Il est ressuscité !

N° 234 – Juillet 2022

Rédaction : Frère Bruno Bonnet-Eymard


LA LIGUE

La Ligue

Trois étoiles pour l’Immaculée

C’EST en notre maison Saint-Louis-Marie, à l’aube du vendredi 8 juillet, que l’Immaculée daigna rappeler l’âme de notre fidèle ami, le vice-amiral Antoine Lecoq. C’était le matin de l’ouverture du camp-vélo, dont il était le grand-assistant. Comment mieux nous rappeler le but véritable de nos camps de jeunes, le Ciel auquel il faut conduire tous ces enfants ?

DE MAGÉ A SAUMUR.

Malgré le bouleversement de l’organisation du camp, frère Jean Duns annonça : « La mission continue, avec un intercesseur de plus. » Tout au long de la journée, nos frères accueillirent donc imperturbablement les cent-cinquante participants. Les enfants furent très impressionnés d’aller prier auprès du corps du défunt, revêtu de son bel uniforme bleu marine aux trois étoiles d’argent. Avec un tel exemple de vie phalangiste et de mort “ en service commandé ” pour la CRC, frère Jean Duns avait la part belle en exhortant les enfants à prendre parti hardiment dans le combat de la vie, à saisir les armes qui nous y assureront la victoire : la confession et la messe quotidienne.

Dimanche 10 juillet, frère Bruno se rendit lui-même à Magé pour prier auprès du corps de notre ami phalangiste. Il en profita pour visiter le camp et revint enchanté de la bonne ambiance familiale et des ateliers organisés tant par les parents des dix “ familles ” de camp que par les frères et les sœurs : confection de figurines de plombs, d’icônes, sculpture, etc.

Après quelques galops d’essai et chapelets-relais récités dans les églises des environs, les enfants furent bientôt prêts à entreprendre leur grand pèlerinage, à Saumur, du 11 au 13 juillet. On a beaucoup célébré la douceur angevine. Néanmoins, pédaler dans la plaine nue, sous le soleil, sans un arbre pour ombrager la route, cela reste pénitent ! Heureusement, en Anjou, les lieux de pèlerinage foisonnent, offrant mille possibilités d’étapes en chemin. À l’aller, la messe fut célébrée dans la basilique du Puy-Notre-Dame, suivie de la vénération de la Sainte Ceinture de la Sainte Vierge. L’après-midi, on s’arrêta aux Ulmes, pour faire mémoire du miracle eucharistique qui s’y produisit le 2 juin 1668.

Après une nuit passée dans un collège fondé par saint André-Hubert Fournet, les enfants se rendirent dans la chapelle du collège Saint-Louis de Saumur afin d’y réciter la prière du matin. Cette institution fut fondée par Mgr Freppel, mais c’est avant tout le Père de Foucauld que le camp venait honorer en ce lieu. Cette magnifique chapelle fut en effet le théâtre du miracle qui fit aboutir la cause de canonisation du frère Charles de Jésus. Les enfants furent très frappés par le récit, in situ, de la chute spectaculaire de ce jeune ouvrier, du haut des quinze mètres de la voûte, et de son non moins spectaculaire rétablissement, sans la moindre séquelle ! C’est avec beaucoup d’émotion qu’ils vénérèrent ensuite une amict ayant appartenu à saint Charles de Foucauld.

On ne peut se rendre en pèlerinage à Saumur sans pousser jusqu’à la basilique Notre-Dame des Ardilliers, au bord de la Loire. On peine à imaginer aujourd’hui quel fut le rayonnement de ce sanctuaire élevé en l’honneur de la Vierge des Douleurs. Il fut l’un des plus privilégiés par nos rois très chrétiens et le bastion de la Contre-Réforme catholique dans une ville de Saumur très infectée par le protestantisme.

