La circumincessante charité
Intermède sur saint Joseph
LES trois premiers chapitres de la circumincessante charité nous ont expliqué comment Dieu le Père avait repris son alliance avec l’homme, après le drame du péché originel. Grâce au sacrifice de la Croix, Jésus et Marie déversent de nouveau dans les âmes qui s’approchent d’eux, la vie divine. La bonté et miséricorde de notre Père Céleste est donc la source de cette charité qu’Il nous communique par tout le réseau de nos relations d’origine et de grâce qui unissent le Ciel et la terre. Dans une nouvelle partie, il nous faut voir maintenant, comment cette charité reçue du Ciel va circuler entre nous et va imprégner, informer toute notre vie d’enfants, de frères et sœurs, d’époux et d'épouse, de père et de mère, d’amis. Ce sera l’exposé de cette charité fraternelle qui s’épanouit au Ciel dans la plénitude de la circumincessante charité divine.
Mais avant, en guise de transition, faisons une station auprès de saint Joseph, car il va être notre modèle parfait : un chaînon très important de la circumincessante charité. Ce n’est pas sans raison qu’il est le patron de l’Église universelle et qu’il est apparu, en gloire, dans le Ciel de Fatima, bénissant la terre.
« J. M. J. »
Jésus, Marie, Joseph
À l’heure où les grands rassemblements de jeunes galvaudent ces initiales, revenons à ces chères invocations que nos grands-parents inscrivaient en tête de leurs cahiers d’école catholique : JMJ au-dessous d’une croix, comme un appel à nos chéris protecteurs, et cela disait « Jésus, Marie, Joseph ! »
En effet, dans la circumincessante charité divine, nous en sommes à l’endroit précis de notre insertion dans la chaîne, au moment de notre naissance à la grâce de notre Père Céleste, dans l’irruption en nous du flot de l’eau vive émanée des Saints Cœurs de Jésus et Marie, de notre baptême. Et notre Père nous interpelle : « Ne sentez-vous pas qu’il manque quelqu’un ? N’avez-vous pas l’idée de lever les yeux vers quelqu’un qui ne parle guère, mais qui ne cesse d’agir et de s’activer en notre faveur ? Il ne faut pas manquer de tourner les yeux vers saint Joseph, car c’est lui, sous peine d’obstruer le courant de la grâce entre Dieu, la Sainte Vierge et nous. “ Ah ! Vous ne priez pas notre grand saint Joseph ? Eh bien ! Je ne prierai pas pour vous ! ” dit la Sainte Vierge. »
Nous allons donc raviver nos relations avec saint Joseph, en commençant par admirer ses propres relations avec la Sainte Trinité et avec la Vierge Marie ; puis nous étudierons sa carrière sacrée et comment l’unir à notre propre recherche de la grâce et de la perfection chrétienne.
Avant sa rencontre avec la Vierge Marie
Saint Joseph était « un homme juste », simple, pieux, serviteur de Dieu. Notre Père l’a toujours imaginé âgé, car n’ayant pas le privilège de la justice originelle comme l’Immaculée Conception, il a dû acquérir par vertu cette perfection de sainteté qui lui a mérité de devenir l’époux de la Vierge Marie et le père adoptif de l’Enfant-Jésus. Cet homme sage, prudent, craignant Dieu était appliqué à scruter la sainte Écriture, en particulier les psaumes et à tenter de conformer sa vie le plus exactement possible à la volonté de Dieu. Fidèle à la loi de Dieu comme Abraham, chaste comme le Joseph de l’Ancien Testament, ce saint patriarche était en attente du Messie. Et alors qu’il était de la race de David, donc de dynastie royale, il était humble.
Dès cette première étape de sa vie, préparatoire, notre Père nous le donne comme modèle de l’enfance spirituelle qui nous est si nécessaire puisque notre relation première d’enfant de notre Père Céleste durera toute notre vie jusqu’au Ciel. Saint Joseph a reçu le pouvoir d’être fils de Dieu, vraiment enfant de Dieu plus qu’aucun autre, excepté Jésus et Marie. Voyons donc saint Joseph tout humble, abandonné, confiant, reconnaissant à Dieu dans cet état d’enfance spirituelle. Il a grandi en perfection même avant cette vocation unique qui va lui advenir, se perfectionnant dans l’amour de Dieu, comme un enfant obéissant entre les mains de son père. Il est véritablement notre patron. Il est non seulement le patron de la bonne mort, mais aussi de la bonne vie ! Ayons donc une dévotion au Cœur doux et humble de saint Joseph.
Premier don mystique de saint Joseph :
son saint mariage avec la Vierge Marie.
