Il est ressuscité !

N° 271 – Novembre 2025

Rédaction : Frère Bruno Bonnet-Eymard


Ô Immaculée Corédemptrice,
notre unique espérance !

NOTRE Saint-Père Léon XIV a signé, approuvé  et ordonné la publication d’une note doctrinale rédigée par le Dicastère pour la doctrine de la foi, intitulée Mater Populi fidelis. Le cardinal Fernandez écrit dans sa présentation : « Cette Note répond à de nombreuses questions et propositions parvenues au cours des dernières décennies au Saint-Siège – en particulier à ce Dicastère – sur des questions liées à la dévotion mariale et à certains titres mariaux. »

Or, voici quelle fut, certainement, la dernière question, la dernière supplique reçue par le Souverain Pontife concernant la dévotion à la Vierge Marie, envoyée de notre maison Saint-Joseph, le 13 octobre dernier :

Très Saint Père,

Lorsque le Vicaire du Christ nous transmet cette déclaration d’amour : « Je t’ai aimé » (l’exhortation apostolique Dilexi te), de tout mon cœur, je crois, j’adore, j’espère et j’aime en retour, selon la formule enseignée en 1916 aux trois pastoureaux du Portugal par l’Ange, non pas de Philadelphie mais de Fatima.

Ce dernier ajoutait : « Et je vous demande pardon pour ceux qui ne croient pas, qui n’adorent pas, qui n’espèrent pas, qui ne vous aiment pas. » C’est-à-dire pour tous ceux dont saint Jean disait à l’Église de Sardes de la part de Dieu : « Je connais ta conduite ; tu passes pour vivant, mais tu es mort. » (Ap 3, 1)

Et j’aime. Je crois, j’adore, j’espère et j’aime. Ah ! j’aime Marie dont vous rappelez le cantique de sa victoire, Très Saint Père : « Il a renversé les puissants de leurs trônes et élevé les humbles. Il a comblé de biens les affamés, renvoyé les riches les mains vides. »

Quelle émotion de voir, sous votre plume, Madeleine « déversant son amour » sur la tête de Jésus qui « quelques jours plus tard serait tourmentée par les épines » ( n° 4 de Dilexi te). Très Saint-Père, vous ne pouvez mieux dire, en ces premiers jours de votre pontificat, qui coïncident avec le centenaire des apparitions dont sœur Lucie fut favorisée durant son premier séjour à Pontevedra.

Aujourd’hui, ce n’est plus seulement la « tête » de Jésus, mais c’est son Sacré Cœur et le Cœur Immaculé de Marie, sa Mère, qui sont « tourmentés par les épines ». Le 13 juin 1917, à Fatima, Notre-Dame avait dit à Lucie : « Jésus veut se servir de toi afin de me faire connaître et aimer. Il veut établir dans le monde la dévotion à mon Cœur Immaculé. »

Moins de dix ans plus tard, dans la soirée du jeudi 10 décembre 1925, à Pontevedra, raconte Lucie, la très Sainte Vierge lui apparut et, à côté d’elle, « porté par une nuée lumineuse, l’Enfant-Jésus. Notre-Dame, comme si Elle voulait m’inspirer du courage, posa doucement sa main maternelle sur mon épaule droite, en me montrant en même temps son Cœur Immaculé entouré d’épines, qu’elle tenait dans l’autre main.

« L’Enfant-Jésus me dit : Aie compassion du Cœur de ta très Sainte Mère, couvert des épines que les hommes ingrats lui enfoncent à tout moment, sans qu’il y ait personne pour faire acte de réparation afin de les en retirer. 

« Ensuite, la très Sainte Vierge me dit : Vois, ma fille, mon Cœur entouré d’épines que les hommes ingrats m’enfoncent à chaque instant par leurs blasphèmes et leurs ingratitudes. Toi, du moins, tâche de me consoler et dis que tous ceux qui, pendant cinq mois, le premier samedi, se confesseront, recevront la sainte Communion, réciteront un chapelet, et me tiendront compagnie pendant quinze minutes en méditant sur les quinze mystères du Rosaire, en esprit de réparation, je promets de les assister à l’heure de la mort avec toutes les grâces nécessaires pour le salut de leur âme. 

