Les Appels du message de Fatima
En décembre 2000 fut publiée « la longue lettre » aux pèlerins que sœur Lucie avait écrite sur la recommandation de Paul VI. Cela faisait vingt-cinq ans que le précieux document avait été remis aux autorités !
Le Père Kondor nous a personnellement confié :
« Sœur Lucie m’ennuyait avec son livre. Chaque fois que je la voyais au carmel de Coïmbre, elle me demandait : “ Qu’est devenu mon livre ? Où est mon livre ? ” Elle posa la même question au pape Jean-Paul II. Mgr Luciano Guerra, recteur du sanctuaire, ne voulait le publier qu’après la mort de Lucie. »
Le livre fut donc enfin édité, sous le titre les Appels du message de Fatima, en date du 25 mars 1997, mais après avoir subi un profond remaniement, à Rome, sous l’autorité directe de Jean-Paul II. Ayant eu le manuscrit un instant sous les yeux, je peux assurer qu’il était daté de la main de sœur Lucie, du 25 mars 1974 et non pas du 25 mars... 1997. J’ai pu constater aussi que le plan d’ensemble avait été bouleversé. Mais plus grave, une lecture attentive de l’ouvrage, tel qu’il a été édité, accuse des omissions qui ne peuvent certainement pas être attribuées directement à sœur Lucie.
La messagère de Notre-Dame, certainement pour se conformer à des consignes de ses directeurs, se réfère constamment dans ses explications à la sainte Écriture, dont elle manifeste d’ailleurs une merveilleuse connaissance. Elle excelle à démontrer que Fatima est en parfaite harmonie avec l’Ancien et le Nouveau Testament.
Cependant, s’il est vrai que les révélations de Fatima récapitulent la Révélation biblique, elles l’actualisent aussi et l’explicitent pour notre temps. Or, c’est ce message réellement nouveau qui est occulté dans la version du livre publiée le 8 décembre 2000. Excepté le saint Rosaire, tout ce qui appartient en propre à Fatima, et qui ne se trouve pas en toutes lettres dans la Bible, est systématiquement négligé, méconnu. Les Appels du message enferment le mystère de Fatima dans les limites de la Cova da Iria, comme un simple rappel de l’Évangile, datant de 1917.
L’événement de Fatima s’y trouve privé des accomplissements de Pontevedra et de Tuy, partant, de sa portée mondiale en relation avec les faits de plus en plus tragiques de l’histoire religieuse et politique de notre temps.
C’est ainsi, par exemple, que dans le huitième chapitre, intitulé “ Appel à la participation à l’Eucharistie ”, Lucie donne un enseignement à la fois catéchétique, scripturaire et dogmatique, qui est une présentation enthousiasmante et exacte du mystère de l’Eucharistie. Mais la pratique nouvelle demandée par la Vierge de Fatima, à savoir la communion réparatrice des cinq premiers samedis du mois, est passée sous silence.
Certes, la voyante développe d’admirables considérations théologiques et élévations mystiques sur le Cœur Immaculé de Marie, mais nulle part, dans les 280 pages des Appels du message de Fatima, il n’est fait mention de la révélation du Cœur Immaculé de Marie entouré d’épines, ni de la réparation pour les ingratitudes et les péchés qui l’offensent, l’outragent, le blessent et l’affligent, pas même dans le récit de l’apparition du 13 juin 1917 ! C’est pourtant l’élément spécifique des révélations de Fatima.
Le grand Secret du 13 juillet 1917, en ses trois parties, est presque entièrement passé sous silence. Il n’est évoqué que dans un seul passage du livre, par la mention de la vision de l’enfer.
Les deux requêtes adressées au Saint-Père, touchant la consécration de la Russie et l’approbation de la communion réparatrice des premiers samedis, sont totalement occultées. Il n’est jamais question des prophéties du Secret en relation avec ces demandes. (...)
Pourtant, même remanié, ce texte témoigne des préoccupations de la messagère du Ciel sous le pontificat de Paul VI. (...)
POUR FORTIFIER NOTRE FOI
Dans la première partie du livre, intitulée “ Sous le regard de Dieu ”, sœur Lucie commence par répondre à une question sur la vie des deux foyers des voyants. C’est toujours un enchantement de la lire lorsqu’elle évoque, avec mille détails de la vie quotidienne, tellement charmants, les jours heureux de son enfance, à Aljustrel, où toutes les familles étaient si profondément unies qu’elles ne formaient qu’ « une seule famille ».
La deuxième partie de l’ouvrage contient l’exposé des “ Appels du message de Fatima ”, en vingt petits chapitres qui suivent chronologiquement les apparitions de l’Ange et de Notre-Dame, à partir de 1915 jusqu’au 13 octobre 1917. On ne trouve dans ce livre aucune mention explicite des grandes révélations ultérieures, de Pontevedra, de Tuy, de Rianjo.
La voyante y présente, sous une forme catéchétique et biblique, les grandes vérités du Credo. Elles sont, pour reprendre son expression, « l’écho de la voix de Dieu », avec une forte insistance sur l’existence du Ciel et de l’enfer.
Très alarmée par l’attiédissement et la perte de la foi, elle dresse le constat suivant : « Le message est venu nous rappeler et nous confirmer ces vérités pour que nous ne nous laissions ni tromper, ni abuser par les fausses doctrines des incrédules qui les nient. » Et de souligner que « la vérité ne cesse pas d’exister du simple fait qu’elle est niée par les incrédules ! Ce qui était vrai hier, l’est aujourd’hui, et le sera demain, parce que “ Jésus-Christ est le même hier et aujourd’hui. Il le sera à jamais. ” (He 13, 8) Tout cela nous montre la grande nécessité que nous avons de prier, de nous approcher de Dieu par la prière. »
Dans son chapitre douzième, intitulé “ L’appel à la récitation quotidienne du chapelet ”, sœur Lucie écrit :
« Le chapelet est la formule de prière vocale qui est la plus appropriée à tous. C’est pourquoi nous devons lui accorder une très grande valeur et nous acharner à la pratiquer sans jamais l’abandonner. En effet, Dieu et Notre-Dame savent mieux que personne ce qui nous convient davantage et ce dont nous avons le plus besoin. Et cette prière sera un puissant moyen pour nous aider à conserver la foi, l’espérance et la charité. »
Entre le sixième appel, « Priez, priez beaucoup ! » et le septième, « Offrez constamment au Très-Haut des prières et des sacrifices », sœur Lucie plaça un commentaire des commandements de Dieu. « Ils sont un des points principaux du message. En effet, Notre-Dame a terminé la série de ses apparitions à Fatima en disant : “ Qu’on n’offense pas davantage Dieu, Notre-Seigneur, qui est déjà trop offensé. ” (...) Sans aucun doute, ce qui offense le plus Dieu, c’est la transgression de sa Loi. Toute la sainte Écriture l’atteste. Tous les prophètes ont hurlé contre la transgression de la Loi de Dieu. Jésus-Christ fit de même, ainsi que l’Église, continuatrice de la voix du Christ auprès de nous. »
Mais l’important est que sœur Lucie exprime dans cet ouvrage sa profession de foi, pour ainsi dire en témoin oculaire de chacun des articles du Credo. Car les lumières divines dont elle a joui, notamment lors de la théophanie de Tuy, l’éclairent et la guident dans son enseignement. Frère Bruno de Jésus l’a démontré dans un commentaire littéral parfait qui met aussi en valeur de nombreuses réminiscences du troisième Secret.
Extraits de Fatima, Salut du monde, p. 320-323