Dans le premier chapitre de saint Matthieu (v. 18 à 25), saint Joseph entre tout d’un coup d’une manière stupéfiante, dans le torrent de la circumincessante charité. Dieu s’intéresse à lui, le tire de l’ombre. Il est choisi comme la tradition nous le rapporte, par les saints parents de la Vierge Marie, comme celui qui serait capable de devenir, s’il le voulait, l’époux de leur sainte enfant de quinze ans, tellement pure et vierge qu’elle ne pensait qu’à une chose : se consacrer tout entière et pour la vie à Dieu. Saint Joseph serait pour elle un époux protecteur qui entrerait dans ses vues, une femme ne pouvant rester seule à cette époque en Orient. C’est ainsi qu’un jour entre les jours, cet homme pieux, solitaire, silencieux, consommé en sainteté, fut mis en présence de la douce Vierge Marie. Cette rencontre fut pour notre saint une grâce mystique extraordinaire que notre Père nous fait comprendre en s’aidant du Panégyrique de saint Joseph, que Bossuet prêcha en 1660. Ce fut un choc, le miracle de l’Immaculée Conception : cette Vierge ne respirant que la perfection divine, Colombe du Saint-Esprit, était saisissante, sanctifiante. Ce fut un éblouissement pour lui : il découvrait sur son visage la sainteté de Dieu. Ici, notre Père corrige un peu Bossuet en nous montrant non pas la Sainte Vierge et saint Joseph s’aimant l’un l’autre saintement dans un duo fermé sur lui-même, mais en nous faisant voir, comme au Paradis, Dieu le Père comme la Première Personne dans l’Amour. Quelle richesse alors dans la contemplation de ces chastes épousailles que notre Père propose ensuite en modèle à imiter.
Quand saint Joseph considère la Sainte Vierge, il ne s’enfonce pas dans son Cœur, ne s’y arrête pas comme son but ultime. La Vierge Marie ne pouvait pas arrêter à Elle le regard de saint Joseph. Elle était porteuse de Dieu, c’est donc la gloire de Dieu qui rayonnait sur son visage. C’est cette présence de Dieu en Marie qui fut comme un toucher divin miraculeux dans l’âme mystique de saint Joseph. Par la Vierge Marie, dans une saisie intuitive, il va vers le Père. Le voilà confondu à cause de cette relation d’amour tout à fait singulière du Père Céleste pour lui, pauvre menuisier de Nazareth. Dieu lui donne la Vierge Marie pour épouse !
Ce don mystique qui fait entrer saint Joseph dans une ardeur plus vive d’un amour de Dieu, par Marie, se double d’un don moral. Cette enfant de la grâce en était l’occasion et comme le sacrement, venant de Dieu et l’élevant vers Dieu, le sanctifiait, le consacrait, le réservait à Dieu seul. Il ne le concédait pas à Marie, comme dit Bossuet, il le concédait à Dieu par Marie et aussi pour Marie.
C’est l’occasion pour notre Père de prêcher cette pureté positive qui découle de sa mystique.
Bien sûr, avant de rencontrer la Vierge Marie, saint Joseph avait combattu contre tous les désordres, toutes les tentations, même légères, pour ne pas céder aux instincts déréglés de la chair. Mais si la vertu de chasteté, explique notre Père, est toujours donnée comme une vertu négative de refus, n’ayant rien de positif, elle ne sera jamais mystique, elle ne sera jamais une force de l’âme dans la vie spirituelle. Voilà la leçon que ce bon saint Joseph peut nous donner : rencontrant la plus belle, la plus parfaite des créatures, l’Immaculée Conception, son cœur s’est jeté vers cette créature empreinte de la gloire et de la beauté de Dieu. Loin de se détourner d’Elle, puisqu’Elle est parfaite et non ambigüe comme Ève, il a pu se jeter en Elle pour ainsi dire, lui donner son cœur et trouver en Elle la marque de Dieu, le don de Dieu : c'est cela la pureté, la virginité, à savoir que cette attirance exclusive vers Dieu qui trouve dans la créature non pas toujours un obstacle, mais un sacrement de Dieu, exclut, sans qu’il y pense le moins du monde, tout autre emploi d’aucune parcelle même de son être corporel et spirituel. « Mon cœur est pris », comme disait le Père Chevrier à une da-dame qui essayait probablement de s’attacher un peu trop à lui. C’était simple ! En quatre mots, ce prêtre avait résolu son problème. La virginité, alors, est un plein emploi de toutes les facultés. Inutile de dire combien cet enseignement est de la plus urgente actualité !
