Sœur Faustine contre sœur Lucie de Fatima
EN 1946, le cardinal Sapieha refusait d’introduire la cause de béatification de sœur Faustine, malgré des pressions de toutes sortes, et pour les bonnes raisons que Mgr Romuald Jalbrzykowski, l’archevêque de Vilnius exprimera officiellement en 1951 dans un texte intitulé : Des prétendues apparitions et visions de sœur Faustine :
« J’adore la Miséricorde divine et j’en demande toujours à Dieu. Mais mes vues sont très négatives quant au culte de la Miséricorde divine proposé à partir des apparitions-visions de sœur Faustine. La façon dont ce culte est propagé n’est pas conforme à l’esprit de la sainte Église. J’ai interdit catégoriquement à l’abbé Sopocko [le directeur spirituel de sœur Faustine] la divulgation des quasi-révélations de sœur Faustine. [Ce qu’il faisait pourtant depuis 1938...] » (Jan Grzegorczyk : Faustine apôtre de la miséricorde, p. 83-84)
LE JUGEMENT DE ROME AVANT VATICAN II
Dans les années 1950-1952, la curie de Cracovie envoya à Rome des copies du « Petit Journal » [diaire de sœur Faustine relatant ses visions et révélations]. Le 14 mai 1953, le Saint-Office interdisait l’institution d’une fête de la miséricorde, et il émettait aussi des réserves quant au caractère surnaturel des visions de sœur Faustine.
Le 19 novembre 1958, au terme d’une enquête de plusieurs années, le Saint-Office adoptait un décret en cinq points qui répondait aux sollicitations de l’épiscopat polonais en faveur de sœur Faustine :
« 1. Il ne faut pas s’obstiner en faveur du caractère surnaturel des révélations de sœur Faustine. Les visions et révélations de sœur Faustine n’ont pas d’origine surnaturelle.
« 2. Il faut retirer les prières et les images venant de ces prétendues révélations.
« 3. Il est conseillé aux évêques de garder la prudence tant que les éléments du culte de la Miséricorde divine ne sont pas retirés de leurs paroisses.
« 4. La fête de la Miséricorde divine ne doit pas être instituée.
« 5. Il faut donner un grave avertissement (gravissimum monitum) à l’abbé Sopocko en lui ordonnant de cesser de défendre et de propager ces prétendues révélations et ce culte. » (Jan Grzegorczyk : Faustine apôtre de la miséricorde ; p. 191-192)
Le cardinal Wyszynski, primat de Pologne, était chargé par le Saint-Office de veiller à l’application du décret en Pologne. Le 6 mars 1959, vu le peu d’empressement de l’épiscopat polonais à obéir à ces injonctions, les autorités romaines haussaient le ton par la voix de l’Osservatore romano en rendant publique l’interdiction absolue de la diffusion du culte de la miséricorde conçut par sœur Faustine :
« Qu’il soit rendu public que la Suprême Sacrée Congrégation du Saint-Office, après avoir examiné les prétendues visions et révélations de Sœur Faustine Kowalska, de l’institut de Notre-Dame de la Miséricorde, décédée en 1938 près de Cracovie, a décidé ce qui suit :
IL FAUT INTERDIRE la diffusion des images et des écrits qui présentent la dévotion à la divine miséricorde dans la forme proposée par ladite sœur Faustine ;
il est requis de la prudence des évêques de devoir faire disparaitre lesdites images qui ont éventuellement déjà été exposées au culte. »
LE JUGEMENT DE ROME APRÈS VATICAN II
Moins de vingt ans plus tard, le 15 avril 1978, la Sacrée Congrégation pour la Doctrine de la Foi (ex-congrégation du Saint-Office) émettait la Notification suivante :
« Cette Sacrée Congrégation, vu les nombreux documents originaux qui n’étaient pas connus en 1959, tenant compte du profond changement intervenu dans les circonstances et de l’avis de beaucoup d’évêques polonais, déclare que les prohibitions contenues dans ladite « NOTIFICATION » n’obligent plus. »
Fausse mystique convaincue de promouvoir un culte erroné de la miséricorde avant le Concile Vatican II, sœur Faustine devint après le Concile Vatican II – profond changement intervenu dans les circonstances – et en moins de vingt ans, une vraie sainte, mondialement connue, au-dessus de tout soupçon.
RÉHABILITATION DE SŒUR FAUSTINE ?
L’ARGUMENT DES « NOMBREUX DOCUMENTS ORIGINAUX »
Sous la rubrique nombreux documents originaux, il ne s’agissait essentiellement que des témoignages recueillis pour le procès de béatification de sœur Faustine ; ses seuls écrits étant quelques lettres, et les six cahiers manuscrits du « Petit Journal » de sœur Faustine.
L’exemplaire envoyé à Rome dans les années 50 avait été mal dactylographié, des paragraphes entiers avaient été omis. Soit. Il était donc compréhensible, probable même, que certaines assertions amputées d’une manière ou d’une autre, aient pu paraître douteuses, hérétiques surtout, aux censeurs de 1958.
C’était possible, mais c’était par conséquent tout à la fois un jeu d’enfant et une exigence d’honnêteté intellectuelle pour la biographe officielle Ewa K. Czaczkowska (EKC) Sœur Faustine, biographie d’une sainte (1905-1938) de nous présenter une hérésie caractérisée due à la première version fautive, et de mettre en synopse la version complète de l’édition critique, qui fait autorité aujourd’hui (elle nous a servi de référence), et d’en faire éclater à nos yeux le caractère lumineusement vrai, juste et bon. Elle nous aurait alors définitivement rassurés... Grâce à ces nombreux documents originaux, le culte de la miséricorde interdit en 1958, s’en serait donc trouvé tout naturellement permis et encouragé depuis 1978, sans déshonneur ni forfaiture de la part des autorités romaines...
