Il est ressuscité !

N° 213 – Septembre 2020

Rédaction : Frère Bruno Bonnet-Eymard


LA LIGUE

La Ligue

Fais ce que dois, Marie bénira !

« Par une miséricorde toute spéciale du Cœur Immaculé de Marie, médiatrice de toutes grâces, nous voilà réunis cette année encore, malgré le déchaînement du diable tout autour de nous. »

Face à cent soixante jeunes gens, masqués et soigneusement dispersés dans la grande chapelle, frère Bruno introduit le camp de la Phalange. Dans l’engourdissement de l’Église et de la France, son alacrité galvanise !

« Alors même que nous sommes encore dans l’épreuve, sans savoir quelle en sera l’issue, il nous faut préparer l’avenir. Notre Père l’a fait, formulant toute notre doctrine en un  Petit livre rouge ”, pour répondre aux  erreurs de la Russie  et faire briller la lumière de la vérité. »

Il s’agit des 150 Points de la Phalange de l’Immaculée, condensé de la doctrine totale de l’abbé de Nantes et auxquels frère Bruno a décidé de consacrer notre camp. C’est sur la base de ces convictions héritées de notre tradition franco-catholique millénaire et qu’il n’a cessé de faire progresser que notre Père fonda la Phalange en 1984. Dès le lendemain soir, un documentaire devait présenter son histoire à la jeune génération, en illustrant des extraits de prédications du Père par des témoignages de frères et de phalangistes. Le Père n’avait d’autre ambition que de défendre la vérité et de garder ceux qui voudraient bien se faire ses disciples sur l’étroite et sûre ligne de crête CRC : ni schisme, ni hérésie. Quelle prédestination admirable d’être appelés à notre tour à imiter la fidélité de nos anciens, à recueillir tant de trésors de doctrine, afin de poursuivre le combat de notre Père !

« Et pourtant, continue frère Bruno, à cette doctrine, il manquait encore quelque chose : la mise à feu d’une arme absolue capable d’embraser le monde, non pas pour sa perte, mais pour son salut temporel et éternel : la dévotion au Cœur Immaculé de Marie. Et c’est pourquoi notre Père consacra la Phalange à l’Immaculée Conception, le 8 décembre 1997. »

Ayant épuisé dans sa lutte contre l’apostasie tous les moyens humains et même surnaturels traditionnels, le Père découvrit la vie extraordinaire du Père Kolbe, le précurseur et le martyr de l’Immaculée. Saisi d’enthousiasme, notre Père résolut d’imiter sa consécration à l’Immaculée pour n’être plus que son instrument : « Tous nos 150 Points sont à réviser et à mettre sur cet axe », s’exclamait-il ! En 2020, c’est enfin chose faite.

Le monastère de Niepokalanów nous ayant communiqué son riche fonds d’archives photographiques, nos frères avaient pu réaliser un montage vidéo très émouvant, bientôt visionné en cratère, propre à mettre dans tous les cœurs le feu d’amour de l’Immaculée qui brûlait tant saint Maximilien-Marie que notre frère Georges de Jésus-Marie. Et dès ce premier soir, frère Bruno acheva son sermon par cette résolution, mieux, ce cri de guerre : « Fais ce que dois, Marie bénira ! »

Très prosaïquement, notre petit devoir commençait par l’application d’une exigeante discipline sanitaire, condition nécessaire de la tenue de ce camp. Frère François avait distribué les effectifs en équipes journalières, et tous s’y mirent de bon cœur. Après chacune de nos activités, un bataillon de jeunes gens mené par frère Joseph Sarto déployait brosses, serpillières et eau de javel pour désinfecter les lieux communs. Expérience faite, cette prophylaxie, efficace contre le virus, s’est avérée propice, en revanche, à la diffusion de la bonne humeur ! Beaucoup furent volontaires pour prendre un tour supplémentaire et certaines prirent même un abonnement permanent ! Au self, dont la moitié des places avaient été supprimées, nous étions accueillis par des équipes sanitaires souriant à plein masque. Une première escouade distribuait couverts, plateaux, et l’inévitable gel hydroalcoolique. Dans le réfectoire, des binômes, patrouillant sans relâche, se chargeaient de désinfecter chaque place au départ de son occupant avec une efficacité redoutable : à peine votre dessert entamé, les voici qui se rapprochent petit à petit, pulvérisateur et lingettes en main, mais toujours aussi affables, pour vous inciter à laisser bien vite la place aux suivants !