Enfin, la journée s’acheva par un pèlerinage à sainte Jeanne Delanoue, la mère des pauvres de Saumur et la fondatrice des sœurs de la Providence de Sainte-Anne au dix-septième siècle. Visite de sa maison, puis pèlerinage et messe à la maison-mère de la Congrégation, avec vénération d’une vertèbre de la Sainte. Mère Hélène n’a pas son pareil pour la faire admirer et pour faire aimer aux enfants la sainte pauvreté qu’elle embrassa et servit toute sa vie.

DE FONS À VIVIERS.

Si Magé a accueilli le plus gros contingent d’enfants, les autres ermitages ont reçu autant de campeurs que le permettaient leurs capacités d’hébergement.

À Fons, les enfants étaient assez nombreux pour constituer cinq familles. Dans les monts d’Ardèche, quand sévit la canicule, les promenades en vélo sont périlleuses. Pour autant, l’oisiveté y est inconnue. Pour les jeux en plein air, frère Michel a fait le choix de conduire ses ouailles à mille mètres d’altitude, au frais ! De retour à Fons, il y a bien sûr les traditionnels ateliers : pas moins de quatorze ! Vitraux, reliures, premiers secours, chapelets, etc. Mais celui qui remporta le plus franc succès fut la fabrication d’un bateau à moteur avec frère Matthieu. Notre maison Saint-Bruno transformée en chantier naval ! Les enfants sont ravis. Et nos frères profitent de ces bonnes dispositions pour les gaver de doctrine – trois instructions par jour ! – qui se grave dans ces jeunes esprits comme dans de la cire molle.

Frère Thomas raconta la geste de Notre-Dame dans l’histoire de sainte et doulce France, depuis ses origines jusqu’à sa consécration à la Sainte Vierge par le roi Louis XIII, en 1638. L’évocation de ses saints innombrables, de tant d’apparitions de la Madone, de ses milliers de sanctuaires jalonnant le Royaume, nous encourage à implorer encore avec confiance le bon Secours de Notre-Dame.

Les enfants regardèrent aussi frère Pierre leur faire le récit de la vie de saint Charles de Foucauld, que frère Michel compléta en lisant et commentant les lettres de l’ermite du Sahara à ses neveux, riches de leçons pour les enfants. Cela préparait le pèlerinage à Viviers, le 13 juillet.

C’est dans la chapelle du grand séminaire que le camp assista à la messe, là même où le Père de Foucauld avait été ordonné prêtre, le 9 juin 1901. Dans ces immenses bâtiments qui furent jadis une pépinière de vocations, mais aujourd’hui déserts, le groupe joyeux de nos enfants fit sensation, comme une promesse de renaissance pour l’Église !

DE FRÉBOURG À ALENÇON.

La maison Saint-Benoît, dans le Perche, recevait pour sa part une soixantaine d’enfants. Là-bas, le terrain est plus vallonné, mais le soleil plus clément et les ombrages davantage propices aux randonnées cyclistes qu’en Anjou ou en Ardèche. Ce n’est cependant pas sans mérites que nos enfants parvinrent à Alençon ! Les quarante kilomètres furent couverts le 12 juillet, fête des saints époux Martin, avec une étape à Sémallé, où leur petite Thérèse fut placée quelques mois en nourrice.

Le lendemain, les enfants sillonnèrent la ville d’Alençon en tous sens : le pont Saint-­Léonard où eut lieu la sainte rencontre de Louis et Zélie Martin, l’horlogerie, où naquirent leurs premiers enfants, l’église Saint-Pierre de Montsort où ils furent baptisés, celle-là même dont l’abbé des Genettes avait été curé quarante ans auparavant ; la maison de la rue Saint-Blaise, maison natale de leur dernière, Thérèse, baptisée quant à elle dans la basilique Notre-Dame. C’est là que le Père Zambelli les rejoignit pour leur célébrer la messe et leur communiquer sa tendre dévotion pour la sainte famille Martin.

