Madame Louise de France
Victime pour le Cœur de Marie et pour son royaume
UNE PRINCESSE PRÉDESTINÉE
D ERNIÈRE fille du roi, Madame Louise est née le 15 juillet 1737 et fut élevée avec trois de ses sœurs à l’abbaye de Fontevrault. Elle y fut portée à l’âge de onze mois ; peu de temps après son arrivée, elle souffrit d’une indisposition si grave qu’on songea, puisqu’elle avait été ondoyée, à parfaire sur-le-champ les cérémonies du baptême et à la placer sous la protection spéciale de la Sainte Vierge... et le mal céda.
Tout est attirant dans le caractère de cette petite fille qui déclarait à l’âge de quatre ans : « J’aime beaucoup le bon Dieu ; je lui donne mon cœur. Que me donnera-t-il en retour ? » Ces défauts eux-mêmes la poussaient à une humilité plus grande. Une de ses suivantes, qui portait un bandeau sur un œil malade, lui faisait une observation inexacte :
« Si vous y mettiez vos deux yeux, dit assez méchamment la princesse, vous ne me verriez peut-être pas faire ce que je ne fais pas.
– J’ai assez d’un œil, Madame, répliqua la servante, pour voir au moins que vous êtes bien orgueilleuse. »
Madame Louise en resta tout interdite :
« Vous avez raison. Me pardonnez-vous ? »
Et elle ajouta, avec un soupir très convaincu :
« Hélas ! Il faudra que je m’en confesse. »
Introduite à la cour en 1748, à l’âge de onze ans, Madame Louise retrouvait sa famille avec joie. Chacun s’accordait à trouver en elle de l’intelligence, de la gaieté, une franchise toujours épanouie. Elle reçut, cette même année, la grâce de la vocation le jour de sa première communion, prenant pour modèle la Vierge Marie au jour de sa Présentation au Temple.
D’une ardeur extrême, elle suivait avec passion les chasses. « En forêt de Compiègne, sa monture se cabre, la princesse est désarçonnée : roulant sous la roue d’un carrosse qui arrive à grande vitesse, elle échappe à la mort par miracle : “ Qu’on me donne mon cheval ! ” »
Aussitôt remontée en selle, elle cravache sa monture, la maîtrise, et rouge de contentement, tête haute, rentre au château. Mais au seuil de ses appartements, elle fond en larmes et court à son prie-Dieu pour remercier la Sainte Vierge de sa protection.
Très soucieuse de remplir son devoir d’état à la cour, elle hésitait à répondre à l’appel divin. Or, en 1750, une jeune veuve de trente-trois ans, attachée à la maison de la reine, se retira au carmel sous le nom de sœur Thaïs de Jésus. Sa vie avait été brisée quelques années auparavant par la perte en trois mois de son fils de quatre ans, de son mari et de son père. Moquée par le monde au moment d’entrer en religion, elle fut soutenue par la famille royale. La reine tint à assister avec ses filles à sa prise d’habit en 1751, qui fit forte impression sur notre princesse :
« Son dévouement généreux vu de près me fit faire de profondes réflexions sur la nécessité du salut et sur le néant de tout ce qui flatte nos sens. Voilà du courage, me disais-je à moi-même, voilà comment on ravit le Ciel. »
De ce jour, elle prit la résolution de demander quotidiennement à Dieu la grâce d’être religieuse.
Elle persévéra pendant dix-huit ans ! entretenant sa vocation par la mortification et la prière. Sous les « cilices du diable », comme elle appelait plaisamment ses robes de cour, elle s’habituait à porter la tunique de serge d’une carmélite. Son directeur, Mgr de Beaumont, archevêque de Paris, retardait son projet, craignant de déplaire au roi, et de l’aliéner à la religion et à sa famille dévote.
