Il est ressuscité !
N° 214 – Octobre 2020
Rédaction : Frère Bruno Bonnet-Eymard
LA LIGUE
Notre “petite voie” CRC
AU terme de plusieurs mois passés dans l’intimité de sainte Thérèse de l’Enfant-Jésus, nous constatons que la fidélité à sa petite voie de la confiance et de l’abandon conduit tout droit, « au temps de l’Antéchrist », à la ligne de crête de notre CRC ! De quelque côté que l’on dévie, c’est toujours le précipice du culte de l’homme qui s’ouvre sous nos pas : à droite, l’orgueil janséniste, mué en intégrisme ; quiétisme d’hier, à gauche, proliférant dans toutes les resucées conciliaires de l’humanisme moderne.
Pour nous en convaincre, c’est en relisant la Page mystique de décembre 1975 que frère Bruno introduisit le LIe Congrès de notre CRC, le 3 octobre :
« “ Vous êtes trop petit pour faire tout cela ”, m’a dit quelqu’un hier. Me parlait-il à moi, ou à nous autres, de cette humble famille spirituelle engagée dans un combat de géants qui nous dépasse tous ? Ô Saint Enfant Jésus, je crois qu’il Vous parlait à vous, si petit, si faible et tout désarmé dans votre crèche de Bethléem en cette nuit de Noël. Oui, plus j’y pense plus je trouve qu’à travers nous et nos pères, remontant les siècles, cette parole des perpétuels Nicodème, souventes fois entendue, s’adresse à Vous, Dieu de misère et de faiblesse, Dieu d’humiliations et de détresse, du jour de votre naissance jusqu’au jour de votre ultime retour. Et je me sens revigoré dans ce froid, dans cette solitude de vos derniers fidèles, à la pensée que nous sommes bien de Vous, comme Vous, puisque les gens nous parlent comme ils vous parleraient à Vous, avec les mêmes solides raisons, le même bon sens qui seulement ne prend point garde au mystère [...].
« C’est vrai, nous sommes comme toi bien trop petits pour le combat à mener, pour l’œuvre à réussir, ou plutôt nous sommes bien comme toi et bien avec toi, dans cette petitesse, comme tant d’autres l’ont été, à ton image, à ta ressemblance et dans ta lignée. Ma mémoire se perd dans cette multitude innombrable de saints de toutes langues et de tous les siècles, sans que j’en trouve un seul qui ne paraisse trop petit pour l’œuvre à mener. Le cœur se serre de tant de petitesse dont on oublie la puissance et la gloire, la force et la victoire. Ils sont si beaux, si touchants, tous ces porteurs d’Évangile trop petits pour le Livre trop lourd !
« Je ne suis pas digne d’entrer dans cette glorieuse phalange. C’est bien à tort que quelqu’un, me regardant mal, m’a jugé trop petit. À côté des saintes Thérèse et Claire et Bernadette, auprès des saints Benoît, François, Ignace, Pie et Charles, je suis vraiment indigne, incapable de porter l’Évangile après eux et l’épée de la vérité, le bâton de la croix, la fronde aux cinq cailloux des vertus théologales. Je ne suis pas assez petit. Faites-nous petits et faibles, désarmés et misérables comme Vous. Car on n’est jamais trop petit quand il est question de vous être, ô mon Dieu-Enfant, mon Jésus-Dieu, une humanité de surcroît, un peuple choisi, une famille dévouée, digne enfin par sa petitesse même de Vous revêtir d’un étincelant manteau de gloire ! » (Page Mystique n° 84)
Gros sacrifice de cette année : n’être réunis que de cœur, en “ télécongrès ”, et non pas physiquement. Mais cela permit à frère Bruno de nous rappeler nos grandes intentions CRC. D’abord, notre Saint-Père, car Notre-Dame attend pour régner sur la terre que son cœur cède au Sien, adhère à ses desseins : qu’il daigne enfin lui consacrer la Russie.
Mais il dépend déjà de nous qu’Elle règne sur nos cœurs phalangistes !
