CAMP NOTRE-DAME DE FATIMA 2025 
La grande nouvelle du règne de l’Immaculée

Troisième conférence : 
Notre-Dame de la Salette : La Vierge contre-révolutionnaire – Les secrets révélés

Le Sanctuaire de Notre-Dame de la Salette

LE SANCTUAIRE DE NOTRE-DAME DE LA SALETTE

« Voyez les agitations populaires, les trônes renversés, l’Europe bouleversée, la société sur le penchant de sa ruine.

« Qui nous a préservés, qui nous préservera encore de plus grands malheurs, si ce n’est Celle qui est venue d’en haut sur nos montagnes, pour y planter en quelque sorte un signe de ralliement et de salut, un phare lumineux, un serpent d’airain vers lequel les âmes pieuses ont levé les yeux pour détourner le courroux céleste et nous guérir de blessures incurables ! » (Mgr de Bruillard, dans le diocèse duquel Notre-Dame a voulu apparaître)

LES précédents articles (parus dans le numéro  de novembre) ont mis en lumière les premières étapes du grand dessein de miséricorde des Saints Cœurs de Jésus et Marie. Notre-Seigneur a voulu sauver les âmes de l’enfer et embraser la terre de son Amour par le culte de son Sacré-Cœur. Mais parce qu’on a refusé une telle offre, le châtiment est venu, terrible, ce fut la révolution “ satanique dans son essence ”, en deux étapes, 1789 puis 1830. C’est alors que la Sainte Vierge apparut à sainte Catherine Labouré, manifestant que Dieu avait tout remis entre ses mains, « le monde entier, particulièrement la France, et chaque âme en particulier », pour y écraser la tête du serpent.

Et depuis, jusqu’en 1846, date de la deuxième intervention de Notre-Dame, que nous allons voir, que s’est-il donc passé ?

Louis-Philippe d’Orléans, l’usurpateur, règne désormais comme “ roi des Français ”, se prétendant le représentant du peuple, et non plus le lieutenant du Christ. Son gouvernement est donc ouvertement laïc, et sourdement anticlérical, dans la ligne de la révolution de 1830. Les évêques et les prêtres légitimistes sont persécutés, le budget des cultes est progressivement réduit. Louis-Philippe fait une vaste épuration dans l’administration dont les places sont prises par des républicains. Bientôt s’étalent au grand jour des livres et des pièces de théâtre blasphématoires, infâmes envers le clergé.

Ainsi, la France n’est plus une Chrétienté, comme sous la Restauration, mais au contraire, la pression sociale est désormais hostile à la religion, à l’Église, dont le clergé est ouvertement moqué, humilié. La conséquence inévitable sur le peuple fidèle est un attiédissement de la foi, un délaissement de la pratique religieuse, souvent à cause du respect humain.

De plus, le nouveau gouvernement laisse le champ libre aux grands bourgeois et financiers pour un enrichissement effréné, par l’industrialisation, sur le modèle anglais. Mais cela se fait au prix de l’exploitation ouvrière de pauvres gens arrachés à leur terre, à leur paroisse, qui travaillent douze heures par jour, sept jours sur sept, pour un salaire insuffisant. Inéluctablement, ils commencent par perdre leur religion, pour tomber finalement dans la révolte ouvrière.

Dans l’Église, la Révolution a donné naissance à un vaste courant libéral, animé d’abord par Lamennais jusqu’à sa condamnation en 1834, puis continué par ses disciples, Lacordaire et Montalembert. Ils prétendent servir l’Église, en croyant séduire ses persécuteurs. Ils se rallient donc aux “ idées modernes ”, révolutionnaires ! en se consacrant spécialement à la revendication de la liberté, sous toutes ses formes. Pratiquement, ils renoncent donc au règne intégral de Notre-Seigneur, pour travailler au triomphe de cette nouvelle idole.

Telle est la triste situation de la France quand, le 19 septembre 1846, Notre-Dame intervient de nouveau.

L’APPARITION

En ce samedi des Quatre-temps, veille de la fête de Notre-Dame des Sept-Douleurs, deux enfants, Maximin Giraud, onze ans, et Mélanie Mathieu, quinze ans, gardaient les vaches de leur maître sur la montagne de La Salette, en Dauphiné. Tous deux enfants de famille pauvre, à peine catéchisés, ils ne se connaissaient que depuis l’avant-veille. Comme traits communs, ils avaient leur origine, leur ­ignorance, leur innocence et même leur profession. Mais leur carac­tère était bien différent : autant le petit garçon était tur­bulent, léger, expansif, autant la petite fille était maussade, ­mé­lancolique et peu communicative.

Vers midi, sur l’ordre de Pierre Selme, le maître de Maximin, et au son de l’Angélus, ils mènent boire leurs vaches à la Fontaine des Bêtes ; puis, ils remontent jusque dans le vallon où coule la Sézia, qui est alimentée par la Fontaine des Hommes, située un peu plus haut ; et près de la Petite Fontaine, alors tarie, ils prennent leur frugal repas, ­rangent leurs panetières, se séparent et, contrairement à leur habitude, s’endorment sur le gazon, à quelque distance l’un de l’autre.

Vers deux heures et demie, Mélanie se réveille la première et réveille Maximin : tous deux gravissent le plateau qui domine le ravin ; et, une fois sur le Collet, ils aperçoivent leurs vaches couchées sur le versant du Gargas. Ils redescendent, tranquillisés, lorsque Mélanie pousse un grand cri à la vue d’un globe de lumière qui rayonnait et dont l’éclat emplissait tout le vallon... Cependant, Maximin était accouru ; et, devant l’effroi de sa petite com­pagne qui avait laissé choir sa houlette, il lui dit : « Garde ton bâton... S’il nous fait quelque mal, je lui jetterai un bon coup ! »

À ce moment, la clarté mystérieuse s’entrouvrit, et une « belle Dame » apparut, assise sur des pierres superposées, dans l’attitude d’une inconsolable affliction, la tête dans ses mains et les coudes sur ses genoux... Bientôt, elle se lève et, faisant quelques pas vers les petits bergers, leur dit : « Avancez, mes enfants, n’ayez pas peur : je suis ici pour vous conter une grande nouvelle. »

Rassurés, ils s’ap­prochent de la Dame, qu’ils peuvent maintenant contempler à leur aise. Elle porte une coiffure brillante avec un diadème de rayons et une couronne de roses. Un fichu blanc jeté sur les épaules et croisé autour de la ceinture, avec une guirlande de roses pour bordure. Robe de lumière, toute blanche avec paillettes d’or. Sur la poitrine et plutôt à l’intérieur, un crucifix, avec tenailles et marteau « qui tenaient sans rien pour les attacher » ; mais, pour soutenir la croix et son Christ, il y avait une petite chaîne passée autour du cou ; puis, une seconde chaîne, en forme de galons et sans anneaux, semblait de son poids très lourd, écraser les épaules comme pour symboliser le fardeau de nos péchés. Enfin, c’était un tablier jaune d’or, – humble livrée de la servante du Seigneur –, et des souliers blancs avec boucles d’or et touffes de roses...

Le visage était divinement beau, mais empreint d’une profonde tristesse. Maximin n’en vit que le front et le menton : le reste était trop éblouissant. Il devina bien, pourtant, l’affliction de la Belle Dame, comme « une maman que ses enfants auraient battue et qui se serait ensauvée dans la montagne pour pleurer à son aise ! » disait-il. Mélanie, elle, put voir les larmes qui tombaient de ses yeux pour s’évanouir dans la lumière comme des étincelles de feu. De plus elle observa, non seulement que les mains étaient croisées l’une sur l’autre dans les manches de la robe, mais que les oreilles aussi étaient cachées, comme les cheveux, sous une sorte de coiffe ou de bandeau.

Et la “ Belle Dame ” se mit à parler, d’abord en français, puis en patois :

« Si mon peuple ne veut pas se soumettre, je suis forcée de laisser aller le bras de mon Fils. Il est si lourd et si pesant que je ne puis plus le retenir. Depuis le temps que je souffre pour vous ! Si je veux que mon Fils ne vous abandonne pas, je suis chargée de le prier sans cesse pour vous ; et vous autres, vous n’en faites pas cas ! Vous aurez beau prier, beau faire, jamais vous ne pourrez récompenser la peine que j’ai prise pour vous !

« Je vous ai donné six jours pour travailler, je me suis réservé le septième et on ne veut pas me l’accorder. C’est ça qui appesantit tant le bras de mon Fils ! Ceux qui conduisent des charrettes ne savent pas jurer sans mettre le nom de mon Fils ! Ce sont les deux choses qui appesantissent tant le bras de mon Fils.

« Si la récolte se gâte, ce n’est rien qu’à cause de vous autres ; je vous l’ai fait voir, l’année dernière, par les ­pommes de terre : vous n’en avez pas fait cas ; c’est au contraire, quand vous en trouviez de gâtées, vous juriez, vous mettiez le nom de mon Fils. Elles vont continuer à pourrir et à Noël il n’y en aura plus. »

À cet endroit du discours, Mélanie regarde Maximin comme pour lui demander ce que signifiaient ces paroles. Mais la Sainte Vierge leur dit aussitôt : « Ah ! vous ne comprenez pas le français, mes enfants : je vais vous le dire autrement. » Elle reprend alors, en patois de Corps, ces der­nières phrases : « Si la récolte se gâte... » Puis Elle continue : « Si vous avez du blé, il ne faut pas le semer. Tout ce que vous sèmerez, les bêtes le mangeront, et ce qui viendra tombera en poussière quand vous le battrez. Il viendra une grande famine ; avant que la famine vienne, les enfants au-dessous de sept ans prendront un tremblement et mourront entre les bras des per­sonnes qui les tiendront, les autres feront pénitence par la famine. Les noix deviendront mauvaises et les raisins ­pourriront. »

Après ces mots, la Sainte Vierge continue de parler ; mais, tout en voyant le mouvement de ses lèvres, Mélanie ne l’entend plus ; Maximin reçoit un secret. Bientôt après, la Belle Dame confie aussi à Mélanie un secret, et Maximin cesse de l’entendre parler.

