Il est ressuscité !

N° 250 – Décembre 2023

Rédaction : Frère Bruno Bonnet-Eymard


LA LIGUE

La Ligue

Grâces au-dedans, menaces au-dehors

LE 7 septembre 1996,  au moment où son évêque fulminait contre lui calomnies et oukases, notre Père déclarait néanmoins à ses amis canadiens : « Nous sommes dans un moment de plénitude de vie, d’allégresse et de charité, en France et au Canada. Nous écrivons des ligues depuis des années, où nous racontons autant que nous le pouvons ce que nous avons fait dans le mois. Ceux qui ne nous aiment pas ne sont pas contents, parce que cela marche toujours bien. C’est un peu lassant, mais si c’est un fait, on ne peut pas dire le contraire ! Cette année a été merveilleuse, avec des persécutions, comme dit Notre-Seigneur. On n’a pas à s’en plaindre. Les croix, les difficultés, les souffrances, c’est dans le contrat. Mais ça marche ! C’est-à-dire que nous faisons un travail qui est intrinsèquement bon, qui fait du bien aux âmes, qui les réjouit. Tout le monde s’en retourne content, enrichi de doctrine nouvelle. Je ne peux pas dire le contraire !

« La merveille d’une vie de communauté ! Vie de communauté très unie, très paisible, très active... C’est une ruche, la maison Saint-Joseph ! Quand les gens viennent de Paris, dès qu’ils ont franchi la grille, ils sont stupéfaits, parce qu’on y est bien : leurs enfants se retrouvent et sont contents, les sœurs sont charmantes et dévouées aux enfants... Et les frères, cela travaille ! Le mécanicien dans sa mécanique, le cuisinier à sa cuisine, les appareils vidéo qui se mettent en place, et puis... tout va très bien ! »

Et notre Père de passer en revue nos diverses activités. Au terme de cette année 2023, nous faisons nôtre son action de grâce. Mois après mois, par écrit dans Il est ressuscité ! ou bien par oral, frère Bruno et les communautés continuent à diffuser et illustrer la doctrine de Contre-Réforme et de renaissance catholique de l’abbé de Nantes, à éclairer ainsi les esprits sur les causes et les remèdes des maux de l’Église et de la Chrétienté, à prêcher la dévotion au Cœur Immaculé de Marie que Dieu veut établir dans le monde.

Que ce soit dans les camps de juillet, durant le camp de la Phalange, au cours des divers stages dans les ermitages ou au fil des premiers samedis du mois, nos frères et nos sœurs ont pu fortifier dans la foi et les vertus chrétiennes des centaines d’enfants, contrant l’influence du monde sur leurs jeunes âmes. Nous poussons les murs ! Et nos frères bâtisseurs, à Magé, à Fons, travaillent avec acharnement à la construction de nouvelles maisons.

Et que dire de la VOD qui fournit le pain quotidien de la doctrine et de la dévotion CRC à des centaines d’amis ? Ces temps-ci, ils vivent au rythme des lettres du commandant Détrie à sa valeureuse épouse, ils vibrent aux grands affrontements du siècle analysés par le Père à la Mutu en 1980, ils nourrissent leur oraison par les logia de frère Bruno.

Cette année, nos frères ont aussi ouvert un nouveau site de librairie, avec l’aide de phalangistes dévoués pour résumer et présenter les nombreux ouvrages de notre école de pensée. La matière est si abondante que le néophyte soucieux de consolider sa foi et d’étudier la doctrine de son maître, pour être capable d’en rendre compte, de la transmettre, de la faire servir à la renaissance de l’Église, se demande parfois par quel chapitre commencer ! Au moment où chacun s’enquiert de cadeaux de Noël et d’étrennes, vous trouverez ci-après (p. 30-31) quelques suggestions pour pénétrer dans la “ cathédrale de lumière ” CRC.

À noter que notre frère Pascal, après ses tomes sur Mgr Freppel prépare désormais une biographie de Léon XIII le maléfique, pour enfin démythifier ce pape qui, le premier, a rallié l’Église à la Révolution.

Il faut évoquer aussi la Permanence Charles de Foucauld, objet de tous les soins de frère François. Les phalangistes parisiens sont ainsi entrés en Avent durant leur Heure sainte du premier jeudi du mois à la suite de la vénérable Mère Marie de Sales Chappuis, supérieure de la Visitation de Troyes (1793 -1875). L’oratorio de cet été les avait bien préparés à aimer cette disciple exemplaire de saint François de Sales, qui trouva dans sa dévotion au Sacré-Cœur, à travers toutes les épreuves de la France et de l’Église, le ressort d’une inébranlable fidélité légitimiste et ultramontaine.

Ils se préparent maintenant à faire pèlerinage le 14 janvier sur les pas de Lucie-Christine, cette mystique du dix-­neuvième siècle dont les lumières s’accordent si bien aux enseignements de notre Père.

PREMIER SAMEDI DU MOIS

Le premier samedi du mois de décembre, qui coïncide avec la solennité de l’Immaculée Conception et l’ouverture de l’Avent, marque traditionnellement le pic annuel d’affluence dans nos maisons. Et la diffusion vidéo en direct dans nos ermitages permit de multiplier le nombre des auditeurs à qui frère Bruno put prêcher la dévotion réparatrice au Cœur Immaculé de Marie. Sans compter les deux-cent-cinquante amis réunis à la maison Sainte-Thérèse, pour consoler tout comme nous, quoiqu’avec six heures de décalage, le Cœur de notre Mère du Ciel.