Les règles sanitaires consciencieusement observées, nous avons pu réaliser tout notre programme, articulé autour des conférences et cratères et de la préparation de l’oratorio de frère Henry sur “ Sainte Thérèse de l’Enfant-Jésus, victime de l’amour miséri­cordieux ”. Frère Bruno nous en commentait chaque matin une scène à l’oraison, la gorge souvent étreinte par l’émotion que suscite l’exemple de la sainte carmélite, ses désirs infinis d’aimer et de faire aimer Jésus et Marie, prouvés et fortifiés par tant de souffrances. Et quelle incomparable maîtresse de novices ! Chacune de ses paroles nous perce à jour, nous presse aimablement de nous convertir, de nous engager à sa suite sur sa « petite voie » de la confiance et de l’abandon, sûr chemin de la sainteté.

S’il y en a qui en ont bien profité, ce sont au moins les vingt-six carmélites de l’oratorio, obligées de suivre un noviciat complet en dix jours ! Sous la direction de nos sœurs, elles ont acquis un maintien religieux en un temps record et appris à éplucher, filer, broder, tricoter, raccommoder comme de vraies bonnes sœurs, ou du moins à faire semblant. Plus difficile : s’asseoir par terre avec naturel, selon l’usage du Carmel... et surtout se relever ! Mais la grâce de revêtir de véritables habits de carmélites, prêtés par un carmel ami, valait bien quelques efforts !

Sainte Thérèse ne nous a cependant pas distraits des 150 Points. Au contraire, l’oratorio et les conférences formaient un ensemble très cohérent et aux détours de notre étude, les vers de sainte Thérèse mis en musique par frère Henry chantaient dans nos esprits : elle illustre merveilleusement notre doctrine et, réciproquement, l’enseignement de notre Père nous permet de comprendre mieux que personne l’exemple et la pensée du petit docteur du Carmel.

Chacun des 150 Points étant une synthèse de vastes études, parcourir leur ensemble, c’est mener une course de sommet en sommet. On a envie de descendre explorer chaque vallée ! C’est ce que nous permirent de faire nos cratères, après le dîner.

La soirée était introduite par une pièce musicale jouée par nos virtuoses. Frère Bruno y tient, afin d’éduquer chez nos jeunes le sens de la beauté qui est bannie du monde moderne (sur le rôle de l’intuition esthétique, cf. Point n° 2). Un soir, notre pianiste nous fit la surprise d’introduire l’exécution d’un Nocturne de Chopin par le récit poignant de la conversion de cet artiste sur son lit de mort. Miracle de la grâce ! et révélation du secret de la beauté de cette musique, jaillie d’une âme demeurée imprégnée du christianisme de son enfance malgré une carrière menée en impie.

Puis venait la partie studieuse du cratère. Les frères se sont appliqués à vulgariser notre doctrine sous une forme aussi accessible que possible. Ainsi du documentaire “ L’islam sous la toise ”, explicitant le Point n° 6 : une suite de trois entretiens de frère Bruno et frère Michel-Marie sur l’islam d’hier, d’aujourd’hui et de demain. Avec beaucoup d’allant, frère Bruno nous initie à son exégèse du Coran, qui dévoile la véritable religion de son auteur. Il analyse ensuite, sur les traces de notre Père, l’angoissante guerre de conquête menée par les musulmans contre la Chrétienté apostate, avant de terminer par l’annonce de leur conversion, par la puissance du Cœur Immaculé de Marie. Cela déchire bien des clichés et suscite une foule de questions de la part de nos jeunes désireux d’en savoir plus !