« Si nous commencerons cet après-midi par donner des nouvelles de notre grande famille placée sous la protection paternelle de notre Père par la “ neuvaine ” qui est plutôt une “ neuvaine ”... de mois, renouvelable jusqu’au plein succès, c’est pour constater que nous avons obtenu cette protection visible que notre Père exerce sur sa grande famille du sein de la gloire où il se trouve présentement, afin que cela serve de témoignage en faveur de la défense de la foi dont il fut un héraut intrépide dans des circonstances jamais vues dans toute l’histoire bimillénaire de l’Église : seul contre tous, contre l’ensemble de l’épiscopat mondial réuni à Rome en concile œcuménique pour y proclamer le “ culte de l’homme qui se fait Dieu ” ! par la bouche du pape Paul VI ! »
Les nombreuses lettres de remerciements reçues de nos amis après les camps d’été ou le Congrès attestent cette pleine santé de notre CRC et une résolution unanime : persévérer sur la voie étroite et sûre de la fidélité à notre Père et à l’Immaculée.
Voici par exemple pour les petits camps familiaux :
« Quelle grâce que nos enfants aient pu profiter, malgré les circonstances, des bons enseignements des frères dans cette ambiance toute familiale, pieuse, et retirée du monde comme le souhaitait frère Gérard ! Ils en reviennent avec un bon sourire d’enfants qui ont bien profité de la grâce qui passait et cela les fortifiera pour l’année qui vient.
« C’est incroyable comme les parents-hôtes ont réussi à donner aux enfants l’essentiel de ce qu’on trouve au camp : la formation spirituelle et intellectuelle, les bonnes amitiés, la découverte de notre belle France !
« Nous ne pouvons vous remercier qu’en priant et nous sacrifiant à toutes vos intentions, ce que les enfants font de grand cœur ! En espérant que le Bon Dieu ne nous refusera pas la formule “ classique ” l’an prochain ! »
Même communion de pensée dans les grands camps :
« Ce camp en montagne nous a en-chan-tés, à tous égards. D’abord, les enseignements historiques et spirituels nous ont élevés et aidés à prendre de bonnes résolutions de fin de camp. Nos hôtes et le frère nous ont guidés sur les chemins avec tant d’aisance et de simplicité qu’on eût cru qu’ils avaient conduit des camps toute leur vie ! L’esprit de notre regroupement était celui des camps tels que frère Gérard et frère Thomas les organisent. Quelle unité, quelle fidélité entre ces âmes phalangistes et religieuses ! Voilà que nous avons reçu l’élan nouveau pour rester fidèles jusqu’au camp de la Phalange, et plus ! Nos pèlerinages nous ont permis de présenter à la Sainte Vierge toutes les intentions familiales et CRC que nous portons. »
Le camp de la Phalange, enfin, a marqué d’une empreinte profonde l’esprit et les cœurs de nos jeunes.
« Les conférences, complétées et approfondies lors des cratères, étaient une fois de plus passionnantes ; ce qui ne va pas aujourd’hui, pourquoi, que faire à la place, comment... Voilà qui a eu de quoi nous enthousiasmer pendant ces dix jours ! Reste à relire une fois encore les 150 Points afin de bien nous les approprier et nous les faire rentrer dans le crâne.
« Et puis, un camp en compagnie de la Sainte Vierge nous rappelle que nous devons passer par Elle en toute chose. Je l’ai toujours entendu, mais ce n’est qu’à présent que je vois à quel point il est primordial de répéter chaque jour notre acte de consécration à l’Immaculée. »
RENTRÉE DES CERCLES
Pendant tout ce mois de septembre, il ne s’est pas passé de semaine sans l’ouverture de quelque cercle aux quatre coins de la France, toujours sous la bannière de l’Immaculée.
RENTRÉE ANGEVINE AU PUY-NOTRE-DAME.