Samedi après-midi : les petites filles se rendent à Sainte-Marie pour y découvrir la vie de mère Marie de Sainte-Philomène, fondatrice en Algérie de trois maisons du Bon-Pasteur d’Angers. Elles en reviendront les mains pleines des précieux ouvrages confectionnés avec les sœurs. Les garçons sont confiés aux frères, qui leur racontent l’Histoire sainte, Fatima, la vie du Père, ou les initient entre deux courses dans le parc à la réfutation des hérésies conciliaires. Pendant ce temps, les grandes personnes regardent les deux premières conférences de la retraite d’automne de 1995 que nos communautés ont elles-mêmes suivie cette année.

SAINT FRANÇOIS DE SALES ET SON EXTRAORDINAIRE VOCATION.

En nous promettant pour plus tard la révélation d’un merveilleux secret, notre Père se contente pour commencer de nous raconter les jeunes années de saint François de Sales (1567-1622). Les anecdotes de son enfance prédestinée auprès de ses saints parents, ses études brillantes à Paris puis à Padoue nous plongent dans le climat de la Contre-Réforme catholique au seizième siècle. Par ses saints et par son admirable doctrine, l’Église resplendissait alors parmi les ténèbres de l’humanisme païen et de la prétendue Réforme protestante. D’emblée, François s’engage dans le bon camp. À Paris, il se met à l’école des premiers fils de saint Ignace au Collège de Clermont. Le jeune homme, qui étudie le droit pour plaire à son père, y joint la théologie « pour se plaire à lui-même ». Il entre dans la Confrérie de Marie et édifie si bien ses condisciples qu’il en devient bientôt le préfet. Dans le même temps, l’explication du Cantique des cantiques par le bénédictin Génébrard lui révèle l’amour de Dieu pour sa créature et le lance à pleines voiles dans la vie mystique. En un mot, dans ce Paris étudiant et turbulent, il est “ l’Ange de l’école ”.

À Padoue, il traverse les tentations de la vie étudiante avec la même perfection aimable et rayonnante : « On ne peut aimer la vertu sans vous aimer », lui déclare son maître Pancirolo.

Mais le diable ne peut supporter tant de sainteté. Alors qu’en écho aux théories abominables de Calvin la controverse sur la prédestination enflamme les écoles, François est saisi par une effroyable tentation de désespoir. Une première fois, à Paris, il en est délivré par un acte de confiance héroïque au pied de Notre-Dame de Bonne Délivrance. Mais son angoisse reprend à Padoue et le conduit aux portes de la mort ! Il lui faudra cette fois-ci la résoudre par un travail théologique personnel, qui le conduira à adopter une position moyenne, évangélique, “ in medio Ecclesiæ ”.

Reçu brillamment docteur dans l’un et l’autre droit, canonique et civil, François rentre en Savoie. Son père ambitionne pour lui une belle carrière au service du duc, mais lui tient ferme dans sa résolution d’être d’Église. Il ne faudra rien de moins que sa nomination par le Pape à la prévôté du chapitre de Genève pour vaincre la résistance paternelle.

« Il entre dans le ministère et d’un seul coup, comme le soleil se lève avec puissance, lumière et chaleur, il éblouit tout », conclut notre Père ! On pressent que Dieu a de grands desseins sur lui, que les prochaines conférences devraient nous dévoiler...

ACTUALITES : « FORIS PUGNÆ, INTUS TIMORES »

Dimanche matin, frère Bruno, tirant les leçons orthodromiques de l’Histoire sainte et de la troisième partie du Secret de Fatima, nous dévoila les causes profondes des calamités qui affligent le monde : l’apostasie de l’Église qui, en renouvelant la perfidie du peuple juif, mérite à son tour le châtiment divin (supra, p. 3-11).

Fort de cette clef d’interprétation, l’après-midi, frère Pierre-Julien analysa les actualités d’une Chrétienté en grand danger. Au-dehors, ce sont des luttes, des guerres meurtrières ; au-dedans, des craintes, l’angoisse de l’apostasie qui mine l’Église.

Après une revue du front ukrainien où la victoire russe est inéluctable, notre frère nous donna quelques nouvelles de la bande de Gaza et en particulier de sa petite communauté chrétienne, victime innocente d’une guerre de barbares.

LE SYNODE SUR LA SYNODALITÉ.

Notre plus grande inquiétude vient du Synode sur l’Église synodale dont la première session romaine s’est tenue tout au long du mois d’octobre.

En application du principe de collégialité posé par Lumen gentium et par lequel les novateurs voulaient étendre le pouvoir de l’évêque à l’Église universelle et non plus seulement à son diocèse particulier, Paul VI avait institué le Synode des évêques. Mais il eut la “ prudence ” – et Jean-Paul II et Benoît XVI à sa suite –, de ne lui confier que des questions anodines. En revanche, François a décidé de pousser la collégialité à son paroxysme. D’abord en soumettant à cette institution la discussion de sujets très sensibles, comme ce fut le cas lors du Synode sur la famille, en 2014. Et aujourd’hui en convoquant à Rome non plus un Synode des évêques, mais une Assemblée synodale au sein de laquelle évêques, prêtres, pape, cardinaux, mais également religieux et laïcs, hommes et femmes confondus sont invités à jouer au “ Peuple de Dieu ” en discutant ensemble, en toute liberté, égalité et fraternité. Avant même toute discussion, François a réussi à imposer à l’Église entière son principe révolutionnaire de synodalité.