Ewa K. Czaczkowska, ni aucun biographe de sœur Faustine n’a pu apporter la moindre preuve en ce sens. La raison de cette impuissance tient au fait que sur l’essentiel du nouveau culte de la miséricorde, c’est-à-dire les principales quatre visions et révélations qui le fondent, les théologiens romains de 1958 ont analysé les mêmes textes que ceux de 1978, publiés aujourd’hui à des centaines de milliers d’exemplaires, or ils ont condamné la doctrine et interdit la diffusion de ce nouveau culte.
Si ce n’est pas en raison des nombreux documents originaux que le Saint-Office a modifié son jugement doctrinal et levé les interdits du nouveau culte de la miséricorde, c’est donc uniquement à cause des « changements profonds de circonstances ».
LES CHANGEMENTS PROFONDS DE CIRCONSTANCES
Dès 1958, le jeune et très brillant évêque auxiliaire de Cracovie, Karol Wojtyla, prit la tête d’une cabale pour réhabiliter sœur Faustine et surtout sa conception novatrice de la miséricorde. Il comprit qu’il ne fallait surtout pas engager une confrontation doctrinale avec les censeurs romains de 1958. Il préféra habilement « démontrer la sainteté de Sœur Faustine » ce qui aurait pour conséquence immédiate, à plus ou moins long terme, de voir reconnu le caractère surnaturel de ses révélations, et donc la légitimité du culte public de la Divine Miséricorde (cf. ECK, p. 383).
En 1965, alors que le Concile Vatican II battait son plein, Mgr Wojtyla déclarait à propos de la béatification de sœur Faustine : « ce dossier est pour moi le plus important. » C’est sous son autorité qu’à Cracovie, de 1965 à 1967, s’est déroulé le procès diocésain sur l’héroïcité de la vie et des vertus de sœur Faustine, et c’est en 1968, sous le règne de Paul VI, que le procès de béatification put être introduit à Rome.
I. VIE DE SŒUR FAUSTINE
Hélène Kowalska est née le 25 août 1905 à Glogowiec en plein cœur de la Pologne, troisième enfant d’un foyer de petits propriétaires. Eux, leurs six filles et deux garçons furent, selon l’expression même de leur curé, « des catholiques très ordinaires ».
UNE ÉTRANGE CLARTÉ
« Dès son plus jeune âge, Helena vivait des expériences spirituelles extraordinaires. Elle avait des visions. Elle racontait par exemple à ses frères et sœurs qu’elle voyait dans ses rêves Notre-Dame. Elle la voyait belle, se promenant dans les jardins du Paradis. » La nuit, elle réveille sa mère en lui disant qu’elle a vu un « éclat de lumière » (...). Sa mère réagissait en lui disant : “ Tu te lèves tout le temps, au lieu de dormir, tu vas devenir folle. Dors ! » (EKC, p. 33) (...).
Le dimanche, Helena refusait parfois d’aider sa mère à la cuisine et se mettait à l’écart pour lire un missel. « Maman, ne te fâche pas, parce que Jésus aurait été encore plus fâché si je ne l’avais pas fait. »
La jeune fille souffrait cruellement d’être pauvre, et ne s’y résigna jamais. Elle quitta la maison pour aller travailler parce « qu’elle n’avait pas de vêtements pour le dimanche, que sa robe n’était pas présentable » (EKC, p. 38).
En 1921, Helena travaille comme aide-domestique à la boulangerie des Bryszewski, dans la petite ville d’Aleksandrow près de Lodz. C’est là qu’elle voit de nouveau « l’éclat de lumière » :
« La clarté était si intense qu’Helena, effrayée, pensait que c’était un incendie. Elle commença à crier que la cour était en flammes (selon une version) ou que les entrepôts avaient pris feu (selon une autre version). Occupés à ce moment-là à mettre le pain au four, les travailleurs de la boulangerie se précipitèrent pour regarder, mais ils ne virent rien. Inquiets pour l’état mental d’Helena, les Bryszewski ont appelé un médecin qui lui a prescrit un médicament contre les maux de tête. Ils ont par ailleurs averti les parents que leur fille était devenue folle (...). (EKC, p. 48-49)
Helena eut d’autres visions de cette « clarté » à Aleksandrow. Elle en parle à sa mère, mais toujours pas à son curé... Quel est l’ “ esprit ” qui lui parle dans les flammes de feu et qui va lui ordonner de partir pour Varsovie et d’entrer au couvent ?
DÉPART POUR VARSOVIE, ENTRÉE AU COUVENT
Sa tante, Stanislawa Rapacka, se rappelle des circonstances : « Helena a acheté à son oncle “ un peu de vodka (sic) et des gâteaux ” et elle lui a demandé de la conduire à la gare. » (EKC, p. 64-65) (...).
À Varsovie, Helena ne connaissait personne. Sur le conseil de sa Voix, elle ouvre son âme à un prêtre, c’est la première fois, et celui-ci la recommande à une jeune mère de famille, Aldona Lipszyc, qui la reçoit chez elle. Cependant, Helena en avait reçu l’ordre : elle doit entrer au couvent, et dans un couvent qui accepte une jeune fille sans dot.
C’est le cas des sœurs de Notre-Dame de la Miséricorde. La congrégation de la Divine Mère de la Miséricorde, selon son appellation officielle, était dite encore “ des Madeleines ”, car vouée à la réhabilitation des femmes de mauvaise vie.
