Le miracle eucharistique de Moure
AU début de l’été 1997, notre Père, l'abbé de Nantes, apprit avec une joie indicible, par des courriers arrivés du Portugal, que, pour la deuxième année consécutive, les 18 et 19 mai, les habitants de Moure, village portugais situé à quinze kilomètres de Braga (voir la carte), avaient eu le privilège de voir de leurs yeux un miracle eucharistique. Quelle merveilleuse nouvelle ! Le Ciel venait visiblement au secours des Portugais pour les conforter dans leur pure foi catholique et pour fortifier leur attachement aux traditions de leurs aïeux. (...)
Les 18 et 19 mai 1998, Notre-Seigneur daigna encore se montrer aux paroissiens de Moure et aux pèlerins accourus. Ce fut la dernière Apparition. (...)
Mais retraçons tout d'abord les principaux événements survenus à Moure depuis 1996.
18-19 MAI 1996 : PREMIÈRE APPARITION
Le samedi 18 mai 1996, à 19 heures, en l’église Santa Maria de Moure, le Père Antonio Duarte Miranda, depuis quarante ans curé de la paroisse, célébra sa Messe, au cours de laquelle il prêcha sur l’Ascension, en présence de cent cinquante à deux cents fidèles. Il consacra deux grandes hosties, sur lesquelles on ne distinguait qu’une croix, et qu’il avait achetées chez son marchand habituel.
À la fin de la Messe, le Curé introduisit la grande Hostie de neuf centimètres qu’il n’avait pas consommée dans la lunule, et il la remit à M. Abilio da Silva Carvalho, “ ministre extraordinaire de l’Eucharistie ”. Celui-ci gravit les degrés de la tribune et la plaça dans l’ostensoir déjà posé sur le trône (ou thabor) dans la chapelle du Saint-Sacrement. Les cérémonies duLausperene commençaient.
« Au moment où j’ai encensé, raconte le Père Miranda, mon regard s’est tout naturellement posé sur la Sainte Hostie, et ce fut alors que la chose la plus merveilleuse est arrivée :
« Sur les Saintes Espèces, l’image de Jésus-Christ est apparue semblable à celle du Saint Christ des Açores. La Sainte Face était légèrement voilée. On ne pouvait la voir avec netteté mais, manifestement, la tête était couronnée d’épines. On remarquait trois taches sur le visage, une d’un côté, et deux de l’autre, qui ressemblaient à des plaies. Les mains étaient croisées sur la poitrine et les épaules étaient recouvertes d’un manteau léger. L’image correspondait à celle du buste d’un homme, qui touchait aux limites de la Sainte Hostie. Les yeux étaient légèrement voilés ; il ne m’est pas possible de dire s’ils étaient ouverts ou fermés.
« Toute l’image était d’une couleur gris foncé, excepté la face, légèrement plus claire. Il n’y avait aucune trace de sang. 1Cité par le P. Fernando Leite, Prodigio Eucaristico em Moure, éd. Apostolado da oraçao, octobre 1996, p. 16. »
Bouleversé par cette vision, le Curé acheva de réciter les prières habituelles, en contenant son émotion, puis il se retira à la sacristie sans dire une parole, ni manifester ses sentiments. Ne sachant pas s’il bénéficiait d’une authentique Apparition et craignant les réactions de ses paroissiens s’il leur en parlait, il rentra chez lui et dîna.
Mais les fidèles avaient, tout comme leur Curé, observé cette mystérieuse image dès le début de l’adoration. « Vers la fin du repas, relate le Père Miranda, le téléphone a sonné... Quelqu’un m’appelait, disant :
– Venez vite à l’église, car dans la Sainte Hostie nous voyons tous l’image du Christ flagellé.
« On m’assurait ainsi que je n’avais pas été victime d’une illusion ou d’une hallucination. Toutes les personnes qui venaient à l’église voyaient ce que j’avais vu.
« En retournant à l’église après mon repas, j’ai fait un certain nombre d’expériences : j’ai commencé par éteindre graduellement toutes les lumières, pour m’assurer qu’il ne s’agissait pas d’effets de lumières et d’ombres. Le Visage restait inaltérable. J’ai rallumé et j’ai demandé au ministre extraordinaire de l’Eucharistie d’aller jusqu’à l’ostensoir, de le lever bien haut, de le tourner à droite et à gauche. Mais l’Image restait toujours visible.
« Il en fut ainsi jusqu’au moment où il fallut enlever l’Hostie, vers 23 heures 30, comme cela était programmé.
« Le lendemain, dimanche 19, à 8 heures, l’un des ministres de l’Eucharistie remit la Sainte Hostie en haut du trône, dans l’ostensoir. Dès qu’elle y fut placée, la même manifestation que la veille se produisit. »
Vers 16 heures, le Curé téléphona à son ami intime, le Père Olavo Teixeira Martins. (...) Répondant à l’invitation de son confrère, le Père Olavo Teixeira se rendit à l’église de Moure sans savoir ce qui s’y passait. « Arrivé à Moure, raconte-t‑il, je suis allé dans la sacristie où m’attendait le Père Antonio Miranda. Il m’a proposé de contempler la Sainte Hostie qui était à l’adoration en haut de la tribune. Je m’y suis immédiatement rendu, je me suis agenouillé et me suis mis en adoration (...). En regardant la Sainte Hostie, j’ai vu clairement le Christ souffrant – son buste uniquement – qui occupait toute la dimension de la Sainte Hostie.