C’est en Anjou, sous la houlette des frères de Magé, que débuta ce tour de France. Lors de leur traditionnel pèlerinage de rentrée au Puy-Notre-Dame, le 6 septembre, nos amis se mêlèrent aux braves gens du pays, pour fêter la naissance de “ Notre-Dame Angevine ”. La froideur du prédicateur, qui “ oublia ” de mentionner la Maîtresse des lieux dans son sermon, fut heureusement compensée par la ferveur de la foule chantant d’un seul cœur le “ Chez nous, soyez Reine ! ” en vénérant la Sainte Ceinture de Notre-Dame. Tout un peuple uni sous l’égide de sa Souveraine : paroissiens, amis CRC et même le clergé !
La journée s’acheva à la maison Saint-Louis-Marie où frère Jean-Duns brossa un aperçu de l’état actuel de l’Église, qui contraste tellement avec la situation de notre CRC. Rappelant nos relations récentes avec la hiérarchie, il souligna combien le fossé se creuse entre nos évêques et l’infanterie de l’Église, de plus en plus volontiers bienveillante à notre égard.
PÈLERINAGE A ROUEN.
Une semaine ne s’était pas écoulée que le 12 septembre, en la fête du Saint Nom de Marie, les communautés de Frébourg retrouvaient la CRC normande à la basilique de Notre-Dame de Bonsecours qui domine la ville de Rouen, pour une journée de ferveur nationale-catholique sous l’étendard de sainte Jeanne d’Arc. Journée qui s’ouvrit par la messe célébrée par le Père Zambelli et animée par nos plus beaux chants.
À la sortie de la messe, le groupe de nos pèlerins se rendit en procession devant le monument en l’honneur de la Sainte de la Patrie, dont frère Benoît rappela qu’il fut relégué si loin de la ville par la lâcheté de l’archevêque de l’époque, Mgr Thomas – adversaire irréconciliable de Mgr Freppel ! Ce libéral craignait en effet que ce monument porte ombrage à la République...
Puis vint le moment de l’instruction sur sainte Jeanne d’Arc pour les plus jeunes et de la conférence d’actualités pour leurs parents. Frère Benoît mit en parallèle le combat de Jeanne et celui de notre Père, tous deux voués corps et âme à la défense de la Chrétienté contre la perfidie de gens d’Église. Une conférence roborative, ponctuée des formules les plus vigoureuses de notre Père, nous appelant au combat de Contre-Réforme : « “ Les soldats combattront et Dieu donnera la victoire ”, disait notre Jehanne Lorraine. Il y faut sagesse et confiance, puisque c’est un service surnaturel qui nous est demandé, mais aussi courage et discipline puisque c’est une lutte d’hommes. » (mars 1970)
« Réveiller nos Pasteurs, garder la vraie foi, œuvre difficile de notre CRC ! » (janvier 1971)
Nos amis furent là aussi très réconfortés par l’analyse claire et vraie des actualités de l’Église, conclue par la dernière parole reçue du Sacré-Cœur par Mère François de Sales Chappuis sur le salut qui nous est promis : « Je le ferai seul et personne ne pourra dire : “ C’est moi qui l’ai fait. ” » Seul, c’est-à-dire indivisiblement avec sa Mère, comme nous l’apprend Fatima !
Après un sympathique pique-nique – les retrouvailles de nos familles CRC sont toujours si joyeuses ! – retour à la basilique pour réciter le chapelet, à l’école de trois saints épris de la France : saintes Jeanne et Thérèse, bien sûr, dont frère Benoît fit méditer les mystères, mais aussi saint Pie X qui travailla tant pour leur canonisation à toutes deux. Nos amis purent en vénérer la calotte, exposée dans un reliquaire au pied du maître-autel. Un pape qui aime la France, remarquait notre Père, ce n’est pas chose si courante que nous pourrions l’imaginer ! Son affirmation solennelle, « Dieu aime la France, parce qu’il aime l’Église » (23 septembre 1904), fonde notre espérance inconfusible : « Elle ne périra jamais, la fille de tant de mérites, de tant de soupirs et de tant de larmes. » (29 novembre 1911)
Puis il fallut redescendre de la colline dans la cité populeuse. En véritable procession, drapeaux rouges en tête et poussettes en queue, notre groupe parcourut les différentes étapes de son pèlerinage, fendant une foule de toutes races, religions, mœurs, éberluée du spectacle !