« Après cette grâce, comment pouvais-je me soustraire au plus petit sacrifice que Dieu voudrait me demander ? Pour consoler le Cœur de ma chère Mère du Ciel, je serais contente de boire jusqu’à la dernière goutte le calice le plus amer. Je désirais souffrir tous les martyres pour offrir réparation au Cœur Immaculé de Marie, ma chère Mère, et lui retirer une à une toutes les épines qui le déchirent, mais je compris que ces épines sont le symbole des nombreux péchés qui se commettent contre son Fils, et atteignent le Cœur de sa Mère. Oui, parce que par eux beaucoup d’autres de ses fils se perdent éternellement. »

Très Saint Père, nous ne sommes plus dans le temps de la vie terrestre de la Vierge Marie, lorsque les soldats de Pilate couronnèrent d’épines la tête de son Fils, mais nous sommes au centenaire de l’apparition de 1925. Des hommes ingrats, pour lesquels la Vierge Marie a tant fait, au long des siècles, enfoncent des épines qui sont les sacrilèges commis contre la Vierge, les péchés qui l’outragent personnellement. À tout moment, les hommes ingrats enfoncent ces épines dans le Cœur de la Vierge, et aucun acte de réparation n’est fait pour les en retirer.

« Nous ne sommes pas dans le domaine de la bienfaisance, écrivez-vous, Très Saint Père, mais dans celui de la Révélation. » ( n° 5) Cette phrase vous a été inspirée par la grâce de votre sacre, Très Saint et vénéré Père ! En effet, c’est la grâce de votre pontificat de nous exhorter à consoler le Cœur de notre Mère qui disait le 19 août 1917, aux trois enfants de Fatima : « Priez, priez beaucoup et faites des sacrifices pour les pécheurs, car beaucoup d’âmes vont en enfer parce qu’elles n’ont personne qui se sacrifie et prie pour elles. »

« Les pauvres » que recommandait « un Cardinal ami » au pape François ( n° 6), étaient ceux que Notre-Dame avait montrés à Lucie, François et Jacinthe le 13 juillet précédent : « Vous avez vu l’enfer où vont les âmes des pauvres pécheurs. Pour les sauver, Dieu veut établir dans le monde la dévotion à mon Cœur Immaculé. »

Très Saint Père ! J’en viens à l’objet de ma supplique. Si je console le Cœur de ma Mère pour les ingratitudes qu’Elle souffre de la part des pécheurs, ces pécheurs seront sauvés. Si je ne la console pas, ces pécheurs seront damnés ! Que des êtres humains puissent tomber en enfer parce que je n’aurai pas consolé la Vierge Marie et, inversement, que des êtres humains puissent “ gagner ” le Ciel parce que j’aurai consolé la Vierge Marie, tel est le message de Notre-Dame qu’il Vous faut faire connaître à tous nos frères, enfants de l’Église, vos enfants.

Certes, pour préparer le centenaire des apparitions de Pontevedra, les conférences épiscopales d’Angleterre, du Pays de Galles, d’Écosse et des Philippines ont recommandé la dévotion réparatrice des cinq premiers samedis du mois. Mais c’est à Vous, Très Saint Père, que sont adressées les demandes instantes et décisives de la Reine des Apôtres, pour sauver les âmes du feu de l’enfer, toutes les âmes s’il était possible, et accorder au monde le don divin de la paix par la conversion miraculeuse de la Russie.

Le pape François a prononcé la consécration de ce pays conformément à la demande explicite et insistante de Notre-Dame, et, de surcroît, conjointement avec le monde entier, mais cette consécration est restée inopérante pour n’avoir pas été suivie de la dévotion réparatrice demandée par Notre-Dame.

Alors, Très Saint Père, nous Vous supplions de satisfaire aux volontés divines révélées par Notre-Dame de Fatima, en accomplissant toutes ses “ petites demandes ”, à savoir :

– Recommander aux évêques du monde entier d’organiser des routes mariales de Notre-Dame de Fatima afin de propager la dévotion au Cœur Immaculé de Marie dans leur diocèse.

– Élever pour l’Église universelle la fête en l’honneur du Cœur Immaculé de Marie au rang de fête solennelle.

– Déclarer le saint rosaire prière liturgique,

– Approuver et recommander la dévotion réparatrice des cinq premiers samedis du mois.