« PRIEZ DIEU POUR LE ROI ET POUR MOI. »
Depuis 1760, le carmel Jésus-Maria connaissait de graves difficultés financières. On avait réduit au minimum ce qu’il fallait pour faire vivre les vingt-sept carmélites, au point de supprimer un repas ! Mais les créanciers menaçaient toujours. La prieure eut alors recours à la protection de la Sainte Vierge et fit avec toute la communauté un vœu : elles promettaient de faire chaque année, du 8 au 16 février, une neuvaine au Cœur de Marie et de construire un petit oratoire en son honneur, si elles obtenaient de la Providence l’entrée d’une postulante aisée dont la dot pût éviter à leur communauté d’être dispersée. Une religieuse dit alors : « Il ne faudrait pas moins que la fille d’un roi. »
La neuvaine à peine achevée, Madame Louise obtenait à Versailles, sans rien connaître du vœu des carmélites, l’autorisation de son père pour entrer en religion. Elle se présenta aux grilles du carmel le 11 avril 1770 qui était un Mercredi saint et implora à genoux devant les religieuses assemblées :
« Je vous supplie, mes sœurs, de me recevoir et d’oublier ce que j’ai été dans le monde. Priez Dieu pour le roi et pour moi. Je désire de toutes les forces de mon âme d’être carmélite. »
Elle reçut le nom de sœur Thérèse de Saint-Augustin. (...)
La princesse, qui tenait de sa mère la dévotion au Sacré-Cœur, avait également un particulier attachement au Cœur de Marie. Aussi dira-t-elle : « C’est au Cœur de Marie que je dois le bonheur d’être ici. » La défense du culte du Cœur de Marie marquera toute sa vie religieuse.
La joie de notre postulante était sans mélange : « Tout ici respire la gaieté du ciel », et les récréations l’enchantaient. « À la cour je ne m’amusais pas si bien, je ne riais pas de si bon cœur dans le siècle que dans mon cher carmel. »
« Trop heureuse d’être carmélite », elle savait qu’il lui faudrait se faire violence et passer sa vie à « balayer, frotter » et à tirer l’aiguille ! Son “ ange ”, sœur Julie de Jésus, la prévint : « Vous vous attendez bien qu’on aura ici pour vous tous les ménagements possibles et qu’à chaque pas que vous ferez, on vous en offrira de toutes les espèces ; vous pouvez les accepter et vous vous édifierez encore beaucoup ; mais si vous m’en croyez, vous les refuserez et vous ne serez point carmélite à moitié. » De ce jour naquit une très grande et très pure amitié spirituelle entre les deux religieuses, toute tournée vers le meilleur bien du monastère puisqu’elles se succédèrent aux charges de prieure, ne cessant de s’entraider.
UNE NOUVELLE SAINTE THÉRÈSE
Si l’obédience de maîtresse des novices, reçue au lendemain de ses premiers vœux en 1771, la jeta dans la plus extrême confusion, son élection au priorat le 27 novembre 1773 lui fut un accablant sacrifice. « Quand on est élue prieure au bout de deux ans de profession, on a de grands sujets de trembler. Ma confiance est dans l’obéissance que j’ai vouée à Dieu et à mes supérieurs. »
Un espoir la soutenait : « Je ne crois pas qu’on recommence pareille sottise ; on en aura j’espère bien assez de moi au bout de mes trois ans. » Mais non ! en novembre 1776, la communauté la reconduisit. « Hélas ! il est arrivé ce fameux jour où mes sœurs ont doublé leur sottise. Il est donc vrai que j’ai encore trois ans à passer avant d’être délivrée d’un emploi dont je m’acquitte si mal. » Elle s’en acquittait fort bien, et son but était simple : « Mes novices sont des anges, et il faut qu’elles deviennent des saintes. »
D’une alacrité communicative : « Bon, bon ! si on a tant d’attention pour sa vie, pour sa santé, on ne fera jamais rien de crainte d’abréger l’une et d’altérer l’autre », elle savait cependant le poids du jour, de la chaleur et... du froid ! « Je gèle, ma chère mère, je crois que mes doigts tomberont. »
Elle recommandait à ses filles l’obéissance, comme elle-même la pratiquait. « J’ai fait mes vœux, je ne suis plus à moi, je suis à l’obéissance. » Elle ne cessait de leur prêcher l’abandon à la volonté de Dieu et la fidélité dans les petites choses. Mais « le moyen le plus sûr d’avancer dans la perfection, le secours le plus puissant contre les ennemis les plus dangereux de l’âme religieuse, l’ennui, la tristesse, la défiance, le scrupule », c’est la sainte Eucharistie. Aussi contre l’esprit janséniste du temps, encourageait-elle ses filles à la communion fréquente.
