Il est ressuscité !
N° 258 – Septembre 2024
Rédaction : Frère Bruno Bonnet-Eymard
LA LIGUE
Inséparables dans notre charité
PARMI toutes les répliques de l’oratorio de frère Henry sur Saint Louis, représenté le 25 août par les jeunes du camp de la Phalange, il semble que c’est la harangue du roi croisé devant Damiette qui a le plus impressionné frère Bruno : « Mes fidèles amis, nous serons invincibles si nous sommes inséparables dans notre charité. »
Voilà qui s’applique parfaitement à notre Phalange et notre frère nous la répéta plusieurs fois. C’est dans cet esprit que nos camps sont depuis cinquante ans le creuset de la Communion phalangiste. Mais que l’on ne se méprenne pas : l’union des cœurs n’est pas chez nous le fruit d’une complaisance mutuelle spontanée... et éphémère ! non plus que d’une ivresse charismatique, sentimentale... et illusoire ! Pour élever pendant dix jours deux cents jeunes de la médiocrité du siècle à nos saints enthousiasmes pour la Vierge Marie, l’Église et la Patrie, il faut bien des efforts concrets de charité fraternelle, il faut des convictions et des dévotions partagées. Notre âme commune est soudée par les mille beautés, raisons et vertus de notre CRC.
ÉCOLE DE VERTU.
D’ailleurs, lors de la messe d’ouverture du camp de la Phalange, le 16 août au soir, le célébrant nous avait précisément invités à rechercher la sainteté dans l’application aux petits devoirs d’état quotidiens de ce camp. Le monde est devenu si contraire à cette humble fidélité qu’elle est d’un grand mérite et console beaucoup les Cœurs de Jésus et Marie. La première mise en pratique de cette exhortation fut la remise des téléphones portables dans le bureau de frère Michel, où ils demeurèrent sagement pendant dix jours, aisément consultables, mais jamais dérangeants. L’attention aux conférences et aux exercices communs en fut singulièrement accrue ! Non seulement les participants étaient libérés des sollicitations permanentes et intrusives du monde mais, comme le leur fit remarquer notre frère, cet acte méritoire d’obéissance les disposait à recevoir la grâce pour progresser vers le Ciel.
Ce n’est pas tout. La vie commune fournit de nombreuses occasions d’exercer la charité. En république, où elle n’existe pas, il faut que l’État socialiste légifère à tout propos. Mais dans l’Église et donc dans la Phalange, la charité est une vertu théologale que chacun pratique en vue du Ciel. Ainsi des membres du camp se dévouant pour aider les participants handicapés : « C’est une grâce d’avoir parmi nous des jeunes qui sont en difficulté, expliqua frère Michel. Il faut y être attentif, parce que c’est comme cela que s’exerce la charité chrétienne. » Ainsi, de même des équipes de service faisant le ménage du réfectoire, encouragées par notre frère qui les assura qu’elles y gagnaient davantage de mérites que sur le terrain de foot ! Ainsi des nécessaires efforts que chacun doit fournir, de politesse et de ponctualité. Ah ! la charité du phalangiste n’est pas une abstraction !
ÉCOLE DE PENSÉE.
Ainsi exercés aux vertus, nous étions disposés à profiter des enseignements des frères sur l’histoire mariale de France. Sous le titre La France de Marie, il ne s’agissait pas d’une “ histoire bataille ”, ni d’une histoire de la monarchie, ou de l’Église de France, pas même d’une histoire du sentiment religieux. Non, mais il s’agissait de raconter l’Alliance du Bon Dieu avec notre peuple, par la médiation de la Vierge Marie : ses origines et sa mise en œuvre progressive dans notre histoire, dont elle est le ressort. Cette alliance est constitutive de la France, c’est-à-dire que notre fidélité à ses exigences détermine ses grandeurs et ses malheurs, sa vie ou bien sa mort.
Cela commence par un miracle de la Providence conduisant sur les rivages provençaux sainte Marie-Madeleine et les saintes Femmes, celles qui avaient le plus intimement connu la Mère de Dieu. Quelle grâce d’élection, authentifiée par l’archéologie et de nombreux miracles ! Au siècle suivant, l’Église de Lyon se rattache à saint Jean, par qui s’établit une nouvelle filiation entre la Gaule et la Vierge Marie. Dès les premiers siècles de son histoire, Notre-Dame en prit possession et lui manifesta sa sollicitude, soutenant les confesseurs de la foi, conjurant les calamités publiques et repoussant les invasions. Nos aïeux n’eurent que le mérite de répondre à tant de grâces par leur culte marial et en se mettant au service de l’Église, à l’exemple de Clovis, le premier roi catholique : « gesta Dei per Francos ».
Bien vite, les monastères se multiplièrent, qui furent autant de foyers d’un culte exubérant envers la Mère de Dieu, en même temps que des grands progrès intellectuels, sociaux et politiques. Si les rois ont fait la France, c’est l’Église qui a inspiré et relayé leur œuvre, faisant d’eux les médiateurs du salut temporel et éternel de leurs sujets et les serviteurs de la Chrétienté tout entière.