Lorsque la supérieure du couvent de Varsovie aperçoit Helena, celle-ci ne lui fait pas bonne impression : « À cause de son aspect extérieur un peu négligé, je me suis dit : “ Ce n’est pas pour nous. ” » Néanmoins, par charité, mère Moraczewska l’accepte dans la congrégation (...).
SŒUR FAUSTINE RELIGIEUSE
Les souvenirs de mère Irena Krzyzanowska, la supérieure de sœur Faustine à Wilno en 1929, et à Cracovie à partir de 1936, paraissent ne laisser voir aucune ambiguïté :
« Elle s’est présentée à moi comme une sœur sérieuse, déjà formée dans la vie spirituelle. Il m’était agréable de voir son calme au travail, elle savait passer du travail aux exercices spirituels, interrompant les tâches auxquelles elle vaquait pour pratiquer ces derniers. J’ai remarqué dans un premier temps que de fréquentes visites dans la chapelle l’absorbaient ; certaines sœurs, surchargées, murmuraient : “ Il est agréable d’aller voir le Seigneur Jésus et de nous laisser travailler. ” Dès que je lui eus recommandé de tâcher d’aider et de soulager les sœurs, je ne fus plus jamais amenée à lui en parler. »
Cependant, de nombreux témoignages confirment que sœur Faustine s’est toujours singularisée sous le rapport du travail, avec le même esprit propre, la même justification que dans son enfance ou lors de son postulat. En 1933, sœur Faustine était chargée du vestiaire avec sœur Suzanna Tokarska. Celle-ci raconte : « À ce moment-là, elle avait déjà la tête ailleurs, elle s’occupait d’apparitions et d’ordres de Jésus et ne s’intéressait pas du tout au travail, même quand il y en avait vraiment beaucoup. »
FAUSTINE DOMINANTE ET INCOMPRISE
Mère Borgia Tichy, la supérieure du couvent de Vilnius, en 1935-1936, pensait que sœur Faustine souffrait d’hystérie. Elle déplorait surtout sa conduite singulière au sein de la communauté :
« En ce qui concerne le domaine spirituel, elle se considérait comme mûre. Elle aimait diriger les sœurs, les regrouper autour d’elle tout en leur indiquant une certaine orientation. En un mot, elle avait le goût de se prendre pour une “ directrice spirituelle ”. Les jeunes sœurs la priaient d’interroger Jésus à propos de leurs problèmes, par exemple pour savoir si elles se confessaient bien, si Jésus leur avait pardonné un péché. » (EKC, p. 237-238) (...).
Sœur Fabiana Pickut raconte : « À nous, les plus jeunes religieuses, sœur Faustine nous demandait souvent de prier pour que telle ou telle sœur s’améliore, pour que Jésus l’illumine, pour qu’elle n’offense plus Jésus. » (EKC, p. 232-236)
De plus, sœur Faustine rapportait dans son « Petit journal » les prétendues méchancetés de ses sœurs à son égard, n’en déplaise à Maria Winowska qui nie ce trait dans sa biographie « Droit à la miséricorde » (éd. Saint-Paul, mars 1958, p. 54).
Lorsque notre Père, l’abbé de Nantes, prendra connaissance des critiques de sœur Faustine jugeant sévèrement certaines religieuses de sa congrégation, il en sera mal impressionné et se montrera très réservé sur sa prétendue sainteté.
Plus encore que sa conduite qui peut donner lieu à des interprétations contradictoires, c’est le contenu doctrinal de ses révélations qui nous éclairera définitivement sur la nature de l’Esprit qui la conduisait (...).
VISION ET MISSION DU 22 FÉVRIER 1931
Le 22 février 1931, premier dimanche de Carême, après le dîner, des religieuses du couvent de Plock aperçoivent une lumière qui rayonne de la cellule de sœur Faustine. Celle-ci décrira la vision dont elle a joui comme d’une apparition du Christ :
« Une main était levée pour bénir, la seconde touchait son vêtement sur la poitrine. » Son Cœur n’était pas visible. « De la tunique entrouverte sur la poitrine sortaient deux grands rayons, l’un rouge, l’autre pâle. En silence, je fixais mon regard sur le Seigneur, mon âme était saisie de crainte, mais aussi d’une grande joie. Après un moment Jésus me dit :
“ Peins un tableau selon l’image que tu vois, avec l’inscription : Jésus, j’ai confiance en Toi. Je désire qu’on honore cette image, d’abord dans votre chapelle, puis dans le monde entier.
“ Je promets que l’âme qui honore cette image ne sera pas perdue. Je lui promets aussi la victoire sur ses ennemis dès ici-bas, et spécialement à l’heure de la mort. Moi-même, je la défendrai, comme ma propre gloire. ” » (PJ, 47)
Ayant dévoilé sa vision au confesseur de la communauté, celui-ci, qui connaissait bien la sœur, interpréta ainsi la demande : « Cela concerne ton âme. Peins l’image de Dieu dans ton âme. » (EKC, p. 15) Quant à ses supérieures, elles se montrèrent réservées.
