Non. Aujourd’hui je ne te demande rien de plus.

« Et, comme d’habitude, elle commença à s’élever en direction du levant jusqu’au moment où elle disparut dans l’immensité du firmament.

« Enfin, dit encore Ti Marto, après que Lucie eut interrogé la Vision pour la dernière fois, on entendit comme un grand coup de tonnerre, et le portique, qu’on avait planté là pour y accrocher deux petites lanternes, trembla tout entier, comme s’il y avait eu un tremblement de terre. Lucie, qui était encore à genoux, se leva, et se tourna si vite que sa jupe se souleva comme un ballon. Et elle s’écria, en montrant le ciel : “ Elle s’en va ! Elle s’en va ! ” Et après quelques instants : “ On ne la voit déjà plus. ” »

13 AOÛT : LE RENDEZ-VOUS EMPÊCHÉ

Le vendredi 10 août 1917, Manuel Marto et Antonio dos Santos furent convoqués avec leurs enfants par Oliveira, président fondateur de la loge maçonnique de Vila Nova de Ourem, administrateur du canton, dénommé le “ Ferblantier ”. Seul Antonio se présenta avec sa fille. Celle-ci raconte :

« L’Administrateur voulait à tout prix que je lui révèle le Secret, et que je lui promette de ne plus jamais retourner à la Cova da Iria. Il n’épargna pas les promesses et, à la fin, les menaces. Voyant qu’il ne pouvait rien obtenir, il me renvoya, protestant que, de toute manière, il obtiendrait ce qu’il voulait, même s’il fallait m’ôter la vie. »

Finalement, le matin du 13 août, le Ferblantier se présenta à Aljustrel et emmena les enfants chez monsieur le Curé pour un nouvel interrogatoire. Comme Lucie persistait à dire ce qu’elle avait vu de ses yeux vu et ce que Notre-Dame lui avait dit, l’impie conclut avec une feinte conviction : « Ce sont là des choses surnaturelles » et fit monter les enfants dans sa voiture pour les emmener à Vila Nova de Ourem, afin de les séquestrer chez lui à l’heure de midi.

Pendant ce temps, la foule attendait les voyants. Quand quelqu’un annonça leur enlèvement, il s’éleva un brouhaha qui aurait tourné à l’émeute si, soudain, un coup de tonnerre n’avait retenti, suivi d’un éclair auquel succéda un petit nuage de couleur blanche, très léger, qui plana quelques instants au-dessus du chêne-vert, où se tenait la Sainte Vierge pour parler aux enfants... qui n’étaient pas là ! puis s’éleva vers le Ciel et disparut dans les airs.

La Sainte Vierge était donc venue ! Le coup de tonnerre et le petit nuage qui lui sert de véhicule sont présents dans le récit de son Assomption, Dormitio ou Transitus Mariæ ; il ne faut donc plus qualifier de “ légendaire ” ce récit antique qui témoigne de ce dont nous avons eu le spectacle sous nos yeux deux mille ans après.

Mais surtout, la Vierge miséricordieuse ne se montre même pas offensée par l’outrage du rendez-vous manqué ! Elle récrée ses fidèles pour qu’ils n’en fassent pas un malheur ! « En regardant alors autour de nous, nous observâmes une chose étrange que nous devions voir encore dans la suite. Les visages des gens avaient toutes les couleurs de l’arc-en-ciel, rose, rouge, bleu ; les arbres ne paraissaient pas avoir des rameaux et des feuilles, mais seulement des fleurs. »

Cette transfiguration de toutes les choses de notre existence est un avant-goût du paradis. Le paradis est comme la terre, mais absolument transfiguré. « Je suis du Ciel », disait cette Dame de lumière, le 13 mai. Nous serons, nous aussi, du “ Ciel ”, comme Elle, si nous lui obéissons comme des enfants, si nous avons la dévotion à son Cœur Immaculé.

En attendant, les enfants s’offrent au martyre. Les menaces que leur fait le Ferblantier, et cette prison dans laquelle il les a jetés, c’est sérieux ! Jacinthe pleure parce qu’elle ne pourra pas dire adieu à sa maman avant de mourir. Mais ils n’hésitent pas une seconde !

LE DIMANCHE 19 AOÛT : AUX VALINHOS.

Le dimanche 19 août, Lucie, François ainsi que son frère Jean, prirent le chemin des Valinhos, pour mener paître leurs troupeaux. Jacinthe, pour sa part, avait été retenue par sa mère. Vers 4 heures de l’après-midi, Lucie observa dans l’atmosphère les changements qui précédaient les apparitions de Notre-Dame. Elle fit appel à Jean : « Va vite chercher Jacinthe ! Je te donne deux “ vintems ” si tu me la ramènes ! En voici déjà un, et je te donnerai l’autre quand tu reviendras. »

Au premier éclair avait succédé un second. À ce moment même, Jacinthe arriva avec son frère. Notre-Dame se montra alors au-dessus d’un chêne-vert un peu plus élevé qu’à la Cova da Iria.

Quelle surprise, quelle joie de la revoir après le rendez-vous manqué du 13 août !

« Que veut de moi Votre Grâce ?