Ce qui est par ailleurs effarant, c’est la quasi-­unanimité avec laquelle les « pères et mères synodaux » ont voté tous les articles du rapport final, y compris les propositions les plus révolutionnaires. Comment s’en étonner, dès lors que tous font explicitement profession d’adhérer aux Actes du concile Vatican II ?

Notre Père l’avait déjà compris en 1985, lors du Synode extraordinaire réuni pour le vingtième anniversaire du Concile :

« Deux partis, si l’on ose dire, se disputeront la vedette durant ces quinze jours de consultation d’une importance décisive, le parti du Concile, mais du Concile entendu dans son exacte teneur... à retrouver et remettre en valeur, et le parti du postconcile, qui est aussi du Concile, mais poursuivi et prolongé, sinon interprété et radicalisé à l’extrême, voire altéré dans son esprit et dans sa lettre comme l’autre parti l’en accuse. Ici, c’est la Réforme permanente, là c’est la réforme arrêtée au 8 décembre 1965, l’Aujourd’hui des temps nouveaux. Ces deux partis proviennent de l’ancienne majorité du concile Vatican II. Sa minorité, en revanche, n’est plus admise dans les assemblées de l’Église hiérarchique depuis vingt ans. Sans décret d’exclusion, elle est dans ses restes épars considérée comme de trop peu de force et de valeur pour qu’il lui soit laissé quelque place (...). La majorité de Vatican II a certes éclaté en deux partis inégaux, l’un progressiste, l’autre conservateur, mais tous deux sont restés conciliaires avec une intolérance de fait, totalitaire. »

Les propositions qui résulteront des discussions d’une pareille assemblée, les décisions que prendra le pape François en 2024 en conclusion de ce Synode ne pourront donc qu’être néfastes pour l’Église !

LE RAPPORT DE SYNTHÈSE.

Ce texte n’est pas aussi incisif et progressiste que l’on pouvait s’y attendre. Mais il n’en est que plus subversif ! L’idée maîtresse qui court tout au long de ses quarante-deux pages est une hérésie sur l’objet formel de la foi en l’Église qui, au sortir du concile de Trente, se définissait comme « une société parfaite, visible et hiérarchique, fondée par Jésus-Christ, dont les membres adhèrent à la même doctrine dans la soumission à la même autorité romaine, en vue d’obtenir par la grâce des sacrements la vie éternelle. Le pape Pie XII compléta cette définition canonique par cette autre, profondément dogmatique, allégorique et spirituelle, de “ Corps mystique du Christ ”. Le Saint-Esprit était dit l’  Âme incréée ” de ce Corps social, et sa hiérarchie son “ âme créée ” toute dépendante du Christ, son Fondateur et Chef souverain. »

L’Église distingue d’une part sa hiérarchie, qui détient seule les pouvoirs de gouverner, d’enseigner et de sanctifier, à la tête de laquelle se trouve le Pape et, d’autre part, l’ensemble des fidèles, dont la vocation est d’être gouvernés, enseignés et sanctifiés. C’est une vérité de foi.

En contradiction avec la constitution divine de l’Église, mais en continuité parfaite avec la constitution conciliaire Lumen gentium, l’Église est présentée par le rapport synodal comme le  Peuple de Dieu  au sein duquel la proclamation de l’égalité de dignité entre tous les baptisés remet en cause tout caractère hiérarchique.

Plus besoin d’un enseignement donné avec autorité par la hiérarchie. Au contraire, celle-ci est invitée à se mettre à l’écoute du peuple des baptisés. Ces derniers détiennent le sensus fidei par lequel l’Esprit leur parle directement et de la façon la plus authentique.

De cet illuminisme démocratique, le rapport de synthèse tire le principe de la synodalité et la méthode de la “ conversation dans l’Esprit ”, à instaurer et généraliser à tous les niveaux dans l’Église, pour prétendument remédier à tous ses maux. Cela implique une promotion des laïcs et spécialement des femmes, au détriment de l’autorité des prêtres et surtout des évêques ; une ouverture œcuménique de l’Église et de ses sacrements à tous les baptisés des confessions hérétiques et schismatiques ; un regard désormais bienveillant à l’égard des erreurs et des vices les plus funestes pour les corps et les âmes.

« C’est absolument révolutionnaire, conclut frère Pierre-Julien, c’est destructeur, c’est subversif, c’est hérétique, mais ce n’est pas nouveau, c’est au contraire une vieille lune qu’on veut nous faire passer pour un fruit de l’Esprit-Saint. »

LE PROJET DU CARDINAL SUENENS.

En juillet 1969, l’abbé de Nantes publia une Lettre ouverte à Léon-Joseph Suenens, antipape. Au moment où Paul VI semblait vouloir freiner la Réforme, ce cardinal belge progressiste, grand artisan de la constitution Lumen gentium dont il connaissait parfaitement et la lettre et l’esprit, préconisait de poursuivre la révolution qu’il avait initiée. De sa seule autorité de novateur, il légiférait en réformateur, au nom de Vatican II, dont il prétendait, à juste titre, dégager les « germes », le « latent », l’implicite. Or, nous retrouvons dans le rapport de synthèse du Synode les “ idées phares ” du cardinal Suenens ! À commencer par le renversement de la pyramide hiérarchique de l’Église, qui fut son titre de gloire au Concile.