Fin février 1931, après son entretien avec son confesseur, la religieuse polonaise est de nouveau sollicitée par sa Vision : « Je désire qu’il y ait une fête de la Miséricorde. Je veux que cette image que TU PEINDRAS AVEC UN PINCEAU soit solennellement bénie, le premier dimanche après Pâques, ce dimanche doit être la fête de la Miséricorde. »
La Mère générale sera avertie du désarroi de sa fille : « La supérieure de Plock me disait que la sœur devait peindre un tableau, mais elle-même ne s’est adressée à moi qu’après être rentrée à Varsovie pour la troisième probation. Je lui ai répondu : “ Très bien, ma sœur, je vous donnerai les peintures et une toile, mettez-vous à le peindre. ”
« Elle est partie consternée et, autant que je sache, elle s’est adressée à plusieurs sœurs leur demandant si elles pouvaient peindre pour elle un tableau du Seigneur Jésus. Elle l’a fait discrètement, mais sans succès, ces sœurs ne sachant pas peindre non plus ; on voyait bien cependant que cette idée la tenaillait. »
Ainsi, la Vision lui avait ordonné de peindre elle-même ce tableau, mais sans lui donner les capacités de le faire (...)... Cette incapacité donnait raison à la mère générale qui était « hantée par l’idée qu’à l’origine des révélations de Faustine ne soient sa fantaisie exagérée ou une hystérie, car, des fois, ce qu’elle annonçait ne se produisait pas. » (EKC p. 20). Mais il y avait là bien plus que fantaisie ou hystérie, car la lumière de cette apparition, bien réelle et constatée, était habitée par un esprit, qui allait se dévoiler et imposer sa volonté d’un culte nouveau de la miséricorde... (...).
La mère Générale s’en remit alors au jugement de deux jésuites, les pères Elter et Andrasz tous deux furent subjugués par sœur Faustine. Mais c’est le troisième, Michal Sopocko, prêtre séculier de 45 ans au visage angélique, qui va faire entrer dans sa “ vie publique ” l’icône du Christ miséricordieux vue et entendue par sœur Faustine le 22 février 1931.
LES DÉSOBÉISSANCES DE L’ABBÉ SOPOCKO
Ewa K. C. insiste beaucoup sur l’extrême prudence de l’abbé Sopocko. Il doute, réfléchit, prie, analyse, se renseigne : « Il a aussi présenté le problème des apparitions de sœur Faustine au très éminent archevêque de Vilnius, Mgr Romuald Jalbrzyskowski. Ce dernier lui a conseillé d’être très prudent, de ne pas céder aux illusions et lui a ordonné de n’en parler à personne. [et donc, ni aux supérieures de la religieuse ni à un peintre éventuel.]
« L’archevêque Jalbrzyskowski était très informé de ses révélations par la supérieure du couvent. Par la suite, la sœur se confessera à lui deux fois pendant l’absence de l’abbé Sopocko en septembre 1935. L’archevêque était très sceptique quant à la véracité de ses révélations. » (EKC, p. 225)
Son nouveau directeur commença par la délivrer d’une impossibilité, celle d’obéir à sa Vision en peignant elle-même l’image demandée, « avec un pinceau », selon l’ordre reçu en février 1931. Il confia cette tâche à Eugène Kazimirowski. L’abbé Sopocko prit cette décision alors qu’il hésitait encore sur la nature de l’Esprit qui était au principe de ces révélations.
La supérieure profitait du jour de promenade des sœurs pour envoyer l’abbé Sopocko et la voyante chez ce peintre. Celle-ci donnait les consignes à l’homme de l’art, et le directeur spirituel prenait un air inspiré pour la pose. Kazimirowski acheva le tableau de Jésus miséricordieux pendant l’été 1934, moyennant finance.
« Sans l’abbé Sopocko [et sa désobéissance à son archevêque], sœur Faustine n’aurait pas réussi à obtenir un tableau de Jésus miséricordieux. » (EKC, p. 397) Cette désobéissance fut doublée d’une autre lorsqu’en avril 1935, sur l’injonction de l’esprit qui guide sœur Faustine, il exposa le tableau de l’apparition du 22 février 1931 à côté de l’icône tutélaire de la Vierge Marie Mère de Miséricorde à la « Porte de l’Aurore »... Puis c’est toujours sans permission de l’archevêque qu’en mars 1936, il installa l’icône du Christ miséricordieux dans l’église saint Michel.
LE PETIT JOURNAL « SENT L’HÉRÉSIE »
L’abbé Sopocko retenait longtemps sa dirigée au confessionnal, ce qui contrariait les autres religieuses dont le temps était compté du fait de leur emploi. Elles voyaient sortir sœur Faustine avec un « visage doux » qui agaçait d’autant plus que celle-ci tardait à revenir ensuite sur le lieu du travail pour aider ses sœurs... Pour remédier à ce désordre, son confesseur lui demanda de rédiger un journal intime.
Sœur Faustine (...) prétendait que Jésus lui-même la poussait à écrire et « qu’il feuilletait son Petit journal pour vérifier ce qu’elle avait rédigé. Il l’appelait secrétaire de la Miséricorde de Dieu. » (EKC, p. 229) (...).
Le Père Jerzy Mrowczynski, vice-promoteur de la foi à son procès informatif de béatification, supervisa la publication de l’intégralité du manuscrit dans une édition critique qui comprend pas moins de neuf cents notes (...). Dans l’introduction à son édition critique, datée du 7 mai 1973, le Père Mrowczynski explique que certaines phrases de la sœur sont « obscures, incompréhensibles ». Parfois, cela « sent l’hérésie » ; du moins si on n’accompagne pas ces phrases de commentaires (éd. Jules Hovine, 1985, p. 15).
Ce constat aurait dû provoquer l’ajournement définitif de l’instruction de son procès de béatification, du moins si l’on suivait encore les règles traditionnelles.
II. CONTRE FAÇON DU MESSAGE DE FATIMA
L’Église maitresse de vérité a le pouvoir et le devoir de discerner les esprits. Les prétendues visions et révélations de sœur Faustine ont été jugées et condamnées par Rome. Reste maintenant à prendre la mesure de la désorientation diabolique qu’elles ont opéré dans l’Église contrefont ou supplantent les visions et révélations de Notre-Dame de Fatima sous tous les rapports ; elles sont aussi la caution mystique d’une hérésie qui a été imposée lors de Vatican II.
DANS LES ABÎMES DE L’ENFER ?