Certes, des difficultés surgiront certainement lorsque vous voudrez satisfaire aux requêtes du Ciel pour consoler le Cœur Immaculé de Marie et pour favoriser le grand dessein divin de miséricorde révélé à Fatima. Mais les grâces divines ne vous manqueront pas, puisque les trois pastoureaux d’Aljustrel, les saints François et Jacinthe, et leur cousine, sœur Lucie, ne cessaient de prier et de se sacrifier « pour le Saint-Père ». « Je prierai pour le Pape tant que je serai sur cette terre, disait sœur Lucie, et je prierai encore plus quand je serai au Ciel. »

Quant à nous, Très Saint Père, avec votre permission, nous prions de tout notre cœur pour l’Église et pour vous-même, sous le regard de l’Immaculée, notre Mère à tous à jamais, afin qu’elle fasse de vous l’instrument diligent des volontés de son Cœur Immaculé qui ne sont autres que celles de son divin Fils : Sauver les âmes de l’enfer par Vous !

Quoiqu’indigne, j’ose cependant implorer de votre miséricorde la grâce de Votre bénédiction pontificale,

Frère Bruno de Jésus-Marie
Prieur général des Petits frères du Sacré-Cœur.

LA RÉPONSE “ DOCTRINALE ”... LUTHÉRIENNE DU VATICAN

Ainsi, notre Saint-Père Léon XIV répond, par la note Mater Populi fidelis, à ces questions et propositions concernant la dévotion mariale... Et sa réponse montre que notre Mère du Ciel va devoir faire un plus grand miracle encore que la conversion d’Alphonse Ratisbonne, un miracle semblable à la conversion de saint Paul sur le chemin de Damas, pour qu’advienne son triomphe sur le cœur du Saint-Père.

Ce Document a pour but « d’approfondir les justes fondements de la dévotion mariale », comme l’écrit le cardinal Fernandez dans sa présentation... « Il ne s’agit pas de corriger », prétend ce serpent, mais bien de valoriser « une authentique dévotion mariale », prétendument celle « du peuple de Dieu fidèle », qui verrait « en Marie, une expression mystagogique et symbolique d’une attitude évangélique de confiance dans le Seigneur » ! En fait le peuple de Dieu s’est exprimé lors de la présentation du Document, par la voix d’un catholique Sarde, absolument scandalisé par les propos de Fernandez, au point de l’interrompre à plusieurs reprises, en criant : « Ce document ne plaît pas à Dieu ! »

Cette note a donc pour but « de préciser la place de Marie – autant dire : “ la remettre à sa place ” – dans sa relation avec les croyants, à la lumière du mystère du Christ, unique Médiateur et Rédempteur. »

Cela « implique un effort œcuménique particulier »... On en revient toujours là, dans la ligne du concile Vatican II et de son insistance outrageante sur le “ rôle subordonné de Marie ” (Lumen gentium, chap. 8) : les protestants refusent à la Vierge Marie ses titres de Corédemptrice et de Médiatrice universelle. Il est donc nécessaire à nos pontifes “ réformés ” d’ôter à notre divine Mère ses couronnes, c’est le but de ce document. Leur fraternité universelle interreligieuse est à ce prix.

Saint Maximilien-Marie Kolbe écrivait : « L’Immaculée doit devenir – et cela le plus rapidement possible – la Reine de tous les hommes, aussi bien des sociétés que de chacun en particulier. Celui qui s’opposera et ne se soumettra pas à son règne, périra. »

AVANT D’ÊTRE ECRASÉ, LE SERPENT LA MORD AU TALON

Il s’agit donc de nier, avec toute l’autorité d’un magistère suprême non pas infaillible... donc faillible, ces expressions de la Corédemption de la Vierge Marie et de sa Médiation universelle.

Pour contester à l’Immaculée son titre de Corédemptrice, les théologiens du Dicastère pour la Doctrine de la Foi n’ont trouvé absolument aucun répondant dans la Sainte Écriture ni dans la tradition de l’Église, bien au contraire. Les citations de saint Paul sur la Primauté du Christ qu’ils avancent ne contrarient en rien les privilèges de sa Sainte Mère ! Ils ne peuvent invoquer que le pape François et le cardinal Ratzinger, qui étaient opposés à ce titre sous prétexte qu’il porterait ombrage à « la place unique du Christ ». Et voici l’affirmation principale, digne d’un pamphlet luthérien :

« Compte tenu de la nécessité d’expliquer le rôle subordonné de Marie au Christ dans l’œuvre de la Rédemption, l’utilisation du titre de Co-rédemptrice pour définir la coopération de Marie est toujours inopportune. Ce titre risque d’obscurcir l’unique médiation salvifique du Christ et peut donc générer une confusion et un déséquilibre dans l’harmonie des vérités de la foi chrétienne. » ( n° 22)

 Inopportune ” ? “ L’unique médiation salvifique du Christ ” devait être aussi “ inopportune ” lors de la réunion interreligieuse du 29 octobre pour l’anniversaire de Nostra ætate, puisque Léon XIV n’en a pas dit un seul mot devant les juifs et les musulmans qu’il avait invités !