Première station à Saint-Ouen, théâtre de la prétendue abjuration de Jeanne, puis à la porte Saint-Romain pour évoquer le privilège éponyme qui fut refusé à Jeanne, en vertu duquel le chapitre de la cathédrale de Rouen pouvait chaque année gracier un condamné. Les gens d’Église libérèrent un violeur et brûlèrent la Pucelle...
Enfin, devant la façade de la cathédrale toute resplendissante de soleil, frère Arnaud évoqua Charles Boulanger, bouleversé par la représentation, sur cette même place, d’un mystère mettant en scène l’abjuration de Jeanne. Ce fut l’origine de sa résolution d’étudier ses procès et de sa découverte décisive de l’indéfectibilité de la Pucelle, jusqu’au bûcher de la place du Vieux-Marché, terme du pèlerinage.
Là, ce furent des vers de sainte Thérèse qui révélèrent aux pèlerins le fond du mystère de Jeanne, sa sœur chérie : sa plus grande victoire et sa gloire véritable, c’est son martyre.
Un conquérant pour la France coupable Non ce n’est pas l’objet de son désir De la sauver Jeanne seule est capable Tous les héros pèsent moins qu’un martyr !
FONDATION DU CERCLE SAINTE-BERNADETTE.
Si les Auvergnats furent rejoints le lendemain 13 septembre par frère Michel, comme chaque année, pour l’ouverture de leur cercle de Clermont-Ferrand, nos amis béarnais se plaignaient en revanche depuis bien longtemps de leur abandon, loin de tout ermitage, dans le coin le plus reculé de France... Ils ont du moins, depuis le 20 septembre, la consolation d’avoir un cercle solidement fondé, sous le patronage de sainte Bernadette. Frère Thomas est descendu les visiter pour leur réunion inaugurale, afin de leur présenter la nouvelle rédaction des 150 Points de la Phalange de l’Immaculée, leur fixant ainsi leur programme de travail pour l’année qui commence : la série des conférences du camp d’août expliquant notre “ petit livre rouge ”.
CENTENAIRE DE SAINTE MARGUERITE BOURGEOYS.
Passons encore une semaine : le 26 septembre eut lieu la rentrée du cercle de la Sainte-Espérance, par un pèlerinage à Troyes, sur les pas de sainte Marguerite Bourgeoys dont nous fêtons le quatrième centenaire de la naissance. En effet, celle qui devint la « petite sainte Geneviève du Canada », la mère de la Nouvelle-France, commença son existence par trente-trois années de vie cachée à Troyes, comme le noviciat humble et pieux de son extraordinaire vocation missionnaire et colonisatrice.
La ville de Troyes a hérité de son opulence médiévale, au temps de l’apogée des foires de Champagne, des trésors architecturaux et artistiques. C’est un enchantement de visiter Saint-Urbain, Saint-Jean, la cathédrale Saint-Pierre-et-Saint-Paul... Mais d’églises en hôtels et de places en ruelles, ce sont les souvenirs de sainte Marguerite Bourgeoys que frère Bernard s’est surtout appliqué à évoquer. Chaque station nous rend plus attachante cette figure qui nous rappelle tous nos saints préférés !