« Dans la blancheur de l’Hostie apparaissait l’Image de Jésus-Christ, que j’ai aussitôt assimilée à celle du Saint Christ de Ponta Delgada, des Açores.
« Le visage contusionné était légèrement voilé ; les yeux attristés et blessés, à peine ouverts, comme quelqu’un qui, d’un regard profond, scrute l’horizon, terrorisé par le choix que l’humanité a fait de la “ mauvaise route ”, humanité chargée de nombreux et graves péchés, qui rejette son “ Dieu Créateur et Sauveur”, lui préférant les chemins de la “ civilisation de la mort ”. Sur la tête, la couronne d’épines était bien visible, un manteau sombre lui couvrait les épaules ; les mains étaient croisées sur la poitrine ; tout cela dans une couleur gris foncé. Les cheveux étaient de la même teinte. On ne distinguait aucune trace de sang. L’image apparaissait, par transparence “ mystérieuse ”, dans une sorte de nuée. »
Le P. Olavo rejoignit le Curé dans la sacristie. « Mon Père, s’exclama-t-il en présence de plusieurs personnes, il n’y a pas de doute, c’est l’image du Christ flagellé qui nous apparaît dans l’hostie consacrée ! C’est une merveille de notre merveilleux Seigneur Jésus ! »
Durant toute la journée, plus de cinq cents personnes, soit de la paroisse, soit de l’extérieur, vinrent dans l’église pour contempler la mystérieuse apparition. (...)
Vers 19 h 30, le ministre de l’Eucharistie monta de nouveau à la tribune et, au moment où il prit l’ostensoir, l’Apparition se dissipa. On procéda à la procession eucharistique à l’intérieur de l’église, puis il y eut la bénédiction du Saint-Sacrement. À la Messe du soir, pour la fin du Lausperene, l’Hostie du prodige fut fractionnée et donnée en Communion aux fidèles.
On ne peut qu’admirer la simplicité et l’esprit surnaturel de ces paysans portugais : « Le Christ est apparu, c’est une réalité, disait l’un d’eux. Mais il n’y a pas de quoi être vaniteux, car nous ne savons pas s’Il est apparu parce qu’Il était content de nous. (...) »
OCTOBRE 1996 : ENQUÊTE ET CONCLUSIONS DU PÈRE FERNANDO LEITE
Cinq mois après la mystérieuse Apparition, le Père Fernando Leite, s.j., publia sa brochure Prodigio eucaristico em Moure, en indiquant qu’il le faisait « avec l’autorisation de l’autorité ecclésiastique diocésaine ».
Il commençait par y rappeler les origines duLausperene dans l’archidiocèse. Ce fut en 1957, le 19 mai, à la fin du troisième “ Congrès national de l’Apostolat de la prière ” que le primat, Mgr Antonio Bento Martins Junior, l’institua : chaque paroisse exposerait, à tour de rôle, le Saint-Sacrement afin qu’il soit, tout au long de l’année, adoré et vénéré comme il convient, dans le diocèse de Braga.
Le Père Leite y décrivait Moure comme un village de Chrétienté préservée. Ses neuf cents habitants, des gens simples, presque tous des paysans, restent indéfectiblement attachés aux dévotions traditionnelles, tel leLausperene. (...)
Dans sa brochure, le Père Leite reproduisait le texte intégral des dépositions du Curé et du Père Olavo, ainsi que les signatures de quatre-vingt-dix-sept personnes confirmant la véracité de leurs témoignages. Il se livrait ensuite à un examen détaillé et objectif des faits, en réfutant notamment la thèse de l’hallucination. (...)
Et d’en arriver à cette conclusion : « Devant ces faits, il nous semble que l’unique solution plausible est d’accepter l’authenticité de cet événement, bien prouvé comme étant réel, en attribuant au pouvoir de Dieu ce qui dépasse les forces humaines. »
Comment interpréter cette Apparition silencieuse ? Après avoir longuement examiné et démontré sa conformité avec la Révélation biblique et avec le dogme de la Présence réelle, le Père Leite disait y voir un geste de gratitude de Notre-Seigneur et de Notre-Dame pour un peuple qui, sous la houlette d’un Curé exemplaire, manifeste une piété traditionnelle. Il rappelait qu’en 1993, avec beaucoup de générosité et au prix de nombreux sacrifices, ses paroissiens avaient restauré et agrandi leur vieille église, et élevé un monument pour honorer le Cœur Immaculé de Marie.
Les paysans de Moure avaient spontanément considéré cette Apparition comme « un appel à la réparation et à la consolation du Christ qui se montra avec “ un air si triste ”, selon le mot d’un vieillard de quatre-vingts ans qui passa toute la journée du dimanche 19 mai à pleurer dans l’église ».
Le Père Leite faisait un rapprochement judicieux avec les révélations de Fatima :
« Le 13 juin 1917, lors de sa deuxième Apparition, Notre-Dame n’a pas demandé expressément que l’on fasse réparation à son Cœur Immaculé, comme elle le fera le mois suivant. Elle montra seulement son Cœur entouré d’épines, comme une délicate et maternelle invitation à la réparation. C’est ainsi que l’ont interprété les pastoureaux, selon le récit de Lucie : “ Nous comprîmes que c’était le Cœur Immaculé de Marie, outragé par les péchés de l’humanité, qui demandait réparation. ”
« D’une manière analogue, à Moure, le Seigneur n’a prononcé aucune parole, mais son visage meurtri, sa couronne d’épines, la tristesse de son regard, nous lancent autant d’appels à la réparation et à la consolation pour tant de péchés “ qui frappent de toutes parts son très amoureux Cœur ” (Pie XI).»