« En mettant à l’avant-plan la notion de peuple de Dieu, déclarait-il, le Concile mettait en relief d’emblée ce que tous les fidèles – pape, évêques, clergé, laïcs – ont en commun : le même baptême qui les rend tous fils de Dieu, frères de Jésus-Christ, sanctifiés par l’Esprit-Saint. Par le fait même, l’autorité hiérarchique s’insère plus nettement, comme un service, au cœur de la communauté ecclésiale, en très étroite union de vie avec elle (...). C’était une véritable révolution  copernicienne ”. »

« Et c’est vrai ! Aussi vrai qu’insensé ! commentait notre Père. Le Concile a renversé l’ordre hiérarchique et mis l’Église tête en bas, pieds en l’air, sous prétexte de faire reposer la pyramide sur sa base ! Il fallait que le Pape soit assujetti aux évêques et ceux-ci (nous verrons comme !) au peuple. » (CRC n° 22, juillet 1969)

De cette nouvelle vision de l’Église découle la coresponsabilité de chacun des membres du Peuple de Dieu : une notion ressassée une vingtaine de fois dans le rapport du Synode. « La coresponsabilité, idée maîtresse de Vatican II », explique Suenens, doit être réalisée en tout premier lieu « au niveau du Saint-Siège », en dépassant même la lettre du Concile, qui présente sur ce point « une lacune importante, dont nous souffrons à l’heure actuelle ».

Une autre idée du cardinal se retrouve dans le rapport de synthèse :

« Il est dans la logique de Vatican II que les Églises particulières – à travers leurs évêques réunis en conférences épiscopales – soient consultées ouvertement et collectivement, et puissent collaborer aux documents d’intérêt vital pour toute l’Église. Et cela en associant à ce travail, non seulement leurs commissions théologiques propres, mais encore les laïcs qualifiés en la matière. Cela répond à l’esprit du Concile comme aux aspirations de nos chrétiens les meilleurs, conscients d’être membres à part entière d’une Église qui est : nous tous ensemble ”. »

Finalement, notre Père résumait la pensée du cardinal en disant qu’il était « contre Vatican I, pour aller au-delà de Vatican II, vers un Vatican III »... qui se réalise au Synode sur la synodalité, avec une radicalité inédite. En effet, quand Suenens n’aspirait qu’à instituer une tutelle des évêques sur le Pape, François et le Synode, aujourd’hui, généralisent cette révolution à tous les étages de l’Église.

LA RÉACTION DES ÉVÊQUES.

Depuis quelques mois, cependant, plusieurs évêques et cardinaux dénoncent le processus synodal avec lucidité. Il s’agit des cardinaux Müller, Burke et Zen, de Nos Seigneurs Schneider, Gadecki, Strickland, Barron, Aguer et quelques autres encore au Mexique ou en Allemagne. En France, en revanche, aucune réaction. Les évêques disent s’en remettre au Saint-Esprit !

Cependant, parmi ces opposants déclarés, ceux qui ont été invités à participer personnellement au Synode, comme le cardinal Müller, Mgr Gadecki ou Mgr Barron, ont accepté de s’y rendre. Aucun d’entre eux n’a quitté l’assemblée en signe de protestation et tous ont signé le rapport final sans broncher. Et s’ils dénoncent les erreurs du Synode, c’est en invoquant les textes de Vatican II et l’autorité de Benoît XVI. Nous sommes au rouet !

En 2020, Mgr Schneider avait tout de même dénoncé « l’affirmation erronée contenue dans la déclaration du concile Vatican II Dignitatis humanæ [sur la liberté religieuse]. Cette erreur a provoqué une série de pratiques et de doctrines désastreuses, telles que la réunion de prière interreligieuse à Assise en 1986, et le Document d’Abou Dhabi en 2019. »

S’il espère que ces erreurs seront « corrigées » un jour, il s’est bien gardé jusqu’à présent d’une accusation formelle d’hérésie contre leurs auteurs, en particulier contre le pape François, pour obtenir de lui soit la rétractation d’un enseignement malheureux d’un jour soit la confirmation, mais par un jugement infaillible d’un enseignement alors donné pour toujours. C’est la procédure que notre Père désignait par la formule de l’appel du Pape au Pape.

Mgr Schneider en est loin, malheureusement. Il met en cause Dignitatis humanæ, certes, mais il ne comprend pas que tous les Actes de Vatican II sont imprégnés de l’esprit mauvais des novateurs qui les ont inspirés. D’un paragraphe à l’autre et tout au long des textes, le meilleur côtoie le pire, l’infaillible justifie le faillible, le vrai garantit le faux, rendant intenable toute interprétation conforme à la Tradition. Comme l’a démontré notre Père, Vatican II est à rejeter tout entier.

Le seul évêque à mettre en relation la crise de l’Église avec les erreurs du Concile, au point d’en réclamer la condamnation, c’est Mgr Vigano, ancien nonce apostolique aux États-Unis. Il est certainement le plus proche des positions de la CRC et va jusqu’à vouloir engager une procédure pour déposer le Pape.

Mais il ne songe pas à faire appel du Pape au Pape. Ses nombreuses interventions n’expriment pas d’espérance surnaturelle de la conversion du Saint-Père, qu’il faut implorer du Cœur Immaculé de Marie. En fait, il n’a plus foi en l’Église. Il s’est en effet rallié à la cause de Mgr Lefebvre qu’il loue comme un confesseur de la foi, jusque dans ses consécrations épiscopales schismatiques de 1988. Quel gâchis !

L’Église ne pourra pas faire l’économie d’une Contre-Réforme catholique, selon l’exemple et les enseignements de l’abbé de Nantes. C’est la première grande conclusion de cette conférence. L’Église ne pourra pas se redresser sans condamner la réforme du concile Vatican II et les enseignements subséquents des papes, sur l’autorité desquels François s’appuie aujourd’hui pour imposer sa réforme synodale.