La journée commença par la messe dans une paroisse de la ville. La première étape conduisit ensuite le groupe à l’église Saint-Jean, où elle fut baptisée. Quelques pas plus loin, voici l’emplacement de sa maison natale, puis la place de la “ Libération ”, où l’on commémore sa grâce du 7 octobre 1640 : sa “ libération ” par la Sainte Vierge de toute attache au monde. Elle l’a raconté elle-même :
« Le dimanche du Rosaire, j’allai à la procession aux Jacobins, où il y avait grand monde ; on passa devant le portail de Notre-Dame où il y a, au-dessus de la porte, une image de pierre. Et en jetant la vue pour la regarder, je la trouvai fort belle et, en même temps, je me trouvai si touchée et si changée que je ne me connaissais plus. Et comme j’étais fort légère auparavant, j’étais la bienvenue avec les autres filles ; mais dès ce moment, je quittai tous mes ajustements et me retirai d’avec le monde, pour me donner au service de Dieu. Je fis une confession et je me mis à la Congrégation où j’étais fort fidèle. »
Sise en l’hôtel de la Licorne, cette Congrégation Notre-Dame, dans le tiers ordre de laquelle entre Marguerite, s’enthousiasme alors pour la mission de Nouvelle-France. Sa supérieure, en effet, mère Louise de Sainte-Marie, n’est autre que la sœur aînée de Paul Chomedey de Maisonneuve, le fondateur de Ville-Marie. En 1641, avant de s’embarquer pour le Canada, il visita le couvent et communiqua si bien son ardeur que toutes les religieuses voulurent le suivre ! Elles lui donnèrent une image de la Sainte Vierge portant ces deux vers :
Sainte Mère de Dieu, pure Vierge au Cœur royal, Gardez-nous une place en votre Montréal.
Toute la France de Contre-Réforme vibrait alors d’une même ferveur missionnaire et coloniale !
Quand en 1652 Maisonneuve revint à Troyes afin d’y recruter du renfort pour la petite colonie de Ville-Marie, si précaire et menacée, sa sœur lui fit rencontrer Marguerite. Entrevue toute surnaturelle entre le pieux gouverneur de Montréal et l’humble Troyenne qui y avait été préparée par un songe. L’apercevant, elle s’exclama : « Mais c’est mon prêtre ! Celui qui m’est apparu en songe ! »
Maisonneuve la convainquit de le suivre au Canada pour y faire la classe aux petites Indiennes. C’est le mystère de la Visitation qu’il lui faudrait reproduire : elle poursuivrait là-bas son idéal d’imiter « la vie voyagère de la Sainte Vierge ». Et Notre-Dame elle-même fit céder ses dernières réticences en lui apparaissant pour lui ordonner : « Pars, je ne t’abandonnerai point. »
Monsieur de Maisonneuve pouvait être fier de sa conquête. Il confiera bientôt à Jeanne Mance : « J’amène une excellente fille qui sera d’un puissant secours au Montréal. Au reste, c’est encore un fruit de cette Champagne qui semble donner à ce lieu plus que toutes les autres provinces réunies ensemble. »
Sentence qui s’est encore vérifiée en 1982 et en 1984, lorsque notre Père envoya de Saint-Parres-lès-Vaudes des Petits frères et Petites sœurs du Sacré-Cœur pour bâtir en Nouvelle-France une digue de Contre-Réforme catholique !
La journée s’acheva à la cathédrale par l’évocation des dernières années si éprouvées de sainte Marguerite, garante de l’esprit des fondateurs de la Nouvelle-France, tout de zèle apostolique, de piété et de pauvreté, dans une colonie dont la prospérité tendait à affadir la ferveur.
Devant l’admirable vitrail du “ pressoir mystique ”, tant aimé de notre Père, frère Bernard cita une recommandation de sainte Marguerite qui nous révèle le secret de son ardeur missionnaire :
« Pensez que dans votre mission, vous allez ramasser les gouttes du sang de Jésus-Christ qui se perdent. »
TOURNÉE DES CERCLES (SUITE).