L’archevêque de Braga autorisa le curé de Moure à commémorer la mystérieuse Apparition, en organisant le 18 de chaque mois une heure d’adoration du Saint-Sacrement exposé, non pas sur le trône, mais simplement sur l’autel. « Les fidèles y participèrent en si grand nombre que l’église fut comble, en été, de 22 à 23 h ; en hiver, de 21 à 22 h. » Que de fruits excellents ! « La piété, le nombre des confessions, des communions et des visites au Très Saint-Sacrement, ont augmenté sensiblement ; en un mot, le culte et la dévotion à la sainte Eucharistie se sont intensifiés. »
Ce renouveau est d’autant plus remarquable que la Chrétienté portugaise se trouve menacée et atteinte tant par le laïcisme que par le laxisme moral. (...)
L'ATTITUDE DE L’ARCHEVÊQUE DU LIEU
Dans son entretien, publié le 12 septembre 1996 par le Comercio do Porto, l’archevêque primat, D. Eurico Dias Nogueira, ne manifesta aucun enthousiasme ni même un réel intérêt pour l’Apparition de Moure. Il n’avait pourtant pas d’objections à formuler contre son authenticité.
« Le Curé est venu me parler, et il mérite toute ma considération. Je l’ai reçu sans lui répondre ni oui ni non. “ Qu’il me fasse un rapport par écrit, lui ai-je dit, et alors nous verrons si cela pourrait être utile. ” Il fit ainsi, au mois de mai. Plus tard, un Père spiritain, témoin lui aussi, m’adressa un deuxième rapport, et plusieurs personnes témoignèrent : “ J’ai vu ”, mais sans décrire les faits. »
Don Eurico avait mis ces rapports de côté : « Je n’ai pas fait de bruit, parce que la foi n’a pas besoin de ces faits pour s’affirmer, mais elle ne les rejette pas pour autant. Je vais suivre avec intérêt l’évolution de tout cela, parce que tout porte à croire que les faits, tels qu’ils ont été décrits, sont exacts. » (...)
Le jugement en matière de miracles et d’apparitions, – lorsque les événements en question ne dépassent pas largement les limites d’un diocèse –, est confié, depuis les règles édictées par le concile de Trente, à l’Ordinaire du lieu. Toutefois, selon les déclarations du chanoine Eduardo de Melo, vicaire général de Braga, l’archevêque ne prendrait aucune décision sans l’aval du Vatican. (...)
18-19 MAI 1997 : DEUXIÈME APPARITION
« “ J’ai vu. Tout le monde a vu ! ” Le Curé de la paroisse a vu, les prêtres qui se sont déplacés jusqu’à l’église paroissiale deSanta Maria de Moure ont vu, les journalistes ont vu, les milliers de personnes qui sont accourues, hier et avant-hier, de tous les coins du pays, ont vu elles aussi. » Ce fut ainsi que le “ Jornal de Noticias ” du 20 mai annonça la nouvelle de la réapparition du buste de Notre-Seigneur à Moure, lors de la traditionnelle cérémonie du Lausperene.
À peine le ministre de l’Eucharistie avait-il placé l’Hostie dans l’ostensoir, en haut du trône, que le Christ souffrant sembla se manifester de nouveau. Or, si des fidèles étaient venus à Moure, ce 18 mai, des paroisses et des villes les plus proches, mais aussi de Leiria, d’Ermesinde, de Porto, de Gaia et même d’Espagne, c’était pour commémorer l’apparition de l’année précédente. Et voici que le miracle se renouvelait devant eux. L’enthousiasme du peuple fut indescriptible. Des fidèles restèrent toute la nuit en adoration.
La presse portugaise publia des photographies de l’Apparition et de nombreux témoignages, convaincants et touchants. (...)
Un homme avait déjà fait cinq cents kilomètres pour venir, et il repartait : il allait chercher sa famille pour que tous les siens voient.
Quelle foule ! Bientôt la circulation automobile fut complètement bloquée à Moure, et il n’y avait plus aucun endroit pour stationner, si ce n’est dans les champs... cultivés !
Tous voulaient entrer dans l’église et y rester : « Qu’il fasse chaud ou qu’il pleuve, nul ne s’en préoccupait. Les jeunes étaient dans l’étonnement et ne voulaient pas s’écarter d’un pouce ; les plus vieux, émus, tenaient bon, malgré une multitude de pèlerins qui ne laissaient personne en paix.
« Les uns répétaient aux autres ce qu’ils avaient vu, et tous disaient de même : “ Dieu est grand, et s’il s’est révélé ici, c’est pour quelque chose. ” »
L’A PRIORI RATIONALISTE ET MODERNISTE
Cinq jeunes gens de la faculté de philosophie de Braga interrogeaient les fidèles à la sortie de l’église, en vue, disaient-ils, de récolter des informations pour une étude en collaboration avec des étudiants en théologie.
« L’entretien que nous avons eu avec eux, rapporte un journaliste, a provoqué un petit rassemblement qui a permis un acerbe échange d’opinions souvent mêlé à des expressions passionnées de foi populaire.
« Les jeunes affirmaient connaître des phénomènes semblables qui étaient présentés comme des faits surnaturels et inexplicables mais que, plus tard, on avait découvert qu’il ne s’agissait que de fraudes... Il fallait donc tirer tout cela au clair.