VICTIME POUR SON PÈRE
Madame Louise avait pour son père et pour sa fonction royale un amour filial et un dévouement sacré. L’inconduite de Louis XV avec la marquise de Pompadour et, après la mort de celle-ci, avec Madame du Barry, compromettaient gravement son salut et son devoir qui était de protéger la religion et le royaume. C’était expressément pour expier les péchés de son père que Madame Louise était entrée au Carmel :
« Verra-t-il [ma résolution]sans être touché de Dieu et sans retourner entièrement à Lui ? Moi carmélite et le roi tout à Dieu ! »
La séparation avait été pour le roi une épreuve difficile et sa vie était intiment liée à la vocation de sa fille : deux raisons pour craindre d’aller la voir. Louis XV rendit sa première visite le 4 mai 1770 « dans une tristesse extrême », nota une carmélite.
« Je sais, commença par dire le roi, que les religieuses aiment à prêcher leurs parents, mais sachez, Madame, que je ne veux pas de vos sermons.
– Ah ! Papa, je respecterai vos ordres, mais au moins, vous agréerez mes prières et mes œuvres. »
Le roi fit le tour du couvent, visita la cellule de sa fille, ne manqua pas de tâter la paillasse. Quand il se retira, sa tristesse semblait s’être évanouie.
Louis XV prit l’habitude de venir une fois par mois au carmel. Le Pape accorda la permission de percer une porte dans le parloir du couvent, donnant directement accès à la chambre de sœur Thérèse. Le roi possédait même une clef du couvent, ce qui faisait dire à une sœur : « Pour le coup, nous sommes ses religieuses de préférence. »
Il s’instaura une sorte de familiarité entre le roi et la communauté. Apprenant que le café était proscrit par la Règle, le roi prétendit un jour qu’une religieuse ne pouvait être régulière au point d’en refuser de sa main, et prenant sa cafetière et ses tasses, il fit le tour des cellules... sans succès.
Louis XV était un homme secret. On ne sait rien de ses entretiens avec sa fille, il est probable qu’ils se déroulaient dans une atmosphère bon enfant. Sans doute aussi le monarque confia-t-il sa profonde inquiétude à l’égard des fins dernières, car la pensée de la mort l’obsédait souvent. Un jour, au chapitre, il tomba en arrêt devant une fenêtre d’où il apercevait l’abbaye, nécropole royale : « Voilà mon dernier gîte. »
Le 27 avril 1774, le roi fut saisi d’une fièvre violente due à la petite vérole et entra dans une agonie lente et humiliante. Les Filles de France se relayèrent au chevet de leur père malgré les risques de contagion, tandis que la communauté de Saint-Denis se mettait en prière devant le Saint-Sacrement.
Pour mère Thérèse, l’instant suprême arrivait. Pour elle également commençait une agonie, ultime combat. Son sacrifice serait-il exaucé ? Aux carmélites qui la conjuraient de se ménager, elle répondait : « Songez que le roi se meurt. Je suis venue ici pour son salut et le mien. Dites-moi si j’en puis trop faire pour une âme si chère ? »
Le 3 mai enfin, le roi renvoyait définitivement sa maîtresse. Dans la nuit du 7 mai, il se confessait durant un long quart d’heure et recevait la communion. Trois jours plus tard, après une agonie atroce, le roi poussait son dernier soupir.
Pour mère Thérèse le choc fut brutal :
« Je suis sûre que si je fais un bon usage de cette croix, elle est seule capable de me mériter le Ciel ».
Mère Thérèse déploya une immense activité en faveur de son Ordre. Humble carmélite, elle entendait le rester, mais fille de roi, elle mettait ses qualités au service de son Roi Jésus et de sa Reine.
Chaque année, l’Ordre du Carmel honorait la fête du Cœur de Marie par un office liturgique qui était gratifié d’indulgences. Or, en octobre 1770, le pape Pie VI refusa de renouveler pour cette fête les indulgences parce que cette dévotion faisait l’objet de débats entre théologiens : « C’est une nouveauté, écrivit le cardinal-secrétaire d’État, dont le Saint-Père n’a pas cru devoir introduire l’exemple ». Deux ans plus tard, Rome retirait cette fête du calendrier liturgique du Carmel ! Sœur Thérèse s’en disait « fâchée et désolée » et les carmélites de Saint-Denis n’interrompirent pas leurs dévotions.