Après cette première rencontre avec cet homme déjà pur, déjà continent avec la Vierge Marie, imaginons son Magnificat ! « Comment ! à moi ? Elle ! Toute la vie ? Est-ce possible, Dieu-Jésus ! » C’est un sentiment sidéré, adorant, du don qui lui était fait. Ce cher enfant, saint Joseph, cette âme d’enfant devient tout à coup ravi d’amour de Dieu par Marie ! Son action de grâces à ce moment-là est délirante.
Bossuet explique que le mariage de saint Joseph avec la Vierge Marie est le plus grand, le plus vrai mariage qui existe. Il y a entre eux « le contrat sacré par lequel ceux que l’on unit se donnent entièrement l’un à l’autre », mais ici, « ils se donnent réciproquement leur virginité » et « toute la fidélité de ce mariage consiste à garder cette virginité. » Saint Joseph avait une telle joie à contempler la pureté de la Vierge qu’il s’y récréait et, évidemment, la conservait donc. « Ce sont deux virginités qui s’unissent pour se conserver éternellement l’une l’autre par une chaste correspondance de désirs pudiques » et mystiques. Quant à l’amour conjugal, rien ne pourra jamais égaler l’ardeur de leur amour tout céleste. Quand saint Joseph regardait la Vierge, Elle lui faisait davantage connaître la gloire de Dieu qu’Elle rayonnait. Tous les attributs divins se reflétaient sur le miroir de son visage et de tout son être et il l’aimait donc vraiment, intensément selon Dieu avec une grande liberté ; notre Père fait appel à une maxime de saint Jean de la Croix qui explique bien : « Quand l’amour et l’affection que l’on porte à la créature est tout spirituel et fondé en Dieu, il développe, en grandissant, l’amour de Dieu dans l’âme ; plus alors l’âme se souvient du prochain, plus aussi elle se souvient de Dieu et le désire ». Voilà le saint mariage de la Sainte Vierge et de saint Joseph sur lequel notre Père a écrit des pages mystiques incomparables.
N’en citons que quelques passages, tirés de ses Lettres à mes amis nos 98, 99, 102 et 104 :
« Plus que le premier couple humain, ce sont eux, ces premiers époux chrétiens qui nous paraissent ouvrir notre Histoire, dans une gloire qui charme la sensibilité, enchaîne le cœur, donne son envol à l’âme contemplative vers les cimes de l’Amour. Nouvel Adam, nouvelle Ève voudrait-on dire, dans leur sagesse et la limpidité de leur regard et de leur vie. (...) Dès qu’ils apparaissent, aux premières pages de l’Évangile, le serpent est sous leurs pieds, leurs âmes sont établies dans la paix, la grâce emplit leur demeure. (...) Nous les voyons dans une attitude simple, heureuse et modeste, l’un près de l’autre comme des époux qu’habite un tranquille et sûr amour mutuel. (...) En quoi consistait un amour conjugal fait de pudeur, de réserve, de discrétion, de silence, de séparation ? En une inhabitation mutuelle, à l’image du mystère trinitaire. Lui habitait en Elle, et Elle en lui, sans cesse et sans réticence. La présence de Marie était d’une densité extraordinaire. Saint Joseph aussi, sans s’en rendre compte, avait sur Elle le même rayonnement. “ Comme il aime Dieu, comme il le sert ! Qu’il est honnête, juste, bon ! Quel dévouement admirable. Quel saint ! ” (...) Et lui, c’était secrètement d’autres litanies qui déjà chantaient ses vertus. Elle le sanctifiait par sa seule présence. »
Puis vint l’Annonciation à la Vierge Marie et un jour, saint Joseph vit qu’Elle attendait un enfant. C’est alors que commença une agonie pour saint Joseph qui vénérait déjà la Vierge Marie comme l’Arche d’Alliance. Il comprit tout de suite que c’était Elle dont le prophète Isaïe avait dit : « La Vierge concevra et enfantera un Fils. Il s’appellera Emmanuel, Dieu avec nous ». Il s’est dit : « C’est la Mère du Sauveur ! Comment n’y ai-je pas pensé ? Une femme incomparable, comme il n’y en a jamais eu, comme il n’y en aura jamais. Je comprends, ce ventre arrondi de cette enfant de quinze ans qui va donner naissance au Messie ! Je ne suis pas digne. Je vais la renvoyer à ses parents. » La loi de Dieu donnée à Moïse, souveraine, lui ordonnait de la renvoyer. Le sacrifice d’Abraham n’était rien en regard de cette décision affreuse de devoir se séparer de son Épouse Immaculée et d’un enfant qu’Elle portait pour obéir à la loi de Dieu. C’est alors qu’il eut, à son tour, son annonciation. L’Ange du Seigneur lui porta la bonne nouvelle : « Joseph, fils de David, ne craignez pas de prendre Marie pour votre épouse : ce qui est né en Elle est en effet l’œuvre de l’Esprit Saint ».