Les périodes de questions avaient lieu lors de la promenade quotidienne. À 14 h 15, à l’appel des trompes de nos frères Alexis et Benoît-Joseph, nous nous ébranlons, par vagues successives et très espacées, selon les règles en vigueur sur la voie publique. Le trajet permet aux frères de stimuler les troupes, si bien qu’arrivés sur la colline qui nous sert de point de ralliement, les questions fusent aisément, et de plus en plus au fur et à mesure du camp : sur les conférences, les cratères, l’oratorio ou l’actualité, donnant lieu à des entretiens passionnants, à peine dérangés par les fréquentes ondées normandes. Quelle est la différence entre la voie d’abandon de sainte Thérèse et le quiétisme des charismatiques ? Entre notre invocation « Par vous Immaculée Conception, notre Mère à tous » et la revendication de la Gospa à Medjugorje : « Tous sont mes enfants » ? Pourquoi les libéraux sont-ils pires que les impies ? Peut-on rencontrer une piété véritable chez les musulmans ? Et frère Bruno ne se fait pas prier pour expliquer, préciser, distinguer, quitte à prolonger ses réponses au cours du sermon de la messe du lendemain, en commentant de façon plus approfondie un Point particulier. C’est en même temps un moyen de montrer à nos jeunes combien il est facile de faire oraison dix minutes à partir de textes si riches !

Autre question : comment demeurer attachés à l’Église dans l’apostasie actuelle des hommes d’Église et de Rome même ? Réponse, à l’école de sainte Thérèse : « Dans le cœur de l’Église, ma Mère, je serai l’Amour. » Aujourd’hui, s’exclame frère Bruno, le cœur de l’Église, c’est le Cœur Immaculé de Marie. C’est pourquoi il faut avoir cette dévotion qui sauve notre foi en l’Église, parce que l’Église, c’est Elle ! Sinon, ce serait effrayant ! D’autant plus qu’à Rome, ils n’en veulent pas. Mais nous savons qu’elle sera victorieuse !

C’est animés par cette espérance inconfusible que nous avons accompli notre traditionnelle procession en l’honneur du Cœur Immaculé de Marie, le 22 août au soir. À la mi-temps de notre camp, c’est chaque année son sommet ! Rassemblés au pied du grand escalier d’honneur du château, avant de porter en triomphe notre Reine à travers le village, frère Bruno nous lut la supplique à Notre-Dame du Saint Rosaire qu’il avait prononcée le 15 août 2013, à l’orée d’un pontificat plein de promesses : « Faites la grâce à notre pape François de sauver l’humanité en répondant à vos demandes ! » Redire cela après les trahisons répétées du Saint-Père, quel bel acte d’espérance ! Une « espérance humiliée », selon la parole entendue par notre Père le 21 avril 1949 et rappelée par frère Bruno dans sa dernière conférence : « Et Jésus me dit :  Tout cela viendra, mais je veux, tout d’abord, l’espérance humiliée et l’agonie de chacun des jours de mes fidèles. ” »

Arrivés à l’église paroissiale, ce fut la “ Complainte d’amour et de miséricorde de notre Mère Immaculée ” qui servit de sermon à notre frère prieur. Notre Père l’avait rédigée le 15 juillet 2000, sous le coup de la divulgation du troisième Secret de Fatima. Il s’agit de son dernier manuscrit, ultime témoignage de son intime cœur à Cœur avec sa Mère chérie. Le Père nous y révèle le bouleversant « marché d’amour » passé par Notre-Dame en grand chagrin avec son divin Fils : au prix de ses larmes, Grâce et Miséricorde ! N’est-ce pas le modèle de l’offrande en holocauste à l’Amour miséricordieux, si bien mise en musique par frère Henry, qui consumera sa Miniature ?

Mais précisément, la représentation approche. Tandis que choristes et orchestre travaillent leurs partitions, que les acteurs peaufinent la mise en scène, frère Louis-Gonzague prend le relais de frère Bruno pour nous présenter les cinquante Points de politique, nous inculquant la haine de la révolution et l’amour de la Chrétienté d’hier et, plus encore, de demain. Nous ne nous éloignons pas de sainte Thérèse, dont la scène 3 de l’oratorio nous rappelle qu’elle est la nouvelle Jeanne d’Arc, pour sauver l’Église et la France !

Remplis de cette saine et salutaire doctrine, c’est avec beaucoup de ferveur que nous avons vénéré les reliques du roi Saint Louis, apportées par un bon prêtre ami venu célébrer la messe de sa fête liturgique, le 25 août. Puisse-t-il nous donner sous peu un chef à sa ressemblance, un lieutenant du Christ !