Quelques années plus tard, élue prieure, mère Thérèse supplia le Pape, au nom de tous les carmels de France, de rétablir l’office du Cœur de Marie, à la date du 8 février. Mais Rome refusa : par prudence, fit deux fois répondre le Saint-Père, il ne fallait pas introduire de précédents « qui pouvaient se révéler pernicieux ». Pie VI manifesta même son impatience : le rang de la prieure, si respectable qu’il soit, ne lui donnait aucun droit !
Celle-ci ne désarma pas. Elle supplia son directeur, l’abbé Courbon du Ternay de constituer un dossier sur l’histoire de cette dévotion, et cinq ans plus tard vit sa ténacité récompensée puisqu’elle reçut l’autorisation verbale de continuer à dire l’office du Cœur de Marie.
Durant ses années de priorat elle déploya une immense activité, avec une énergie toute tournée vers le service de l’Ordre. Ne nous méprenons pas ; humble carmélite, elle entendait le rester, mais fille de Roi, elle brûlait du zèle de la gloire de Dieu et puisque le Bon Dieu l’avait pourvue des qualités et des grâces d’une fille de France, elle les mettait toutes au service de son Roi Jésus-Christ, de l’Église, de son Ordre et du royaume Très Chrétien. C’est ainsi que mère Thérèse de Saint-Augustin devint la première carmélite de France, et Saint-Denis la plaque tournante du Carmel. Elle s’occupait du transfert des religieuses d’un monastère à un autre, veillant à équilibrer les répartitions. Le passage des sœurs par Saint-Denis était un moyen de les conseiller, de contrôler aussi leur bon esprit afin de combattre tout jansénisme.
Après sa mort, on trouvera ce billet : « Tout mon but dans ce que j’ai fait pour l’Ordre, a été de sauver des âmes, pour lesquelles je donnerais jusqu’à la dernière goutte de mon sang, à l’imitation de notre divin Époux. »
Elle fut la providence de l’Ordre, et ses générosités allèrent à doter des postulantes indigentes pour leur permettre d’accomplir leur vocation. Ne retenons qu’un nom, celui d’une sainte, Marie-Madeleine Lidoine, que mère Thérèse dirigea vers le carmel de Compiègne si cher à sa mère, avec une dot qu’elle avait demandée à la dauphine Marie-Antoinette. En reconnaissance, la sœur Lidoine prit le nom de sœur Thérèse de Saint-Augustin ; c’est elle qui, devenue prieure du carmel de Compiègne, mènera ses filles au martyre le 17 juillet 1794.
Mère Thérèse était « accablée d’affaires ». Elle se dévoua corps et âme pour accueillir à Saint-Denis, les carmélites de Bruxelles, chassées des Pays-Bas autrichiens par Joseph II. Dans une de ses nombreuses lettres à la prieure du carmel de Bruxelles, on peut découvrir le portrait qu’elle brossait d’elle-même, si révélateur de sa simplicité enjouée et de son cœur :
« Votre servante est fort petite, grosse tête, grand front, sourcils noirs, yeux bleus gris brun, nez long et crochu, menton fourchu, grasse comme une boule et bossue. On dit cependant que depuis qu’elle est revêtue de l’élégant habit du Carmel, il n’y paraît que peu. Elle s’en moque, cela ne lui a jamais rien fait depuis l’âge de raison. Du reste, pourvu que sa figure ne vous répugne pas et que vous ne voyiez en elle que son cœur qui vous est tout dévoué ! »
Tenir à sa vocation coûte que coûte, tel était le fond de son âme dévorée du zèle de la gloire de Dieu et du salut de ses sœurs.