« Les fidèles leur expliquaient que, l’année dernière, on avait procédé à des vérifications très frappantes : lorsque les lumières de l’église étaient éteintes, l’image ne disparaissait pas pour autant, ce qui voulait dire qu’il ne s’agissait nullement d’un reflet ou d’une lumière extérieure, mais bel et bien d’une figure provenant de l’Hostie elle-même. »
Le sacristain, quant à lui, Joaquim Pereira, parlait haut et fort : « Comment cela ne serait-il pas un miracle puisqu’il y a soixante-deux ans que l’on place une fois par an l’ostensoir sur le trône et qu’il ne s’est jamais rien produit de semblable ? »
Il n’empêche que la psychologue Maria Luisa Albuquerque, consultée par le diocèse, n’en démordait pas : « Le miracle n’est produit que par l’éclairage et par la profondeur du verre de l’ostensoir utilisé. »
Toutefois le vicaire épiscopal pour la doctrine de la foi, le Père Costa Santos, venu à Moure le lundi matin pour observer de ses yeux l’Apparition, rejeta cette hypothèse. Quant à lui, le vicaire général Eduardo de Melo affirmait déjà : « Nous considérons ce fait comme une manifestation merveilleuse, et non comme un miracle. »
Hélas ! l’a priori rationaliste infeste les esprits de certains ecclésiastiques de Braga. « Je ne suis pas allé à Moure », déclara l’évêque auxiliaire, Mgr Jacinto Botelho, qui opinait pour « une explication naturelle ». « Une foi solide, disait-il, n’a pas besoin de ces phénomènes miraculeux. Il faut maintenant trouver (sic) une explication à cette ombre. » Non, il ne fallait pas que ce « cas curieux » échappât aux lois naturelles ordinaires et manifestât une intervention visible de Dieu ! « Le vicariat chargé de l’enquête devra rechercher toutes les possibilités pour s’enquérir de ce qui est arrivé. »
CELUI QUI AIME, DÉSIRE VOIR !
Extraits de l'homélie de l'abbé de Nantes à la basilique Notre-Dame de Turin, le 9 mai 1998 :
« Bienheureux ceux qui croiront sans avoir vu. » (Jn 20, 29) C’est une parole évangélique, elle a été dite à Thomas. Et il est évident qu’il est meilleur de croire sans avoir vu. Quant à dire que celui qui croit n’a pas besoin de voir, c’est là l’erreur foncière, et on en tire que la Vierge Marie n’a pas reçu la visite de Jésus au matin de Pâques parce qu’elle n’avait pas besoin de ça !
Nous venons ici, à Turin, pour tomber à genoux devant le Saint Suaire. Plus nous croirons, plus nous aimerons, plus nous voudrons voir, et enfin voir face à Face ce Christ qui nous apparaîtra et se donnera à nous à la fin de notre vie à tous. Alors, cette proposition qui est absolument un danger de damnation éternelle : « Moi, je n’ai pas besoin de tout ça pour croire ! » se transformera dans notre cœur en un cri enflammé : « Je veux Le voir un jour, je veux La voir, j’irai La voir un jour » ; et qu’Il fasse des miracles dans le ciel, et qu’Il démontre sa vérité pour les incroyants, c’est leur dernière chance. Mais pour nous qui croyons, nous ne nous lasserons pas de regarder ce Visage du Christ, et de contempler l’image de la Vierge Marie dans son Cœur Immaculé, afin déjà de nous préparer à cette joie suprême qui est de voir ce que nous aurons cru méritoirement pendant toute notre vie. (CRC n° 346, mai 1998, p. 4)
Ce fut alors, le 19 ou le 20 mai 1997, que l’ouvrage Prodigio Eucaristico em Moure fut retiré des deux librairies catholiques du diocèse : « Une mesure de prudence », commenta Mgr Botelho. Le Père Leite se soumit à la censure épiscopale et, de plus, il changea apparemment de conviction. (...) Cela ne nous étonne pas outre mesure, car ce pieux et savant jésuite portugais ne s'est jamais départi d'une obéissance et d'une soumission aveugles à la hiérarchie.
JUILLET 1997 : LA NOTE PASTORALE
L’archevêque primat de Braga, Mgr Eurico Dias Nogueira, publia les deux petites pages de sa Note pastorale sur les événements de Moure, le 2 juillet 1997. Il expliquait :
« Deux hypothèses » sont « possibles : fait surnaturel ou fait naturel, cette dernière devant être présumée jusqu’à ce que des preuves d’une intervention divine fussent recueillies. »
L’archevêque relatait les expériences faites dès le 19 mai au soir : « Le Lausperene terminé avec les cérémonies d’usage, l’Hostie de l’Exposition a été distribuée pendant la Communion, avec les autres Hosties. L’église une fois fermée aux fidèles fut visitée par le Vicaire épiscopal pour l’éducation de la foi, professeur de la faculté de théologie de l’Université catholique portugaise, entouré d’un groupe d’assesseurs choisis par lui, et accompagnés également par deux évêques auxiliaires. Le Vicaire épiscopal avait été chargé, il y a longtemps, par les autorités diocésaines de préparer une minutieuse enquête et de recueillir toutes les preuves et témoignages qu’il jugerait nécessaires.
