25 DÉCEMBRE 2022
La Vierge allaitante dans la crèche
est déjà corédemptrice
QUAND est arrivé le quarantième anniversaire de mon sacerdoce, j’ai choisi cette ravissante statuette d’ivoire qui a ravi mon cœur et qui représente la Vierge donnant le sein à son Enfant Jésus. Cette statuette évoque pour moi la joie du Ciel qui découle du mystère de l’Incarnation.
Si nous voulons bien comprendre cette maternité tout à fait incomparable, il faut penser que Notre-Seigneur et la Vierge Marie sont le nouvel Adam et la nouvelle Ève, sortis de toute éternité de la pensée du Père céleste. Il y a entre ces deux êtres le maximum d’unité qui est concevable entre un époux et son épouse.
L’époux et l’épouse mystiques ont pour définition de ne rien vouloir que ce que veut l’autre. Même volonté, même détestation, même amour. Leurs cœurs sont parfaitement à l’unisson parce que tout ce que l’un veut, l’autre le lui donne, tout ce que l’un donne, l’autre le veut. C’est une circumincessante charité qui donne à cette union entre les personnes divines une perfection qui va jusqu’à l’unité, qui vient de l’unité et qui va à l’unité de l’amour.
Lui est le Fils de Dieu, elle, la Vierge Immaculée, créature de Celui qui est là et lui réclame le sein. Nous voyons la représentation sensible, admirablement tendre, chaste, merveilleuse de ce qu’est le mystère de l’Incarnation, présage de l’union que nous aurons avec notre Dieu dans le Ciel.
Cette Vierge merveilleusement enfant, merveilleusement calme, souriante, et ce petit Enfant tout à son ouvrage et bien assis là sur la cuisse de sa Mère, et la Mère a l’autre jambe bien arc-boutée, de telle manière que l’Enfant puisse poser ses pieds comme chez lui, en tant que propriétaire et il est bien à son affaire. L’Enfant est agrippé d’une main à sa Mère très tendrement, de l’autre il tient une petite rondeur semblable à la rondeur du sein et le statuaire l’a fait exprès : elles sont l’une au-dessus de l’autre. Cette rondeur que l’Enfant tient avec beaucoup de noblesse, c’est la terre. Voyez comme ces sculpteurs ne se contentaient pas d’évoquer une petite scène familiale sensible, charmante, mais une théologie : donnant-donnant ! La Vierge presse de la main son sein pour donner du lait tant qu’elle peut. L’Enfant accepte et il tient le monde pour dire : tout ce que tu me donneras me servira pour sauver le monde.
À ce moment-là, on s’aperçoit que cette statue évoque aussi le mystère de la Rédemption. Sœur Marie de Saint-Pierre a appris de Notre-Seigneur qu’au moment où il tétait sa Mère, il lui prenait son lait pour le changer en son Sang et qu’il en était avide pour avoir beaucoup de Sang à répandre sur la Croix pour le salut des âmes.
Éclairés par le message de sœur Marie de Saint-Pierre, nous voyons très bien qu’entre cette Maman et cet Enfant, c’est un contrat rédempteur. La Vierge est corédemptrice déjà à ce moment-là. La Croix est déjà dans la crèche. Jésus n’est pas venu sur la terre uniquement pour caresser sa Mère et nous enseigner quel bonheur serait le nôtre dans le Ciel, mais pour opérer l’œuvre de notre salut en intime union avec la Vierge Marie.
Abbé Georges de Nantes
Extraits des sermons du 11 octobre 1993 et du 2 janvier 1989