Puis Elle continue, pour les deux bergers : « S’ils se convertissent, les pierres et les rochers se changeront en monceaux de blé, et les pommes de terre seront ensemencées par les terres. »

« Faites-vous bien votre prière, mes enfants ? » leur demanda-t-elle ensuite. Ils répondirent : « Pas guère, Madame. » – « Ah ! mes enfants, il faut bien la faire soir et matin ; quand vous ne pourrez pas mieux faire, dites seulement un Pater et un Ave Maria ; et quand vous aurez le temps, il faut en dire davantage.

« Il ne va que quelques femmes un peu âgées à la messe ; les autres travaillent, tout l’été, le dimanche, et l’hiver, quand ils ne savent que faire, ils ne vont à la messe que pour se moquer de la Religion ; le Carême, ils vont à la boucherie comme des chiens ! »

Puis la Sainte Vierge ajouta : « N’avez-vous jamais vu du blé gâté, mes enfants ? » Tous deux répondirent : « Oh ! non, Madame. » Alors, elle dit à Maximin : « Mais toi, mon enfant, tu dois bien en avoir vu une fois, vers la terre du Coin, avec ton père. Le maître de la pièce a dit à ton père : “ Venez voir comme mon blé se gâte. ” Vous y allâtes tous les deux. Ton père prit deux ou trois épis dans sa main, les froissa et tout tomba en poussière ; puis, quand vous reveniez et n’étiez plus qu’à une demi-heure de Corps, ton père te donna un morceau de pain en te disant : “ Tiens, mon enfant, mange encore du pain cette année, car je ne sais qui en mangera l’année ­prochaine, si le blé continue encore (à se gâter) comme ça.  » Et Maximin répondit : « C’est bien vrai, Madame, je ne me le rappelais pas. »

La Sainte Vierge termina son discours par ces paroles prononcées en français : « Eh bien ! mes enfants, vous le ferez passer à tout mon peuple. » Et laissant les bergers, elle traverse le torrent de la Sézia et sans se retourner vers eux, elle dit une seconde fois : « Eh bien ! mes enfants, vous le ferez passer à tout mon peuple. » Puis, elle se dirige vers le plateau, d’où elle s’élève au-dessus de terre, pour regagner ensuite les hauteurs sereines du Paradis... Le soir, lorsque le soleil fut sur son déclin, Maximin et Mélanie s’empressèrent de rentrer, avec leurs troupeaux, au village des Ablandens, et racontèrent à leurs maîtres tout ce qu’ils avaient vu et entendu sur la montagne.

Nous allons maintenant, dans une première partie, étudier le message “ officiel ” de Notre-Dame de La Salette, et le pèlerinage qui en est issu. Notre fil directeur sera l’intuition de notre Père sur l’ortho­dromie mariale au dix-neuvième siècle : par ses apparitions, la Sainte Vierge vient porter remède aux funestes conséquences de la Révolution, pour sortir son peuple de l’abîme où il est tombé. Dans une deuxième partie, nous nous pencherons sur les “ secrets ” – vrais ou prétendu tels – de Notre-Dame de La Salette.

NOTRE-DAME DE LA SALETTE, MÉDIATRICE ET CORÉDEMPTRICE

Relisons ce message :

« Si mon peuple ne veut pas se soumettre, je suis forcée de laisser aller le bras de mon Fils. Il est si lourd et si pesant que je ne puis plus le retenir ! Depuis le temps que je souffre pour vous ! Si je veux que mon Fils ne vous abandonne pas, je suis chargée de le prier sans cesse pour vous... »

Notre-Dame de la SaletteCette plainte saisissante, convertissante, de notre Reine dévoile les vertigineux mystères de notre rédemption et de sa médiation. Elle retient, à grand-peine, le bras de son Fils outragé par les péchés des hommes, dont la Sainteté de Justice exige un châtiment proportionné. Elle est notre Mère et notre Avocate, ainsi que l’Église l’a toujours professé : Elle s’interpose pour épargner le châtiment à ses enfants. Mais Elle en paie le prix : Depuis le temps que je souffre pour vous ! Elle souffre bien pour nous, comme lors de la Passion de son Fils, et non pas seulement par nous, comme Elle l’a montré à Fatima. Il semble donc que ses souffrances, au Ciel, ont une valeur rédemptrice, corédemptrice, comme sa Compassion aux souffrances de son Fils sur le Calvaire.

Une telle révélation est incompatible avec la prétendue théologie postconciliaire. Le cardinal Fernandez la critique ouvertement dans la note Mater Populi fidelis : il dénonce les expressions qui présentent Marie « comme une sorte de  paratonnerre  devant la justice du Seigneur, comme si Marie était une alternative nécessaire à l’insuffisante miséricorde de Dieu » ( n° 37. c).

Mais la Sainte Vierge ne rivalise pas avec le Bon Dieu ! Elle est conçue par Lui, selon son bon plaisir, au cœur de ses propres relations trinitaires. Notre-Dame de La Salette dit bien qu’Elle est chargée de prier pour nous. C’est donc une mission qui lui est confiée par notre très chéri Père céleste, pour retenir le bras de son propre Fils, afin que les bienfaits de la Rédemption, qu’Il a lui-même obtenus, ne soient pas perdus. Elle est chargée de « tout l’ordre de la miséricorde » comme disait saint Maximilien-Marie Kolbe ; Elle est « toute miséricordieuse » comme Elle l’a révélé à Pellevoisin. Alors que son Fils, Notre-­Seigneur, doit satisfaire la rigueur implacable de la Sainteté de Justice.

Une telle intercession de la Vierge Marie n’est possible que par l’inhabitation en Elle du Saint-Esprit, le second Paraclet (avocat), qui « intercède pour nous avec des gémissements ineffables » (Rm 8, 26). Elle est sa Colombe, son sanctuaire... Depuis quand ? Ne dit-Elle pas : « Je vous ai donné six jours pour travailler » ? Elle était donc déjà auprès de Dieu lorsqu’Il donna sa Loi à Moïse, Compagne de toutes ses œuvres de Création et de Providence, sanctuaire de sa Sagesse, ainsi que nous la montre le Livre des Proverbes (8, 22). C’est un argument décisif en faveur de la thèse de la préexistence de son âme avant tous les siècles, comme l’expliquait notre Père.

LA VIERGE CONTRE-RÉVOLUTIONNAIRE.

« Si mon peuple ne veut pas se soumettre... »

Le Père Giraud, qui fut le deuxième supérieur général des Missionnaires de La Salette, commentait ainsi ces premiers mots de Notre-Dame :

« Il est évident pour quiconque ouvre les yeux, qu’un mal effrayant a gagné notre société moderne, c’est l’esprit de révolte, c’est le mépris de l’autorité et une aspiration violente vers l’indépendance absolue, la liberté sans limites. Ce mal est grand, et on dirait qu’il s’étend toujours davantage sur le corps social, pour y dévorer tous les principes de la vie. [...]

« “ Si mon peuple ne veut pas se soumettre... ” Tout est dans ce mot. Si mon peuple, c’est-à-dire, toutes les nations, la multitude des âmes rachetées, qui est le peuple de Marie, ne veut pas se soumettre, à qui ? À Dieu d’abord, à sa volonté sainte, que les commandements nous font connaître ; mais en même temps, à toute puissance qu’il a établie et qui le représente, à la sainte Église, aux puissances de ce monde [...]. Qu’elle est pleine d’enseignements, cette simple parole de l’auguste Marie ! Elle nous menace ; mais elle nous instruit. » (La pratique de la dévotion à Notre-Dame de La Salette, 1863)

L’insoumission, la révolte contre Dieu, contre l’Église, voilà bien l’esprit, la racine même de la Révolution, que Notre-Dame vient réprouver, ainsi que ses conséquences : les blasphèmes et le travail du dimanche, « les deux choses qui appesantissent tant le bras de mon Fils ! »

Pourquoi ? Parce que ce sont des outrages publics envers Dieu, des négations ostensibles de sa Souveraineté, scandale pour ceux qui croient ! Depuis 1789 et 1830, le blasphème se répandait partout, sous bien des formes, que ce soit dans les journaux ou dans la bouche des hommes d’État. Les critiques et les vexations contre l’Église et contre les prêtres, qui représentent l’autorité de Dieu, furent innombrables, parce que l’esprit même de la Révolution est blasphématoire. En temps de Chrétienté, l’État punissait de tels délits : Charles X avait fait une loi punissant le sacrilège, que le nouveau gouvernement de Louis-Philippe s’était hâté d’abolir.

Quant au travail du dimanche, généralisé dans les usines depuis la Révolution, il était inconcevable sous l’Ancien Régime ! L’impiété publique suscitée par la Révolution était donc le principal motif de la Colère de Dieu contre la France, qui méritait un châtiment tel que même Notre-Dame ne pouvait plus l’épargner à son peuple : « Je suis forcée de laisser aller le bras de mon Fils. Il est si lourd et si pesant que je ne puis plus le retenir ! »

 UN RECOMMENCEMENT DE L’HISTOIRE RELIGIEUSE ”.

Notre-Dame demande donc avant tout que son peuple se soumette à la Loi de Dieu. Ne pas blasphémer, sanctifier le jour du Seigneur, ce sont tout simplement les premiers commandements du Décalogue qu’Elle vient rappeler, sous peine de châtiments terrestres : une grande famine, une épidémie, la perte des récoltes. Sa promesse, conditionnée par notre conversion, emprunte le même langage biblique, et évoque l’avènement des temps messianiques : « les pierres et les rochers se changeront en monceaux de blé, et les pommes de terre seront ensemencées par les terres ».