 Je veux que vous continuiez d’aller à la Cova da Iria le 13, que vous continuiez de réciter le chapelet tous les jours. Le dernier mois, je ferai le miracle afin que tous croient. Si l’on ne vous avait pas emmenés à la ville, le miracle aurait été plus connu. »

Ce miracle promis – « afin que tous croient » –, Notre-Dame prévient d’avance qu’il ne pourra pas être aussi éclatant, par la faute du Ferblantier qui avait tenté de l’empêcher plutôt que d’ouvrir les yeux sur la vérité des apparitions.

« Saint Joseph viendra avec l’Enfant-Jésus, pour donner la paix au monde. Notre-Seigneur viendra bénir le peuple. Viendra aussi Notre-Dame du Rosaire et Notre-Dame des Douleurs. »

Parce que c’est par Elle que saint Joseph et l’Enfant-Jésus donneront la paix au monde, par le Cœur Douloureux et Immaculé de Marie Victorieuse de toutes les hérésies.

JEUDI 13 SEPTEMBRE

Dès l’aube, toutes les routes menant à Fatima étaient noires de monde. On dénombra ce jour-là entre vingt-cinq mille et trente mille personnes. La plupart des pèlerins récitaient pieusement leur chapelet.

« Quand le moment fut venu, je m’en allai là-bas avec Jacinthe et François, au milieu des nombreuses personnes qui nous laissaient à peine avancer et qui, toutes, voulaient nous voir et nous parler. Il n’y avait aucun respect humain. Beaucoup de gens du peuple, et même des dames et des messieurs, fendant la foule qui se pressait autour de nous, venaient s’agenouiller devant nous, en nous priant de présenter à Notre-Dame leurs intentions. D’autres, qui ne parvenaient pas à s’approcher de nous, criaient de loin :

 Pour l’amour de Dieu, demandez à Notre-Dame qu’Elle me guérisse mon fils, qui est estropié !

 Qu’Elle guérisse le mien, qui est aveugle !

 Le mien, qui est sourd !

 Qu’Elle me ramène mon mari qui est à la guerre !

 Qu’Elle convertisse un pécheur ! Qu’Elle me rende la santé, à moi qui suis tuberculeux !...

« On voyait là toutes les misères de la pauvre humanité. Certains criaient même du haut des arbres ou des murs sur lesquels ils étaient montés pour nous voir passer.

« En répondant oui aux uns, en aidant les autres à se relever, nous avancions, grâce à quelques messieurs qui nous frayaient un passage à travers la foule.

« Quand je lis maintenant dans le Nouveau Testament les scènes touchantes du passage de Notre-Seigneur sur les routes de Palestine, je me rappelle ce que Notre-Seigneur m’a fait voir, quand j’étais encore une enfant, sur les pauvres chemins et sur les routes d’Aljustrel à Fatima, et à la Cova da Iria, et je rends grâces à Dieu, en lui offrant la foi de notre bon peuple portugais. Je me dis que si tous ces gens se prosternaient ainsi devant trois pauvres enfants, uniquement parce que ceux-ci avaient reçu, de la Miséricorde divine, la faveur de parler avec la Mère de Dieu, que n’auraient-ils pas fait, s’ils avaient eu devant eux Jésus-Christ lui-même ? »

Les trois petits arrivèrent enfin près du chêne-vert, et Lucie, comme de coutume, demanda que l’on récite le chapelet avec elle. Tous se mirent donc à genoux, riches et pauvres, et répondirent à haute voix aux Ave Maria.

Vers midi, certains pèlerins aperçurent un globe lumineux qui glissait majestueusement dans l’espace. C’était le céleste véhicule de la Vierge Marie qui se dirigeait vers le chêne-vert. L’éclat du soleil diminua et l’atmosphère devint jaune d’or.

« Que veut de moi Votre Grâce ?

 Continuez à dire le chapelet afin d’obtenir la fin de la guerre. En octobre, Notre-Seigneur viendra ainsi que Notre-Dame des Douleurs et du Carmel, saint Joseph avec l’Enfant-Jésus afin de bénir le monde. Dieu est satisfait de vos sacrifices, mais il ne veut pas que vous dormiez avec la corde. Portez-la seulement pendant le jour.

 Il y a ici cette petite, qui est sourde-muette, Votre Grâce ne voudrait-elle pas la guérir ?

 Au cours de l’année, elle éprouvera du mieux.

 J’ai bien d’autres demandes, les unes pour une conversion, les autres pour une guérison.

 Je guérirai les uns, mais les autres non, parce que Notre-Seigneur ne se fie pas à eux. »

Présentant à Notre-Dame un flacon d’eau de senteur, Lucie lui dit :

« On m’a donné cela. Votre Grâce le veut-elle ?

 Cela ne convient pas pour le Ciel.

 Il y a beaucoup de gens qui disent que je suis une menteuse, que je mériterais d’être pendue ou brûlée. Faites un miracle, pour que tous croient.

 Oui, en octobre, je ferai le miracle, pour que tous croient.

« Elle commença à s’élever doucement en direction du levant jusqu’à disparaître dans l’immensité du Ciel. »

Lucie s’écria alors :

« Si vous voulez La voir, regardez par-là ! »

Et elle montra du doigt la direction du levant. Alors, de nouveau, l’on vit le globe lumineux, de forme ovale, prendre son essor et s’éloigner de la Cova da Iria en direction de l’Orient.