En octobre 1936, c’est-à-dire très tardivement, alors que tout son message est pour ainsi dire formulé, sœur Faustine aurait visité l’enfer : « Elle y fut transférée pour un bref moment : “ Moi, sœur Faustine, par ordre de Dieu, j’ai pénétré les abîmes de l’enfer, pour en parler aux âmes et témoigner que l’enfer existe. Je ne peux en parler maintenant. J’ai l’ordre de Dieu de le laisser par écrit ”, affirmait-elle d’un ton cérémonieux. » (EKC, p. 299). Voici ce qu’elle écrit avec une grandiloquence glaciale :
« C’est un lieu de grands supplices. Et son étendue est terriblement grande. Genres de souffrances que j’ai vues : La première souffrance qui fait l’enfer c’est la perte de Dieu. La deuxième : les perpétuels remords de conscience. La troisième : le sort des damnés ne changera jamais. La quatrième : c’est le feu qui va pénétrer l’âme sans la détruire. C’est une terrible souffrance, car c’est un feu purement spirituel, allumé par la colère de Dieu. La cinquième souffrance, ce sont les ténèbres continuelles, une odeur terrible, étouffante. Et, malgré les ténèbres, les démons et les âmes damnées se voient mutuellement et voient tout le mal des autres et le leur. La sixième souffrance, c’est la continuelle compagnie de Satan. La septième souffrance : un désespoir terrible, la haine de Dieu, les malédictions, les blasphèmes. »
Une telle liste n’a rien à voir avec les descriptions saisissantes d’authentiques voyants qui témoignaient de ce qu’ils avaient vu et entendu, tels le bienheureux Père Hoyos, sainte Thérèse d’Avila, sœur Lucie. Sœur Faustine paraît répéter ce qu’elle a appris par ses lectures et entendu lors de prédications.
À Fatima, la vision de l’enfer est capitale, première. Elle procède du Cœur de notre Dieu navré de voir les âmes s’y précipiter et veut les en empêcher, selon sa Volonté de bon plaisir révélée par Notre-Dame : « Pour les sauver, Dieu veut établir dans le monde la dévotion à mon Cœur Immaculé. » (13 juillet 1917) (...).
CHAPELET CONTRE CHAPELET
Le 13 septembre 1935, sœur Faustine reçoit vision et révélation d’un autre moyen pour sauver les âmes. C’est une parodie du troisième secret de Fatima où elle tient, elle et son “ chapelet de la miséricorde ”, la place de la Sainte Vierge en Personne (...).
« Le soir, quand j’étais dans ma cellule, j’ai vu un Ange, l’exécuteur de la colère de Dieu. Il était en robe claire, la face rayonnante, une nuée sous les pieds, de cette nuée sortait la foudre et des éclairs qu’il lançait de sa main sur la terre.
« Lorsque je vis le signe de la colère de Dieu qui devait frapper la terre, et surtout un certain endroit, qu’évidemment je ne puis nommer, j’ai commencé à prier l’Ange pour qu’il s’arrête quelques instants, lui disant que le monde allait faire pénitence. Mais ma prière n’était rien devant la colère de Dieu (...).
« J’ai commencé à supplier Dieu pour le monde, par des paroles entendues intérieurement. Alors que je priais ainsi, j’ai vu l’impuissance de l’Ange qui ne pouvait accomplir la juste punition qui revient de plein droit aux péchés. Je n’avais encore jamais prié avec tant de force intérieure (...).
« Le lendemain, en entrant dans la chapelle, j’ai entendu intérieurement ces paroles : “ Chaque fois que tu entres à la chapelle, récite tout de suite la prière que je t’ai apprise hier. ” Lorsque j’ai récité cette prière, j’entendis : “ Cette prière doit apaiser Ma colère. Tu vas la réciter pendant neuf jours, sur un chapelet, de la manière suivante : d’abord tu diras un Pater, un Ave et le Je crois en Dieu. Puis sur les grains du Pater, tu vas dire les mots suivants : “ Père Éternel, je Vous offre le Corps, le Sang, l’Âme et la Divinité de votre Fils Bien-Aimé, Notre-Seigneur Jésus-Christ, pour implorer de vous le pardon de nos péchés et ceux du monde entier. ” Sur les grains de l’Ave Maria, tu diras : “ Par sa douloureuse Passion, ayez pitié de nous et du monde entier. ” À la fin tu réciteras trois fois ces paroles : “ Dieu Saint, Dieu Fort, Saint Immortel, ayez pitié de nous et du monde entier. ” » (PJ, 474-476)
« Alors que je priais ainsi, j’ai vu l’impuissance de l’Ange qui ne pouvait accomplir la juste punition qui revient de plein droit aux péchés. » (PJ, 197) (...).
« le pouvoir autonome illimité » de ce chapelet qui s’impose à Dieu même d’une manière automatique et systématique a beaucoup inquiété les autorités romaines, avec raison... Plus facile, plus court, il surclasse le traditionnel chapelet que Notre-Dame du Rosaire de Fatima veut que nous récitions chaque jour. Faustine ici supplante surtout l’Immaculée à qui Dieu a confié tout l’ordre de la miséricorde, et qui seule peut faire obstacle à la sainteté de justice de Dieu, comme le révélait la vision du troisième secret...