C’est la morale de l’Alliance, sévère, mais juste et sainte, que la Sainte Vierge vient rappeler, expliquait notre Père (on retrouve toute son explication dans le numéro sur La Salette, CRC n° 324, juillet-août 1996). Sa leçon est simple, prosaïque : si vous continuez d’offenser Dieu, vous serez châtiés, vous souffrirez ! C’est un discours d’Ancien Testament, certes, mais la leçon est éternelle... de Moïse à Notre-Seigneur, et de l’Apocalypse à Fatima. Malheur à ceux qui ne l’entendent pas ! Ce sont les fondamentaux de la religion, de la religion de nos pères, que le Ciel vient recommander et qui jamais ne passera.

Cependant, l’étonnement majeur qu’éprouvait notre Père en lisant cela était suscité par la première personne du singulier : « JE vous ai donné six jours pour travailler, JE me suis réservé le septième et on ne veut pas ME l’accorder. » N’est-ce pas curieux ? C’est la reprise littérale d’un verset de l’Exode (31, 15). La Vierge Marie semble prendre la place de Dieu ; Elle trône et légifère, reprenant à son compte sa Loi comme si c’était la sienne propre ; le peuple de Dieu est devenu son peuple... C’est donc la révélation commencée en 1830 à la Rue du Bac, où Elle a manifesté qu’Elle tient le monde entre ses mains, qui continue. Elle se plaint, d’ailleurs, que l’on n’ait pas fait cas de ce message, de sa médiation universelle qu’Elle a manifestée seize ans plus tôt, dans ces apparitions : « Je suis chargée de prier sans cesse pour vous, et vous autres, vous n’en faites pas cas ! »

Tout lui a été remis, parce qu’il faut tout reprendre depuis le début. C’est une sorte de recommencement de l’histoire religieuse de l’humanité et donc la promesse d’un renouvellement de toutes choses... qui doit être révélé par d’autres apparitions, toujours de la Sainte Vierge, « chargée » de sauver son peuple de l’esclavage de Satan où il est tombé par la Révolution, puis de le conduire, de l’éduquer, pour le faire bénéficier d’un renouvellement de l’Alliance, en lui dévoilant progressivement les volontés de son Fils sur Elle.

Ainsi s’explique le caractère austère, rude, du fait de La Salette : cette apparition ne se suffit pas à elle-même. Dans le plan de Dieu, elle marque l’attente de “ l’épiphanie ” de l’Immaculée, à Lourdes d’abord, puis à Fatima suprêmement. En comparaison desquelles, l’apparition de la Vierge à La Salette paraît l’antitype, la préfiguration, l’ombre de l’Ancien Testament avant la lumière du Nouveau.

LA CONVERSION DU PEUPLE DE NOTRE-DAME

Sans attendre tout le dévoilement de son grand dessein, pour convertir son peuple, Notre-Dame de La Salette n’a pas craint de parler des récoltes qui se gâtent, des noix qui pourrissent en punition des blasphèmes des charretiers. Cette “ pastorale ” de la Sainte Vierge fut très bien comprise : les paysans de La Salette, du bourg voisin de Corps et des villages environnants furent les premiers à se convertir, à se soumettre à ses demandes, et à pèleriner sur sa sainte montagne.

Il faut dire aussi que les châtiments annoncés par la Sainte Vierge ne tardèrent pas à s’accomplir, figeant le rire sarcastique de ceux qui se moquaient de “ la Vierge paysanne ”. L’année 1847 fut une année de famine, faisant plus de cent mille victimes en France et un million en Europe, aggravée par deux épidémies de ­choléra. Au dire des témoins, sur cinq personnes qui montaient à La Salette en 1856, trois étaient en deuil.

Sur le lieu de l’apparition, Notre-Dame fit de nombreuses guérisons miraculeuses, par l’eau d’une fontaine tarie, qui jaillissait de nouveau depuis l’apparition. Mais le miracle le plus saisissant, aux yeux de l’autorité ecclésiastique, fut la conversion et l’élan de dévotion spontané qui parut dans toute la région. L’abbé Mélin, curé de Corps, écrivait à un confrère deux mois après l’apparition, à laquelle il n’osait encore croire : « La semaine dernière, 6 à 700 personnes ont fait cette pénible ascension ; et mardi 17, on y a compté 600 personnes à la fois. La montagne semble s’abaisser et les aspérités disparaître. Enfants, vieillards, femmes âgées, femmes enceintes, tous s’y précipitent, arrivent suants et haletants, boivent à la fontaine, et redescendent joyeux et contents. Leur prière et leur confiance assainissent ces eaux ; elles ne font de mal à personne. »

Six jours plus tard, le 24 novembre, l’eau de cette fontaine de La Salette accomplit le premier miracle de Notre-Dame, la guérison de Marie Laurent.

« Nos hommes, même ceux à conscience robuste, vainqueurs du respect humain, oublient ce qu’ils sont, pour devenir chrétiens. » (cf. Jean Stern, La Salette documents authentiques, t. I, p. 127)

Cette foule était montée en procession organisée, priant le long du chemin, mais sans clergé, puisque l’évêque de Grenoble, Mgr de Bruillard, avait ordonné à son clergé de ne pas paraître cautionner ce nouveau pèlerinage tant qu’une enquête et un mandement n’auraient pas sanctionné la surnaturalité du fait. À son commencement, l’élan de conversion de la région fut donc purement spontané, populaire, même si l’Évêque et la majeure partie de ses prêtres crurent rapidement à la réalité de l’apparition.

Au même moment, un autre curé de la région pouvait écrire :

« Aujourd’hui déjà, tous les vieux pécheurs du canton ont plié et fléchi le genou devant la petite croix de bois plantée sur le lieu de l’apparition. Tout annonce un grand changement dans notre pays. » (Mgr Giray, Les miracles de La Salette, t. II, p. 186)

Septième anniversaire de l’apparition, le 19 septembre 1853.

Cette lithographie représentant les foules présentes lors du septième anniversaire de l’apparition, le 19 septembre 1853 nous donne une idée de ce que furent les premiers pèlerinages, dont Mgr de Bruillard écrivait, dans son mandement de reconnaissance de l’apparition :

« Un autre fait qui nous a paru tenir du prodige, c’est l’affluence à peine croyable et cependant au-dessus de toute contestation, qui a eu lieu sur cette montagne à diverses époques, mais spécialement au jour anniversaire de l’apparition, affluence devenue plus étonnante et par l’éloignement des lieux, et par les autres difficultés que présente un tel pèlerinage. »

Le pèlerinage prit donc rapidement une très grande ampleur. Pour le premier anniversaire de l’apparition, le 19 septembre 1847, près de mille personnes passèrent la nuit en plein air, sur la montagne, malgré la pluie et le froid, priant sans interruption. Pour la grand-messe, ils furent au moins soixante mille, enchaînant litanies, chapelets, cantiques... Bientôt, on vint de toute la France, puis de toute l’Europe. Et cet afflux de pèlerins traduisait une réelle conversion, un retour à la pratique religieuse.

C’est le premier fruit, la première grâce que Notre-Dame de La Salette était venue donner : la conversion, la soumission à ses volontés, à la Loi divine.

Évidemment, le démon ne pouvait pas laisser faire cela impunément. Dès que le fait de La Salette fut connu, des journaux anticléricaux firent paraître des articles moqueurs, blasphématoires. Des miracles, en plein dix-neuvième siècle, et puis quoi encore ! Pire, des journalistes catholiques, mais libéraux et démocrates, y firent écho, comme dans le Constitutionnel, qui était considéré comme le journal du gouvernement. Ils se moquaient de ces prétendus miracles inadmissibles à des esprits éclairés, qui “ faisaient du tort à la religion ”, et qui « pourraient donner lieu aux conséquences les plus déplorables parmi les populations ignorantes » ! (cf. Stern, op. cit., p. 261)

L’administration en vint même à prendre des mesures contre Notre-Dame de La Salette, à Paris, Amiens, Angers, en sanctionnant la vente de brochures racontant l’apparition. Les membres du clergé qui craignaient de déplaire au gouvernement ou de s’attirer des critiques dans les journaux étaient donc enclins à mépriser le fait de La Salette. D’autant plus que le scepticisme gagnait certains esprits, au sein même de l’Église.

SŒUR MARIE DE SAINT-PIERRE ET L’ŒUVRE RÉPARATRICE

Cette opposition de certains ecclésiastiques eut des conséquences tragiques, notamment pour empêcher le deuxième “ fruit ” que Notre-Dame de La Salette est venue susciter : l’esprit de réparation. Pour le comprendre, il faut nous transporter au carmel de Tours, où, au même moment et depuis plusieurs années, sœur Marie de Saint-Pierre recevait de nombreuses communications de Notre-Seigneur. Ces révélations forment une véritable chronique des relations du Ciel et de la terre pour cette période.

Depuis 1843, Notre-Seigneur entretenait sa confidente du châtiment que mérite la France, « qui a sucé les mamelles de sa miséricorde jusqu’au sang », et ne cesse de l’outrager, spécialement par ses blasphèmes et le travail du dimanche. Sa justice ne peut plus supporter tant d’outrages contre son Père, contre l’Église : « La terre est couverte de crimes ! Lui dit-il. Ces péchés sont montés jusqu’au trône de Dieu et provoquent sa colère, qui se répandra si on n’apaise sa Justice ; dans aucun temps ces crimes n’ont monté si haut. » (Vie de la sœur Saint-Pierre par l’abbé Janvier, 1896, p. 150)

Comme ultime moyen de salut, Il demandait très précisément la fondation d’une œuvre, dont les associés prieraient en réparation pour ces crimes, feraient tout leur possible pour les empêcher, et s’appliqueraient à consoler Sa Sainte Face outragée. Le péché s’étalant publiquement dans toute la France, Notre-Seigneur exigeait que réparation fût faite publiquement dans chaque ville du Royaume.

Il ordonna à sœur Saint-Pierre d’en faire part à son évêque, Mgr Morlot. Mais ce dernier jugea que ces demandes n’étaient pas opportunes et risquaient de le compromettre vis-à-vis du gouvernement anticlérical de Louis-Philippe.