L’après-midi, avant de réciter le chapelet devant le baptistère de sainte Thérèse, frère Benoît recommanda spécialement aux enfants le repos de l’âme de l’amiral Lecoq. Il rappela que les grands-parents de notre ami étaient alençonnais, du quartier de Montsort, précisément. Lors de l’exhumation de sainte Thérèse, sa grand-mère, fleuriste, fut chargée de changer les fleurs artificielles qui étaient près du corps de la sainte et, bien sûr, elle conserva les anciennes comme reliques. À sa mort, son petit-fils, notre ami, les reçut comme son héritage le plus précieux et s’empressa, pour faire plaisir, de transmettre ce trésor à une âme pieuse et dévote de la petite Thérèse... C’est ainsi qu’elles se trouvent désormais présentées à la vénération des fidèles dans la chapelle de notre maison Saint-Joseph, au pied de la statue de la Sainte sculptée par frère Henry.

ALLER LA VOIR UN JOUR.

Les camps de Fons et Magé s’achevèrent le vendredi 15 juillet au matin, permettant à certains participants de se rendre aux funérailles de l’amiral Lecoq, célébrées à 15 heures, en l’église Saint-Lubin de Rambouillet. De là-haut, notre grand-assistant avait tout soigneusement organisé !

Le chant “ J’irai La voir un jour ”, lors de l’arrivée du cercueil, donna la tonalité à toute la cérémonie, d’espérance surnaturelle.

La grande église, comble, reflétait la personnalité de notre ami dont la fidélité CRC avait décuplé l’alacrité au service de la France et de l’Église. Se trouvaient réunies les trois amours du défunt, rappelées par son fils aîné, Pierre-Marie, en introduction : sa famille, édifiante par la sérénité de son espérance, et la foule de ses amis phalangistes, qui en était le prolongement surnaturel ; la France, à travers la Marine, officiellement représentée par de nombreux amiraux et officiers supérieurs ; l’Église enfin, incarnée par Mgr de Romanet, évêque aux Armées, qui présidait la célébration, entouré par Mgr Tois, vicaire général de Paris, par de nombreux aumôniers militaires et le clergé de la paroisse, tous redevables du dévouement infatigable de l’amiral Lecoq. La seule figure de ce phalangiste exemplaire suffit à prouver la parfaite “ ecclésialité ” de la Contre-Réforme catholique, dont les membres remplissaient la nef !

Ces amours communiquent : Antoine Lecoq avait donné deux de ses enfants à l’Église, frère Marc de l’Immaculée Corédemptrice et sœur Marie-Espérance des Martyrs, petit frère et petite sœur du Sacré-Cœur. Quant aux officiers des forces sous-marines qui entouraient le cercueil de leur camarade, en les voyant s’agenouiller comme un seul homme pour adorer Jésus-Hostie, on comprenait qu’ils étaient bien plus que des compagnons d’armes : une véritable famille communiant dans une même foi et un même idéal de service de la Patrie. L’amiral Morio de l’Isle, ancien inspecteur général des Armées pour la Marine, rappela la foi rayonnante et le sens du service de celui qui avait été son adjoint au commandement de la Force océanique stratégique et qu’il invoque désormais comme son intercesseur dans le Ciel.

Le moment le plus émouvant, à l’issue de la messe, fut celui de la bénédiction du cercueil, sur lequel étaient disposés la photographie du défunt, sa casquette aux trois étoiles d’argent, son sabre et ses décorations. De nombreux cantiques avaient été prévus et tous furent chantés intégralement avant que la longue, longue procession des assistants se soit achevée.

Six jeunes marins phalangistes portèrent ensuite la bière sur le parvis de l’église, où l’attendait un petit détachement de la Marine. Prenant la suite de l’Église et de ses rites sacramentels, c’était au tour de la France d’honorer la dépouille de son serviteur, recouverte du drapeau tricolore. Pendant que retentit la sonnerie aux morts, tous les militaires présents saluèrent leur ancien qu’on allait emporter au cimetière.