Le 8 octobre, nos frères Thomas et Louis-Gonzague ont rallié le cercle Saint-Joseph de Lille. Au programme : la série de conférences sur L’Église malade du Concile, prononcée à la Mutualité pour son vingtième anniversaire, en 1982 -1983 (disponible sur la VOD sous le sigle V II). Notre Père n’a cessé de remettre sur le métier sa critique des Actes du concile Vatican II : il les analysa sur le moment même, dans ses Lettres à mes amis, puis dix ans plus tard, dans sa campagne pour Préparer Vatican III et jusqu’à la fin de sa carrière avec l’Autodafé. Parmi toutes ces études, la force de celle de 1982 tient au double point de vue qu’elle adopte, dogmatique et empirique : l’analyse historique vient en renfort de la théologie pour conforter notre conviction du désastre conciliaire.
L’orientation mariale que notre Père a donnée à notre école de pensée CRC à partir des années 1990 éclaire cette étude d’une espérance nouvelle. Puisque la racine de nos maux est la désobéissance de la hiérarchie aux demandes de Fatima, blessant le lien vital qui unit l’Église à la Sainte Vierge, le remède à la maladie conciliaire, c’est l’Immaculée !
Le lendemain soir, nos frères ouvraient le cercle Sainte Jeanne et sainte Thérèse à Amiens. En attendant la publication des conférences sur les 150 Points, c’est la présentation par frère Bruno de l’Histoire volontaire de sainte et doulce France qui les occupa, toujours avec le souci de mettre en lumière la primauté de l’Immaculée dans la conduite de sa destinée. En vertu de l’alliance passée par Notre-Dame Marie avec son Royaume, Elle est la clef de voûte de ses grandeurs, la pierre d’achoppement de ses ennemis, et la pierre d’assise de sa restauration future.
CINQUANTE-ET-UNIÈME CONGRES
Revenons à notre Congrès, après ce tour des “ nouvelles de la famille ”. La décentralisation de nos activités CRC s’est encore révélée bien précieuse pour pallier l’impossibilité de nous rassembler à la maison Saint-Joseph. Beaucoup ont pu tout de même se regrouper par régions pour suivre au moyen de la VOD sermons et conférences.
La grande consolation fut la projection de l’oratorio de frère Henry : Sainte Thérèse de l’Enfant-Jésus, victime de l’Amour miséricordieux. Depuis, les commentaires fusent : « – Une prière continue ! – Une musique convertissante ! – Sainte Thérèse autrement ! »
« C’est “ bluffant ”, diraient nos jeunes gens ! Pour parvenir à un tel résultat, il faut vraiment n’être rien, bon enfant de notre Père, et qu’une pluie de roses se soit abattue sur tous du premier jusqu’au dernier ! »
« Je n’ai jamais rien vu de si juste et de si vrai sur sainte Thérèse. Tout cet oratorio parle du Père qui a compris mieux que personne sainte Thérèse et a su nous la faire connaître et aimer !
« Une communauté si imprégnée de l’esprit de sainte Thérèse ne peut pas se fourvoyer dans la désorientation diabolique ! »
Si le public en a tant profité, c’est aussi parce qu’il y avait été bien préparé par le commentaire de frère Bruno et par sa méditation du premier samedi du mois sur les Mystères douloureux de Jésus, Marie, Thérèse, victimes d’holocaustes. Frère Bruno avait sorti des archives inédites de notre Père sa contribution à un concours de théologie au séminaire, en 1946. Le jeune théologien de vingt-deux ans nous introduit savoureusement dans le mystère de la compassion et de Marie corédemptrice au pied de la Croix :
« Lorsque les livres lus et les études préparatoires achevées, le jeune théologien ferme les yeux et médite, lorsqu’il recherche pour cette recherche de la théologie à peine entrevue le souffle de vie divine qui lui permettra de parler des choses de Dieu avec foi et amour, c’est bien loin dans le passé que le conduisent ses réflexions. Il se voit, petit enfant, assister aux mystères divins avec une foi sans encombre, ses yeux suivaient le prêtre lointain avec un étonnement jamais lassé. Les mystères, avec leurs oppositions de couleur, et les tons divers de leurs chants ont marqué profondément l’âme, lui apprenant la douleur et la joie, le bonheur calme des féries ordinaires ou la joie débordante des carillons éclatants de Pâques.