POUR LE SALUT DU ROYAUME
Dans le combat contre l’impiété, elle lutta avec une égale ardeur contre jansénistes et protestants, libertins et encyclopédistes. Elle s’est mêlée de politique, assurément, dans la mesure où le salut du royaume était en jeu. De son regard pénétrant, elle jugea Louis XVI, son neveu : « Dame, ce n’est pas Louis XV », disait-elle déplorant son manque de volonté, « voilà ce que c’est que d’être faible, on se met à la tutelle et on y met les autres. On gagnerait plus pourtant d’être ferme. »
Quant aux idées, elle savait qu’il fallait se battre sur le terrain même des philosophes :
« Je déteste dans la bouche des chrétiens ces expressions que la philosophie ne fait tant ronfler que pour bannir la charité. Ce n’est pas que la “ bienfaisance ” (la “ solidarité ”, dirions-nous aujourd’hui)soit un mal, mais ses motifs trop humains sont insuffisants pour remplacer l’aumône et en remplir le précepte. Le premier placet qu’on m’a présenté où, au lieu de charité, on me demandait l’aumône en sollicitant ma “ bienfaisance ”, m’a révoltée. »
Ses compagne ont attesté combien elle s’imposait de veilles, de prières à la chapelle « jusqu’après minuit », de disciplines sanglantes pour la conversion des pécheurs du royaume. Après avoir tant prié pour le roi, elle implorait pour le royaume. Sans connaître tous les détails des agitations de Paris, son sens religieux lui révélait les causes supérieures du mal social. L’irréligion, se faisant passer pour affaire de mode, atteignait son véritable but : renverser les lois les plus sacrées.
En novembre 1787, mère Thérèse apprend que Louis XVI a laissé se tenir par faiblesse une séance de l’Assemblée des notables où Loménie de Brienne, mauvais ministre et mauvais évêque, soutenu par les philosophes, présentait un édit qui accordait aux protestants l’état civil dont ils demeuraient privés depuis Louis XIV. Ils pouvaient désormais faire sanctionner les actes religieux de leur vie par un magistrat laïc. Le principe du mariage purement civil, c’est-à-dire du mariage sans Dieu, était introduit.
Avouant la peine « dont elle n’était point maîtresse », au souvenir des luttes de ses aïeux contre les Réformés, ainsi que des intentions de sainte Thérèse d’Avila, restaurant le Carmel pour racheter le mal que faisaient à l’Église les calvinistes français, mère Thérèse tremblait de voir abaisser les barrières protectrices de la société contre l’hérésie. « Si ces gens-là reviennent dans ce beau royaume, avec le peu de religion qui y règne, Dieu seul sait où cela peut aller. »
Mère Thérèse fut atterrée : « Cette nouvelle m’a causé une étrange révolution ». Elle, qui ne se plaignait jamais de sa santé, avoua de grands maux d’estomac. Trois jours après, les suffocations augmentèrent et elle ne se fit guère d’illusion sur son état. Les maux de tête augmentèrent : « Il me semble que Notre-Seigneur y enfonce toutes les épines de sa couronne. »
Le 22 décembre elle recevait l’extrême-onction et, à l’aube du dimanche 23, les doigts serrés sur les grains de son rosaire, les yeux levés vers le ciel, ses lèvres laissaient tomber ces mots qui résumaient son ardeur et le but de sa vie : « Dépêchons. Au galop ! En paradis ! » Louise de France avait cinquante ans et dix-sept ans de vie religieuse.
Victime, mère Thérèse de Saint-Augustin le fut à double titre. « Il ne fit pas de doute que l’édit de tolérance de novembre 1787 l’avait tuée. » (CRC n° 352, p. 30) Par là, elle fut martyre de la Révolution, annonçant le sacrifice du petit roi Louis XVII « pure victime sacrée de l’ignominie révolutionnaire ».
Elle fut également victime de Rome pour sa dévotion au Cœur de Marie. Essuyant humiliations et rebuffades de la part du Pape lui-même, elle accepta tout par amour pour la Sainte Vierge. La ténacité étonnante dont mère Thérèse fit preuve dans cette bataille et le succès qu’elle remporta annoncent déjà les combats à venir.
Que cette sainte de Contre-Révolution et de Contre-Réforme intercède pour la France et pour l’Église par le Cœur Immaculé de Marie.
Extraits de la CRC tome 31, n° 352, janvier 1999, p. 26-30