Presque toute l’assistance s’y transporta à sa suite, manifestement heureuse de prouver ainsi son affection pour le défunt et sa famille. Mgr Tois bénit le cercueil et frère Marc prononça un dernier adieu à son père. En réalité, c’était plutôt une chaleureuse exhortation, adressée aux assistants, à embrasser comme l’amiral Lecoq la dévotion au Cœur Immaculé de Marie, à imiter sa fidélité à la récitation du chapelet, gages de résurrection, pour aller La voir un jour !

La foule ne se dispersa pas sans défiler une dernière fois devant la tombe. L’émotion étreignant les gorges, les militaires se succédèrent devant le caveau, saluant réglementairement avant de se découvrir et de faire le signe de croix.

Antoine Lecoq repose désormais sur le Cœur Immaculé de Marie, « ce port du salut, toujours prêt à accueillir tous les naufragés de ce monde ». Puissions- nous rallier à notre tour ce havre bienheureux !

frère Guy de la Miséricorde.

CORRESPONDANCE

Au moment où nos ermitages entreprennent un second camp-vélo, pour les adolescents, voici la lettre d’une mère de famille phalangiste qui devrait redoubler leur dévouement pour former les esprits et les cœurs des jeunes CRC.

Bien cher Frère Bruno,

Je voudrais vous raconter l’anecdote suivante qui prouve, s’il en était besoin, la spécificité de la CRC, absolument indispensable aujourd’hui pour garder la Foi, l’Espérance et la Charité. Martin se rend une heure par semaine, le mercredi après-midi, auprès d’un jeune et gentil chanoine du Christ-Roi qui a le mérite d’être à dix minutes en vélo de chez nous et de lui assurer, à seize ans, un catéchisme de persévérance. Du moins le croyions-nous, jusqu’à ce que notre fils revienne un jour, un peu méprisant envers ce prêtre qui avait expliqué sans sourciller que la Genèse était à prendre au pied de la lettre, que la Terre avait cinq mille ans maximum et que toute idée d’évolution était en elle-même diabolique...

Il se trouve que Martin a l’esprit scientifique, logique, qu’il s’intéresse à énormément de choses et qu’il avait écouté toute la série du Père sur les Sciences, avec Darwin et compagnie. L’intelligence du Père, son acceptation et son intérêt pour les découvertes scientifiques, sa manière d’expliquer l’évolution sans nier la Création ont permis à Martin, je crois qu’on peut le dire, rien de moins que de garder la Foi !

Autant pour un esprit littéraire, une mauvaise philosophie peut être dramatique, autant pour un esprit scientifique, le refus de toute réflexion et de toute nouveauté, sous prétexte de Tradition mal comprise, aurait des conséquences désastreuses... Donc merci au Père, merci à vous les frères de la VOD, de rechercher toujours la vérité, avec Foi et intelligence et de nous la mettre à disposition si généreusement. C’est sauveur ! et on aimerait que chaque classe de 1re puisse écouter le Père sur grand écran !

J’en discutais avec une amie phalangiste dont le fils, en 1re dans une école hors contrat honnêtement remarquable ! tenue par les chanoines du Christ-Roi, devait faire un exposé sur l’évolution. Il apporté le livret que frère François avait réalisé pour la visite de la Galerie de l’évolution à Paris. Son prof le feuilleta... et dit : « Ah oui ! la CRC, ça carbure là-bas ! » Donc chers Frères, sachez que tous vos travaux, recherches et soucis d’explication sont immensément utiles dans nos familles, avant même de s’atteler à convertir le monde entier ! Je n’ai jamais aussi bien compris cette petite phrase « nôtre est le vrai » qui, mal comprise, peut paraître un peu prétentieuse (« Ah ! la CRC, ils pensent toujours avoir raison ! »), mais qui est tellement salvatrice. Merci pour tout. Nous restons bien en union de prières et d’affection.

C. B.