« La lumière qui l’environnait semblait lui ouvrir un chemin entre les astres, ce qui nous a fait dire quelquefois que nous avions vu s’ouvrir le Ciel. »

Pendant le temps de l’apparition, la plupart des pèlerins avaient vu tomber du ciel comme une pluie de pétales blancs, ou de flocons de neige ronds et brillants qui descendaient lentement et disparaissaient en touchant terre.

Par trois fois se forma autour du chêne-vert une nuée agréable à voir qui s’élevait dans l’air avant de se dissiper.

La Sainte Vierge donna encore un autre signe de sa gracieuse présence : une nuée, agréable à voir, se forma autour de l’arc rustique qui dominait le petit tronc d’arbre déchiqueté. Montant du sol, elle s’amplifia et s’éleva dans les airs jusqu’à atteindre une hauteur de cinq ou six mètres, puis elle s’évanouit comme une fumée qui se dissipe au vent. Peu après, des volutes semblables se formèrent et se dissipèrent de la même manière. Et encore une troisième fois. Tout se passa comme si des thuriféraires invisibles encensaient liturgiquement la Vision. Les trois “ encensements ” durèrent ensemble tout le temps de l’Apparition, c’est-à-dire dix à quinze minutes.

Dans l’attente du 13 octobre, commença « ce que j’appelle maintenant le commencement de la lutte diabolique contre le Message de Fatima, bien que, certainement, mes parents ne l’aient pas compris, ni moi non plus », reconnaît Lucie.

Le 27 septembre 1917, le chanoine Formigão l’interrogeait :

« Tu n’as pas peur que l’on te fasse du mal s’il n’arrive rien d’extraordinaire ce jour-là ?

 Non, répondait fermement l’enfant, je n’ai aucune peur. »

Il lui dit un jour : « “ Ma petite fille, tu as le devoir d’aimer beaucoup Notre-Seigneur à cause de tant de grâces et de bienfaits qu’il t’accorde. ”

« Cette phrase se grava si intimement dans mon âme que, depuis lors, je pris l’habitude de dire constamment à Notre-Seigneur : “ Mon Dieu, je vous aime en remerciement des grâces que vous m’avez accordées. ” »

SAMEDI 13 OCTOBRE :
« JE SUIS NOTRE-DAME DU ROSAIRE »

« Le 13 octobre prochain, se disait le chanoine Formigão, ou bien tout se dissipera comme par enchantement », s’il ne se passe rien. « Ou bien de nouvelles preuves, parfaitement concluantes, viendront confirmer celles qui existent déjà en faveur de la réalité des apparitions de la Vierge », si elle fait le miracle annoncé depuis trois mois.

Début octobre, Maria do Carmo Menezes obtint des parents Marto et dos Santos la permission d’emmener Lucie et Jacinthe chez elle, à Reixida, pour qu’elles puissent s’y reposer huit jours. Elle donnera ce témoignage :

« À moi, elles m’ont dit que ce qui les avait le plus impressionnées, c’était la vision de l’enfer. D’après ce qu’elles m’ont déclaré quelquefois, si cela avait duré une minute de plus, elles seraient mortes de peur. Elles m’en parlaient souvent. Et j’ai eu l’occasion de me rendre compte que c’était pareil avec d’autres personnes. J’ai toujours conservé l’idée que l’enfer était leur grande préoccupation.

« Ce qui les inquiétait le plus, c’était la haine de tant de gens contre Dieu et les terribles conséquences éternelles de l’état de tant d’âmes. Et c’est même pour cela qu’elles insistaient tant sur la vision de l’enfer. »

En revanche, ceux qui essayaient d’intimider les pastoureaux en leur faisant croire qu’il arriverait un malheur le 13 octobre, en étaient pour leurs frais.

« La rumeur avait couru, écrit sœur Lucie, que les autorités avaient décidé de faire exploser une bombe près de nous, au moment de l’apparition. Je n’en ressentis aucune crainte et, en parlant de cela avec mes cousins, nous disions : “ Quelle joie si nous obtenions la grâce de monter avec Notre-Dame vers le Ciel ! ” Cependant, mes parents prirent peur... »

La mère de Lucie, la veille du 13 octobre, le jour à peine levé, sauta du lit, réveilla sa fille et lui dit : « Oh, Lucie ! il vaut mieux aller nous confesser. On dit que nous allons mourir à la Cova da Iria... Si Notre-Dame ne fait pas le miracle, on risque de nous tuer ! Aussi, il vaut mieux aller à confesse, pour être préparées et mourir. »

Lucie lui répondit calmement : « Si vous voulez vous confesser, j’y vais aussi ; mais ce n’est pas pour cela. Je n’ai pas peur qu’on nous tue. Je suis absolument sûre que Notre-Dame fera demain tout ce qu’elle a promis. » Et l’on ne parla plus de confession.

Dès le 12 octobre, des groupes de pèlerins se mirent en marche sur les routes de Fatima. Et cela ne cessera plus, depuis cent ans, tous les 12 octobre que Dieu fait. Un vent du nord, froid et rude, annonçant l’hiver, faisait trembler les peupliers au bord des ruisseaux. La pluie tombait avec une douce obstination. Mais tous ces gens, pataugeant dans les larges flaques des chemins bourbeux, ne semblaient pas la sentir.

Ils marchaient, illuminés par la foi, dans l’attente du miracle que Notre-Dame avait promis aux enfants, pour le 13 à midi, heure du soleil. On récitait le chapelet, on chantait des cantiques et cela s’entendait jusqu’à Aljustrel.