Aussi, rédiger aujourd’hui de simples dubia pour combattre des erreurs qui prospèrent en réalité dans la Chaire même de saint Pierre depuis soixante ans est absolument sans force. Et critiquer les erreurs, les hérésies du pape François, même avérées sur le fond, est en soi une faute très grave, surtout de la part d’un évêque, lorsque la critique n’est pas formalisée par un acte adressé directement, officiellement et même publiquement au Saint-Père.

Notre Père désirait qu’un évêque accuse canoniquement le Pape d’hérésie et rompe sa communion avec lui dans l’attente d’un jugement doctrinal infaillible. Existe-t-il aujourd’hui un évêque ayant foi en l’Église, dans le pouvoir du Vicaire du Christ et dans son propre pouvoir de successeur des Apôtres, pour engager et soutenir une telle accusation comme l’a fait notre Père, lui seul, en tant que simple prêtre ?

Pour notre part, et c’est la seconde conclusion de cette conférence, nous n’attendrons pas qu’un évêque se lève pour continuer à soutenir les accusations de notre Père, portées hier à l’encontre des papes Paul VI, Jean-Paul II et Benoît XVI et aujourd’hui contre François. Mais nous poursuivrons aussi nos prières et nos sacrifices afin d’obtenir du Cœur Immaculé de Marie la conversion et le salut de l’âme du pape François. Frère Bruno ne se lasse pas de nous y exhorter, selon l’exemple que nous ont laissé les trois enfants de Fatima, après avoir vu le Saint-Père dans le grand Secret de Notre-Dame de Fatima, le 13 juillet 1917.

PREMIER SAMEDI EN OPÉRATION EXTÉRIEURE

Pendant ce temps, nos frères Thomas et Théophane étaient partis en mission lointaine. Quelques fidèles du pays et familles phalangistes des environs les rejoignirent pour célébrer les exercices du premier samedi du mois, sous la houlette du curé de la paroisse, un bon pasteur soucieux de correspondre avec ses ouailles aux volontés du Ciel.

Pour encourager ce petit troupeau, frère Thomas précisa une circonstance touchante : le 11 décembre 1925, le pape Pie XI promulguait son encyclique sur le Christ-Roi, Quas Primas, qui instituait la “ fête de Jésus Roi de l’univers ”. Les termes de l’encyclique, ceux de l’office liturgique, sont solennels et grandioses, car Jésus est vraiment Roi, rien n’échappe à son sceptre, dans tous les domaines, nos cœurs, nos familles, nos patries, et l’univers entier. Certes ! Mais voici l’étonnant, l’émouvant : c’est précisément la veille de cette proclamation pontificale de sa royauté que Jésus choisit d’apparaître à Pontevedra, sous les traits d’un Enfant. Et le seul souci qu’il y manifeste, la seule chose qui l’intéresse aujourd’hui encore, qui lui fait plaisir, qui fait battre son Cœur... c’est de consoler le Cœur de sa Maman !

Après quelques kilomètres de marche dans la neige, en égrenant leur chapelet, nos amis atteignirent un petit sanctuaire marial où ils accomplirent le quart d’heure de méditation des mystères joyeux du Rosaire, se confessèrent, assistèrent à la messe et communièrent, en esprit de réparation.

L’après-midi, frère Thomas retraça en trois quarts d’heure l’orthodromie mariale en France au dix-­neuvième siècle, cette « grande nouvelle » annoncée par Notre-Dame de la Salette, qui actualise la Bonne Nouvelle de l’Évangile. De la Rue du Bac à Pellevoisin, en passant par La Salette, Lourdes, et Pontmain – ce chapelet d’apparitions qui dessine un grand “ M ” sur la terre de France –, la Sainte Vierge prépare sa révélation suprême de Fatima : « Dieu veut établir dans le monde la dévotion à mon Cœur Immaculé. »

Or, il est triste de constater que ce trésor incomparable que nous a donné notre Mère demeure enfoui, inexploité. Ce ne sont pas tant les ennemis du dehors qui ont entravé les desseins du Ciel, que la perfidie des “ mauvais catholiques ” opposés à toute ingérence céleste dans leurs affaires et la pusillanimité des bons eux-mêmes, ne parvenant pas à prendre la mesure de la mission de l’Immaculée : Elle descend sur la terre pour écraser le serpent et reconquérir son Royaume ! C’est notre honneur d’entrer aujourd’hui dans cette Croisade, de faire enfin fructifier le trésor marial de nos siècles passés par une fervente dévotion réparatrice.

SAINT SUAIRE, REPONSE DEFINITIVE (SUITE)

Notre souci de réparation nous conduit souvent à la polémique contre les blasphémateurs de Jésus et Marie, mais aussi contre leurs complices. Ainsi de l’historien Jean-Christian Petitfils, auteur du Saint Suaire de Turin, Témoin de la Passion de Jésus-Christ, ouvrage dans lequel il affirme tout à la fois l’authenticité de la sainte relique et la probité des scientifiques qui procédèrent à sa datation médiévale au carbone 14 ! Ce n’est pas tout : il accuse notre frère Bruno – dont il pille sans vergogne les travaux – d’avoir grandement nui à la cause du Saint Suaire par sa dénonciation de la fraude des “ Carbonari ” ! Il importe de savoir si cet auteur est de bonne foi, pour l’éclairer, ou bien s’il est malhonnête, pour le dénoncer, car “ nôtre est le vrai ” !