Les mois, les années passèrent, et Mgr Morlot ne faisait rien, malgré les avertissements de plus en plus pressants que Notre-Seigneur adressait à sœur Marie de Saint-Pierre. Faute de cette réparation, le châtiment devait tomber, c’est pourquoi Notre-Seigneur appliqua sa confidente à réparer le plus possible elle-même, ce qu’elle fit avec sa communauté et quelques proches, dont le “ saint homme de Tours ”, Monsieur Dupont. Une de ces révélations montre bien que cette œuvre réparatrice était par excellence le moyen de la contre-révolution : « Notre-Seigneur m’avait inspiré de me présenter à Lui au nom de la France, et de le recevoir dans le royaume de mon âme en qualité de Roi, lui offrant ma communion en esprit de réparation pour les crimes dont notre nation est coupable. » (ibid., p. 184)

Il demande donc à sœur Marie de Saint-Pierre de faire, en son âme, ce qu’Il ne peut obtenir publiquement, des autorités ecclésiastiques et civiles : que tous se soumettent à son Règne, et fassent réparation.

En 1846, après bien des atermoiements, l’archevêque de Tours ne voulait toujours rien entendre. Sœur Saint-Pierre en mourait d’angoisse, au fond de son carmel : « Hâtons-nous d’apaiser notre Dieu ; car je vois sa Justice prête à déborder ; le bras du Seigneur est levé ! »

Le premier signe du châtiment fut le débordement de la Loire, qui causa de grands ravages dans la ville de Tours, tandis que la révolution qui éclata deux ans plus tard commençait à gronder. « J’aurais voulu, disait-elle si cela eût été possible, proclamer l’œuvre de réparation par toute la France, en faisant connaître à ma patrie les malheurs qui la menaçaient. »

NOTRE-DAME VIENT INSTAURER LA RÉPARATION.

La solution vint enfin lorsque sœur Marie de Saint-Pierre s’en remit à la Sainte Vierge, en récitant le chapelet tous les jours pour le salut de la France et l’établissement de la Réparation dans toutes les villes du royaume. Elle écrivait alors : « Ah ! que je souffre d’être seule dépositaire d’une chose qui est si importante, et que je suis obligée de garder dans le silence du cloître ! Vierge sainte, apparaissez dans le monde à quelqu’un, et faites-lui part de ce qui m’est communiqué au sujet de la France ! »

En septembre 1846, enfin, Notre-Seigneur lui dit : « Ma Mère a parlé aux hommes de ma colère ; Elle veut la fléchir, Elle m’a montré son sein et m’a dit :  Voilà le sein qui vous a nourri, laissez-lui répandre des bénédictions sur mes autres enfants.  Alors Elle est descendue, pleine de miséricorde, sur la terre ; ayez donc confiance en Elle. » (ibid., p. 256)

Il s’agit bien de l’apparition de Notre-Dame de La Salette, de ses sévères avertissements et de ses reproches à l’égard des blasphèmes et du travail dominical. Ce message, qui fut rapidement connu dans toute la France, était une confirmation retentissante des révélations faites à sœur Marie de Saint-Pierre, mais Mgr Morlot n’en fut toujours pas ébranlé.

Heureusement l’évêque de Langres, Mgr Parisis, touché par les avertissements de Notre-Dame, ayant eu aussi connaissance des révélations faites à la carmélite de Tours, accepta de fonder l’Œuvre réparatrice dans son diocèse. En juillet 1847, on sollicita la faveur de Pie IX, qui accorda des indulgences, érigea l’association en archiconfrérie, et tint à en être le premier associé. Dès lors, l’œuvre se répandit rapidement dans de nombreux diocèses, suscitant un grand mouvement de réparation dans toute la France. En 1854, Mgr Ginouilhac, successeur de Mgr de Bruillard sur le siège de Grenoble, écrivait que l’institution de cette Œuvre Réparatrice était l’un des meilleurs fruits de l’apparition de Notre-Dame de La Salette : « Son influence s’est fait sentir là même où cette œuvre n’a pas été établie, et aujourd’hui, un mouvement général agite la France en ce sens ; il gagne de jour en jour nos villes les plus considérables. » Et Notre-Seigneur dit à sœur Marie de Saint-Pierre que la fondation de cette œuvre si nécessaire à la France et sa bénédiction par Rome étaient des grâces obtenues par la Sainte Vierge, « parce qu’Il avait tout remis entre ses mains, et qu’Il voulait que ce soit Elle qui ait l’honneur de donner ce gage nouveau de sa miséricorde » (p. 306).

Pourtant, Notre-Seigneur n’était pas encore satisfait, parce que dans l’archiconfrérie, il n’était pas fait mention explicite de ses demandes, qui n’étaient donc pas toutes accomplies. L’obstacle était toujours Mgr Morlot, qui refusait de se prononcer sur la surnaturalité des communications faites à sœur Marie de Saint-Pierre. Les autres évêques, dont celui de Langres, ne pouvaient donc pas faire état de ces révélations “ privées ”, non reconnues par l’ordinaire du lieu. Une lettre remarquable de l’abbé Mélin, curé de Corps, à Monsieur Dupont, témoigne de leur incompréhension envers ces réticences de la hiérarchie, et de leur angoisse à la pensée du châtiment qu’elles attirent sur la France (cf. Stern, op. cit., t. II, p. 181).

Ce châtiment advint avec la Révolution de 1848, mais il fut tempéré grâce à ce qui avait été déjà accompli pour instaurer l’Œuvre de la Réparation, comme Notre-Seigneur le précisa lui-même à sœur Marie de Saint-Pierre un jour : la France « qui devait être réduite en cendres ne sera que légèrement blessée ».

LA FRANCE SAUVÉE PAR LA VIERGE MARIE.

Dès lors, la confidente du Ciel eut de nombreuses révélations sur la miséricorde obtenue pour la France grâce à la Maternité divine de la Vierge Marie, qui pouvait désormais y répandre ses grâces, manifestées sous la figure de son lait virginal (cf. encart page suivante). Notre-Dame expliqua aussi à sœur Saint-Pierre qu’à La Salette, Elle était venue annoncer des châtiments qui seraient tombés infailliblement, sans sa médiation (p. 371). Mais parce qu’Elle s’est interposée, dès qu’Elle eut obtenu la fondation d’une œuvre réparatrice, même imparfaite, Elle a pu obtenir miséricorde, tempérer le châtiment de la Révolution, et répandre ses grâces sur la France. Pour nous aujourd’hui, c’est très encourageant de voir comment Notre-Dame a réussi à surmonter “ l’obstacle ecclésiastique ”... à condition qu’on la prie !

Il est remarquable que Mgr de Bruillard, qui ne pouvait connaître ces révélations, ait pourtant compris que La Salette avait eu une grande importance dans la crise politique que la France traversait. Peu de temps après la révolution de 1848, dont les émeutes mirent fin au règne de Louis-Philippe, tandis que Pie IX était contraint à l’exil, il écrivait :

« Cette apparition, le 19 septembre 1846, n’a-t-elle pas été comme la préface des plus grands événements ? Voyez les agitations populaires, les trônes renversés, l’Europe bouleversée, la société sur le penchant de sa ruine. Qui nous a préservés, qui nous préservera encore de plus grands malheurs, si ce n’est Celle qui est venue d’en haut sur nos montagnes, pour y planter en quelque sorte un signe de ralliement et de salut, un phare lumineux, un serpent d’airain vers lequel les âmes pieuses ont levé les yeux pour détourner le courroux céleste et nous guérir de blessures incurables ! » (mandement pour le Carême 1852)

Parmi ces “ âmes pieuses ” suppliant Notre-Dame de La Salette, il y eut de nombreux saints, comme Monsieur Dupont, le “ saint homme de Tours ”, mais aussi saint Pierre-Julien Eymard, saint Jean Bosco, saint Eugène de Mazenod... Et, à côté de l’œuvre réparatrice, il y eut de nombreuses autres associations, dont, bien sûr, l’archiconfrérie de Notre-Dame de La Salette, qui fut fondée dès le mois de mai 1848, et comptait déjà dix-huit mille inscrits trois ans plus tard. Ses associés s’appliquaient à réparer et prier pour les pécheurs ; ils avaient repris l’invocation de la Médaille miraculeuse, en l’adaptant selon les paroles de la Sainte Vierge : Notre-Dame de La Salette, Réconciliatrice des pécheurs, priez sans cesse pour nous qui avons recours à vous !

L’apparition a donc suscité un grand mouvement de conversion, de réparation, qui fut un remède, un rempart contre la Révolution, et qui prit encore une plus grande ampleur suite à la reconnaissance canonique de l’Apparition par Mgr de Bruillard.

LA VIERGE MARIE, LÉGATAIRE DES BIENS DE LA RÉDEMPTION

APRÈS l’établissement de l’Œuvre  de la Réparation, sœur Marie de Saint-Pierre eut de nombreuses communications sur la Maternité de la Vierge Marie, qui ravissaient notre Père.

Médiation universelle :

« J’ai encore été éclairée sur ce mystère : le Saint-Esprit, du plus pur sang de Marie, avait formé le Corps adorable de notre divin Sauveur. Ce Corps sacré était né de cette tendre Mère, Elle avait des droits sur lui ; c’est pourquoi, après sa mort, Il a été déposé en ses bras maternels. Cet aimable Jésus m’a fait entendre qu’Il avait voulu lui rendre tout ce qu’Il avait reçu d’Elle pour opérer la rédemption du monde. Elle l’avait nourri de son lait très pur ; Jésus, pour la remercier, lui a remis son Sang, dont Il l’a faite dépositaire : oui, Elle était là, au pied de la Croix, afin de recevoir ce dépôt dans le précieux vaisseau de son Cœur maternel ! Marie avait donné à Jésus son Corps adorable, et Jésus le lui a rendu après sa mort, orné de ses glorieuses plaies, afin qu’Elle puisât, dans ces fontaines sacrées, la vie éternelle pour les enfants que son amour lui avait engendrés avant son dernier soupir.