Lorsque les pastoureaux arrivèrent à la Cova da Iria, la foule était si dense qu’ils ne purent la traverser. Alors, un chauffeur prit Jacinthe dans ses bras et se fraya un passage en criant : « Laissez passer les petits qui ont vu Notre-Dame ! »

« Un prêtre, qui avait passé la nuit à la Cova, demanda à Lucie à quelle heure Notre-Dame allait venir.

 À midi, lui répondit-elle.

« Le prêtre tira sa montre, et dit :

 Voyez, il est déjà midi ! Notre-Dame ne ment pas ! Nous allons bien voir ! »

Il était bien midi à l’heure officielle mais pas encore à l’heure solaire. En effet, pour adopter l’heure des belligérants, le gouvernement portugais avait imposé au pays une heure légale qui avançait de quatre-vingt-seize minutes sur l’heure solaire.

« Quelques minutes s’écoulèrent ; l’abbé tira de nouveau sa montre, et dit :

– Midi est déjà passé. Que tout le monde s’en aille !... Tout cela est une illusion !

« Lucie ne voulait pas partir. Le prêtre se mit alors à pousser les enfants de ses deux mains, mais Lucie lui dit en pleurant :

 Que ceux qui veulent s’en aller s’en aillent ! Moi, je ne pars pas. Je suis chez moi ici. Notre-Dame a dit qu’elle viendrait. Les autres fois, elle est venue, et maintenant aussi, elle va venir ! ” »

Il était à peu près 1 heure de l’après-midi, et il continuait à pleuvoir. Soudain, poussée par un mouvement intérieur, Lucie demanda à la foule de fermer les parapluies pour réciter le chapelet. Tous obéirent sans broncher.

Vers 13 h 30, c’est-à-dire environ midi à l’heure solaire, le soleil perça victorieusement l’épaisse couche de nuages qui le cachait jusque-là, et brilla intensément. Tout à coup, les trois enfants virent l’éclair, et Lucie s’écria : « Silence ! Silence ! Notre-Dame va venir ! »

Maria Rosa qui était toute proche de sa fille lui murmura : « Regarde bien. Prends garde de ne pas te tromper ! »

Mais Notre-Dame apparaissait déjà au-dessus du chêne-vert. Alors, Lucie tomba en extase. Son visage, de plus en plus beau, prit une teinte rose ; ses lèvres s’amincirent. Jacinthe, dans un geste de sainte impatience, donna un coup de coude à sa cousine et lui dit : « Parle, Lucie, Notre-Dame est déjà là ! »

Lucie revint à elle-même et commença son entretien avec la Reine des Cieux : « Que veut de moi Votre Grâce ?

 Je veux te dire que l’on fasse ici une chapelle en mon honneur. Je suis Notre-Dame du Rosaire. Que l’on continue toujours à réciter le chapelet tous les jours. La guerre va finir et les militaires rentreront bientôt chez eux.

 J’avais beaucoup de choses à vous demander : de guérir quelques malades et de convertir des pécheurs, etc.

 Les uns oui, les autres non. Il faut qu’ils se corrigent, qu’ils demandent pardon pour leurs péchés. »

Et prenant un air plus triste : « Que l’on n’offense pas davantage Dieu, Notre-Seigneur, car il est déjà trop offensé !

 Vous ne voulez rien de plus de moi ?

– Non, je ne veux rien de plus de toi.

 Alors, moi, je ne demande rien non plus. »

LE MIRACLE DU SOLEIL.

Lucie s’écria : « Elle s’en va ! Elle s’en va ! » Et la voyante, de sa voix forte, lança : « Regardez le soleil ! »

Ouvrant alors les mains, Notre-Dame les fit se réfléchir sur le soleil et, pendant qu’Elle s’élevait, le reflet de sa propre lumière continuait à se projeter sur le soleil. Tous purent le regarder sans avoir mal aux yeux. On aurait dit qu’il s’éteignait et se rallumait. Il lançait des faisceaux de lumière, de-ci, de-là, et peignait tout de différentes couleurs : les arbres, les gens, le sol, l’air.

Soudain, le soleil eut quelques secousses puis se mit à danser, à tournoyer sur lui-même. Il s’arrêta puis recommença par deux fois. Il semblait une roue de feu qui allait tomber sur la foule. À un moment, il parut vraiment se détacher du ciel et s’avancer sur la terre. Ce fut un instant terrible. On criait : « Ô Jésus ! Nous allons tous mourir ! Notre-Dame, au secours ! »

Finalement, le soleil s’arrêta, et tous poussèrent un soupir de soulagement. Les vêtements trempés de pluie avaient séché en un instant. La Sainte Vierge avait ainsi multiplié les merveilles, en Mère attentive et bienfaisante. Le miracle annoncé par les enfants avait eu lieu. Tous avaient vu. Et la mère de Lucie déclara : « Maintenant, on ne peut pas ne pas y croire ; car le soleil, personne ne peut y toucher. »

Durant les dix minutes où la foule contempla ce grandiose miracle cosmique, les voyants purent admirer, en plein ciel, trois tableaux successifs des mystères du Rosaire résumant la vie de la Sainte Vierge : la Sainte Famille, puis Notre-Seigneur et Notre-Dame des Douleurs. Notre-Seigneur paraissait à l’âge adulte, vêtu de rouge ; et enfin Notre-Dame du Mont-Carmel. Notre-Seigneur et saint Joseph bénissaient la multitude.