Voilà bien comment la liberté religieuse et l’œcuménisme de Vatican II en viennent à renier même ce qui relève du magistère dogmatique de l’Église. Car, comme la divinité de Jésus-Christ, les privilèges de sa Sainte Mère ne sauraient être “ opportuns ” ou “ inopportuns ”. Ils sont vrais ou faux, révélés par Dieu ou non, et la réponse à la question relève du magistère infaillible du successeur de Pierre. Toujours l’Église en a jugé ainsi, depuis la proclamation de la Maternité divine de Marie en 431, jusqu’à celle de son Assomption en 1950.

Mais puisque, depuis la seconde “ réforme ”, l’Église est divisée entre les théologiens qui renient les titres glorieux de la Sainte Vierge afin de plaire aux “ frères séparés ”, et la meilleure part du troupeau, qui espère de la proclamation de Marie corédemptrice et médiatrice universelle un regain de vie dans le corps mourant de l’Église, c’est le devoir du Souverain Pontife d’utiliser son magistère extraordinaire pour confirmer infailliblement ses frères dans la foi. Pour l’honneur de la Vierge Marie, et le salut des âmes : « Celui qui croira sera sauvé, celui qui ne voudra pas croire sera condamné ! » (cf. Mc 16, 16)

Mais, Léon XIV, fidèle à ses prédécesseurs, ne veut pas définir ces vérités qui le « gênent » ( n° 22), malgré les demandes nombreuses qui ont été faites au Saint-Siège au cours des dernières années, et il ne peut pour autant les condamner. Il fait donc publier cette note qui n’aura d’autre effet que celui de « mettre publiquement dans le cœur des enfants [les enfants de l’Église] l’indifférence, le mépris ou même la haine à l’égard de cette Mère Immaculée », selon l’expression même de Notre-Seigneur à sœur Lucie.

À longueur de page, la Vierge Marie est rabaissée, humiliée. Son Immaculée Conception n’est évoquée que pour prétendre qu’Elle n’est que la « première des rachetés », le « prototype de chaque personne rachetée » ( n° 14) ! Comme l’écrivait notre Père : « On la dirait “ enfant trouvée ” au milieu de la massa damnata... » Ils insistent pour dire qu’Elle n’a pas de mérite, qu’Elle a tout reçu ( n° 67), que son rôle, sa maternité même, sont subordonnés ( n° 37). Dix paragraphes (45-55) répètent lourdement que Dieu seul peut donner la grâce, afin de nier sa médiation universelle : « Pour la communication de la grâce, même Marie ne peut intervenir. » ( n° 54) Ils interdisent à Dieu de passer par Elle ! Et pour se justifier, avec une hypocrisie toute pharisaïque, ils invoquent sa modestie : « Tout ce qui précède n’offense ni n’humilie Marie, parce que tout son être est référé à son Seigneur » ( n° 66) !

ET DIEU NE VENGERAIT PAS L’OUTRAGE FAIT A SA MÈRE ?

Ô Vierge Mère de Dieu et notre Mère, il a fallu que vienne ce vingt et unième siècle et ce grand remuement et cet orgueil insensé dans l’Église, il a fallu que dominent chez nous les hommes de Bélial, partisans de cette grandissime apostasie et révolution que vous annonciez à Fatima comme le châtiment promis au monde s’il ne se convertissait pas, il a fallu toute cette folle politique et cette fausse religion pour que les Princes de l’Église vous mordent au talon, avec un air dévot, et répandent leur blasphème dans tout le peuple fidèle. Abîme de perversion...

C’est vous, ô Reine du très saint Rosaire qui êtes, en Chrétienté perdue, la Reine des grandes batailles de Dieu, le Signe apocalyptique de la ruine finale des francs-maçons athées persécuteurs. Et cela parce que vous êtes l’Immaculée, la Femme bénie entre toutes les femmes, la Toute-Puissante sur le Cœur de Celui auquel la fureur des océans est soumise. C’est pour cela qu’ils vous combattent, parce que votre gloire leur est insupportable.