« Mais dans l’inconscience du premier âge, sans contredit, c’est l’angoissante détresse du Vendredi saint qui trace en l’âme ses plus profonds stigmates. Tandis que le chant grave et repentant du “ Vexilla Regis ” montait de la foule agenouillée, la grande Croix s’avançait avec ses deux flambeaux, suivie du prêtre récitant d’une voix désagréable de bien tristes paroles : “ Jésus tombe... Pleurez plutôt sur vous... ”
« Ces souvenirs d’enfance sont peut-être ce qu’il y a de plus indéracinable dans notre piété. Ce Crucifix que les prêtres allaient adorer, pieds nus, et que les petits enfants allaient baiser, cette personnalité unique de Jésus en agonie, puis de Jésus flagellé et toujours de ce même Jésus mourant sur la Croix. Ce masque impassible du Crucifié passant au milieu des gens prosternés ; et lui, indifférent, jamais consolé, demandant toujours une aide, un réconfort que personne ne pouvait lui donner... On a beau sangloter au pied de la Croix, là-haut, dans les affres d’une mort solitaire, il reste seul...
« Nous trouvions cependant compatissante comme nous, la Vierge de douleur ; elle paraissait même nous aider à souffrir et se montrait bienveillante. Elle ne restait pas seule, mais nous accueillait et nous aidait à voir Jésus et l’aimer. Quand nous chantions le “ Stabat Mater ”, notre cœur était moins lourd, notre souffrance moins inhumaine ; il nous était bon de pleurer avec elle, de regarder nos péchés devant elle. “ Virgo virginum præclara... mihi jam non sis amara... ” Ah ! certes, non, elle ne nous était pas amère. Nous avions le grand bonheur de pleurer avec elle : “ Fac ut tecum lugeam. » Et pour lui mieux ressembler, nous lui demandions d’approcher de la terrible Croix de son Fils : “ Fac ut portem Christi mortem... ” En ces déserts de la souffrance, le Cœur de Marie était une oasis. Sans elle, nous aurions trouvé trop arides ces sentiers escarpés où était passé l’Homme-Dieu portant tous les péchés du monde. Sans elle, nous n’aurions pas osé parler à cette victime silencieuse buvant jusqu’à la lie le calice d’amertume. Sans elle, nous aurions fui notre doux Sauveur tendant les bras au sommet de la Montagne mystique... »
Comme les sœurs de sainte Thérèse ne pouvant supporter le spectacle de ses souffrances et s’enfuyant de l’infirmerie du carmel au moment de son agonie, le 30 septembre 1897.
Après avoir précisé la relation ineffable qui unit la Mère à son Fils crucifié, frère Bruno conclut :
« L’œuvre corédemptrice de Marie ne fait pas nombre avec l’œuvre rédemptrice de son Fils. Ils ne font en réalité qu’un seul Cœur en cette unique œuvre de notre Rédemption. La relation est si profonde que, des deux volontés, une seule demeure, consubstantiellement.
« Sainte Thérèse de l’Enfant-Jésus de la Sainte Face avait si bien compris ce mystère : n’être rien afin que le rien de la volonté se perde dans le Tout de la volonté divine qui l’envahit. C’est pourquoi “ l’holocauste ” lui-même, celui de Jésus sur la Croix, de sa Mère auprès de lui... et de la petite Thérèse... est unique, ne fait qu’un. »
Le lendemain matin, 4 octobre, frère Bruno nous commenta la prière de notre Père à sainte Thérèse. Prière qui nous met à l’école de cette « humble, laborieuse et douloureuse vierge de Lisieux », afin de puiser dans le trésor des mérites qu’elle a amassés par son offrande à l’Amour miséricordieux. Elle ne demande qu’à nous les distribuer en pluie de roses ! Toutes ces richesses sont à la disposition des petites âmes qui écoutent les logia sur la VOD.