Dans son deuxième Mémoire, sœur Lucie écrit en 1937 :

« Les paroles de cette apparition qui se gravèrent le plus dans mon cœur, furent la demande de notre Très Sainte Mère du Ciel : “ N’offensez pas davantage Dieu Notre-Seigneur, qui est déjà trop offensé. ” Quelle plainte d’amour et quelle tendre supplication ! Qui me donnera de la faire résonner dans le monde entier afin que tous les enfants de la Mère du Ciel entendent le son de cette voix ! »

« Lorsque le soleil se retrouva normal, raconte le Dr Carlos Azevedo Mendès, je pris Lucie dans mes bras pour la porter jusqu’à la route. Ainsi mon épaule fut la première tribune d’où elle a prêché le message que venait de lui confier Notre-Dame du Rosaire.

« Avec un grand enthousiasme et une grande foi, elle criait : “ Faites pénitence ! Faites pénitence ! Notre-Dame veut que vous fassiez pénitence. Si vous faites pénitence, la guerre finira ”... »

« Elle paraissait inspirée, ajoute le docteur Mendès. C’était vraiment impressionnant de l’entendre. Sa voix avait des intonations comme la voix d’un grand prophète. »

Dans son troisième Mémoire, sœur Lucie écrira en 1941 : « Je crois que Dieu a voulu se servir de moi pour rappeler au monde la nécessité qu’il y a d’éviter le péché, de réparer les offenses envers Dieu par la prière et la pénitence. »

Lorsque, le soir même, l’abbé Formigao demandait à Lucie : « Notre-Dame a-t-elle employé le mot “ Pénitence ” ? »

Lucie répondit : « Non. Elle a dit qu’il fallait réciter le chapelet, nous corriger de nos péchés, et demander pardon à Notre-Seigneur, mais elle n’a pas parlé de pénitence. »

En fait, Lucie mimait l’Ange qu’elle avait vu, le 13 juillet, « à gauche de Notre-Dame, avec une épée de feu dans la main gauche. Elle scintillait, émettait des flammes qui paraissaient devoir incendier le monde ; mais ces flammes s’éteignaient au contact de l’éclat que, de sa main droite, Notre-Dame faisait jaillir vers lui ; l’Ange, désignant la terre de sa main droite, dit d’une voix forte :

« “ Pénitence, Pénitence, Pénitence ! ” »

C’était déjà une version surnaturelle du “ miracle du soleil ”.

*
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PONTEVEDRA : 
JEUDI 10 DÉCEMBRE 1925

Après la mort de François (4 avril 1919) et de Jacinthe (20 février 1920), Lucie restait « toute seule ». Non pas, avait rectifié Notre-Dame, le 13 juin :

« Je vais rester ici toute seule ? » avait demandé Lucie après que Notre-Dame eut annoncé à François et Jacinthe qu’elle viendrait les chercher.

Non, ma fille, avait répondu Notre-Dame. Tu souffres beaucoup ? Ne te décourage pas, je ne t’abandonnerai jamais. Mon Cœur Immaculé sera ton refuge et le chemin qui te conduira jusqu’à Dieu. »

Elle tint parole.

JEUDI 10 DECEMBRE 1925.

En 1925, Lucie avait dix-huit ans. Elle était postulante à Pontevedra, en Espagne, dans la vieille et belle demeure des religieuses dorothées. Dans la soirée du 10 décembre, après le souper, elle reçut la visite de l’Enfant Jésus et de Notre-Dame, venus lui révéler les promesses attachées à la dévotion des cinq premiers samedis du mois, et lui demander de la répandre : la Très Sainte Vierge mit la main sur son épaule et lui montra en même temps un Cœur entouré d’épines qu’elle tenait dans l’autre main.

Au même moment, l’Enfant lui dit : « Aie compassion du Cœur de ta très Sainte Mère, entouré d’épines que les hommes ingrats lui enfoncent à tout moment, sans qu’il y ait personne pour faire acte de réparation afin de les en retirer. »

Ensuite, la Très Sainte Vierge dit : « Vois, ma fille, mon Cœur entouré d’épines que les hommes ingrats m’enfoncent à chaque instant par leurs blasphèmes et leurs ingratitudes. Toi, du moins, tâche de me consoler et dis que tous ceux qui, pendant cinq mois, le premier samedi, se confesseront, recevront la sainte Communion, réciteront un chapelet, et me tiendront compagnie pendant quinze minutes en méditant sur les quinze mys­tères du Rosaire, en esprit de réparation, je promets de les assister à l’heure de la mort avec toutes les grâces nécessaires pour le salut de leur âme. »

« Après cette grâce, comment pouvais-je me soustraire au plus petit sacrifice que Dieu voudrait me demander ? Pour consoler le Cœur de ma chère Mère du Ciel, je serais contente de boire jusqu’à la dernière goutte le calice le plus amer. Je désirais souffrir tous les martyres pour offrir réparation au Cœur Immaculé de Marie, ma chère Mère, et lui retirer une à une toutes les épines qui le déchirent, mais je compris que ces épines sont le symbole des nombreux péchés qui se commettent contre son Fils, et atteignent le Cœur de sa Mère. Oui, parce que par eux beaucoup d’autres de ses fils se perdent éternellement. »

Lucie s’ouvrit aussitôt à sa supérieure, mère Magalhaes, de cette mission que lui confiait le Ciel. Elle en fit part aussi au confesseur de la maison, don Lino Garcia, qui lui fit remarquer que, seule, la supérieure ne pouvait rien. Sur les entrefaites, elle reçoit une réponse de Mgr Pereira Lopes auquel elle s’empresse d’écrire en lui donnant plus amples détails :

« Mon très Révérend Père, je viens bien respectueusement vous remercier de l’aimable lettre que vous avez eu la bonté de m’écrire.