Ce samedi 2 décembre, il dédicaçait son livre au salon des écrivains catholiques. Quelques-uns de nos amis s’y rendirent donc pour donner suite à la lettre ouverte publiée par M. Claude de Cointet (cf. IER n° 249, p. 28-30). Ils étaient encouragés par la réponse reçue quelques jours auparavant de l’éminent physicien belge Stefaan Pommé : « Je vous souhaite de la force dans la défense de l’intégrité scientifique et de la vérité. »

Voici leur compte-rendu.

« Nous nous sommes retrouvés en haut de l’escalier de la mairie du VIe arrondissement. La salle où se trouvait le salon était divisée en deux parties, la première servant de hall et la seconde accueillant les stands des auteurs, répartis sur quatre rangées. Nous trouvâmes M. Petitfils à l’avant-dernière table de la première ligne, ce qui nous garantissait de pouvoir discuter sans devenir rapidement le centre de l’attention générale et ainsi d’éviter tout scandale.

« Après l’avoir salué aimablement, l’une d’entre nous commença par lui confier son livre à dédicacer. Tout en le lui tendant, elle nous présenta en tant que “ membres de la CRC de tous âges ” et lui demanda s’il avait lu la lettre de M. de Cointet. Tout en saisissant le livre, M. Petitfils répondit par l’affirmative, en précisant qu’il n’était pas dans ses intentions d’y répondre. Notre amie s’enquit alors de sa connaissance du caractère diffamatoire de certains de ses propos envers frère Bruno, un autre membre de notre groupe précisant qu’ils n’étaient d’aucune aide pour l’établissement de la vérité sur l’examen scientifique du Saint Suaire. M. Petitfils rétorqua qu’il était libre de donner son opinion sur la CRC. Comme nous insistions sur la diffamation, qui consiste à alléguer d’un fait qui porte atteinte à l’honneur d’une personne, notre interlocuteur répliqua, mi-emporté mi-dédaigneux, que nous n’avions qu’à lui faire un procès si cela ne nous plaisait pas. Sûrement pensait-il ainsi couper court à toute poursuite de la conversation.

« Changeant alors d’angle d’attaque et dévoilant une autre partie de nos batteries, nous avons déplacé l’échange sur la compétence scientifique de frère Bruno, le sérieux de ses dizaines d’années de recherche sur le Saint Suaire, de ses participations à tous les congrès, quand M. Petitfils n’est qu’un historien. Notre protagoniste affirma alors : “ Bruno (sic !) n’y a jamais été ! Ou alors en tant que spectateur ! 

« “ Faux ! avons-nous répliqué. À titre d’exemple, frère Bruno était présent au congrès de 1978, il connaissait les membres du STURP. Les scientifiques reconnaissaient sa compétence, particulièrement en exégèse, au point qu’ils avaient demandé son intervention dans certains congrès et notamment au congrès de Bologne en 1981 sur le soudarion johannique. ” De même, lors du congrès de Cagliari en 1990 sur le codex Skylitzès ; frère Bruno rédigea même la motion finale de ce congrès, qui recueillit l’adhésion générale.

« “ Et M. de Cointet, qui a lui-même accompagné frère Bruno dans ses recherches et enquêtes, vous le dit bien dans la lettre qu’il vous a adressée : les hommes de vraie science qui s’intéressaient au Saint Suaire ont toujours montré à leur égard une grande cordialité et étaient devenus leurs amis. 

« À ce moment, notre interlocuteur semblait mal à l’aise, enlevant ses lunettes pour les tripoter nerveusement, essayant de jauger les personnes en face de lui, tandis que ses voisines de table écoutaient discrètement, mais avec beaucoup d’attention notre échange. Sans nous départir de notre calme, nous avons abordé les malversations, dont lui-même accuse les différents laboratoires, reprenant sans le dire les dix ans d’enquête de frère Bruno.

« “ Mais comment ça ? Il n’y a pas que frère Bruno ”, protesta-t-il en énumérant les noms de plusieurs scientifiques, comme pour rendre frère Bruno insignifiant.

« Sans nous laisser impressionner, nous sommes revenus sur les tricheries des laboratoires démontrées par frère Bruno et reprises – sans conclusion ! – par M. Petitfils. Il nous dit alors reconnaître que la procédure n’avait pas été respectée par les laboratoires, mais que cela ne prouvait pas pour autant leur malhonnêteté. Devant notre étonnement de le voir accorder du crédit à des scientifiques qui ne respectent pas leur propre protocole, il ne put se défendre que par un vague “ C’est comme ça, je ne fais qu’énoncer des faits. 

« Saisissant la balle au bond, nous avons relancé la controverse en évoquant la différence de poids et de taille constatée sur les échantillons au cours de l’analyse : un fait troublant, justement ! La réponse de M. Petitfils fut laconique et quelque peu déplacée puisqu’il se contenta de dire que cela avait été constaté ultérieurement, quand frère Bruno n’était plus concerné par le Saint Suaire. Mais il essaya de détourner la conversation sur un ton doctoral en arguant que les datations au carbone 14 ne seraient pas fiables, particulièrement pour le Saint Suaire, sur lequel plus on s’éloigne du centre et plus la datation serait récente.

« “ Si c’est si peu fiable, ripostons-nous, comment expliquez-vous que dans le tube n° 3, l’échantillon soit daté très précisément de l’époque du Saint Suaire ; alors que l’échantillon de ce tube était censé être un tissu du deuxième siècle ? Le test est très précis... Reconnaissez-le : c’est ainsi que les scientifiques ont, malgré eux, bien daté au carbone 14 le vrai échantillon du Saint Suaire, démontré son authenticité. Et si vous, vous refusez de le constater, eux le savent parfaitement. 