LA MISÉRICORDE SANS LA GRÂCE
Le 12 décembre 1936, pour la première fois, sœur Faustine dit “ le chapelet de la miséricorde ” auprès d’un mourant : « Je m’agenouillai près de l’agonisante et je commençai avec toute l’ardeur de mon esprit à dire ce chapelet. Soudain la moribonde ouvrit les yeux, elle me regarda et je n’eus pas le temps d’achever le chapelet qu’elle était morte dans une étrange paix. Je priais ardemment le Seigneur de tenir sa promesse qu’Il m’avait faite pour la récitation de ce chapelet. Le Seigneur me fit connaître que cette âme avait reçu la grâce que le Seigneur m’avait promise. Cette âme était la première qui ait obtenu la promesse du Seigneur. Je sentais comment la force de la miséricorde entourait cette âme. » (PJ, 810)
Cette agonisante a-t-elle reçu les derniers sacrements ? Sœur Faustine ne dit rien à ce sujet, il n’en est pas question. Elle poursuit : « En entrant dans ma solitude, j’entendis ces paroles : “ À l’heure de sa mort, je défends comme ma propre gloire chaque âme qui récite ce chapelet elle-même, ou bien si d’autres le récitent près de l’agonisant – l’indulgence est la même. Quand on récite ce chapelet auprès de l’agonisant, la colère divine s’apaise, la miséricorde insondable s’empare de son âme, les entrailles de ma miséricorde sont émues par la douloureuse passion de mon Fils. ” » (PJ, 811)
C’est “ automatique ”, peu importe si l’agonisant manifeste ou non un repentir, une volonté de se confesser. Le seul énoncé des paroles de la prière opère à la manière de la formule sacramentelle de l’absolution, ex opere operato, et obtient le salut éternel de l’âme.
Cette prétendue “ miséricorde ” recouvre le pécheur d’un manteau qui lui fait trouver grâce aux yeux du Seigneur, sans contrition ni repentir de sa part, voire même sans la moindre conscience.
RÉPROUVÉE PAR LE SAINT-OFFICE.
C’est ce nouvel Évangile que rejetèrent les théologiens du Saint-Office, à Rome, lors de l’examen de ses écrits et demandes : « Dans les années 1950, les relateurs [sic] du Saint-Office contestaient avant tout le fait que le culte du tableau de Jésus miséricordieux, ainsi que la fête de la miséricorde divine et le chapelet à la miséricorde divine recevaient apparemment dans les révélations de sœur Faustine un pouvoir autonome illimité. Comme quoi il suffirait de vénérer le tableau et de propager son culte pour pouvoir obtenir la vie éternelle. » (EKC, p. 379)
Le sens obvie des paroles de la Vision accorde la Miséricorde divine aux fidèles non pas par le truchement de l’Église catholique et hiérarchique, sa prédication, ses sacrements et son gouvernement des âmes, mais par le “ culte de la Miséricorde ”, selon les pratiques de sœur Faustine, c’est-à-dire par des pratiques dévotionnelles abusives, comme l’écrivit le Saint-Office au cardinal primat Wyszynski le 19 novembre 1958 (Dictionnaire de Spiritualité, t. 7, col 1774) (...).
FÊTE DE LA MISÉRICORDE... POUR OBTENIR LA PAIX ?
En 1934, sœur Faustine entend ces paroles à l’adresse de l’abbé Sopocko : « Demande à mon fidèle serviteur de proclamer en ce jour (1er dimanche après Pâques) ma grande miséricorde au monde entier. Qui s’approchera ce jour-là de la Source de Vie obtiendra une totale rémission de ses péchés et de leurs châtiments. »
Ces derniers incluant la « guerre » causée par « les erreurs de la Russie » qui plongent l’Espagne dans le chaos en 1934, selon le grand “ secret ” de Fatima, qui établissait le Cœur Immaculé de Marie “ ministre ” de la Miséricorde. Ici, rien de tel : « L’humanité ne trouvera pas la PAIX tant qu’elle ne se tournera pas avec confiance vers ma miséricorde. » (PJ, 300)
Qu’est-ce que cette « Source de Vie » dont il faut s’approcher pour obtenir les mêmes grâces qu’une absolution sacramentelle avec, de surcroît, une indulgence plénière ?
Pour tenter de rendre catholique une telle révélation, Ewa K. C. identifie cette « Source de Vie » à “ la confession et à la communion eucharistique ” (EKC, p. 171). Deux ans plus tard, dans le récit d’une autre “ révélation ” (PJ, 699), on trouvera la mention de la confession et de la communion, mais avec une confusion entre d’une part le pardon des péchés et, d’autre part, la remise des peines que l’on gagne ici-bas par les indulgences. Comme si l’absolution sacramentelle nous obtenait l’une et l’autre. Dans ces deux textes, la nécessité de faire « de dignes fruits de pénitence » (Lc 3, 8), d’expier et de réparer, est totalement occultée.
Selon sœur Faustine, la paix du monde est directement liée à la « Miséricorde, le plus grand attribut de Dieu ». Pour obtenir cette paix, il suffit que l’humanité se tourne avec confiance vers cette « miséricorde ».
À Fatima, en 1917, au cours d’apparitions dont l’authenticité est attestée par le plus grand miracle cosmique de l’histoire universelle, Dieu a promis d’accorder la paix au monde par la médiation du Cœur Immaculé de Marie. Assurément, il y a mis une condition sine qua non : la dévotion au Cœur Immaculé de Marie. Il ne suffit pas de se tourner vers un « attribut de Dieu », il faut obéir. L’obéissance du Saint-Père à deux demandes, l’approbation de la communion réparatrice des cinq premiers samedis du mois, et la consécration collégiale de la Russie au Cœur Immaculé de Marie, doit glorifier à jamais ce Cœur Immaculé et accorder au monde « un certain temps de paix » (...).