« Quand je l’ai reçue et que j’ai vu que je ne pouvais encore répondre aux désirs de la Sainte Vierge, je me suis sentie un peu triste. Mais je me suis tout de suite rendu compte que les désirs de la Très Sainte Vierge étaient que je vous obéisse.

« Je me suis tranquillisée et, le lendemain, quand j’ai reçu Jésus à la communion, je lui ai lu votre lettre et je lui ai dit : “ Ô mon Jésus ! Moi, avec votre grâce, la prière, la mortification et la confiance, je ferai tout ce que l’obéissance me permettra et ce que vous m’inspirerez ; le reste, faites-le vous-même. ” »

« Le reste », c’est la diffusion de cette dévotion réparatrice dans toute l’Église.

« Je suis restée comme cela, jusqu’au 15 février. Ces jours-là ont été pour moi une continuelle mortification intérieure. Je me demandais si cela avait été un rêve ; mais je sais bien que non : je pensais que cela avait été vraiment la réalité. Mais comment, moi, qui avais si mal correspondu aux grâces reçues jusque-là, comment Notre-Seigneur daignait-il m’apparaître de nouveau ?

« Le jour où je devais aller me confesser approchait, et je n’avais la permission de rien dire ! Le dirai-je à Mère supérieure ? Mais, pendant la journée, mes occupations ne me le permettaient pas, et le soir, elle souffrait de maux de tête. Et alors, craignant de manquer de charité, je pensais : “ Cela sera pour demain ; je vous offre ce sacrifice, ô ma Mère chérie. ” Et ainsi, les jours se sont succédé les uns aux autres, jusqu’aujourd’hui. »

15 FÉVRIER 1926.

« J’étais occupée par mon emploi, et je ne songeais presque pas à cela. J’allais vider une poubelle en dehors du jardin. »

Au même endroit, quelques mois auparavant, elle avait rencontré un enfant à qui elle avait demandé s’il savait l’Ave Maria : « Il m’avait répondu que oui, et je lui avais demandé de me le réciter, pour l’entendre. Mais comme il ne se décidait pas à le dire seul, je l’avais récité trois fois avec lui. À la fin des trois Ave Maria, je lui avais demandé de le dire seul. Comme il restait silencieux et ne paraissait pas capable de le dire seul, je lui demandais s’il connaissait l’église de Sainte-Marie. Il répondit que oui. Je lui dis alors d’y aller tous les jours et de prier ainsi : “ Ô ma Mère du Ciel, donnez-moi votre Enfant-Jésus ! ” Après lui avoir appris cette prière, je m’en allais. »

Le 15 février 1926, en revenant comme d’habitude, après avoir rempli le même office, « je trouvai un enfant qui me parut être le même, et je lui demandai alors :

 As-tu demandé l’Enfant-Jésus à notre Mère du Ciel ?

« L’Enfant se tourna vers moi et me dit :

 Et toi, as-tu révélé au monde ce que la Mère du Ciel t’a demandé ?

« Et, ayant dit cela, il se transforma en un enfant resplendissant. Reconnaissant alors que c’était Jésus, je lui dis :

 Mon Jésus ! Vous savez bien ce que m’a dit mon confesseur dans la lettre que je vous ai lue. Il disait qu’il fallait que cette vision se répète, qu’il y ait des faits pour permettre de croire, et que la Mère supérieure ne pouvait pas, elle toute seule, répandre la dévotion dont il était question.

 C’est vrai que la Mère supérieure, toute seule, ne peut rien, mais avec ma grâce, elle peut tout. Il suffit que ton confesseur te donne l’autorisation et que ta supérieure le dise pour que l’on croie, même sans savoir à qui cela a été révélé.

 Mais mon confesseur disait dans sa lettre que cette dévotion ne faisait pas défaut dans le monde, parce qu’il y avait déjà beaucoup d’âmes qui Vous recevaient chaque premier samedi, en l’honneur de Notre-Dame et des quinze mystères du Rosaire.

 C’est vrai, ma fille, que beaucoup d’âmes commencent, mais peu vont jusqu’au bout et celles qui persévèrent le font pour recevoir les grâces qui y sont promises. Les âmes qui font les cinq premiers samedis avec ferveur et dans le but de faire réparation au Cœur de ta Mère du Ciel me plaisent davantage que celles qui en font quinze, tièdes et indifférentes.

 Mon Jésus ! Bien des âmes ont de la difficulté à se confesser le samedi. Si vous permettiez que la confession dans les huit jours soit valide ?

 Oui. Elle peut être faite même au-delà, pourvu que les âmes soient en état de grâce le premier samedi lorsqu’elles me recevront et que, dans cette confession antérieure, elles aient l’intention de faire ainsi réparation au Cœur Immaculé de Marie.

 Mon Jésus ! Et celles qui oublieront de formuler cette intention ?