C’est alors que saint Joseph devint le père adoptif de Jésus. Il reçut un cœur de père, une participation de l’amour même que Dieu le Père avait de toute éternité bien spécifiquement pour Jésus.
Citons Bossuet qui l’explique lumineusement :
« Ce n’est pas assez au Père éternel d’avoir confié à saint Joseph la virginité de Marie (...), il va mettre en ses mains Jésus-Christ lui-même et Il veut le conserver par ses soins. (...) Depuis ce temps-là, saint Joseph ne vit plus que pour Jésus-Christ. (...) Voyez donc le secret de Dieu et l’accommodement qu’Il invente entre la paternité de Joseph et la pureté virginale. (...) Il y a quelque chose dans le nom de père que la virginité ne peut pas souffrir ; vous ne l’aurez pas, ô Joseph ! Mais tout le reste, je vous le donne, dit Dieu. Donc, Marie ne concevra pas de Joseph parce que la virginité y serait blessée ; mais Joseph partagera avec Marie ces soins, ces veilles, ces inquiétudes, par lesquels Elle élèvera ce divin Enfant ; et il ressentira pour Jésus cette inclination naturelle, toutes ces douces émotions, tous ces tendres empressements d’un cœur paternel. Mais peut-être me demanderez-vous où il prendra ce cœur paternel si la nature ne le lui donne pas ? (...) Si donc saint Joseph n’est pas père, comment aura-t-il un amour de père ? (...) »
C’est Dieu qui forme les cœurs, qui les pétrit comme Il veut. Il va faire à saint Joseph un cœur de père, par un effet de sa toute-puissance divine :
« Le vrai Père de Jésus-Christ, ce Dieu qui l’engendre dans l’éternité, ayant choisi le divin Joseph pour servir de père au milieu des temps à son Fils Unique a fait, en quelque sorte, couler en son sein quelque rayon ou quelque étincelle de cet amour infini qu’Il a pour son Fils : c’est ce qui lui change le cœur, c’est ce qui lui donne un amour de père. Si bien que le juste Joseph qui sent en lui-même un cœur paternel, formé tout à coup par la main de Dieu, sent aussi que Dieu lui ordonne d’user d’une autorité paternelle ; et il ose bien commander à celui qu’il reconnaît pour son maître. »
Quelle merveille de circumincessante charité ! Du Cœur de Dieu, du sein de Dieu coule dans le sein de saint Joseph le propre amour paternel de Dieu le Père ! Saint Joseph se trouve tout à coup enflammé en son cœur d’un amour bien spécifique et particulier qui s’appelle l’amour paternel, par lequel un père est viscéralement attaché à son enfant. Pour saint Joseph, Dieu a suppléé à l’absence d’instinct charnel, tirant de son propre Cœur un amour tendre et paternel pour l’Enfant-Jésus. Quand vint le moment de la nativité, l’humble et pudique Joseph se retire dans l’ombre, s’écartant sous les étoiles pendant que la Vierge Immaculée donne la vie à son Enfant, seule, comme une Reine, sans douleur ni peine. « Elle enfanta son Fils premier né. Elle l’enveloppa de langes et le coucha dans une crèche. » Puis, bien vite, Elle appela saint Joseph pour qu’il l’adore lui aussi, car cet Enfant était maintenant le sien aussi, de par le don indicible que Dieu lui avait fait, versant en son cœur son amour ardent pour l’Enfant-Jésus. Dans ses sermons de Noël, notre Père aimait nous montrer saint Joseph comme “ le ravi ” de nos pastorales provençales. Il est dans un ravissement perpétuel et une adoration profonde. Il admire et se tait ; des larmes de joie coulent de ses yeux. « J’aime, nous disait notre Père, qu’on représente la Vierge Marie et saint Joseph comme des santons silencieux pleins d’amour et d’adoration, dans une extrême simplicité, douceur, joie intime. Cela s’est passé dans un très grand silence : chacun est plongé dans la contemplation du mystère qui s’accomplit en l’un et en l’autre, Joseph plein d’une admiration immense pour Marie, Marie pleine de confiance pour Joseph, et tous deux regardant l’Enfant dont ils savent qu’Il est le Fils de Dieu. »
Après la Présentation de l’Enfant-Jésus au Temple, où la Vierge Marie et saint Joseph ont appris que cet Enfant serait un signe de contradiction, et qu’un glaive de douleur transpercerait le Cœur de la Vierge Marie, saint Joseph fut averti en songe de partir, car on cherchait à attenter à la vie de l’Enfant. Commencent donc l’angoisse, les tracas, les tourments, l’inquiétude. C’est la fuite en Égypte.