« Oui, Jésus est à Marie avec tous ses trésors, et Marie est aux hommes avec toutes ses tendresses ! Oh ! Qu’elle est grande la miséricorde de cette Mère ! Elle nous tend ses bras bienfaisants et nous invite à puiser le lait de la grâce sur son sein virginal : son Cœur est toujours ouvert pour nous recevoir. »

Petite voie d’enfance :

Un jour, Notre-Seigneur lui dit : « Tant que l’homme est sur la terre, il est dans un état d’enfance ; au Ciel seulement il sera dans l’âge parfait ; c’est pourquoi il doit sans cesse recourir à sa Mère comme un petit enfant. »

« Oui, s’écrie notre carmélite, je le vois clairement dans la lumière de Dieu, l’homme doit sans cesse recourir à la très Sainte Vierge, sa Mère, s’il veut parvenir à l’âge parfait de la vie éternelle. Voilà les deux grands mystères de la maternité de Marie que l’enfant Jésus veut m’apprendre : Marie, Mère de Dieu, Marie, Mère de l’homme. C’est pourquoi Il m’applique continuellement à le considérer au sein de sa Mère, se nourrissant de son lait virginal, afin de m’apprendre par son exemple à recourir à Elle, pour me nourrir du lait de ses vertus. » Ailleurs, elle écrit : « L’Enfant Jésus, si je puis m’exprimer ainsi, a fait des vertus de sa sainte Enfance un bouquet dont il a orné le sein de sa Mère, vertus de douceur, d’humilité, d’innocence, de pureté, de simplicité, que les frères de Jésus, enfantés par Marie au pied de la Croix, doivent venir chercher auprès de leur Mère adoptive. »

Communion réparatrice :

« Voici qu’aujourd’hui Il daigne, par la sainte communion, m’unir à Lui et me faire entrer dans son Cœur adorable, afin que je m’approche du sein virginal de son auguste Mère ; c’est Lui qui me conduit à cette source de grâces et de bénédictions, me disant de puiser le lait de la divine miséricorde dans l’esprit de charité avec lequel Il a puisé lui-même ; car Il a pris ce lait pour tous les hommes, et, pour tous les hommes, Il l’a répandu en versant son Sang sur la Croix. Je dois, à son exemple, m’approprier cette précieuse liqueur sur le sein de Marie, au nom de tous mes frères, et la répandre ensuite sur le monde entier, comme une rosée céleste, pour rafraîchir et purifier la terre dévorée par le feu de la concupiscence et pleine de corruption. »

(Abbé Janvier, op. cit., p. 354)

LA RECONNAISSANCE DE L’APPARITION

L’article exhaustif sur Notre-Dame de La Salette, publié dans la CRC n° 324, juillet-août 1996, raconte les péripéties qui repoussèrent cette reconnaissance jusqu’au 19 septembre 1851 (p. 7-10).

Un premier obstacle vint d’un malheureux événement dû à la légèreté de Maximin, que l’on a appelé “ l’incident d’Ars ”. Contre la volonté de Mgr de Bruillard, le jeune voyant fut emmené à Ars par des gens assez louches, férus de prophéties en tout genre, pour rencontrer le saint Curé. Là, il semble que Maximin, indisposé par l’attention malsaine dont l’entouraient ses amis, échauffés par un vicaire d’Ars qui l’avait traité de menteur, ait dit au Saint qu’il avait menti à propos de l’apparition. Après quoi, saint Jean-Marie Vianney dit, quoiqu’avec beaucoup de prudence, qu’il ne croyait plus à La Salette. Il en revint huit ans plus tard, mais cela fit grand bruit, et tous ceux qui ne voulaient pas croire à l’apparition sautèrent sur l’argument.

Qui étaient ces opposants à l’apparition ?

Les plus virulents étaient quelques prêtres du diocèse de Grenoble, qui multiplièrent les pamphlets, les articles mensongers, et même un mémoire au Pape contre La Salette. Ils s’opposaient frontalement à leur évêque, dont ils ne partageaient pas les convictions réactionnaires : l’un des plus acharnés, l’abbé Déléon, qui fut d’ailleurs sanctionné pour sa conduite scandaleuse, était bonapartiste. L’abbé Kœnig, qui critiqua en chaire le mandement de reconnaissance de l’apparition, était un démocrate aux idées socialistes avancées. Ils n’auraient pas eu d’influence sans le soutien du cardinal de Bonald, archevêque de Lyon, qui multiplia les démarches contre La Salette avec une malice obstinée. C’est principalement à cause de lui que Mgr de Bruillard dut ajourner la reconnaissance de l’apparition, qu’il aurait voulu faire dès 1848.

Parmi les adversaires de Notre-Dame, on trouve aussi le Père Lacordaire, chef de file du mouvement libéral. Avant même l’incident d’Ars, on disait qu’il considérait le fait de La Salette comme « absurde, ridicule, impossible », et qu’il combattait son authenticité (cf. Stern, op. cit., t. II, p. 253). Comme pour le cardinal de Bonald, il est difficile de percer les vraies raisons de son opposition, mais il est certain que tous deux réclamaient et promouvaient la liberté, alors que Notre-Dame de La Salette venait rappeler son peuple à la soumission... Ce n’est pas le même esprit.

Mgr de Bruillard (1765-1860) lui, était un catholique intégral, contre-révolutionnaire et légitimiste, d’autant qu’il avait été aumônier de la guillotine pendant la Terreur. Sa foi, ses convictions étaient en harmonie parfaite avec le message de Notre-Dame, et l’enquête minutieuse qu’il avait menée lui donnait la certitude de la réalité de son apparition. Pour trancher les débats sans fin qui se cristallisaient autour des “ secrets ”, il les fit rédiger aux voyants en 1851, et envoyer à Pie IX. L’avis favorable du saint Pape et celui de membres éminents de la Curie l’encouragèrent à reconnaître l’apparition, malgré l’opposition de l’archevêque de Lyon. Son mandement du 19 septembre 1851 est remarquable, exemplaire, parce qu’il donne à l’intervention de Notre-Dame toute son autorité. Il affirmait que cette apparition « porte en elle-même tous les caractères de la vérité, et que les fidèles sont fondés à la croire indubitable et certaine ». C’est pourquoi « Nous défendons expressément aux fidèles et aux prêtres de notre diocèse de jamais s’élever publiquement, de vive voix ou par écrit, contre le Fait que nous proclamons aujourd’hui, et qui, dès lors, exige le respect de tous. »

Il concluait son mandement : « Nous vous en conjurons, nos Frères bien-aimés : rendez-vous dociles à la voix de Marie qui vous appelle à la pénitence, et qui, de la part de son Fils, vous menace de maux spirituels et temporels, si, restant insensibles à ses avertissements maternels, vous endurcissez vos cœurs. »

Cette reconnaissance solennelle de la hiérarchie suscita un grand enthousiasme dans toute la France, comme un triomphe de la Sainte Vierge sur ses ennemis. Beaucoup d’évêques manifestèrent leur soutien à Mgr de Bruillard, les dons affluèrent de partout pour la construction d’un sanctuaire, et le vieil évêque de Grenoble, après avoir encore fondé les Missionnaires de Notre-Dame de La Salette, put chanter son Nunc dimittis.

À l’avènement de son successeur, Mgr Ginouilhac, l’opposition releva la tête, au point que Pie IX lui-même le pressa d’intervenir. Après une enquête très fouillée, Mgr Ginouilhac publia un autre mandement remarquable, le 4 novembre 1854, prouvant point par point la réalité de l’apparition, répondant à toutes les objections soulevées notamment par la vie des voyants. Après quoi, l’histoire du sanctuaire de Notre-Dame de La Salette continua, impeccable, édifiante, au fil des pèlerinages qui se multiplièrent, notamment après 1870. En effet, après le châtiment de l’invasion et de la révolution, les sévères avertissements et reproches de Notre-Dame parurent aux esprits droits l’explication divine de tous leurs maux. Le premier “ pèlerinage national ” de pénitence au nom de toute la France, animé par un esprit vraiment contre-révolutionnaire, eut lieu à La Salette en août 1872.

Conclusion de cette première partie : à La Salette, Notre-Dame est venue rappeler, réapprendre à son peuple la soumission à Dieu, à sa volonté, à sa Loi, sous peine de châtiment... Afin de prévenir ou guérir dans les âmes l’esprit de révolte, d’impiété, ou de libéralisme engendré par la Révolution. Leçons plus actuelles que jamais ! Elle a aussi suscité un grand mouvement de réparation, qui est la condition sine qua non pour obtenir miséricorde. Et surtout, Elle a attiré les âmes à une plus grande confiance en Elle, en sa médiation, et à la compassion de ce qu’Elle souffre pour nous. Ce sont trois pierres d’attente, comme des préparations d’Ancien Testament en vue de la grande nouvelle qu’Elle revint révéler en 1917.

Précisément, avec Fatima, La Salette est la seule apparition reconnue où Notre-Dame ait confié des messages cachés, prophétiques, apocalyptiques, sous la même forme de ces deux secrets.

VRAIS ET FAUX SECRETS, 
OU L’APOCALYPSE DE NOTRE-DAME DE LA SALETTE

« Cette apparition est différente des autres apparitions de la Sainte Vierge. Les déchaînements qu’elle provoqua dans l’Église en font un événement singulier, difficile et merveilleux. Les contradictions qu’elle rencontra nous sont un signe certain de son importance dans l’histoire de l’Église et du monde. » (CRC n° 324, p. 27) Aussi ne doit-on pas s’étonner que le démon se soit acharné contre les secrets de Notre-Dame de La Salette, dont l’histoire est aujourd’hui un véritable nœud de vipères, spécialement à cause des inventions de Mélanie.