« Il s’en suivit un échange sur la manipulation des chiffres par les scientifiques, sur leur concertation, leurs échanges lors de l’analyse, tous ces stratagèmes témoignant de leur malhonnêteté que M. Petitfils refuse de voir, préférant hurler avec les loups en diffamant gratuitement frère Bruno.

« Il s’opiniâtra d’ailleurs en évoquant le statut de l’abbé Georges de Nantes et notre caractère prétendument sectaire, l’avertissement de la CEF et le cortège de calomnies qu’il propage. Nous répondîmes que ni l’abbé de Nantes ni la CRC n’ont jamais été condamnés comme hérétiques et sectaires par l’Église catholique, avant de lui demander à nouveau quel était le rapport entre ces diffamations et le Saint Suaire.

« Mais M. Petitfils mit fin à la conversation : “ Et alors ? Si mon livre ne vous plaît pas, ne l’achetez pas, mais partez, nous n’avons plus rien à nous dire, d’autres veulent acheter mon livre. 

« Nous avons acquiescé, renvoyant cette affaire au tribunal de Jésus-Christ. Il importait de l’avertir que la fraude du carbone 14 et le discrédit du Saint Suaire avaient été une seconde crucifixion de Notre-Seigneur, dont il se rendait complice en diffamant le meilleur défenseur de la sainte relique depuis quarante ans.

« Nous le quittâmes alors pour distribuer quelques tracts. Une personne croisée à cette occasion connaissait les livres de frère Pascal sur Mgr Freppel et se montra intéressée par la lettre de M. de Cointet. Une autre, chimiste, nous écouta attentivement elle aussi, demandant ensuite s’il était encore utile de débattre du carbone 14, attendu qu’il existe maintenant d’autres techniques d’analyse ne nécessitant pas de prélèvement d’échantillon.

« Notre Père, déjà, jugeait la datation au carbone 14 inutile, puisque l’authenticité du Saint Suaire était prouvée depuis des années de manière décisive par d’autres preuves, historiques et archéologiques notamment. Par exemple, l’empreinte d’une pièce de monnaie frappée par Ponce Pilate, que le Père Filas avait identifiée en 1979 sur les yeux de Notre-­Seigneur. Cependant, il reste nécessaire de dénoncer la frauduleuse datation de 1988, puisqu’elle fut le grand moyen pour les diaboliques de mettre en cause dans l’opinion mondiale l’authenticité de la relique.

« Enfin, notre petite équipe de choc se retrouva sur le palier, déçue par M. Petitfils, mais réconfortée par l’accueil et les échanges avec les autres auteurs.

T. S. »

M. Petitfils a-t-il été néanmoins éclairé par cette conversation ? Lors de la fête du livre de l’association “Renaissance Catholique”, le 10 décembre, à Port-Marly, il était « malheureusement absent » et son stand est demeuré vide.

8 DÉCEMBRE, NOUVEL AN PHALANGISTE

Ce jour-là, dans notre maison Saint-Bruno, se déroula une cérémonie bien touchante, sous le regard de l’Immaculée Conception : la passation de la charge priorale de frère Michel de l’Immaculée triomphante et du Divin Cœur à frère Grégoire de l’Annonciation.

Devant le Saint-Sacrement exposé, après que nos deux frères eurent renouvelé leurs vœux perpétuels, frère Bruno lut la lettre d’obédience du nouveau prieur : « Avec l’aide de l’Immaculée à qui notre Père a passé la main, vous remplirez cette charge dans l’esprit de vos vœux, pour garder vos frères dans la fidélité à notre Règle et à nos coutumes. Soyez d’humbles moines-missionnaires, voués au Sacré-Cœur de Jésus, pour la louange de la gloire de Dieu et l’extension de son Règne à tous les humains nos frères, par le triomphe du Cœur Immaculé de Marie. »

Puis les frères de l’ermitage promirent une obéissance fidèle à leur nouveau prieur, avant d’échanger le baiser de paix. À l’heure où le Vatican lamine les congrégations religieuses les unes après les autres, cette simple cérémonie est à elle seule un acte de Contre-Réforme mariale ! Quant à frère Michel, déchargé de nos maisons fontanelles, il a rejoint la maison Saint-Joseph pour assister frère Bruno. Ce dernier sourit de contentement : la relève est assurée ! L’Adversaire n’a d’ailleurs pas attendu pour en manifester son dépit...

HÉRÉTIQUE, LA CRC ?

Notre Père s’en plaignait déjà en 1996 : toutes ces bonnes œuvres que nous avons décrites sont systématiquement ignorées par la hiérarchie catholique en général et par notre évêque en particulier : Mgr Daucourt hier, Mgr Joly aujourd’hui. Installé depuis deux ans sur le siège épiscopal de Troyes, ce dernier n’est encore entré en relation avec nos communautés d’aucune manière, n’accusant pas même réception du mémoire que lui avait envoyé frère Bruno pour lui exposer en détail “ L’Affaire de Nantes ” (cf. IER n° 229 à 231).

Or, voici qu’il vient de sortir publiquement de son silence, précisément en cette fête de l’Immaculée Conception. Dans un sermon d’une mariologie minimaliste bien dans la ligne conciliaire, il en vint à réprouver vigoureusement « un courant théologique, non... un courant hérétique, présent dans notre diocèse, avec la Contre-Réforme catholique ». En cause, notre croyance dans la préexistence de l’âme de la Vierge Marie. Mais au fait, de quoi s’agit-il ? Rien de plus facile que de saisir le mot “ préexistence ” dans le champ de recherche du site de la CRC ou bien sur la VOD pour trouver les nombreux enseignements de l’abbé de Nantes à ce sujet.