« Parmi ses assesseurs se trouvait un membre du clergé diocésain, professeur de physique, et tous s’étaient déjà mêlés aux fidèles lors des cérémonies de la journée, afin d’observer attentivement les événements. Sur l’hypothèse d’un phénomène de réfraction de la lumière, il réalisa plusieurs expériences qui ont conclu à une confirmation de cette hypothèse. Le phénomène se produisait également si l’on utilisait une hostie non consacrée ou même un simple morceau de papier blanc placé au même endroit, et l’image disparaissait quand la réflexion de la lumière était empêchée, ou quand la lunule était déplacée du côté du verre qui la protège du côté des fidèles, et aussi quand l’ostensoir était retiré hors de la tribune. Et le fait ne s’est pas produit lorsqu’on employa un ostensoir différent du premier, qui appartient à la paroisse depuis presque deux siècles.
« D’où l’on peut conclure à un phénomène assurément singulier, créateur de sentiments de foi et de piété, mais explicable par les lois de la physique optique : il s’agit d’un phénomène naturel, quoique étrange, de réflexion de la lumière.
« Ce rapport détaillé a été étudié par des professeurs spécialistes ès sciences physico-chimiques appartenant aux deux universités d’État, qui l’ont approuvé et loué, remarquant “ la description d’une grande clarté et rigueur ”, en vue “ d’une explication scientifique complète qui explique la formation de l’image ”.
« Le résultat de l’enquête fut communiqué à Monsieur le Curé et aux autres responsables de la paroisse, qui l’ont accepté, quoique avec grande surprise et avec la peine qu’on peut imaginer. Les expériences ont été refaites et confirmées en leur présence. Lors d’une deuxième session qui eut lieu le 25 de ce mois, en ma présence et en celle d’un professeur d’université, de physique optique. »
Voilà l’essentiel de cette “ Note pastorale ”. (...) Avant même de formuler des remarques concernant la prétendue explication du phénomène, il importe de remarquer cette froideur inquiétante de Mgr Dias Nogueira à l’égard de la “ merveille des saints mystères ”. (...) Quelle que soit l’origine du phénomène de l'Apparition, naturel ou surnaturel, ne pouvait-on pas y voir un appel et un encouragement à pratiquer la réparation due au Christ pour les « outrages, sacrilèges et indifférences » par lesquels Il est offensé ?
UNE EXPLICATION NATURELLE ADÉQUATE ?
Si depuis le concile de Trente le jugement en matière de miracles, d’apparitions et de révélations est confié à l’Ordinaire du lieu, il importe de souligner que la sentence qu’il porte ne relève pas du magistère infaillible. (...) Plusieurs réserves peuvent être émises à l’encontre du jugement rendu par l’archevêque de Braga.
Voici la première, que lui-même a mentionnée dans sa Note pastorale. Il écrit en effet : « Cependant, reste encore à expliquer pourquoi, dans les années antérieures à 1996, où l’exposition s’est déroulée apparemment dans les mêmes conditions, personne ne s’est aperçu de rien. » Mais l’archevêque ne prétend pas l’expliquer ! Il enchaîne aussitôt en signalant une deuxième objection à l’encontre de sa théorie : « Et aussi le fait de la formation d’une image si parlante, qui rappelle spontanément celle de Jésus, compte tenu de l’infime probabilité que cela puisse se produire avec tous les caractères décrits plus haut. » Là, encore, don Eurico ne répond pas à l’objection, comme s’il voyait lui-même à quel point son « explication naturelle » est infirme et inadéquate.
Par ailleurs, l’archevêque ne fait pas la moindre allusion aux expériences que le Curé de Moure avait effectuées publiquement le 18 mai 1996, en présence de deux cents fidèles. Du coup, tous les paroissiens de Moure n’ont pas été convaincus par les conclusions que tira l’archevêque de ses expériences réalisées en catimini, les portes de l’église étant fermées : « Les responsables de l’Église ont beau jeter le doute sur le “ miracle de Moure ”, rien ne pourra changer l’attitude de foi des fidèles. C’est ainsi que José Costa Dias, diacre de la paroisse, s’affirme témoin du “ miracle ”. L’année dernière, lors de la première “ apparition ”, José Dias a effectué plusieurs expériences avec l’ostensoir, le déplaçant plusieurs fois en présence des fidèles. “ Et l’image était toujours là. C’est alors que nous restâmes en adoration jusqu’à 11 h 30 du soir ”. »
Le Père Fernando Leite avait très précisément rendu compte des expériences réalisées par le P. Antonio Miranda :
« Pour s’assurer de l’objectivité des faits, le Curé procéda à plusieurs expériences :
« Il éteignit toutes les lumières en ne laissant allumées que les deux appliques fixées au mur de la chapelle principale. Il arriva ainsi à cette conclusion : l’image de l’Hostie n’est pas produite par quelque reflet ou projection extérieure, car toutes les lumières sont éteintes, et la luminosité et l’image proviennent de l’Hostie elle-même.
« Il demanda au ministre extraordinaire de l’Eucharistie de soulever l’ostensoir au plus haut qu’il pouvait (preuve que l’ostensoir n’était pas relié à un fil électrique !) et de le tourner à droite et à gauche. Au cours de tous ces examens, l’image du Seigneur demeura identique.
« On alluma de nouveau les lumières et le Curé parcourut l’église du côté droit puis du côté gauche, jusqu’à la porte d’entrée, à vingt mètres de distance, mais la vision ne se modifia pas. Pendant les deux jours, l’image sur l’Hostie était visible de n’importe quel lieu, avec la même intensité et avec des dimensions égales. » (...)
Mais peut-on aller jusqu’à suspecter l’archevêque de Braga de partialité et de mauvaise foi ? Étant donné le ravage opéré dans maints esprits par le préjugé rationaliste et la passion moderniste qui habitent aujourd’hui tant de membres de la hiérarchie, une telle suspicion nous paraît pour le moins légitime. D’autant que le Vatican lui a probablement donné certaines consignes.