Au service de votre Fils, vous acceptez le combat, vous vous y tenez à nos côtés, au-devant de nous. La morsure de la Bête vous est cruelle... Vous pleuriez, à La Salette, et vous pleurez encore aujourd’hui, en voyant le châtiment que s’attire votre peuple, s’il n’a pas recours à vous, malgré tous vos efforts :

« Si mon peuple ne veut pas se soumettre, je suis forcée de laisser aller le bras de mon Fils ! Il est si lourd et si pesant que je ne puis plus le retenir. Depuis le temps que je souffre pour vous ! Si je veux que mon Fils ne vous abandonne pas, je suis forcée de le prier sans cesse pour vous ; et vous autres, vous n’en faites pas cas ! »

Qu’on touche à l’honneur de sa Mère, un homme ne peut pas le supporter. Moins encore un Dieu ! Dieu ne vengerait pas l’outrage fait à sa Mère ? Si le Vatican n’est pas frappé par la foudre de la Vengeance divine, ce sont les âmes qui l’habitent, qui suivent ses directives, indifférentes au blasphème, qui seront frappées, qui devront payer, éternellement !

Ah, vous avez touché à ma Sainte Mère, vous avez osé ! Épouvante...

Il faudrait réparer. Je voudrais en expiation élever un monument à la gloire de votre compassion rédemptrice, de votre médiation maternelle, ô Mère de Dieu et notre tendre Mère, Immaculée corédemptrice, notre unique espérance !

L’UNIQUE MÉDIATION ET CO-RÉDEMPTION DE JÉSUS-MARIE

Le titre de Corédemptrice exprime simplement le rôle majeur, unique, que Jésus-Christ a voulu donner à sa Mère Immaculée dans notre rédemption. La note Mater Populi fidelis oppose sans cesse ce rôle de la Sainte Vierge à celui de Notre-Seigneur, comme si la Mère portait ombrage à son divin Fils ! Le Saint-Père et ses théologiens sont donc absolument étrangers au mystère de “ l’union de Jésus et Marie ”, comme disait saint Louis-Marie Grignion de Montfort, mystère central de notre foi, d’une union sans pareille, que croyait jadis le plus humble chrétien.

Cette médiation unique de Jésus et Marie est révélée dans la Sainte Écriture dès le péché originel, parce que ce n’est que par Elle et Lui que le misérable genre humain a pu obtenir miséricorde, pour être sauvé de l’esclavage du Serpent, à qui Dieu a dit : « Je mets une hostilité entre toi et la Femme, entre ta semence et la sienne. Elle t’écrasera la tête, et tu l’atteindras au talon. » (Gn 3, 15)

On ne peut distinguer qui, de la Femme, ou de sa semence, écrase le Serpent. Ils le font tout ensemble ! Elle, elle est de toute évidence l’Immaculée Conception, que l’Église dans sa liturgie nous donne à contempler comme mystérieusement conçue depuis toujours, dès l’éternité, compagne du Verbe de Dieu créateur, vivant avec Lui et pour Lui, faisant ses délices (Pr 8, 22-31). Ainsi que saint Jean de la Croix l’a admirablement exprimé dans son Romancero : « Une épouse qui t’aime, mon Fils, je voudrais te donner... »

Adam et Ève, nos premiers parents, furent créés homme et femme, à leur image et ressemblance.

UNIE AU VERBE DIVIN, L’IMMACULÉE CORÉDEMPTRICE DE NOS PREMIERS PARENTS.

Saint Irénée, docteur de l’Église au IIe siècle, disciple de saint Polycarpe, lui-même disciple de l’Apôtre Jean, écrivait que la Vierge Marie était la réparatrice d’Ève : « Il était juste et nécessaire qu’Adam fut restauré dans le Christ... qu’Ève fût restaurée en Marie, afin qu’une Vierge devenue l’Avocate d’une vierge, effaçât et abolît la désobéissance d’une vierge par son obéissance virginale. » (Epideixis, 33)

À la suite de ce saint Docteur et Père de l’Église des Gaules, l’abbé de Nantes notre Père écrivait :

« La rédemption du genre humain, c’est la substitution de Jésus à Adam coupable et, parallèlement, la substitution de la Vierge Marie, l’Immaculée Conception, à Ève coupable. La Vierge Marie, Victime offerte au glaive de douleur annoncé par le vieillard Syméon.