 Elles pourront la formuler à la confession suivante, profitant de la première occasion qu’elles auront de se confesser. »

« Aussitôt après, il disparut sans que je sache rien d’autre des désirs du Ciel jusqu’aujourd’hui. Et quant aux miens, c’est qu’une flamme d’amour divin s’allume dans les âmes pour que, soutenues dans cet amour, elles consolent vraiment le Cœur Immaculé de Marie.

« J’ai du moins le désir de consoler beaucoup ma chère Mère du Ciel, en souffrant beaucoup pour son amour. »

*
*       *

TUY : 
JEUDI 13 JUIN 1929

Le 20 juillet 1926, sœur Lucie quitte le couvent de Pontevedra pour entrer au noviciat des Dorothées, installé à Tuy, petite cité espagnole. Après sa prise d’habit le 2 octobre 1926, elle prononçait ses ­premiers vœux le 3 octobre 1928. En 1929, l’humble Maria das Dores poursuit à Tuy sa vie cachée, si bien cachée que la plupart de ses compagnes ignorent encore qu’elle est la voyante de Fatima. Elle met en pratique le message de Notre-Dame, vivant sa règle à la perfection dans le don total aux saints Cœurs de Jésus et de Marie (...).

Alors se réalisa la promesse du grand Secret : « Je viendrai demander la consécration de la Russie... » Écoutons sœur Lucie raconter l’événement :

« (...) Ce fut à cette époque que Notre-Seigneur m’avertit que le moment était venu où il voulait que je fasse connaître à la sainte Église son désir de la consécration de la Russie et sa promesse de la convertir... La communication s’est produite ainsi :

« (13 juin 1929). J’avais demandé et obtenu la permission de mes supérieures et de mon confesseur de faire une heure sainte de 11 heures à minuit, dans la nuit du jeudi au vendredi de chaque semaine.

« Me trouvant seule une nuit, je m’agenouillai près de la balustrade, au milieu de la chapelle, pour réciter, prosternée, les prières de l’Ange. Me sentant fatiguée, je me relevai et continuai à les réciter les bras en croix. La seule lumière était celle de la lampe du sanctuaire.

« Soudain, toute la chapelle s’éclaira d’une lumière surnaturelle et, sur l’autel, apparut une croix de lumière qui s’élevait jusqu’au plafond. Dans une lumière plus claire, on voyait sur la partie supérieure de la croix, une face d’homme, avec un corps jusqu’à la ceinture ; sur sa poitrine une colombe, également lumineuse, et cloué à la croix, le corps d’un autre homme.

« Un peu en dessous de la ceinture de celui-ci, suspendus en l’air, on voyait un Calice et une grande Hostie sur laquelle tombaient quelques gouttes de sang qui coulaient sur les joues du Crucifié et d’une blessure à la poitrine. Coulant sur l’Hostie, ces gouttes tombaient dans le Calice.

« Sous le bras droit de la Croix se trouvait Notre-Dame avec son Cœur Immaculé dans la main... C’était Notre-Dame de Fatima avec son Cœur Immaculé dans la main gauche, sans épée ni roses, mais avec une couronne d’épines et des flammes.

« Sous le bras gauche de la Croix, de grandes lettres, comme d’une eau cristalline qui aurait coulé au-dessus de l’autel, formaient ces mots : “ Grâce et Miséricorde ”.

« Je compris que m’était montré le mystère de la très Sainte Trinité, et je reçus sur ce mystère des lumières qu’il ne m’est pas permis de révéler.

« Ensuite, Notre-Dame me dit : Le moment est venu où Dieu demande au Saint-Père de faire, en union avec tous les évêques du monde, la consécration de la Russie à mon Cœur Immaculé, promettant de la sauver par ce moyen. Elles sont si nombreuses les âmes que la justice de Dieu condamne pour des péchés commis contre moi, que je viens demander réparation. Sacrifie-toi à cette intention et prie

« Je rendis compte de cela à mon confesseur, qui m’ordonna d’écrire ce que Notre-Seigneur voulait que l’on fasse. »

Il suffit de se représenter la scène décrite par sœur Lucie pour y découvrir des lumières inédites. Elle se déroule dans une « lumière surnaturelle » qui envahit soudain la chapelle dans la nuit du jeudi au vendredi où ne brillait jusque-là que « celle de la lampe du sanctuaire ». Cette « lumière immense qui est Dieu » redouble d’éclat lorsque apparaît sur l’autel « une Croix de lumière qui s’élevait jusqu’au plafond ».

« Sur la partie supérieure de la Croix, une face d’homme », qu’elle ne nomme pas, « avec un corps jusqu’à la ceinture » qui ne fait qu’un avec « un autre homme » auquel il est pour ainsi dire incorporé, et qui est, lui, « cloué à la Croix ». Ils ne forment donc qu’un seul Être, avec la « colombe également lumineuse ». C’est pourquoi ils ne sont pas nommés. Si on les nomme, cet Être immense qui est Dieu est... Trois, trois Personnes, le Père, le Fils et le Saint-Esprit. Mais ici, ils ne font qu’un seul Être en Action avec la Vierge Marie, seule nommée, et son Cœur Immaculé offrant ce Saint-Sacrifice du Sang qui « coule sur les joues du Crucifié et d’une blessure à la poitrine » de son Fils, et tombe sur l’Hostie et, de là, « dans le calice ».