LA VRAIE ICÔNE DE L’AMOUR MISÉRICORDIEUX
L’atmosphère surnaturelle qui enveloppe les visions et révélations de Fatima est débordante d’amour compatissant pour les pécheurs qui sont sur le chemin de l’enfer ; c’est un appel à la charité afin d’aider au salut éternel des âmes par la prière et le sacrifice à l’imitation des saints petits voyants, Lucie, Jacinthe et François... Faustine et Wojtyla ont imposé à l’Église une inquiétante icône de l’amour miséricordieux qui a supplanté la théophanie trinitaire contemplée par sœur Lucie le 13 juin 1929, révélation de l’unique source de la grâce et de la miséricorde, renouvelant sans cesse le divin mystère de la Rédemption.
GRÂCE ET MISÉRICORDE
Tout le mystère de la circumincessante charité eucharistique et mariale s’y trouvait révélé, selon lequel la « grâce » et la « miséricorde » sont répandues dans le monde entier par le Cœur Immaculé de Marie. En effet, « sous le bras gauche de la Croix, se trouvaient de grandes lettres, comme d’une eau cristalline qui aurait coulé au-dessus de l’autel, formant ces mots : “ Grâce et Miséricorde ” ». Tandis que « sous le bras droit de la Croix, se trouvait Notre-Dame, avec son Cœur Immaculé dans la main, sans épée ni roses, mais avec une couronne d’épines et des flammes ».
La « Grâce » est à la fois la source d’un don en Dieu et l’effet de ce don en Celle qui le reçoit, « pleine de grâce » (Lc 1, 28). « La Grâce, c’est la beauté et la gratuité. À la racine de ces deux réalités attirantes que désigne le même mot mystérieux, nous trouvons le don de Dieu. » (Georges de Nantes, CRC n° 123, novembre 1977, p. 12)
Ainsi, l’Immaculée Conception offre son Cœur Immaculé d’Épouse du divin Crucifié, Corédemptrice et « réparatrice de l’humanité déchue » (saint Pie X), Cœur de la Mère de Dieu, Médiatrice de la Grâce et dispensatrice universelle de la Miséricorde sur toute l’humanité rachetée au Calvaire. La liturgie célébrée en l’honneur de son Cœur Immaculé nous invite instamment à recourir à sa médiation : « Approchons-nous avec confiance du Trône de la Grâce, pour obtenir Miséricorde et trouver Grâce, pour le secours dont nous avons besoin. »
LA POLOGNE SUPPLANTE LA RUSSIE !
Lors de la théophanie de Tuy, Notre-Dame avertissait sa messagère que le moment était venu où Dieu demandait au Saint-Père d’accomplir la consécration collégiale de la Russie à son Cœur Immaculé, promettant de la sauver par ce moyen. Dieu étant « disposé à user de miséricorde envers la pauvre Russie ».
La Russie est donc la nation privilégiée, objet des complaisances du Cœur de Dieu, par “ Grâce ”. En se convertissant, elle aura un rôle décisif dans la réalisation du grand dessein divin de “ Miséricorde ” pour notre temps. Or sœur Faustine l’ignore. Pire ! sa Vision en prend le contre-pied. Le 16 décembre 1936, la religieuse polonaise écrit : « J’ai offert ce jour pour la Russie, j’ai offert pour ce pauvre pays toutes mes souffrances et mes prières. Après la sainte Communion, Jésus me dit : “ Je ne peux plus tolérer ce pays, ne me lie pas les mains, ma fille ! ” » L’Esprit qui l’inspire substitue à la Russie la Pologne. La Vision lui dit :
« J’aime particulièrement la Pologne, et si elle obéit à ma volonté, je l’élèverais en puissance et en sainteté. D’elle sortira l’étincelle qui préparera le monde à mon ultime venue. » (PJ, 1731)
Une étincelle a bien jailli de la Pologne en 1938, mais elle a mis le feu au monde. Une étincelle a bien jailli de la Pologne en 1978, avec l’élection de Jean-Paul II sur le trône de Pierre.
FAUSTINE SUPPLANTE LE CŒUR IMMACULÉ DE MARIE !
Plus encore que la Pologne, c’est elle-même, sœur Faustine, qui prépare la venue dernière du Christ. En effet, elle applique à sa propre personne les prophéties de saint Louis-Marie Grignion de Montfort concernant l’Immaculée Mère de Dieu (Traité de la vraie dévotion, n° 49-50). Elle devient rien de moins que la “ Femme bénie entre toutes les femmes ”. :
« Je vis le Seigneur Jésus en grande Majesté... Une force s’empara de mon âme, un feu étrange s’alluma dans mon cœur et j’entrai dans une sorte d’agonie pour Lui. Soudain, j’entendis ces mots : « “ Avec aucune âme je m’unis aussi étroitement qu’avec la tienne et cela en raison de ta profonde humilité (sic) et de l’ardent amour que tu as pour moi ”. » (PJ, 587) « Tu prépareras le monde à Ma venue dernière. » (PJ, 429)
La Vision déclare la religieuse Médiatrice : « Je désire que ton cœur soit la demeure de ma miséricorde. Je désire que cette miséricorde se répande sur le monde entier par ton cœur. » (PJ, 1777)
Et la sœur de répondre : « Ô mon Dieu, je suis consciente de ma mission dans la Sainte Église. Mon incessant effort doit être la prière pour obtenir la miséricorde pour le monde. Je m’unis étroitement à Jésus et je me tiens devant Lui, comme une offrande suppliante pour le monde. Dieu ne me refusera rien si je Le supplie par la Voix de son Fils. » (PJ, 482) Et non par l’intercession de Marie Médiatrice ?!
SŒUR FAUSTINE, UNE SAINTE ?
La réforme de la procédure des procès de béatification imposée par Jean-Paul II en 1983, dans la Constitution Divinus perfectionis magister, permet désormais à un “ serviteur de Dieu ” qui « sent l’hérésie » d’être béatifié puisque les échanges contradictoires ont presque entièrement disparu de la nouvelle procédure (...).
