16 SEPTEMBRE 2018
La profession de foi de Pierre à Césarée
et l’annonce de la Croix
8 27 Jésus s’en alla avec ses disciples vers les villages de Césarée de Philippe, et en chemin il posait à ses disciples cette question : “ Qui suis-je, au dire des gens ? ” 28 Ils lui dirent : “ Jean Baptiste ; pour d’autres, Élie ; pour d’autres, un des prophètes ” 29 “ Mais pour vous, leur demandait-il, qui suis-je ? ” Voilà le sommet de l’Évangile, il tient dans les quelques versets qui suivent. Enfin Jésus pose la question dramatique, la question de confiance et – Pierre lui répond : “ Tu es le Christ. ” – Il répond au nom de tous les autres, non sans une lumière spéciale. Il mourra à cause de cette affirmation, il versera son sang après une vie d’apostolat laborieuse parce qu’il croyait que Jésus-Christ était le Christ.
30 Alors il leur enjoignit de ne parler de lui à personne. Il ne dit pas que c’est faux, mais il leur dit très sévèrement : « Taisez-vous sur cela ». C’est le secret messianique. Jésus ne veut pas voir imposer aux âmes cette affirmation sans preuve et sans réflexion. Il faut qu’elles aient le temps de faire un cheminement pour le comprendre du dedans. Mais c’est fait, il est reconnu par les Apôtres et maintenant, c’est à la vie à la mort, un seul trahira.
31 Et il commença de leur enseigner. Tout de suite, Jésus les enseigne ; à peine savent-ils qu’il est le Christ, à peine ont-ils fait le pas de la foi, il leur répond : “ Le Fils de l’homme doit beaucoup souffrir, être rejeté par les anciens, les grands prêtres et les scribes, être tué et, après trois jours, ressusciter. Dépassés, les apôtres sont donc emportés à donner leur adhésion d’esprit. Dès qu’ils l’ont fait, Jésus leur découvre le dessein de Dieu sur lui, le dessein de son Père, leur ouvre la porte de l’avenir effrayant qui est en contradiction absolue avec tous les rêves des Juifs de ce temps concernant le messie ! Jésus ne pouvait le dire devant les foules de Galilée qui l’auraient abandonné. Là, il le dit en réponse à leur foi.
32 et c’est ouvertement qu’il disait ces choses. Pierre, le tirant à lui, se mit à le morigéner. 33 Mais lui, se retournant et voyant ses disciples, admonesta Pierre – tança Pierre, et non pas “ admonesta ” – et dit : “ Passe derrière moi, Satan ! Dégage ! Satan ! Car tes pensées ne sont pas celles de Dieu, mais celles des hommes ! ”
Je vais vous faire une révélation : Notre Seigneur connaît une véritable agonie, parce que s’il avait été en pleine possession de sa force morale, il aurait dit à Pierre qu’il se trompait. Mais ce « dégage Satan » veut dire que Jésus, au même moment où il est reconnu comme le Christ, dans toute sa force humaine, son désir de sauver les âmes, son désir de régner sur le monde, de glorifier son Père, Jésus dans sa nature humaine aspire au succès. Il est comme les Apôtres, les saintes Femmes, le peuple de Galilée et de Judée, il attend la libération d’Israël, il attend la réalisation de l’ère messianique telle que les Prophètes l’ont annoncée, et il voudrait que ce soit tout de suite, aussi bien que nous aujourd’hui nous voudrions le succès de notre doctrine, la résurrection de l’Église ! Satan, c’est le tentateur, celui qui pendant 40 jours a essayé de faire tomber Jésus au début de sa mission. Il revient là dans la personne de Pierre. Pierre est possédé par Satan, lui qui tente Jésus. Alors Jésus, réellement ébranlé, a cette parole terrible : « Dégage, cesse de me tenter ! Tes pensées ne sont pas celles de Dieu mais celle des hommes ».
Lors de la multiplication des pains, Notre Seigneur, voyant les cinq mille hommes prêts à l’acclamer, à lui donner tout leur cœur, ne pouvait rester insensible à cette ovation. Il a dû les calmer en faisant effort sur lui-même. Il savait ce qui devait arriver, mais il n’en disait rien à personne. Maintenant que les Apôtres lui ont donné leur foi, il n’y a pas une minute à perdre. Dans quelques mois, tout sera achevé. Alors il leur ouvre les yeux, il essaye du moins. Et l’autre imbécile se met en travers ! Ce n’est pas seulement un imbécile, c’est le diable qui est là. A lieu, alors, la véritable agonie, la véritable hésitation de Jésus. En chassant Pierre devant lui et en le reprenant vigoureusement, Jésus décide de consentir à la volonté de son Père. Ce qu’il a prophétisé, il le veut. Nous allons de choses capitales en choses capitales.
34 Appelant à lui la foule en même temps que ses disciples, il leur dit : “ Si quelqu’un veut venir à ma suite, qu’il se renie lui-même, qu’il se charge de sa croix, et qu’il me suive. ” Jusqu’à maintenant, l’Évangile était une parole, le règne de Dieu, on ne savait pas très bien ! Et voilà que tout d’un coup, l’écorce éclate, on voit le noyau, le fruit : c’est la croix ! Le mot de Croix y est. Jésus l’a certainement dit, Pierre ne l’a pas inventé. Chaque fois qu’il y avait eu des rébellions, les Romains avaient crucifié tous les rebelles, et les gens en frémissaient encore. Jésus n’est pas de ces menteurs qui disent : « Je vais libérer mon peuple et nous irons de victoire en victoire ». Non. Il leur dit : « Je vous préviens, ça échouera. Si vous êtes mon disciple, il faut déjà porter sa croix. »
Vous voyez le spectacle de celui qui porte sa croix. Cela ne veut pas dire que tous les jours ils vont porter leur croix. Mais qu’ils sachent que cela se terminera ainsi, et, que chaque jour, ils pensent : je suis un condamné à la Croix comme Jésus. 35 Qui veut en effet sauver sa vie la perdra, mais qui perdra sa vie à cause de moi et de l’Évangile la sauvera.
Tout l’Évangile est contenu dans ce chapitre 8 de saint Marc. La grande révélation a été déclenchée par la confession de Pierre en la messianité de Jésus. Elle nous apprend que la vocation du chrétien est de mourir pour vivre, mourir en martyr, en disciple du Christ. Celui-là sauvera sa vie. Ceux qui sont fidèles à Jésus, vont aller vers la mort. Et le point de fuite, la ligne d’horizon maintenant c’est une croix sur un horizon dévasté. Le saviez-vous ? Les prédicateurs qui parlent de l’Évangile vous ont-ils dit cela ? Et pourtant, c’est la pure vérité de l’Évangile de Marc.
Abbé Georges de Nantes
Extraits du commentaire de l’Évangile de saint Marc (S 90),
5e instruction : Le ministère laborieux de la prédication évangélique