Dans un premier cratère, frère Louis-Gonzague interrogea madame Perrin, professeur agrégé de lettres et phalangiste, sur la réforme de l’enseignement qu’il faudra mener lors de la restauration nationale de nos espérances, afin de rendre à nos enfants leur âme catholique et française et même simplement pour le salut de l’intelligence ! Dans ce domaine encore, nous avons des maîtres, une doctrine, un programme pratique, réaliste : c’est enthousiasmant !

Le lendemain soir, c’était au tour de frère Michel, ancien officier appelé au plus haut service de l’Immaculée triomphante dans notre ordre des Petits frères du Sacré-Cœur, de nous présenter la pensée de notre Père sur l’Armée. Bien que malade de la République, elle demeure « la dépositaire de l’honneur, des traditions, des grands desseins de la nation » (Point n° 96) et « seule habilitée de droit à s’emparer du pouvoir pour instaurer une légitimité nouvelle » (Point n° 100). Avec notre Père, nous crions en chœur : « Vive l’Armée ! »

Mais tout cela suscite encore bien des questions ! Le Pape doit-il faire de la politique ? Pourquoi les droits de l’homme sont-ils un antihumanisme ? La dissuasion nucléaire : indispensable instrument de puissance ou gadget gaullien ? Ou encore celle-ci qui nous mène à la dernière partie de nos 150 Points : Pourquoi sommes-nous pour Fillon et contre Marion Maréchal- Le Pen ? Réponse : Ni pour l’un ni pour l’autre, puisqu’ils sont démocrates ! Néanmoins, Fillon avait en 2017 un programme véritablement de droite, qu’il était en position de pouvoir mettre en œuvre, en faveur de l’armée, de la famille, etc.

Restaurer la famille et à partir d’elle tout le tissu social, c’est l’objet de notre écologie communautaire, présentée par frère Pierre-Julien. Il s’agit de « la science spéculative et l’art pratique des conditions idéales et des réalisations possibles de la prospérité des familles, par le moyen de la vertu de prudence, en vue de la vie heureuse des communautés humaines fraternelles. »

Madame Perrin nous écrit son enthousiasme pour la nouveauté de cette dernière partie : « Dans les camps d’A. F., on traitait rapidement, en gros, la restauration de la France dans ses corporations et ses états. Tandis que là, l’on sent que ceux qui ont rédigé ces derniers points ont le souci de la réalité présente, qu’ils connaissent. Les nouveautés qu’ils introduisent, ils veulent les intégrer dans un tissu qui existe déjà, avançant avec grande prudence et sagesse car, même après le grand miracle, le terreau humain et social subsistera, qu’on ne peut violenter. C’est une approche très pragmatique, réaliste et qui, du coup, devient vraiment crédible ! loin des jugements catégoriques, tout faits. Un regard neuf sur ces réalités. »

Le dernier cratère du camp donna un coup de projecteur sur la communauté économique de base qu’est l’entreprise. Frère Pierre-Julien s’entretint avec deux phalangistes de la première heure, l’un chef d’une PME et l’autre cadre supérieur dans un grand groupe agroalimentaire, qui prodiguèrent expériences et recommandations, avec l’humilité de disciples convaincus de tout devoir à notre Père dont ils se sont efforcés d’appliquer les conseils. Pour leur auditoire, ce fut non seulement la découverte du rude monde entrepreneurial, mais aussi une nouvelle preuve de la fécondité des principes posés par notre Père, capables de sauver des entreprises.

Voici la fin du camp. Selon le mot de mère Lucie, en première ligne durant ces dix jours : « Ce fut encore la course !... Mais nous l’avons gagnée ! » L’oratorio a été admirablement exécuté et joué et notre exploration des 150 Points est achevée. Il ne manque plus que le commentaire des trois derniers points, conclusion que frère Bruno nous a promise pour le “ télé-congrès ” des 3 et 4 octobre.

Notre doctrine est claire, sûre, complète, nous mobilisant pour le service de Jésus et Marie, de l’Église et de la Chrétienté, de nos familles. Comment cela, alors que la hiérarchie nous refuse toute mission et nous ostracise ? La solution que nos jeunes gens semblent avoir bien comprise est de se vouer à l’Immaculée comme ses instruments à Elle, selon le conseil de notre Père et du Père Kolbe : « Si vous voulez faire quelque chose, il faut vous consacrer à la Sainte Vierge. »

frère Guy de la Miséricorde.