« En Adam, c’est le Verbe de Dieu qui est blessé. En Ève, c’est Elle-même, dans sa féminité qui l’apparente à cette femme perdue, c’est elle-même qui est blessée dans ce qu’elle a de plus intime.

« Or, Elle voit son Fils racheter pareil opprobre. La justice de Dieu pardonnera à son Fils se faisant Adam coupable pour obtenir absolution. L’Immaculée Conception, la “ Femme ” céleste, adhère à sa résolution, mais elle se dit répondante d’Ève et prête par sa nature créée et sa féminité vouée à l’obéissance, à être immolée, Elle, par son divin Chef, le Verbe de Dieu. Lui, le digne Prêtre du Très-Haut, offrit à Dieu le Père son Immaculée Conception, digne, plus qu’aucune créature, de coopérer à la Rédemption. »

Jésus-Christ est “ l’unique médiateur ” (1 Tm 2, 5), mais « pour l’honneur, le mérite, la gloire éternelle et le bonheur de pareille satisfaction donnée au Père, Il accepta que sa Mère, l’Immaculée Fille de Dieu, en fût l’associée, la conjointe, par sa présence, par son courage, par son martyre : tandis que son Fils souffrirait passion cruelle et mort, un glaive de douleur lui percerait le cœur, l’associant à l’œuvre du salut du monde. » (Retraite, Circumincessante charité, 1997)

LA MÈRE DU RÉDEMPTEUR.

Ineffable mystère : le Fils de Dieu voulût se faire son Enfant, s’incarner en son sein virginal, recevoir d’Elle cette Chair qu’Il immolerait pour le salut du monde. Ainsi, la Vierge Marie est-elle médiatrice du Médiateur ! exerçant cette charge avant Lui, en vue de son avènement. Par la vertu de son humilité, Jésus a voulu se soumettre à Elle (Lc 2, 51), pour le mérite d’une obéissance parfaite, à tel point que rien de notable, rien de grand ne se faisait qu’Elle n’y participe en son titre et avec son autorité de Mère.

Mère du Fils de Dieu, Elle ne fait qu’un avec Lui : saint Bède le Vénérable (673-735), docteur de l’Église, n’hésitait pas à dire « Jésus-Christ, consubstantiel à sa Mère » ! Ils ne font donc qu’un seul Cœur, une seule Hostie.

« Près de la Croix de Jésus se tenait sa Mère. » (Jn 19, 25) Au douzième siècle, Arnaud de Bonneval, disciple et biographe de saint Bernard, écrivait : « La volonté du Christ et de Marie est absolument une, tous deux offraient pareillement un seul sacrifice, celle-ci dans le sang de son Cœur, celui-là dans le sang de sa chair. »

En 1946, notre Père, jeune séminariste, commenta un texte de l’abbé de Bonneval, à l’occasion d’un concours de théologie. Il y justifiait, incontestablement, le titre de Marie Corédemptrice :

« Marie veut toute la volonté de son Fils ; elle désire ardemment la Rédemption des hommes et soupire après le pardon de la faute... Au-delà de ses incroyables souffrances, sa vraie part au sacrifice rédempteur est à chercher dans cette volonté unique qui animait la Mère et le Fils.

« Marie épouse la même volonté rédemptrice qui anime Jésus. Il est victime, médiateur et sauveur. Marie le devient et va être ainsi à Jésus une humanité de surcroît. Pie X l’écrivait dans son Encyclique “ Ad Diem illum ” : “ C’est là l’amour véritable, celui-là seul qui a la vertu d’unir les volontés. 

« La Maternité de Marie est la seule raison d’un tel amour. Elle avait, comme Mère, une certaine autorité sur Jésus, et jamais le Christ n’avait brisé le joug d’une autorité si maternelle, si sainte.

« La place qu’occupe Marie dans la Rédemption opérée au Calvaire – sa corédemption – est donc infinie, parce qu’elle est toute tirée de Dieu même qui agit en Elle et par Elle, du fait de sa Maternité divine.