18-19 MAI 1998 : TROISIÈME ET DERNIÈRE APPARITION
Nous étions impatients d’apprendre ce qui surviendrait à Moure lors des cérémonies du Lausperene du 18 et 19 mai 1998. Or, nous avons eu le bonheur inouï de recevoir d’un ami portugais que nous estimons pour sa pondération, sa prudence et sa modestie, le témoignage que voici :
« D’abord, je suis allé à Braga, siège de l’archevêché dont dépend la paroisse de Moure. (...) Je me trouvai convaincu qu’il n’y avait pas de preuves positives de l’authenticité du phénomène. (...) Et ce 18 mai, je restai à Braga. (...)
« Cependant, le lendemain, tôt matin, je sortis acheter le “ Jornal de Noticias ” et j’ai lu avec stupéfaction la nouvelle que, pour la troisième fois, le phénomène de Moure avait eu lieu !
« Naturellement, j’en fus extrêmement confus, ennuyé, tout comme Nos Seigneurs de Braga et leur équipe d’experts. Et je partis immédiatement pour Moure.
« J’y arrivai bientôt et je vis une église dans le genre de celles du Minho, ou, comme on dit, “ à la portugaise ”, très colorée et bien décorée. (...)
« Quelque deux cents ou deux cent cinquante personnes récitaient le chapelet dirigé par un laïc que je connais. Ils chantaient aussi nos cantiques traditionnels. (...)
« Allons au plus important : Dans la chapelle latérale, du côté droit, il y a l’autel du Saint-Sacrement et, au-dessus, un trône avec l’ostensoir et la Sainte Hostie.
« Tout le monde regardait, avec des expressions de contemplation, le Très Saint-Sacrement. Sans aucun doute, on pouvait y voir quelque chose. Assurément, la Sainte Hostie n’était pas complètement blanche. J’ai vu, et réellement tout le monde voyait, une sorte d’ombre qui configurait le visage et en partie le buste d’une personne.
« À cause de l’entassement des gens, presque tous debout faute de place, et en arrêt, je n’ai pas réussi à m’approcher. Je suis resté à six ou sept mètres. Et la Sainte Hostie ne me parut pas être des plus grande (peut-être à peine six ou sept centimètres). C’est pourquoi ma “ lecture ” de l’image n’aura pas été parfaite. J’admets évidemment que de plus près, et dans une ambiance moins émouvante, on aurait pu voir avec plus de netteté. Mais l’image visible configurait un Christ, je ne puis pas en douter. Je me souviens même de ce détail : en y allant, je m’attendais à voir un visage ressemblant à la Sainte Face du Saint Suaire de Turin ; finalement, je me suis rendu compte qu’il était différent. Il m’a semblé qu’il ressemblait davantage au profil de celui que l’on appelle “ Le Seigneur Saint Christ ” (Ecce Homo) qui est très vénéré aux Açores. (...)
« Il est certain que la répétition, pour la troisième fois, de ce phénomène va exiger des “ experts ” une nouvelle enquête. Nos Seigneurs Évêques eux-mêmes et les théologiens restent maintenant avec une pomme de terre chaude dans les mains...
« Cependant, je veux souligner qu’il ne s’agit pas seulement de voir un visage. Ce qui se passe, c’est qu’il y a aussi quelque chose que chacun ressent à l’intime. Nous avons senti cela. C’est une certaine forme de Présence. Je ne sais pas l’expliquer, mais j’en juge ainsi. Cette Présence nous met à genoux et nous fait méditer. Dans l’église, tout le peuple était et a toujours été en prière. J’en suis témoin.
« L. F., le 21 mai 1998. »
PRODIGE OU MIRACLE ?
Autant le témoignage de notre ami est saisissant, autant les articles des journalistes furent décevants. (...) Mais, rapportait le “ Comercio do Porto ”, « ceux qui ne sont pas d’accord avec l’archevêque de Braga, ce sont les habitants de Moure ». Joao Batista Costa, membre de la chorale et du groupe biblique, expliquait sans ambages aux journalistes combien il lui paraissait déplorable que certaines personnes « aient si peu de foi au point de dire qu’un tel miracle n’est pas au pouvoir de Dieu » ! (...)
UNE VISITE PLEINE D'ENSEIGNEMENT
Nos frères Gérard et Michel sont allés faire leur petite enquête, les 14 et 15 novembre 1998. Voici quelques extraits du compte-rendu de frère Gérard, paru dans la CRC n° 551 :
Déjà nous apprenons que chaque 18 du mois la paroisse commémore la grâce du mois de mai par une heure d’adoration. (...)
La messe paroissiale à Moure
La chorale prend place sur des gradins, tous les âges y sont représentés et tous resteront debout pendant toute la messe. Jusque-là personne ne parlait dans l’église, tous ceux qui étaient entrés d’avance priaient, et priaient à genoux. Mais dès que la messe a commencé, s’est révélé le cœur profond des paroissiens : une parfaite unité, dans les mouvements liturgiques, dans les beaux chants portugais nostalgiques, chantés par cœur, unité dans la tenue elle-même, le vêtement modeste mais toujours digne. Tout le monde s’agenouille à la consécration et communie sur les lèvres. (...)