En effet, dès 1852, la voyante de La Salette a rédigé un récit de son enfance, qu’elle refit ensuite, prétendant avoir été comblée de grâces mystiques, alors même qu’en 1846, elle répondait à la Sainte Vierge qu’elle ne faisait pas guère sa prière ! En 1853, quand Mgr Ginouilhac lui ordonne d’écrire de nouveau son secret, elle fait deux rédactions divergentes, à deux jours d’intervalle. Dans l’une, elle prétend que la Sainte Vierge lui a donné la règle d’un ordre nouveau à fonder. Ce sont là ses premières affabulations.

Au noviciat des sœurs de la Providence à Corenc où elle est entrée en 1850, Mélanie fut très admirée, interrogée par de nombreux visiteurs, et ses supérieures n’ont pas su préserver son humilité ni la diriger dans ses tentations. Le démon rôdait, se manifestant par des phénomènes étranges, de cécité et de mutisme passagers. C’est là qu’elle s’engagea pour la vie sur la pente fatale, diabolique, de l’illusion et de la désobéissance.

MÉLANIE, FIGURE DE L’ÉGLISE CONCILIAIRE DIABOLIQUEMENT DÉSORIENTÉE.

On trouve dans la CRC de juillet-août 1996 la démonstration de l’imposture de Mélanie, qui est confirmée par de nouveaux documents publiés par l’abbé Michel Corteville, auteur de La  grande nouvelle  des bergers de La Salette (Téqui, deuxième édition, 2008). La preuve décisive qu’elle n’était pas une vraie mystique, contrairement à ce que certains croient encore – dont l’abbé Corteville – ce sont ses désobéissances. Sous ce rapport, le contraste de sa vie avec celle de sœur Lucie est saisissant. Quand Mgr Ginouilhac refuse de l’admettre aux vœux, pour éprouver son humilité, Mélanie ne se soumet pas, mais refuse l’année de probation qui lui était demandée. En 1854, elle suit donc un évêque anglais qui l’amène dans son diocèse, et prononce ses vœux au carmel de Darlington, puis en ressort, prétendant qu’on la séquestre.

En 1860, elle se rend à Marseille, et c’est là qu’elle cherche à publier une nouvelle version de son secret, bien plus longue que celle rédigée pour Pie IX. Son texte est jugé irrecevable par le clergé de Marseille, qui la soupçonne de folie, ou même de possession (Corteville, p. 263). Si bien qu’en 1867 elle doit quitter le diocèse, et se rend à Castellamare, en Italie, où l’évêque lui est favorable. Son prétendu secret paraît donc dans la presse à partir de 1870.

C’est en 1878, avec l’imprimatur d’un autre évêque italien, qu’elle publie ce qu’elle prétend être la version complète du secret que lui a confié Notre-Dame. Encore aujourd’hui, les “ mélanistes ” tiennent ce texte pour le seul récit complet et authentique de l’apparition de Notre-Dame de La Salette.

Dans ce texte, le secret est encore plus long, et a vraiment peu de parties communes avec le secret de 1851. Dans un style prophétique, c’est l’annonce de châtiments apocalyptiques, précédée d’un long réquisitoire contre les prêtres, que la Sainte Vierge accuserait, dès 1846, d’être devenu « un cloaque d’impureté ». Publié en France, ce texte a suscité un tollé, parce qu’il revenait à prétendre que la Sainte Vierge faisait à l’Église les mêmes reproches que les anticléricaux de la IIIe République au même moment ! Au point que plusieurs évêques le dénoncèrent au Saint-Office. On connaît maintenant tout le détail de l’enquête grâce aux documents trouvés dans les archives vaticanes par l’abbé Corteville.

En 1880, les consulteurs du Saint-Office concluent que le récit de l’apparition par Mélanie « ne peut être retenu comme authentique ni sain quant à la doctrine » (ibid., p. 338), c’est-à-dire que ce ne peut pas être le message de la Sainte Vierge. Ils décidèrent donc que sa diffusion soit désormais interdite, et qu’on interdise à la voyante de parler et d’écrire sur le sujet. Comme elle désobéissait, le Saint-­Office la menaça d’excommunication (ibid., p. 345). La sanction ne tomba pas, mais elle continua son existence chaotique, d’échecs en renvois, et on la retrouva finalement morte à Altamura, en 1904, seule, vêtue de l’habit religieux qu’elle prétendait avoir reçu directement de la Sainte Vierge...

MAXIMIN, FIGURE DE LA FIDÉLITÉ LABORIEUSE
DE L’ÉGLISE À SA FOI, DE LA FRANCE À SON ROI.

Maximin, lui, fit quelques incartades au cours des années 1851-53, lors de son séjour au petit séminaire de la Côte-Saint-André. Ses camarades le harcelaient pour obtenir son secret, lui parlant sans cesse d’autres prophéties plus ou moins fantaisistes. Dans cette ambiance malsaine, le petit voyant s’est laissé aller à jouer le prophète, surtout pour se libérer des questionneurs importuns. Ce à quoi Mgr Ginouilhac porta rapidement remède en le congédiant du petit séminaire, pour le placer en pension chez un curé du diocèse afin d’y continuer ses études. La leçon porta ses fruits, et Maximin fut ensuite bien fidèle à défendre son secret, menant une vie pauvre et instable, mais modeste et pieuse, couronnée par une sainte mort en 1875. Notre Père l’aimait beaucoup, pour sa fidélité laborieuse à sa mission, comme son attachement à Pie IX et son légitimisme monarchique.

Il voyait en lui un fils d’Adam « modeste et dépassé », honnête représentant de la France profonde, peuple légitimiste, “ catholique et français toujours ”, conservant vaille que vaille sa fidélité. Tandis que Mélanie, fille d’Ève tombée dans le piège du serpent, paraît une figure de la France et de l’Église en proie à la désorientation diabolique, à la grande apostasie annoncée précisément dans ces secrets de Notre-Dame.

LA VERSION PRIMITIVE DES SECRETS EST AUTHENTIQUE

En 1996, au terme d’une minutieuse enquête dévoilant tout ce qu’on pouvait alors savoir de ces secrets, notre Père appelait de ses vœux la divulgation par le Saint-Siège de leur première rédaction, celle de 1851. Il tenait cette version pour la seule authentique, parce que jusqu’à cette date, rien ne permettait encore de remettre en cause le témoignage de Mélanie. Mgr de Bruillard, le bienheureux Pie IX et le cardinal Lambruschini, préfet de la Congrégation des rites, qui ont lu cette version des secrets, en furent vivement impressionnés, et c’est suite à cette lecture que fut décidée la reconnaissance canonique de l’apparition (cf. le témoignage de l’abbé Rousselot, publié dans la CRC de juillet-août 1996, p. 8). Leur jugement fait autorité, en voici une preuve “ négative ”.

À l’opposé des admirateurs inconditionnels de Mélanie, comme l’abbé Corteville, on trouve le Père Jean Stern, qui fut archiviste des Missionnaires de La Salette, auteur d’une monumentale publication critique des documents sur l’histoire de La Salette. Il récuse l’authenticité de tous les secrets rédigés par les voyants, y compris leur version primitive, mais sa démonstration ne nous semble pas satisfaisante.

Dans l’un de ses derniers ouvrages, il veut affirmer que Pie IX a porté sur ces secrets de 1851 un jugement négatif, et pour cela, il cite d’abord une lettre de Mgr Depéry, où ce prélat affirmait que le Pape ne faisait aucun cas des secrets de La Salette (Le curé d’Ars et le message authentique de La Salette 2018, L’Harmattan, p. 72). Mais Mgr Depéry était un adversaire virulent de l’apparition, au point d’aller lui-même à Rome pour y répandre ses critiques. Saint Pierre-Julien Eymard lui-même en était indigné et commentait : « Oh ! Si le Souverain Pontife pouvait juger par lui-même, et non sur les paroles d’un évêque que tout le monde sait, à Gap et dans son diocèse, avoir bien peu la confiance de son clergé, avoir bien peu de tête. » (cité dans Bassette, Le fait de La Salette, 1955, p. 326). D’ailleurs, l’abbé Stern lui-même écrivait en 1991 : « La correspondance de Mgr Depéry révèle chez cet évêque trop d’oublis ou de méprises pour qu’on puisse lui accorder une pleine confiance. » (Documents authentiques, t. 3, p. 47) Ce témoignage de Mgr Depéry n’est donc pas digne de foi, pas plus que celui, cité ensuite, du cardinal de Bonald, qui a multiplié les malhonnêtetés et dissimulations pour dénigrer l’apparition de La Salette.

Prétendant confirmer « l’objectivité » de ces témoignages, l’abbé Stern avance ensuite un témoignage indirect du Père Giraud, à qui Pie IX aurait dit lors d’une audience en 1874 que les secrets ne contiennent que « des choses vagues qu’on peut toujours dire ».

Mais il faut savoir qu’à cette date, Mélanie avait déjà envoyé au Saint-Siège une nouvelle version, amplifiée, de son secret, en 1858, et qu’elle diffusait encore une autre version dans la presse, depuis 1870. Cela explique les réserves du bienheureux Pie IX vis-à-vis de ces secrets, mais ne remet pas en question sa première réaction à la lecture de leur version primitive, en 1851.

Ainsi, à la suite de notre Père, nous croyons que les secrets rédigés par Maximin et Mélanie en 1851 pour le bienheureux Pie IX sont les authentiques secrets de Notre-Dame de La Salette.

LES SECRETS RETROUVÉS.

Jusqu’en 2001, on croyait ces secrets égarés dans les archives vaticanes, et le Saint-Siège ne manifestait aucune velléité de les publier. Mais en 1998, ces archives ont été ouvertes à la recherche historique, et l’abbé Corteville affirme qu’il y a retrouvé la première rédaction des secrets, qu’il publie avec toutes les autres rédactions ultérieures, et d’autres nouveaux documents.

On ne retrouve pas, dans ces secrets originaux, la phrase « Rome perdra la foi et deviendra le siège de l’Antéchrist », écrite par Mélanie dans la dernière version de son secret, que notre Père tenait pour un reste authentique du vrai secret. En fait, maintenant qu’on connaît toutes les rédactions, on voit que cette phrase ne se trouve que dans l’ultime version, et même pas dans les autres “ fausses ”.