En réalité, il ne s’agit pas d’une hérésie, ni même d’une extravagance, mais d’une pensée qui lui était suggérée, imposée même, par la liturgie. La loi de la prière n’est-elle pas la loi de la foi ? Or, lors des fêtes de la Sainte Vierge et spécialement celle de l’Immaculée Conception, l’Église l’identifie avec la Sagesse de l’Ancien Testament, cette mystérieuse créature féminine préexistante auprès de Dieu, que les livres sapientiaux célèbrent avec exubérance : « Le Seigneur m’a conçue au début de ses desseins, avant ses œuvres les plus anciennes. Dès l’éternité, je fus sacrée, dès le commencement, avant l’origine de la terre. » (Pr 8, 22-23)

Ainsi conduit par la liturgie de l’Église et la Sainte Écriture, notre Père admira la convenance et la fécondité d’un tel privilège. La Vierge Marie ne fut donc pas simplement une femme ordinaire préservée de la transmission du péché originel dans le sein de sa mère, mais elle est la Personne que la Sainte Trinité a conçue à l’origine des siècles, « dans une telle plénitude d’innocence et de sainteté, écrit le bienheureux Pie IX dans sa bulle Ineffabilis Deus, qu’on ne pût, au-dessous de Dieu, en concevoir une plus grande, et que nulle autre pensée que celle même de Dieu ne pût en mesurer la grandeur. »

Avant tous les siècles, elle existe mystérieusement auprès de Dieu, vivante, aimante, adorante. Que cette pensée ravit nos cœurs d’enfants de Marie ! Nous savourons mieux, dès lors, tous les titres que lui a décernés la piété catholique et les hardiesses des Pères de l’Église. De Mariam numquam satis ! Saint Jean Damascène l’appelle la “ Primogenita ”, « cette première-née qui devait enfanter le premier-né de toutes les créatures ». Saint Éphrem, affirme que c’est par sa médiation que le premier Adam reçut la grâce ! Elle est la Première, la Reine des Anges, des hommes et de tout l’univers, la coopératrice des desseins divins depuis les origines et déjà lors de la création : « Je vous ai donné six jours pour travailler, je me suis réservé le septième », ose-t-elle déclarer aux bergers de La Salette !

Pour le moment, il ne s’agit encore que d’une libre opinion théologique, que l’abbé de Nantes se disait même prêt à abandonner si l’Église la condamnait comme contraire au dogme. Cependant, ce nouveau privilège pourrait bien plutôt faire un jour l’objet d’une définition du magistère extraordinaire, en raison de son fondement dans la Sainte Écriture et dans la Tradition. Que les théologiens étudient donc la question, notre Père leur a préparé le travail en examinant les difficultés qu’elle soulève. Mais les accusations gratuites d’hérésie lancées par le parti minimaliste ne nous ébranlent pas.

De la part de notre évêque, il s’agit évidemment d’une manœuvre de diversion, visant à escamoter notre opposition pourtant inouïe aux nouveautés enseignées par le concile Vatican II et par les papes Jean XXIII, Paul VI, Jean-Paul II (tous canonisés !), Benoît XVI et François. Ce subterfuge, quelle reconnaissance de la solidité des accusations de l’abbé de Nantes ! Quel aveu d’impuissance face à son appel au magistère infaillible !

Et cependant, au moment où il croit déplacer le combat et contre-attaquer efficacement, Mgr Joly, en s’en prenant au culte de la Vierge Immaculée, se précipite en réalité au cœur de la bataille qui oppose, dans l’Église, les enfants de Marie aux suppôts de Satan. En effet, la source de tous les malheurs de l’Église, c’est la révolte de sa hiérarchie contre la Vierge Marie. En refusant de définir sa Médiation universelle, en rejetant les demandes de Notre-Dame de Fatima, les Pères conciliaires et les papes successifs se sont coupés de la grâce divine.

Le 15 août 1964, notre Père interrogeait la Vierge Marie sur la raison de la haine que lui vouent les novateurs : « Qu’a donc d’inquiétant le développement de la théologie catholique, partie à la découverte de vos étonnants et singuliers privilèges ?

« Depuis les disciples de Nestorius jusqu’aux réformistes du deuxième Concile du Vatican, la zizanie est semée périodiquement dans la famille chrétienne à propos de Vous, ô Mère de Dieu. C’est une nécessité inéluctable et une malédiction pour les novateurs d’aller s’attaquer et se briser contre cette pierre d’achoppement de votre culte !

« Vous êtes bien un signe de contradiction, vous êtes l’occasion d’une révélation des cœurs. En vertu d’une disposition providentielle qui n’est ni à démontrer ni à justifier, vous avez été établie gardienne, ou mieux, Sauvegarde de l’Église et des chrétiens. Certaines gens peuvent trouver que vous prenez maintenant trop d’importance, c’est la preuve que votre mystère et notre dévotion font obstacle à leurs inventions et leurs projets. » (Lettre à mes amis n° 179)

Et quelques semaines plus tard, analysant la quatrième session du Concile, notre Père concluait : « Il est sûr qu’il y a incompatibilité entre le parti réformiste et la Vierge Marie, Notre-Dame de Lourdes et de Fatima ! Mais c’est pour nous un signe de victoire, car celui qui est contre la Vierge est contre l’Église et va à sa perte. » (Lettre à mes amis n° 185, 1er octobre 1964)

frère Guy de la Miséricorde.