Le témoignage du Père Aurélio Soares
Frère Michel a suivi le célébrant à la sacristie : en fait, ce n’était pas le curé de la paroisse, mais le Père Aurélio Soares, celui-là même qui avait déjà remplacé le Père Antonio Miranda pour le “ Lausperene ” de 1998, puisque celui-ci venait de mourir. (...)
Le Père Aurélio était ardent défenseur de l’authenticité du miracle. « Le Père Antonio Miranda est mort de chagrin, nous dit-il, à la suite des persécutions dont il a été l’objet après le miracle du Lausperene. » Lui-même, le Père Aurélio, nous tendit le bulletin paroissial du mois de septembre dont il avait rédigé l’article principal et qui résume toute notre conversation, il suffit de le citer :
À Moure (Barcelos)
Manifestation merveilleuse
Pendant le Lausperene du 18-19 mai 1996 a eu lieu un merveilleux prodige. (...) Tous ont vu, mais personne n’en a parlé... (...) Le curé s’est tu et n’a même pas communiqué les faits à Braga. Ce n’est que plus tard, après que les enfants ont commencé à répandre la nouvelle dans les écoles du village, et devant les demandes instantes de plusieurs personnes et de quelques prêtres, que le curé a communiqué les faits au siège archiépiscopal pour que le prodige soit étudié.
La commission désignée a travaillé une année durant sans arriver à une conclusion. Or, en mai de l’année suivante, 1997, le prodige s’étant répété, la commission est venue sur place pour étudier les conditions de l’exposition du Saint-Sacrement et donner son avis. Mais ce fut d’une manière bâclée et superficielle, tard dans la nuit, après la clôture du Lausperene.
La réponse incontrôlée, précipitée, intempestive et a priori d’une dame qui se disait parapsychologue, devançant l’avis de la commission dont elle faisait partie, n’a fait que compliquer les choses et les rendre plus confuses et polémiques, au lieu de s’adresser à l’intelligence des fidèles d’une façon scientifique ; elle n’explique rien, ne cherche que le sensationalisme.
Plus tard, la commission a donné son avis et aussi Monseigneur l’archevêque qui, avec bon sens et intelligence, sans contredire l’étude présentée par la commission, a quand même laissé la porte ouverte à une autre explication plus convaincante et plus en accord avec la réalité.
Il a rappelé une chose qui demeure sans explication, à savoir le fait que jusqu’en 1996 on n’a rien vu, jamais la moindre ombre, et que ces choses extraordinaires arrivent seulement maintenant, alors que l’ostensoir a 236 ans et n’a subi aucune modification ni restauration. (...)
Entre-temps, dans les années 97-98 avant le dernier Lausperene de mai 1998, un phénomène identique s’est reproduit dans les paroisses voisines, à Bastuço Santo Estêvao, à Bastuço San Joao, le même jour, à la même heure, dans les mêmes circonstances. Également à Sequiade, à Couto, à Carreira, selon ce que les journaux ont dit, et finalement aussi à Fonte Coberta, la paroisse voisine.
Surviennent la maladie et la mort du Père Antonio Miranda, le 5 mai 1998, quelques jours avant l’ouverture du Lausperene du 18-19 mai. Le prêtre qui le remplaçait [le Père Aurélio lui-même, auteur de l’article] a tout fait ce jour-là comme il a l’habitude de faire depuis quarante ans dans ses propres paroisses. Il n’a rien fait pour, et rien contre non plus.
Au moment précis de placer l’ostensoir sur le “ trône ” eucharistique, encore une fois, devant l’admiration d’une église remplie de monde, on a pu voir un buste humain, comme lors des deux années précédentes. Pendant vingt-quatre heures, jour et nuit, tous ont pu voir et photographier à loisir, même les médias qui ont pris des photos en toute liberté.
Septembre 1998, Père Aurélio Soares.
Maintenant, le Père Aurélio rédige quelque chose pour répondre à la campagne menée par la prétendue doctoresse, qui en fait était décidée, avant toute enquête, à “ démystifier Moure ”. (...)
À l’archevêché de Braga
Restait à connaître les pensées de l’archevêque de Braga sur tout cela. Un premier téléphone mit frère Michel en présence d’un secrétaire du vicaire épiscopal qui lui assura : « Moure ? Mais il n’y a rien à Moure ! » Et sur l’insistance de frère Michel : « Quelque chose de merveilleux, mais pas miraculeux... » (...) Comment ne pas voir dans cette réponse l’affirmation captieuse d’un moderniste, voilant maladroitement son incrédulité de principe.
Merveille ou miracle ?
Donc rendez-vous fut pris pour le lendemain, et non pas à Braga mais à Fatima où l’Archevêque, ou, s’il était empêché, son Auxiliaire, devait se rendre pour une réunion de la conférence épiscopale du Portugal. (...)
Ce fut finalement l’Auxiliaire que nous rencontrâmes, à la nuit et en pleine rue, jeune, très aimable, que rien ne semblait devoir surprendre. (...) Mais sa réponse amicale tenait en deux mots : « J’ai vu moi aussi... et j’ai vu,encore ! quand, au lieu de l’Hostie, j’ai placé un papier blanc dans la lunule... Il s’agit d’une illusion d’optique, et vraisemblablement d’un phénomène de réfraction de la lumière sur le bord du verre. » Et voilà ! C’est comme ça, amicalement, et bonne soirée !