Au demeurant, la teneur générale de ces secrets de 1851 est assez surprenante...

Peut-on donc croire l’abbé Corteville ? Sont-ce là les vrais secrets de Notre-Dame de La Salette ?

Tout d’abord, la découverte de l’abbé Corteville a tous les caractères de l’authenticité. Elle a été faite dans le cadre des permissions données par les archives vaticanes qui n’ont pas fait de démenti ni d’objections contre cette publication. L’abbé Laurentin a donné à cette découverte une large diffusion, qui n’a soulevé aucune contestation sérieuse. Les caractéristiques des documents, l’enveloppe, le sceau et les signatures des témoins de l’évêché de Grenoble correspondent à ce qu’on en savait. Les ­fac-similés sont publiés, les écritures sont bien celles des voyants, d’une orthographe et d’une syntaxe plus qu’approximatives. L’abbé Stern lui-même y reconnaît la rédaction primitive des voyants en 1851. Il prétend que leur contenu s’explique par les fausses prophéties qui avaient cours en ce temps-là, y compris dans l’entourage des voyants, mais il n’établit aucun rapprochement démonstratif, convaincant, entre ces fausses prophéties et le texte des secrets (Le curé d’Ars et le message authentique de La Salette, p. 84).

Quoique forts différents, ces deux secrets de Mélanie et Maximin sont très cohérents entre eux, mais aussi avec les révélations faites à sœur Marie de Saint-Pierre, et ils s’insèrent bien dans le message officiel de l’apparition. On y trouve la même annonce de terribles châtiments, les mêmes reproches très vifs de la Sainte Vierge se plaignant « qu’on aille à la boucherie en carême comme des chiens ». C’est la même atmosphère “ d’Ancien Testament ”.

Avec l’autorité de frère Bruno et sous son contrôle, nous affirmons donc que rien ne permet de rejeter ces secrets de 1851 publiés par l’abbé Corteville. Il est toutefois regrettable qu’ils n’aient pas fait l’objet d’une divulgation officielle par le Saint-Siège, comme le secret de Fatima.

En étudiant ces secrets, et en considérant la vie troublée des voyants, il faut se rappeler l’explication lumineuse de notre Père : l’apparition de Notre-Dame à La Salette ne se suffit pas à elle-même, elle a une place caractéristique, atypique, dans le dessein divin. Obscure, troublante en certains de ses aspects, elle est comme la figure, l’ombre de l’Ancien Testament avant la lumière du Nouveau, qui paraîtra à Lourdes et Fatima.

LE SECRET CONFIÉ À MAXIMIN.

Comme celui de Mélanie et même celui de sœur Lucie, le secret de Maximin est une prophétie sur l’avenir, conditionnée par la réponse des hommes aux demandes de Notre-Dame : leur conversion, ou bien leur endurcissement dans le péché. Les quelques commentaires qui suivent sont à compléter par l’explication plus générale donnée par frère Michel dans un sermon au camp de la Phalange en août 2025.

« Voilà ce que la Dame m’a dit : Si mon peuple continue, ce que je vais vous dire arrivera plu tôt, si il change un peu ce sera un peut plu tard. La France a corrompu l’univers un jour elle sera punie... »

Cette phrase lapidaire explique tout le drame du dix-neuvième siècle. La France a bel et bien corrompu l’univers en y répandant partout les idées de 1789, les Droits de l’homme et la démocratie. Cela concorde avec la dénonciation des erreurs de la Russie par Notre-Dame de Fatima, puisque celles-ci trouvent leurs origines dans les doctrines de la Révolution française.

« ... la foi s’éteindra dans la france trois partis de la france ne pratiqueront plus de religion ou presque plus l’autre partie la pratiquera sans bien la pratiquer puis après les nations se convertiront la foi se ralumera partout. »

L’apostasie presque générale que nous constatons aujourd’hui prouve la véracité de cette prophétie, mais elle est heureusement suivie de l’annonce de la conversion du monde entier, dont nous espérons l’accomplissement lors du triomphe de son Cœur Immaculé. À Fatima, Notre-Dame n’a pas été aussi explicite : Elle a parlé uniquement du Portugal qui conserverait toujours le dogme de la foi, laissant supposer que la foi se perdrait partout ailleurs.

« Une grande contrée dans le nord de l’Europe aujourd’hui protestante se convertira par l’appuie de cette contrée toutes les autres contrées du monde se convertirons... »

Au dix-neuvième siècle, un grand mouvement de conversion a touché l’Angleterre, grâce aux efforts du bienheureux Pie IX, soutenu par les prières de l’abbé des Gesnettes et de son archiconfrérie. Saint Dominique Savio a même vu en songe la foi éclairer de nouveau l’Angleterre grâce au Pape (Corteville, p. 393, note 338). Mais ce mouvement n’a finalement pas abouti.

« ... avant que tous cela arrive de grands troubles arriveront dans l’église et partout puis notre Saint père le pape sera persécuté son successeur sera un pontife que personne s’y attend puis après une grande paix arrivera, mais elle ne durera pas longtemps un monstre viendra la troubler tout ce que je vous dit là arrivera dans l’autre siècle plus tard au deux mille ans. »


Voici les fac-similés des secrets remis à Pie IX le 16 juillet 1851, retrouvés par l’abbé Corteville dans les archives du Saint Office, et publiés dans son ouvrage La “ Grande Nouvelle ” des Bergers de La Salette (2e édition, 2008, p. 128 et 222). En haut, celui de Maximin, intégralement. En bas, la première page de celui de Mélanie.

Fac similé, le secret de Maximin.

Fac similé, le secret de Mélanie.

En voici la transcription littérale :

Secret de Maximin :

Le 19 septembre 1846.

Nous avons vu une belle Dame. Nous n’avons jamais dit que cette dame fut la Ste Vierge mais nous avons toujours dit que c’était une belle Dame. Je ne sais pas si c’est la sainte Vierge ou une autre personne moi je crois au jour d’hui que c’est la sainte vierge.

Voilà ce que cette Dame m’a dit.

 Si mon peuple continue, ce que je vais vous dire arrivera plu tôt, si il change un peu ce sera un peut plu tard. La France a corrompu l’univers un jour elle sera punie la foi s’éteindra dans la france trois partie de la france ne pratiqueront plus de religion ou presque plus l’autre partie la pratiquera sans bien la pratiquer, puis après les nations sce convertiront la foi se ralumera partout. Une grande contrée dans le nord de l’Europe aujourd’hui protestante se convertira par l’appuie de cette contrée toute les autres contrées du monde se convertirons, avant que tous cela arrive de grands troubles arriveront dans l’église et partout puis après notre Saint père le pape cera persécuté son successeur sera un pontif que personne s’y attend puis après une grande paix arrivera, mais elle ne durera pas long-temps un pontif monstre viendra la troubler toute ce que je vous dis là arrivera dans l’autre siècle plus tard au deux mil ans. ” Maximin Giraud (elle ma dit de le dire quelque temps avant).

Mon Très St Père votre sainte benediction à une de vos brebie Maximin Giraud. Le 3 juillet 1851 Grenoble.

Secret de Mélanie :

J. M. J. Secret que m’a donné la Ste Vierge sur la Montagne de La Salette le 19 septembre 1846

Secrt.

Mélanie, je vais vous dire quelque chose que vous ne direz à personne.

Le temps de la colère de Dieu est arrivé ; si, lorsque vous aurez dit aux peuples se que je vous ai dit tout à l’heure, et se que je vous dirai de dire encore ; si après cela ils ne se convertissent pas, qu’on ne fait pas pénitence et si on ne cesse pas de travailler le Dimanche, et si on continue à blasphémer le Saint Nom de Dieu, en un mot, si la fasse de la terre ne change pas, Dieu vas se venger contre le peuple ingrat, et esclave du démon, Mon Fils va faire éclater sa puissance.

Paris, cette ville souilléte de toutes sortes de crimes périra infailliblement Marseille sera détruite en peu de temps, lorsque ces choses arriveront : le désordre sera complet sur la terre ; le monde s’abandonnera à ses passions impies. Le Pape sera persécuté de toutes parts on lui tirera dessus, on voudra le Mettre à Mort, mais on ne lui poura rien, le Vicaire de Dieu triomfera encore cette fois. Les prêtres et les religieuses, et les vrais serviteurs de mon Fills seront persécutés, et plusieurs mourront pour la foi de Jésus-Christ. Une famine reignera en même temps.

Après que toutes ces choses seront arrivées beaucoup de personnes reconnaîtront la main de Dieu sur eux, se convertiront, et feront pénitence de leurs péchés. Un grand roi montera sur le tronne et reignera pendant quelques années. La religion refleurira et s’étendra par toute la terre et la fertilité sera grande, le monde content de ne manquer de rien recommencera ses désordres, et abandonnera Dieu, se livrera à ses passions criminelles.

Les ministres de Dieu, et les Epouses de Jésus-Christ il y en a qui se livreront au désordre, et c’est ce qu’il y aura de terrible, enfin un enfer régnera sur la terre ; se sera alors que l’antechrist naîtra d’une religieuse, mais malheur à elle ; beaucoup de personnes croiront à lui parce qu’il se dira le venu du ciel, malheur pour ceux qui le croiront, le temps n’est pas éloigné, il ne passera pas deux fois 50 ans

Mon enfant, vous ne direz pas ce que je vien de vous dire, vous ne le direz à personne, vous ne direz pas si vous devez le dire un jour, vous ne direz pas se que ça regarde, enfin vous ne direz rien jusqu’à ce que je vous dise de le dire. !!! ! +

Je prie Notre Saint-Père le Pape de me donner sa sainte bénédiction.

Mélanie Mathieu Bergère de La Salette
Grenoble 6 juillet 1851.
J. M. J. +


LE SECRET CONFIÉ À MÉLANIE.