Après la conférence de frère Thomas sur les 150 Points et les Actualités par frère Bruno (cf. supra, p. 1-17), il restait à notre frère prieur à conclure, non seulement ce Congrès, mais aussi le camp de la Phalange, par le commentaire des Points 148 à 150. Chose promise, chose due !
« Les résolutions à prendre avant de nous séparer tiennent dans cette parole de Notre-Seigneur : “ Cherchez le Royaume de Dieu et sa justice, et le reste vous sera donné par surcroît. ” Or, nous dit le Point 148 : “ Le phalangiste sait que le Royaume de Dieu est déjà au milieu de nous ”, à savoir dans le Cœur Immaculé de Marie. Sans lui, dénatalité, débauche et crimes, impiété et anarchie, guerres et génocides affreux, qui sont les œuvres de Satan, auraient tout emporté en Enfer. C’est pourquoi Notre-Dame a institué à Pontevedra la dévotion des premiers samedis du mois. Les trois derniers Points 148, 149 et 150 suivent la courbe des Mystères joyeux, douloureux et glorieux du Rosaire que Notre-Dame nous a demandé de méditer avec Elle. C’est donc en égrenant nos cent cinquante Ave, sous le regard et avec le perpétuel secours de notre Mère Immaculée, Médiatrice de toutes grâces, que nous recevrons la grâce de mettre en œuvre les 150 Points de “ sa ” Phalange à Elle, et de Lui rester fidèles envers et contre toutes les menées de Satan. »
L’admirable est que le portrait idéal du phalangiste de l’Immaculée dressé dans cette finale de nos 150 Points n’est pas une utopie. Nos derniers phalangistes partis pour le Ciel l’ont réalisé dans leur vie quotidienne et suprêmement par leur mort, d’une manière exemplaire.
Le congrès achevé, il faut se colleter de nouveau avec les difficultés de l’heure. Remerciant frère Bruno du congrès un phalangiste écrit :
« Les temps sont difficiles, le découragement n’est jamais loin. Hier soir, dimanche, après avoir écouté votre sermon de clôture, j’ai parcouru la nouvelle encyclique de notre Saint-Père, “ Fratelli Tutti ”. Tout y est du MASDU et j’en étais bouleversé. Depuis cinquante ans que nous assistons à cette “ molle apostasie ”, totalement évidente aujourd’hui, à cette négation ou déformation obstinée et méthodique de tout ce qui fait notre sainte religion, je ne peux qu’offrir aux Cœurs de Jésus et de Marie Immaculée mes peines spirituelles, mes angoisses, mes doutes parfois, en réparation et pour les consoler.
« Je demande donc à Dieu, avec le réveil de notre Saint-Père de son “ rêve ” d’une fraternité universelle sur le fondement du culte de l’Homme, de vous soutenir dans ce combat de la Foi, vous, et avec vous toute notre petite Phalange. »
Frère Bruno compte bien éclairer nos amis à la Toussaint sur ce nouveau texte pontifical.
Mais au préalable, du 11 au 18 octobre, nos communautés des maisons Saint-Joseph et Sainte-Marie fermeront leurs portes pour leur retraite annuelle. Une semaine coupée du monde, durant laquelle frère Bruno nous enseignera la doctrine mariale de notre Père. Sujet passionnant entre tous, à l’heure où les privilèges de Notre-Dame sont bafoués jusque par le Pape et où ses interventions sont méprisées au profit de simagrées de Satan.
Notre Père, pour sa part, animé par les ardeurs toujours plus vives de son amour pour l’Immaculée, s’est appliqué, toute sa vie durant, à récolter le meilleur de la tradition de l’Église, intarissable depuis les origines pour publier les gloires de Marie. Bien plus, il a lui-même enrichi ce dépôt sacré par ses propres lumières et ses fulgurances théologiques, dévoilant toute la portée des révélations de Fatima. Fondement sûr d’une dévotion tendre, ardente et féconde pour l’Immaculée, cette doctrine irriguera demain toute l’Église revenue du minimalisme conciliaire dont elle se meurt !
frère Guy de la Miséricorde.