« Pure relation au Fils de Dieu, cette Maternité a pris en Marie une telle place que la Personne de la Vierge se définit toute en cette relation à Jésus qui la place au centre de la Rédemption, par son “ Oui ” à l’Archange de l’Annonciation. Le Christ ayant voulu venir en ce monde grâce au consentement de l’Ève nouvelle, Il ne pouvait achever ce voyage parmi nous en s’immolant sur la Croix sans la mêler encore à cet holocauste. Comme Jésus s’abandonne à la volonté de son Père et y perd la vie, Marie s’abandonne à cette volonté qu’Elle voit en Jésus et, perdant Jésus, Elle offre sa maternité... La Vierge est comme greffée sur l’arbre de la divine Croix. Mais c’est pour produire un fruit de Vie, un acte propre qui fit d’Elle une Corédemptrice de son Fils.

« Jésus immolé attirait sur lui tous les péchés du monde et retenait en lui, pour les sauver, tous les hommes. La Vierge, alors, consent à une telle substitution qui déchire son Cœur de Mère... parce qu’Elle épouse la souffrance de Jésus et son humiliation qui fait de tous les hommes les frères de Jésus, et donc ses propres enfants à Elle, en vertu de son universelle et perpétuelle maternité divine. »

Arnaud de Bonneval écrivait : « Le Père aimait le Fils, et le Fils aimait le Père ; la Mère quant à Elle, brûlait d’amour pour l’un et pour l’autre. »

Or, Marie est la Colombe du Saint-Esprit. « Son intercession est donc infaillible. Elle reçoit de Dieu lui-même, par la médiation de Jésus, autorité et toute-puissance pour être exaucée. Le Fils alors s’empare de cette prière et l’offre à son Père. Arnaud écrit : “ L’homme a désormais un accès assuré auprès de Dieu, devant qui il a le Fils pour médiateur de sa cause devant le Père, et la Mère pour médiatrice devant le Fils. Le Christ découvre à son Père et lui montre son côté et ses blessures, Marie découvre et montre au Christ son Cœur et ses seins. Et Elle ne peut d’aucune manière être repoussée, en présentant ensemble ces insignes témoignages de la clémence et de la charité, unis dans une même prière, plus éloquente que tout discours. ” »

Une seule rédemption, mais co-rédemption.

ÉPOUSE DU RÉDEMPTEUR, ELLE DONNE LA VIE À SES ENFANTS.

Mater Populi fidelis. L’expression est tirée de saint Augustin, qui affirmait que « Marie est bien la Mère des membres du Christ, car Elle coopéra, par sa charité, à la naissance des fidèles dans l’Église, des membres de ce Chef. » (De sancta virginitate, 6)

Saint Pie X, après avoir cité l’Évêque d’Hippone, expliquait comment la Vierge Marie avait mérité cette maternité des rachetés par la « perpétuelle société de vie et de souffrance » qui l’unissait à Jésus-Christ. « La conséquence de cette communauté de sentiments et de souffrances entre Marie et Jésus, est que Marie mérita très légitimement de devenir la réparatrice de l’humanité déchue et, partant, la dispensatrice de tous les trésors que Jésus nous a acquis par sa mort et par son sang. » (Ad Diem illum, 1904)

Ainsi s’éclaire la vision relatée par saint Jean dans l’Apocalypse, de cette Femme apparue dans le Ciel « enceinte et criant dans les douleurs de l’enfantement » (Ap 12, 2). Ces douleurs sont celles du Calvaire, où en fidèle Épouse du Rédempteur, Elle enfante l’humanité rachetée, ainsi que l’expliquait encore notre Père :

« Jésus tourne son regard vers elle. Lui, Il est tout, Il est l’Homme qui a remplacé Adam défaillant. Du haut de la Croix, Il enfante à la grâce tous ceux qu’Il sauve par son Sang. C’est le Chef de l’humanité, c’est le Roi des rois et Seigneur des seigneurs.

