9 JANVIER 2022
La colombe du Saint-Esprit et de la Vierge Marie
DANS cette théophanie où les trois Personnes divines veulent se manifester à Jean-Baptiste, le Père se manifeste seulement par sa voix : “ Celui-ci est mon Fils Bien-Aimé en qui j’ai mis toutes mes complaisances. ” Jésus, lui, est le Fils de Dieu, le Fils tourné vers le sein du Père. Il ne fait qu’un avec son Père et il est là, son corps sortant de l’eau du Jourdain ; il est à la fois Dieu et homme. Là-dessus, une colombe descend du Ciel en fendant l’air de son vol élégant et rapide, et plane sur la tête de Jésus. Je voudrais saluer cette Sainte Colombe volant au-dessus de Notre-Seigneur lors de son baptême par Jean-Baptiste, et pénétrer un peu son mystère.
Pourquoi le Saint-Esprit a-t-il choisi cette forme de la colombe pour se manifester dans cette théophanie du Baptême de Notre-Seigneur ? Que pouvait signifier, pour Jean-Baptiste et les Juifs de l’époque, la vue d’une colombe ?
La réponse à ces questions est dans la Bible. Ouvrons-la pour constater aussitôt que la colombe est une figure, un symbole tout à fait poétique et d’une grande et profonde portée. Il suffit de songer à la colombe de Noé qui, par opposition au corbeau, est un être de lumière, un être qui symbolise l’union et l’alliance entre Dieu et les hommes. C’est un peu comme si Dieu voulait nous signifier que son alliance reprenait vigueur, et qu’aux châtiments mérités par la malice du péché allait succéder, avec Jésus et sous l’égide du Saint-Esprit, un temps de grâce...
Mais le plus évocateur des figuratifs de l’Ancien Testament est celui du Cantique des Cantiques où Dieu compare son épouse à une colombe. C’est la Vierge Marie qui est désignée ainsi, ou encore l’épouse pénitente retrouvant sa pureté parfaite dans l’amour de son Époux. Cette épouse tellement louée, admirée, c’est aussi l’âme sainte, l’âme mystique, et c’est par excellence, comme premier analogue, la Vierge Marie.
À partir de là, on ne peut pas parler de colombe sans parler de la Vierge Marie... et c’est ce à quoi nous invite aussi la Liturgie de l’Église.
Dans le temps de l’Église, les âmes saintes paraîtront sous la forme de colombes. C’est sous cette apparence que saint Benoît voit l’âme de sa sœur sainte Scholastique monter au Ciel ; que l’âme de sainte Jeanne d’Arc s’échappe du bûcher où son corps est dévoré par les flammes, pour s’envoler vers le Ciel. Tout cela nous parle beaucoup, et lorsque nous verrons des colombes se poser sur les pieds de la statue de Notre-Dame de Fatima en procession à travers le monde (de 1946 à 1959), cela ne nous étonnera pas. Là, ce seront de vraies colombes, mais elles se mettront au service de la Sainte Vierge et symboliseront les âmes fidèles dont la Sainte Vierge aime s’entourer.
D’ores et déjà nous pouvons conclure en disant que la colombe symbolise une âme très pure, très dévote, appelée à être épouse intime du Christ. Quand nous voyons apparaître cette forme de colombe, c’est pour nous signifier et nous évoquer excellemment la présence de la Vierge Marie.
Reconsidérons le baptême de Jésus dans cette lumière. Je vais jusqu’à penser que lorsque cette colombe plane au-dessus de Jésus, la Vierge Marie (qui est la Colombe du Saint-Esprit) est spirituellement transportée de Nazareth au bord du Jourdain. Le Saint-Esprit lui fait assister à ce Baptême. Elle est la Mère de Jésus, la Médiatrice de la grâce.
À partir de quoi, nous voilà partis dans une immense contemplation, parce que partout où nous entendons parler de l’Esprit-Saint, nous voyons paraître notre petite colombe, c’est-à-dire l’apparition de la Vierge Marie. Cela ne nous étonne pas qu’elle apparaisse à Fatima ou ailleurs : c’est le Saint-Esprit en elle qui veut parler aux hommes.
Retenons cette image de la colombe avec beaucoup d’affection. Elle symbolise la présence de la Vierge Marie comme le temple privilégié du Saint-Esprit. Lorsque le Saint-Esprit choisit quelqu’un pour exprimer ce qu’il est, il pense d’abord à la Vierge Marie. À ce moment-là, le Saint-Esprit cesse d’être un inconnu pour nous, et marchant à grands pas dans cette voie, nous voyons dans la loi de Dieu dictée par l’Esprit-Saint aux prophètes et aux législateurs de l’ancien temps, la Vierge Marie. La parole de l’Esprit-Saint, c’est elle. Voilà de quoi fêter aujourd’hui la Sainte Colombe de l’Esprit-Saint.
Abbé Georges de Nantes
Extraits du sermon du 13 janvier 1993