Ainsi voyons-nous la France monter vers son apogée, sous les Capétiens, que domine la haute et fine silhouette de Saint Louis. Il se disait modestement le “ sergent du Christ ”, mais il fut, bien plus, comme sa nouvelle incarnation dans la France du treizième siècle, complétant admirablement l’image qu’en avait donnée cinquante ans plus tôt son cher saint François d’Assise. En Saint Louis, nous contemplons non seulement la douceur de Notre-Seigneur, mais aussi sa force ; non seulement son humilité, mais encore sa majesté. L’oratorio et les oraisons matinales de frère Bruno qui nous l’expliquaient nous firent prendre la mesure de sa sainteté : le roi croisé avait pris la croix dans toute son acception. Couronné des épines de l’abjection dans les prisons sarrasines, il devint réellement le rédempteur de son peuple.
Qu’ajouter à de telles splendeurs ? Pour augmenter le mérite de ses enfants bien-aimés, notre très chéri Père céleste permet à Satan de les éprouver. Dorénavant, les malheurs vont fondre sur la France, menaçant son corps et son âme. Tandis que les assauts du démon deviennent de plus en plus formidables, ceux qui lui résistent sont de plus en plus rares, mais revêtus d’une gloire tragique d’autant plus resplendissante. Il semble qu’à la mesure même de la gravité croissante de ces épreuves, les restaurations soient ensuite plus magnifiques, quoiqu’incomplètes : la guerre de Cent Ans et la geste de Jeanne d’Arc, les guerres de Religion et le “ Grand Siècle ” de la consécration de la France à Marie, la Révolution française et le siècle de l’Immaculée. Jusqu’au vingtième siècle où notre Père se dressa seul face au raz-de-marée de l’apostasie, en chevalier et en docteur de l’Immaculée. Dans la désolation présente, nous espérons une résurrection merveilleuse de l’Église et de la France, si seulement nous demeurons fidèles aux enseignements d’un tel maître, nous efforçant de toucher le Cœur de notre Mère chérie en faveur de son beau royaume.
La série de ces dix conférences fut complétée chaque soir en cratère par d’admirables montages qui nous firent visiter tour à tour la Sainte-Baume et Saint-Maximin, auprès de sainte Marie-Madeleine, Rocamadour, le roc de la fidélité catholique, Chartres, le miroir de la royauté de Marie, Pellevoisin et L’Île-Bouchard, moins connus mais si émouvants, où Notre-Dame se montra une mère miséricordieuse et si bonne Française ! Cet ensemble sera publié tout au long de l’année sur notre site de VOD.
Mais c’est aussi au cours des périodes de questions que se transmettent nos convictions CRC. Beaucoup portèrent sur le mystère de l’Immaculée Conception, dont frère Bruno ne se lasse pas de nous entretenir ; sur les grands combats du Père, contre le Concile et l’intégrisme, sujets que l’on pourrait croire épuisés, mais que chaque nouvelle promotion de phalangistes doit découvrir à son tour. Et, bien sûr, ce furent les conférences qui alimentèrent principalement nos conversations, permettant à frère Bruno de bien définir notre ligne de conduite, dans le prolongement de l’orthodromie mariale.
« Puisque Notre-Dame aime la France, faut-il dire que la France lui est infidèle ou bien que ce sont les ennemis de la Sainte Vierge qui essayent de lui arracher son royaume ?
– Un jour, l’ambassadeur de Russie en France avait expliqué qu’il distinguait bien les Français de leurs gouvernants et qu’il aimait toujours la France. La Sainte Vierge fait de même ! Toutes ses interventions passées nous prouvent qu’elle ne se lasse pas d’aimer la France. Aujourd’hui même, il ne faudrait peut-être pas grand-chose pour réveiller la piété française... Il nous revient donc d’aimer Marie pour tous ceux qui ne l’aiment pas, afin qu’elle ne se dégoûte pas de la France, mais qu’elle la convertisse enfin ! »
ÉCOLE DE PIÉTÉ.
Précisément, ce camp rythmé par les chapelets et la messe quotidienne est aussi une école de prière. Au fil de ses sermons, frère Bruno s’efforça d’infuser dans nos âmes l’amour dont il brûle pour l’Immaculée Conception, “ la Femme ” révélée dans la Bible de la Genèse à l’Apocalypse. Encore une riche série de prédications à réécouter et méditer dans les logia. Les sermons de nos aumôniers furent aussi à l’unisson de nos préoccupations et de nos amours. Ainsi, le 22 août, pour la fête du Cœur Immaculé de Marie, le célébrant mit-il en rapport la parole de Notre-Dame de Fatima « Dieu veut établir dans le monde la dévotion à mon Cœur Immaculé » avec la demande du Pater : « Que votre volonté soit faite sur la terre comme au Ciel. » Si le Bon Dieu veut que sa Mère soit tellement glorifiée sur la terre, c’est qu’elle l’est déjà dans le Ciel ! Le soir même, notre procession aux flambeaux à travers le village, derrière le brancard de Notre-Dame, fut si belle qu’elle dut ravir la Cour céleste elle-même !
Enfin, les deux derniers jours du camp furent consacrés à la représentation de l’oratorio, à laquelle frère Bruno nous avait recommandé d’apporter une application religieuse, comme à une véritable liturgie. La vie de Saint Louis n’est pas seulement une page d’histoire, ajouta-t-il ensuite, mais elle nous dicte notre vocation présente, de persévérance dans les humiliations, demeurant tous à notre rang d’enfants de Marie, inséparables dans notre amour mutuel, dans le refus de la molle apostasie et la fidélité à Jésus et Marie. C’est ainsi que nous hâterons le salut de la France !
frère Guy de la Miséricorde.