Pour le cas Faustine, la biographie d’Ewa K. laisse entrevoir qu’il y a eu des oppositions, ne serait-ce que celle du seul exposé des faits... Mais en avril 1978, personne ne résista à la volonté d’un cardinal, disciple très apprécié du pape Paul VI, considéré par tous ses confrères comme l’étoile montante de l’épiscopat mondial, et prochain papabile... Mais pourquoi Karol Wojtyla, le pape Paul VI, Benoît XVI ont-ils accordé tant d’importance au dossier Faustine Kowalska ?
SŒUR FAUSTINE GARANTE DE KAROL WOJTYLA
Ewa K. C. constate le caractère novateur de la miséricorde que personne ne connaissait dans l’Église avant que la révélation en soit faite à sœur Faustine ; elle remarque surtout que ce caractère novateur est un des ressorts de la pensée de Jean-Paul II (...).
Dans le commentaire de l’encyclique Dives in Misericordia, l’abbé de Nantes, démasque le principe et fondement d’une « nouvelle manière de penser et de sentir » autrement dit d’une gnose. À la traditionnelle pitié de notre Père Céleste pour l’homme indigne et coupable qui, par son péché, a perdu sa filiation et mérite sa colère, Jean-Paul II substitue un “ droit ” du pécheur à la miséricorde, car au plus profond de lui-même il découvre une dignité qui s’impose à Dieu, celle d’être homme.
La “ Miséricorde ” devient alors le résultat d’une double exigence : le fils en tant que fils exige la miséricorde, et le père en tant que père est contraint de faire miséricorde. Dieu “ doit ” la miséricorde à l’homme au nom de sa “ dignité ” native, naturelle (...).
WOJTYLA – FAUSTYNA – VATICAN II : MÊME GNOSE
Pendant sa retraite qui débute le 1er août 1937, la Vision dicte à sœur Faustine une neuvaine de prières qui devront être dites chaque jour, du Vendredi saint au premier dimanche après Pâques, fête de la miséricorde.
« Chaque jour tu amèneras jusqu’à Mon Cœur un nouveau groupe d’âmes et tu les plongeras dans l’immensité de Ma Miséricorde. Et moi, je les conduirai toutes dans la maison de mon Père. Tu feras cela en cette vie et en l’autre. » (...).
La conception de la Miséricorde de la religieuse polonaise s’accorde donc parfaitement avec celle du Pape polonais, dans leur nouveauté : c’est « une mécanique du pardon », comme expliquait l’abbé de Nantes dans son commentaire de Dives in Misericordia (...).
L’HÉRÉSIE DE GAUDIUM ET SPES
Or, c’est cette mécanique du pardon sans condition, principe et fondement du culte de la miséricorde selon Faustine, qui va se retrouver sur proposition de Mgr Wojtyla, inscrite en toutes lettres dans la constitution Gaudium et Spes (GS 22, 2). C’est pourquoi il ne cessera de répéter dans ses encycliques en l’accentuant davantage : « Par son incarnation, le Christ s’est en quelque sorte uni à l’homme, à chaque homme sans aucune exception [quelle que soit sa religion] même si ce dernier n’en est pas conscient. » (Redemptor hominis nos 10 et 14)
Selon cette gnose, il existe une réalité divine à l’œuvre dans l’homme, dans tout homme, qui n’est pas liée, comme on le pensait jadis, au Baptême ou à l’Eucharistie ni à aucun autre sacrement, source de la Grâce, mais qui résulte directement, ipso facto, c’est-à-dire d’une manière mécanique, « solo mecano » (Autodafé, p. 372), du seul fait de l’Incarnation et de la création.
JEAN-PAUL II... L’HÉRÉSIARQUE
Avant le concile Vatican II, observait l’abbé de Nantes, les catholiques polonais savaient que « la vie n’est qu’un passage difficile, un temps d’épreuve, une “ vallée de larmes ”. Il faut beaucoup prier, comme on a toujours prié, faire pénitence, souffrir, porter sa croix, vaincre le péché, craindre l’enfer, mourir muni des sacrements de l’Église pour aller enfin au Ciel, unique objet de nos travaux. »
Ayant rompu avec cette tradition, la religion du jeune étudiant Wojtyla est devenue une gnose développée à partir d’une erreur fondamentale qui sera insérée dans la Constitution conciliaire Gaudium et Spes : « Par son incarnation, le Fils de Dieu s’est en quelque sorte uni lui-même à tout homme. » (22, 2)
Dans cette gnose, la Miséricorde devient un droit de l’homme en vertu de sa dignité sans égale et inaliénable. Donc, tous les hommes sont sauvés. C’est pourquoi l’abbé de Nantes a publiquement accusé le pape Jean-Paul II d’être un « hérésiarque », c’est-à-dire le créateur « d’une doctrine perfide, contraire à notre sainte religion chrétienne dans son principe, dans son essence et dans sa fin. Qu’il soit donc anathème m’apparaît très certain. » (CRC n° 230, février 1987, p. 1). Cette accusation demeure en attente d’un jugement infaillible des plus hautes autorités de l’Église (...).
JUGEMENT
Les “ visions ” de la religieuse polonaise ne sont pas un rappel, une suite ou un développement du message de Fatima, mais l’absolue contradiction du grand Secret du 13 juillet 1917. Elles ont été légitimement condamnées par l’Église, et cette condamnation condamne par conséquent sans appel Wojtyla-Jean-Paul II, le promoteur de la plus formidable désorientation diabolique de toute l’histoire de l’Église.
Extraits de Il est ressuscité ! n° 162, avril 2016