Puis lorsque Jésus, à l’âge de douze ans, restera au Temple de Jérusalem, ce sera une angoisse pour ses saints parents, et la Vierge Marie dira à Jésus : « Votre père et moi vous cherchions angoissés », disant bien ainsi que Joseph est le père de Jésus. Il a pour lui toutes les tendresses, affections, douces émotions ; il partage aussi les angoisses et sollicitudes de son Père céleste. Car l’Enfant Jésus est bien « cet Enfant incommode qui partout où Il entre, entre avec sa Croix », selon cette belle parole de Bossuet. Saint Joseph manifeste dans toutes ces circonstances de la vie cachée de Jésus une fidélité à toute épreuve. Et Bossuet met aussi en lumière deux autres vertus de saint Joseph à Nazareth : l’humilité et l’obéissance. « Il appréhende les yeux des hommes et ne veut pas se montrer au monde, mais il aime se cacher avec Jésus-Christ. »
« Toute la vie de saint Joseph nous est inconnue, dit encore notre Père. Voilà qu’il faut que j’en parle ! Que pourrai-je en dire sinon que cette dissimulation de ses vertus est une grande leçon pour notre orgueil, notre vanité, notre jactance, notre désir de paraître... Aimons donc cette vie cachée où Jésus s’est enveloppé avec Joseph. » Et notre Père de conclure en nous invitant à entrer dans le cœur mystique de saint Joseph qui a grandi chaque jour dans l’amour de Dieu, par le ministère de la Vierge Marie, dans son cœur doux et humble. Il n’a tiré aucun bénéfice, ni matériel ni vaniteux, aucune gloriole d’avoir été le témoin et le protecteur de cet enfantement merveilleux d’un Dieu fait homme, rien ! Sa vie sera un rien ! Il garde le secret de l’Incarnation dans une existence qui est nulle ! Comme quoi on peut être grand selon Dieu, mystique, en étant toujours de plus en plus abaissé. Et dans les continuelles épreuves de la vie cachée, Dieu tirera du cœur de saint Joseph un amour de plus en plus méritant, héroïque et à la fin, glorieux.
Saint Joseph est donc notre Patron à bien des titres ! Lui qui a reçu, comme un baptême inouï, la triple relation divine d’être uni à Dieu dans une commune paternité, plus qu’image et ressemblance, uni à Jésus dans une divine filiation et uni à Marie dans de confondantes épousailles virginales.
Dans ses relations, il est un réservoir d’exemples de mérites, de vertus dans lesquelles nous pouvons puiser pour les imiter, dans la mesure où nous voudrons être les amis, les fervents de saint Joseph. Nos relations avec le Ciel et entre nous sont un peu semblables. Ainsi, nous anticipons sur ce qui va faire l’objet de notre dernière partie : la charité fraternelle, en prenant saint Joseph comme modèle pour expliquer nos liens personnels : comment suis-je avec mon père, comment suis-je avec ma mère ? C’est vrai que je suis un peu avec mon père, avec ma mère, comme l’Enfant-Jésus a été avec saint Joseph et avec la Sainte Vierge. Saint Joseph, c’est d’une manière tout à fait unique et incomparable puisque c’est le Cœur de Dieu qui, pour ainsi dire, s’est ouvert pour lui seul afin de laisser couler un torrent d’amour nuptial ou conjugal. De même, saint Joseph a avec la Sainte Trinité, des relations d’une qualité, d’une abondance et d’une perfection rares qui en font un très grand saint, le Patron de l’Église universelle dont la dévotion est appelée encore à grandir.
Ressembler à saint Joseph est déjà en soi un idéal. Dévotion pleine de confiance et d’amour à saint Joseph à cause de toute sa vie passée auprès de la Vierge Marie dans l’amour de Dieu le Père et l’obéissance à ses ordres. Il nous conduira à Dieu notre Père dans la confiance, la soumission et l’abandon.
Aimons dire cette invocation que notre Père a composée pour notre Ordre des Petits Frères et Petites Sœurs du Sacré-Cœur : « Cœur très pur, très généreux et tout-puissant de saint Joseph, régnez sur nous, gouvernez-nous, sauvez-nous ! »