La soirée ne fut pas bonne. Nous allâmes nous consoler aux pieds de la Très Sainte Vierge à la Capelinha, mais notre méditation roula beaucoup sur Moure et tous les récits lus et entendus depuis deux ans et hier encore. Car une seule réflexion du Père Aurélio suffisait à balayer la calme assurance “ scientifique ” de l’évêque auxiliaire : la dernière fois que l’apparition a eu lieu, c’était au maître-autel pendant la bénédiction du Saint-Sacrement et non pas au “ trône ” eucharistique. (...)
La révélation des cœurs
Cette enquête a donc été pour nous surtout une révélation des cœurs. Les “ pauvres de Yahweh ” ont vu et ils ont cru. Mais des autres, Isaïe a dit : « Il a rendu leurs yeux aveugles, il a endurci leur cœur, pour que leurs yeux ne voient pas, que leur cœur ne comprenne pas, qu’ils ne se convertissent pas et que je ne les guérisse pas. » (Is 6, 9) (...)
Frère Gérard de la Vierge
18 MAI 1999 : LE MIRACLE CONFIRMÉ
Les sceptiques et les railleurs qui ne s’étaient pas déplacés pour le lausperene des 18 et 19 mai 1999 à Moure, ont cru triompher, car il n’y eut, cette fois, aucune manifestation extraordinaire. Mais comment peuvent-ils expliquer le fait que ces mêmes paroissiens de Moure, qui ont vu l'Apparition les trois années précédentes, dans des circonstances extérieures identiques, affirment qu’ils ne voient pas quand Jésus ne se manifeste pas ?!
De plus, deux de nos amis, en cette année 1999, ont pu constater que les fidèles poursuivaient leur adoration du Très Saint Sacrement sans être nullement ébranlés. Ils semblent au contraire avoir été rendus plus fervents par cette déconvenue. Jésus “ caché ” ou Jésus manifesté par un grand miracle, cela ne dépend ni de l’électricité ni de quelque phénomène optique ! mais uniquement de ce qu’Il veut Lui, soit leur faisant cette grâce, soit les en privant. Ainsi, nos amis revinrent-ils plus convaincus de la foi profonde de ce peuple portugais, témoin du miracle trois années de suite.
CONTRE L’HÉRÉSIE
Évoquant tant d’attaques perfides contre le dogme et le culte eucharistiques, l’évêque de Fatima, Mgr do Amaral, disait en 1984 dans l’une de ses homélies : « L’Apparition et les paroles de l’Ange à l’automne 1916 nous ont prophétiquement préparés à nous défendre des erreurs qui sont entrées dans le sein de l’Église catholique elle-même, au nom d’un faux œcuménisme,par exemple, la négation de la Présence réelle hors de la célébration de la Messe. Une onde d’hérésie – théorique et pratique – a balayé l’Occident chrétien et est parvenue jusqu’à nous. »
Des circonstances mêmes de l’Apparition de Moure, on pourrait tirer un message qui compléterait celui de l’Ange de Fatima. En effet, « à l’automne 1916, écrit le Père Leite, l’Ange du Portugal invite les pastoureaux à adorer le Seigneur réellement présent dans les Espèces eucharistiques. Dans l’acte de réparation qu’il répète avec eux, il leur enseigne à offrir à la Très Sainte Trinité “ les Très Précieux Corps, Sang, Âme et Divinité de Jésus-Christ, présent dans tous les tabernacles de la terre ”. Remarquons bien : réellement “ présent ”, non seulement sur l’autel pendant l’offrande du Saint-Sacrifice, mais “ dans tous les tabernacles de la terre ”.
« En donnant la Communion aux voyants, l’Ange souligne de nouveau la présence réelle du Christ dans l’Eucharistie, par les paroles qu’il prononce alors : “ Prenez et buvez le Corps et le Sang du Christ. ” Cela veut dire : “ Ce qui est le Corps et le Sang ”, et non ce qui paraît l’être.
« La désacralisation, tache noire de notre temps, a envahi l’autel et a banalisé le mystère eucharistique.
« Que voyons-nous à Fatima ? L’Ange s’agenouille respectueusement le visage contre terre et invite les pastoureaux à l’imiter en cette attitude de vénération et de respect envers Jésus dans l’Eucharistie. C’est quand ils sont à genoux, qu’il leur distribue la Sainte Communion. »
JÉSUS, ROI DE GLOIRE
À l’école de l’Ange, les trois pastoureaux ont été instruits du mystère de la sainte Eucharistie : ils ont appris, par un mimétisme surnaturel, comment Notre-Seigneur doit être honoré et adoré au Très Saint-Sacrement de l’autel. Mais l’Apparition de Moure nous révèle une volonté divine plus précise encore, que notre Père nous expliquait dans l’une de ses homélies.
Si le Christ montre sa Sainte Face uniquement lorsque l’ostensoir est placé en haut du trône de la tribune, c’est parce qu’il veut se manifester et être adoré comme Roi. Notre doux Sauveur n’est pas seulement l’ami intime, le frère miséricordieux, l’époux mystique. Dans sa Gloire, il est le Seigneur des seigneurs, d’une majesté royale par trop méconnue et bafouée aujourd’hui. Voilà pourquoi son Image apparaît lorsque la Sainte Hostie est placée et adorée sur le trône royal, et qu’Elle disparaît en le quittant. (...)
Admirons immensément la foi éclairée des paysans portugais, et faisons nôtre l’un des vœux que sœur Lucie a si souvent exprimés dans sa correspondance : « Que Dieu donne la lumière aux aveugles... et l’humilité aux orgueilleux, afin qu’ils voient le bon chemin et s’écartent du mal. »
Extraits de la CRC n° 347, juin 1998, p. 1-8