Le Livre de Ruth

Ruth et Booz par Nicolas Poussin

DANS la généalogie du Christ, « fils de David » par laquelle saint Matthieu commence son Évangile, quatre femmes sont mentionnées, préparant la cinquième, « Marie, de laquelle naquit Jésus ». Il y a une femme de l’Ancien Testament qui est particulièrement aimable, c’est l’aïeule de David : Ruth la Moabite, qui épousa Booz.

« Booz engendra Jobed, de Ruth,
Jobed engendra Jessé,
Jessé engendra le roi David. » (Mt 1, 5-6)

Le Livre de Ruth raconte sa ravissante histoire. Ce Livre dut être rédigé aux environs des années 450 avant Jésus-Christ mais il raconte une histoire beaucoup plus ancienne, qui remonte au temps des “ Juges ”. (...)

C’est un beau livre, historique, allégorique et prophétique, que ce livre de Ruth.

I) Un livre historique, racontant les desseins divins sur une famille qui était dépositaire de la promesse faite à Abraham : de ses reins devaient naître le Messie. Le père de famille, Élimélek, était mort, ses deux fils aussi, laissant leurs deux épouses sans enfants. Pour Noémi, la veuve d’Élimélek, il n’était plus question d’être mère. La promesse s’éteindrait-elle ? C’était impossible. Aussi, cette vraie fille d’Abraham envisagea une issue, combien improbable : celle que lui ouvrait la loi du lévirat (Dt 25), lui permettant d’obtenir du plus proche parent de son époux qu’il lui suscite un fils qui hériterait selon la Loi de Yahweh de tous ses biens et privilèges. Encore fallait-il que Noémi elle-même trouve en l’une de ses brus la bonne volonté de se substituer à elle, et de se prêter à cette maternité que la Loi de Dieu autorisait et que requérait la Promesse messianique à ne pas laisser sans effet. La merveille fut qu’un tel projet réussit et c’est l’objet du Livre de Ruth de raconter comment cela se fit.

Nous le lirons sans nous contenter du récit des événements. Nous essaierons de deviner le sentiment des âmes et ces sentiments sont relationnels. Ce sont les relations des personnages entre eux en lesquelles consiste tout le mystère de l’élection divine. Le bien et le mal viennent toujours de ces relations des êtres tellement particuliers, tellement singuliers, de ces destinées qui se croisent, qui se décroisent, quelquefois qui se retrouvent. C’est là qu’il faut chercher l’émotion sacrée qui doit nous donner le culte de la bible et une sorte de sens profond du cœur humain.

II) Un Livre allégorique, car dans ce roman de grâce divine et d’amour humain, peut se lire l’histoire de toute âme. Ruth, l’étrangère, la païenne, l’indigne, c’est chacun de nous. Tout au long du livre, elle adopte l’attitude de la créature en face de Dieu, une attitude passive, d’accueil. Booz, lui, est le figuratif du Dieu très Bon et Miséricordieux, son attitude est celle du don gracieux, du don actif, efficace. Comme Ruth recevra tout de Booz, la créature a tout reçu de son Dieu. Noémi, quant à elle, figure l’Église qui nous enseigne comment trouver grâce auprès de Dieu. Nul ne peut avoir Dieu pour Père s’il n’a l’Église pour Mère. Notre foi, nous l’avons reçue. Elle est née de Dieu par le ministère maternel d’un être humain qui nous a été comme une mère : mes parents, un bon prêtre, une religieuse, un monastère, un couvent, un ami, une amie, une sœur... C’est par les sages conseils de l’Église et ces envoyés de Dieu que les âmes chrétiennes traversent victorieusement les épreuves et difficultés d’ici bas.

Dans ces pages, se mirent tous ceux qui sont conduits à leurs noces mystiques par cette immortelle Noémi qui a pour nom l’Église, ou Marie Immaculée, c’est tout un. Qu’ils soient religieux, époux chrétiens, pères de famille, de peuple ou d’Église, tous peuvent méditer ces exemples de sagesse, de fidélité, de pureté du cœur et de respect de la loi divine, avec la leçon que cela vaut la bénédiction de Dieu.

III) Un Livre prophétique, car les grands personnages de l’Ancien Testament sont des figures des saints de la Nouvelle Alliance, en tout premier lieu de Notre-Seigneur Jésus-Christ et de sa toute sainte, gracieuse et glorieuse mère.

Les vertus de Ruth, de Noémi et de Booz nous parlent de celles de Marie Immaculée et de Jésus notre rédempteur.

À la fin de la même généalogie où Booz et Ruth occupent leur modeste mais glorieuse place, il y a un autre couple à leur image et ressemblance, celui de “ Joseph, l’époux de Marie, de laquelle naquit Jésus qu’on appelle le Christ ”. Beauté de ces figuratifs où l’honneur est comparable d’un père adoptif à l’autre, et la vertu, d’une mère à l’autre, son aïeule lointaine. En eux, en elles, l’humilité, la chasteté, l’obéissance à Dieu et l’amour du messie sont d’admirables signes de la prédestination dont ils furent comblés.

Ouvrons maintenant le Livre de Ruth pour en faire le commentaire littéral et pour y retrouver tout au long ces qualités historiques, allégoriques et prophétiques.

Abbé Georges de Nantes
Extraits de la retraite de communauté Le Livre de Ruth, S 16, automne 1971.

En audio seulement :
  • S 16 : Le livre de Ruth, retraite automne 1971, 16 h (aud.)

Références complémentaires

Oratorio composé par frère Henry de la Croix :
  • HE 6 : II. Le livre de Ruth, drame biblique, août 1997 1 h (aud./vid.) (compte-rendu : CRC tome 30, n° 346, mai 1998, p. 28-29)
Méditation :
  • Dans les Pages mystiques, tome 2 :
    • Ce deuxième secret…, janvier 1978
Extraits de prédication :
  • LOGIA 99, n° 25
  • LOGIA 2004, n° 1 à 3, n° 5