« Elle est son épouse, c’est la Femme, mais ce n’est pas l’Ève pécheresse, c’est l’Ève triomphante. C’est l’Ève qui, en suivant son Époux jusque sur la Croix et mourant de compassion avec Lui, mérite de devenir la Médiatrice, c’est-à-dire la Mère de nous tous. Il nous la donne. Elle devient véritablement le sein fécond qui va engendrer toutes les générations de chrétiens et ainsi, elle est la personnification de l’Église, notre Mère. L’Église est fondée dans le Cœur de la Vierge Marie, transpercé d’un glaive de douleur. »

« Jésus donc voyant sa Mère et, se tenant près d’elle, le disciple qu’il aimait, dit à sa Mère :  Femme, voici ton fils.  Puis il dit au disciple :  Voici ta Mère.  Dès cette heure-là, le disciple la prit chez lui. » (Jn 19, 26-27)

Jean, qui bénéficie le premier de cette rédemption, personnifie l’humanité tout entière. Il en va donc de Marie comme il était dit de Jérusalem, l’épouse de Yahweh qui donnerait naissance à tout un peuple en un seul jour, ainsi que l’annonçait le prophète :

« Qui a jamais entendu rien de tel, qui a vu rien de pareil ? Accouche-t-on d’un pays en un seul jour ? Enfante-t-on une nation toute à la fois ? Qu’à peine en gésine, Sion ait enfanté ses fils ! » (Is 66, 8)

Sion n’était que la figure de Marie. Elle personnifie cette Ville Sainte, Épouse de Yahweh, mère de tous les peuples : « Sion, chacun lui dit : Mère ! car en elle chacun est né. » (Ps 86, 5 dans la Vulgate)

Dans cette “ tradition ” de la Vierge Marie à saint Jean, disait encore notre Père, Jésus a consommé toute son œuvre : Il sait que « désormais tout était achevé pour que l’Écriture fût parfaitement accomplie » (Jn 19, 28). Il est content, maintenant ils ont sa Mère qui sera véritablement Médiatrice de toutes grâces. Il peut partir, son Église est fondée parce qu’il y a la Mère, et les enfants qui vont se confier à Elle.

Il dit alors « J’ai soif ! » Il a soif que l’Église commence, que les âmes se sauvent, qu’elles reçoivent le lait et la vie du sein virginal de la Vierge Marie. « Inclinant la tête, il remit l’esprit. » (Jn 19, 30)

Si l’Église est fondée, c’est parce que le Christ a mérité par sa mort salvatrice de nous donner son Esprit divin, dont la Vierge est la Colombe et le Sanctuaire.

STAT CRUX

Dix-neuf siècles plus tard, le 13 juin 1929, l’épiphanie mariale et eucharistique de Tuy, dont nous célébrerons bientôt le centenaire, a révélé que cette Vierge Immaculée au Cœur enflammé d’amour est toujours notre corédemptrice, épouse du Rédempteur, Mère et Médiatrice des rachetés, au Saint-Sacrifice de la Messe, mémorial du Calvaire. Leur unique Cœur eucharistique est toujours le signe et le sacrement de l’inépuisable grâce de l’opération de notre salut.

Stat Crux dum volvitur orbis. Jésus-Christ convoque toujours le monde au pied de sa Croix. Bon gré, mal gré, nous revenons tous rôder au Calvaire, fidèles ou persécuteurs, hantés par ce mystère... Ô Jésus, ils sont peu nombreux, aujourd’hui, ceux qui demeurent au pied de votre Croix, tandis que le monde sombre dans l’apostasie, et qu’à Jérusalem vos ennemis célèbrent un sabbat infernal.

Seule, votre Mère demeure fidèle, aimante, seule gardienne du dogme de la foi, Cœur intact et ardent de l’Église, dont le Corps est ravagé.

Vous avez voulu, en ces temps qui sont les derniers, manifester sa gloire en nous confiant tout spécialement à Elle, pour nous sauver de l’enfer à l’unique condition que nous embrassions la dévotion à son Cœur Immaculé, que nous compatissions à ses souffrances qui nous méritent une telle miséricorde.

Et c’est Elle qu’aujourd’hui, nos sanhédrites, nos grands prêtres viennent encore humilier, outrager. Elle, la Mère du Crucifié, parce qu’ils ne veulent pas qu’Elle règne sur eux.

Ô Marie, ô Mère chérie, vous seule avez les paroles et les promesses de la vie éternelle, parce que Jésus a tout remis entre vos mains. Ah ! gardez-nous fidèle à demeurer auprès de vous, souffrant et priant en vous et pour vous. Serrez ferme notre main dans la vôtre, pour que nous ne trahissions pas, en cette heure de ténèbre, mais que nous restions avec vous jusqu’à l’aube radieuse du troisième jour...

Nous, du moins, nous voulons vous aimer, compatir et vous consoler... Ô Immaculée Corédemptrice, notre unique espérance ! (à suivre)

Frère Bruno de Jésus-Marie