« Mélanie, je vais vous dire quelque chose que vous ne direz à personne. Le temps de la colère de Dieu est arrivé ; si, lorsque vous aurez dit aux peuples se que je vous ai dit tout à l’heure, et se que je vous dirai de dire encore ; si, après cela ils ne se convertissent pas, qu’on ne fait pas pénitence et si on ne cesse pas de travailler le dimanche, et si on continue à blasphémer le Saint Nom de Dieu, en un mot, si la fasse de la terre ne change pas, Dieu vas se venger contre le peuple ingrat, et esclave du démon, Mon Fils va faire éclater sa puissance.

« Paris, cette ville souillée de toutes sortes de crimes, périra infailliblement Marseille sera détruite en peu de temps, lorsque ces choses arriveront : le désordre sera complet sur la terre ; le monde s’abandonnera à ses passions impies. »

On pourrait objecter que ces châtiments ne se sont pas accomplis littéralement. Mais, précisément, cela correspond à ce que la Sainte Vierge a dit à sœur Marie de Saint-Pierre, qui s’étonnait de la voir répandre ses grâces, alors même qu’à La Salette, Elle avait annoncé des châtiments et parlé de la Colère de son Fils. Notre-Dame lui répondit que, de fait, Elle avait « annoncé des malheurs qui seraient infailliblement arrivés sans sa médiation » (Janvier, op. cit., p. 371).

Il faut bien voir que ces châtiments étaient conditionnés : « si la fasse de la terre ne change pas ». Il était donc juste qu’ils ne se soient pas accomplis intégralement, puisqu’on avait fait pénitence, notamment par le moyen de l’Œuvre Réparatrice. Mais Paris a tout de même souffert de la révolution de 1848, puis des horreurs de la Commune en 1870.

« Le Pape sera persécuté de toutes parts on lui tirera dessus, on voudra le Mettre à Mort, mais on ne lui pourra rien, le Vicaire de Dieu triomfera encore cette fois. »

L’abbé Corteville et l’abbé Laurentin appliquent cette phrase à Jean-Paul II, qui s’est fait tirer dessus sans mourir. Toutefois, Jean-Paul II ne fut jamais persécuté de toutes parts, il fut au contraire entouré d’une adulation sans limites. En revanche Pie IX, à qui ces secrets étaient adressés, a bien été persécuté. On voulut le mettre à mort, dès 1848. Les révolutionnaires tirèrent sur les fenêtres du Vatican, tuant l’un de ses secrétaires, Mgr Palma.

« Les prêtres et les religieuses, et les vrais serviteurs de mon Fils seront persécutés, et plusieurs mourront pour la foi de Jésus-Christ. Une famine reignera en même temps. »

On peut croire que cette prophétie s’est accomplie en 1870, notamment avec les martyrs de la Commune.

« Après que toutes ces choses seront arrivées beaucoup de personnes reconnaîtront la main de Dieu sur eux, se convertiront, et feront pénitence de leurs péchés. »

Après la défaite infligée par la Prusse, il y eut un grand mouvement de conversion et de dévotion au Sacré-Cœur. Il y a eu notamment l’avènement de l’archiconfrérie de prière et de pénitence au Sacré-Cœur de Montmartre qui contribua grandement à la conversion des âmes.

« Un grand roi montera sur le tronne et reignera pendant quelques années, la religion refleurira et s’étendra par toute la terre. »

Selon la chronologie de ce secret, on peut penser que ce “ roi ” aurait dû être le comte de Chambord, puisque le Sacré-Cœur voulait qu’il soit l’instrument de la restauration de la France et de la délivrance du Saint-Siège. Dans cette hypothèse, la prophétie du secret ne se serait pas réalisée, car ce Prince n’a pas fait cas des demandes que lui transmettait Madame Royer.

Il pourrait aussi s’agir du Souverain Pontife, saint Pie X selon nous, puisque Mélanie écrit que sous son règne la religion refleurira sur toute la terre, et que Maximin annonce l’avènement d’un pontife que personne s’y attend. Cette interprétation trouve un appui dans une vision qu’eut Madame Royer d’un trône de bois qu’on tentait de détruire sans pouvoir y arriver. Elle comprit qu’il s’agissait du trône pontifical, qui fut effectivement attaqué par les révolutionnaires dans les années 1860. Elle vit aussi une « couronne royale » destinée, lui sembla-t-il, à être rendue au Souverain Pontife.

La suite est bien compréhensible :

« La fertilité sera grande, le monde content de ne manquer de rien recommencera ses désordres, et abandonnera Dieu, se livrera à ses passions criminelles. Les ministres de Dieu, et les Epouses de Jésus-Christ il y en a qui se livreront au désordre, et c’est ce qu’il y aura de terrible. »

Cette dernière phrase dénonçant les désordres dans l’Église a un riche sens biblique, que nous pouvons comprendre grâce à l’enseignement de saint Paul. Dans sa seconde épître aux Corinthiens, l’Apôtre s’adressait à sa communauté comme à une « vierge pure à présenter au Christ » (2 Co 11, 2), c’est-à-dire une épouse de Jésus-Christ. Puis il lui faisait ses reproches, en dénonçant ses désordres : « J’ai bien peur qu’à l’exemple d’Ève, que le serpent a dupée par son astuce, vos pensées ne se corrompent en s’écartant de la simplicité envers le Christ. Si le premier venu en effet, proclame un autre Jésus que celui que nous avons proclamé, s’il s’agit de recevoir un Esprit différent que celui que vous avez reçu, ou un évangile différent que celui que vous avez accueilli, vous le supportez fort bien. » (2 Co 11, 3-4)

Donc, quand la Sainte Vierge annonce que des ministres de Dieu et des Epouses de Jésus-Christ se livreront au désordre, Elle dénonce surtout leur infidélité à l’Évangile, à la Vérité du Christ, à son Esprit, c’est-à-dire leur hérésie. Ce langage biblique, d’Ancien Testament, fait écho aux reproches d’Ézéchiel et Jérémie dénonçant l’infidélité et l’idolâtrie d’Israël comme un adultère envers Yahweh.

Saint Pie X condamnera explicitement ce “ nouvel évangile ” prôné par les démocrates-chrétiens et les modernistes ; hérésie qui a subsisté après sa mort, et qui gagna peu à peu toute l’Église, et triompha à la faveur du concile Vatican II, comme l’expliqua notre Père.

« Enfin un enfer régnera sur la terre ; se sera alors que l’antechrist naîtra d’une religieuse, mais malheur à elle... »

Pour interpréter cette phrase extrêmement choquante, il faut expliquer ce qu’est l’antéchrist. Notre Père écrivait dans la Lettre à mes amis n° 141 : selon la Sainte Écriture, « il se peut que ce soit un [ou plusieurs] Homme de Satan qui devance le retour du Christ Jésus, mais ce sera nécessairement aussi un mouvement de masse et une idéologie [...]. L’Antéchrist se présentera comme une réplique du Christ, un autre Christ, et sa doctrine, comme un nouveau christianisme, mis à jour, amélioré, calqué cependant sur l’authentique au point que les élus eux-mêmes y seront pris, si Dieu ne les en préserve ! »

Plus tard, dans ses livres d’accusation, notre Père accusa Paul VI et Jean-Paul II d’agir en antéchrist, parce qu’ils imposaient dans l’Église le culte de l’homme à la place du culte de Dieu, accomplissant de façon saisissante la prophétie de saint Paul sur l’avènement de « l’Homme impie, l’Être perdu, l’Adversaire » (2 Th 2, 3-4).

De plus, le terme de religieuse peut évoquer figurativement une communauté, des membres de l’Église... une assemblée d’évêques réunis en concile.

Ainsi, à la lumière des événements actuels, il nous semble que cette phrase du secret de Notre-Dame annonce figurativement l’adultère spirituel des membres de l’Église, à un point tel qu’il suscite l’avènement de l’Antéchrist et de la grande apostasie, comme Elle le dit ensuite :

L’Antéchrist, « beaucoup de personnes croiront à lui parce qu’il se dira le venu du ciel, malheur pour ceux qui le croiront, le temps n’est pas éloigné, il ne passera pas deux fois 50 ans ».

En 1903 déjà, dans son encyclique inaugurale E supremi apostolatus, saint Pie X confiait sa crainte que l’Antéchrist soit déjà né, tant la perversion des esprits et la révolte des hommes contre Dieu lui paraissait l’accomplissement des cataclysmes annoncés pour les derniers temps.

Ainsi, cette conclusion du secret nous semble une confirmation, inattendue et figurative, par la Vierge Marie Elle-même ! de ce que notre Père expliquait dans ses lettres sur Le mystère de l’Église et l’antéchrist, ainsi que dans l’Autodafé, sur l’adultère spirituel et l’acte d’apostasie que fut le concile Vatican II.

CONCLUSION

Notre-Dame de la Salette.Si notre Mère du Ciel est apparue en larmes sur la montagne de La Salette, montrant une inconsolable affliction, c’est parce qu’elle voyait déjà, en 1846, l’avènement de l’Antéchrist, l’Adversaire de son Fils, et la grande apostasie où il allait entraîner son peuple, pour le conduire en enfer !

Aussi les premières paroles de sa grande nouvelle interpellent avec force notre pauvre Église en proie à la désorientation diabolique, pour n’avoir pas fait cas des grandes apparitions de Notre-Dame, et tout spécialement de ses demandes de Fatima. Ce message est l’explication divine de tous les maux de notre peuple, comme des guerres, des cataclysmes qui ravagent le monde aujourd’hui.

« Si mon peuple ne veut pas se soumettre, je suis forcée de laisser aller le bras de mon Fils. Il est si lourd et si pesant que je ne puis plus le retenir. Depuis le temps que je souffre pour vous !

« Si je veux que mon Fils ne vous abandonne pas, je suis chargée de le prier sans cesse pour vous ; et vous autres, vous n’en faites pas cas ! Vous aurez beau prier, beau faire, jamais vous ne pourrez récompenser la peine que j’ai prise pour vous ! »

Frère Joseph-Sarto du Christ-Roi