C’est certainement en pensant à cette vision que sœur Lucie écrit, dans les Appels du Message de Fatima :

« Quand la souffrance et l’angoisse nous ac­cablent, souvenons-nous de Jésus-Christ au jardin des Oliviers et, comme Lui, disons à Dieu : “ S’il est possible, Seigneur, éloignez de moi ce calice ; mais, si vous voulez que je le boive, que votre volonté soit faite et non la mienne. ” Lors même que notre affliction est grande, pensons que celle de Jésus a été plus grande encore, puisque son visage s’est couvert de grosses gouttes de sang, qui tombèrent jusqu’à terre.

« Oh ! comme j’aurais voulu être à ce mo­ment-là auprès du Seigneur, pour essuyer sa Face avec un linge fin. Et conserver la relique du Sang de mon Dieu ! Mais, ce que je n’ai pas fait alors, je veux le faire aujourd’hui, parce que tous les jours le Sang de la Rédemption coule de son visage meurtri, de ses mains et de ses pieds transpercés, de son Cœur ouvert, et ce Sang est présent dans l’Hostie et le Vin consacrés sur l’autel du sacrifice ; et j’ai le bonheur de me nourrir de ce Corps et de ce Sang.

« Ave Maria ! »

Reprenons le récit de la théophanie :

« Ensuite, Notre-Dame me dit : “ Le moment est venu où Dieu demande au Saint-Père de faire, en union avec tous les évêques du monde, la consécration de la Russie à mon Cœur Immaculé, promettant de la sauver par ce moyen. »

C’était en 1929. Si le Pape avait obéi, il n’y aurait pas eu de pacte germano-soviétique ni de Seconde Guerre mondiale. Mais en méprisant cette demande de la Mère de Dieu, Pie XI et ses successeurs ont précipité le monde dans des malheurs dont il subit encore aujourd’hui les conséquences. Néanmoins la promesse divine demeure, incondi­tionnelle : « Cependant, le Cœur Immaculé de Marie sauvera la Russie, elle lui est confiée. »

Et « si cet acte de consécration de la Russie, par lequel nous sera accordée la paix, n’intervient pas ? La guerre cessera seulement lorsque le sang répandu par les martyrs sera suffisant pour apaiser la divine justice. »

« “ Elles sont si nombreuses les âmes que la justice de Dieu condamne pour des péchés commis contre moi, que je viens demander réparation. Sacrifie-toi à cette intention et prie. ” »

Ami lecteur, cette demande du Cœur Immaculé de Marie s’adresse à chacun de nous. Comment ne pas lui promettre d’y répondre de tout notre cœur avec le secours de sa sainte grâce.

Ainsi soit-il !

LA RÉVÉLATION DE FATIMA

L’abbé de Nantes, notre Père, écrivait en conclusion de son “ Livre d’accusation ” contre Jean-Paul II :

« La Très Sainte Vierge Marie, notre Reine et Souveraine, à qui est confié le Jugement de Dieu sur nous, dans la carence opiniâtre des juges ecclésiastiques et du Juge romain, nous a révélé le 13 juillet 1917 tout ce qui était nécessaire aux âmes pour leur salut éternel, aux nations pour leur salut temporel, à l’Église pour sa victoire sur les enfers déchaînés. »

C’était en 1983, avant le dévoilement du “ Secret ” que Jean-Paul II, lui, avait lu, après l’attentat commis contre lui par Ali Agça à Rome le 13 mai 1981. Or, continue notre Père, « pour tout cela, dont vous n’avez pas fait cas, vous n’avez ressenti que mépris, horreur et haine. Ces trois vérités et justices vous accusent et vous terrassent. »

Force est de constater que toutes nos démarches auprès de François pour attirer son attention sur la religion, le message et le secret de Fatima, se heurtent à la même « haine ». Il n’est que de relire ces pages étincelantes de la lumière descendue du Ciel pour constater qu’elles dénoncent les mêmes ténèbres à l’œuvre pour l’étouffer.

« LA RELIGION DU CIEL ET DE L’ENFER. »

« D’abord, à ces trois tout jeunes enfants, la Sainte Vierge a montré l’Enfer. Je vous défie bien de lire cette description de l’enfer dans quelqu’un de vos solennels discours, écrit l’abbé de Nantes à Jean-Paul II. Car elle pulvérise tout votre optimisme humaniste et en montre le venin pour les âmes ! Car en voici la conclusion : Cette vision ne dura qu’un moment, grâce à notre bonne Mère du Ciel qui, à la première apparition, nous avait promis de nous emmener au Ciel. Sans quoi, je crois que nous serions morts d’épouvante et de peur. Effrayés, et comme pour demander secours, nous levâmes les yeux vers Notre-Dame qui nous dit avec bonté et tristesse : “ Vous avez vu l’enfer où vont les âmes des pauvres pécheurs. ” »

De ce jour, les enfants ne connaîtront plus de repos. Il ne leur suffit pas de se savoir sauvés. Sœur Lucie le dira au Père Fuentes le 26 décembre 1957 :

« Ma mission n’est pas d’indiquer au monde les châtiments matériels qui arriveront certainement si le monde ne prie pas et ne fait pas pénitence. Non, ma mission est d’indiquer à tous l’imminent danger où nous sommes de perdre notre âme à jamais si nous restons obstinés dans le péché. »

frère Bruno de Jésus-Marie.