10 AVRIL 2021 – RAMEAUX
Nos modestes cérémonies
touchent le Cœur de Dieu
LE dimanche des Rameaux célèbre cet accueil triomphal que Jérusalem fit à Notre-Seigneur Jésus-Christ, le reconnaissant comme son sauveur. Tout Jérusalem est transporté d’enthousiasme... et pourtant quelques jours plus tard, la foule se retournera et réclamera la mort de Jésus. Saint Augustin fait remarquer que ce grand triomphe de Jésus n’était à ses yeux qu’un petit succès, car en réalité il est le Roi du monde. Quel contraste entre Jésus tout-puissant, Jésus Roi des rois et Seigneur des seigneurs, et ce triomphe si modeste en comparaison qu’il en devient pour ainsi dire dérisoire !
Jésus aurait pu mépriser ce prétendu triomphe et rester absolument insensible à ces hommages de rien du tout. Mais au lieu de verser du côté de la colère, son Cœur doux et humble a chaviré du côté de la pitié, de la compassion, de la condescendance, de la tendresse. Il nous faut bien réaliser à quel point le Cœur de Notre-Seigneur est à ce moment-là empli d’une immense pitié pour cette créature si fragile qu’est l’humanité : son Cœur est étreint d’une immense compassion pour ce monde pécheur.
Au cours de son humble triomphe, ce sont des sentiments de miséricorde, de compassion et de pardon qui ont envahi son Cœur. N’imaginons pas qu’il a été ivre de la gloire qui lui était faite. Mais il en mesurait la disproportion, et cette disproportion émouvait son Cœur, un peu comme des parents sont émus de voir leur enfant leur offrir un dessin parfaitement laid pour le jour de leur fête. Évidemment, il ne faut pas laisser croire à l’enfant qu’il a fait un chef-d’œuvre ! Mais il faut lui manifester le principal avec beaucoup de tendresse : lui faire comprendre qu’il a fait plaisir.
Ainsi Notre-Seigneur ne donne pas à croire aux Apôtres et aux juifs qui l’acclament qu’ils viennent de faire une action d’éclat. S’il reste absolument le maître, le Roi donnant le sentiment de sa majesté, il accepte cependant ce triomphe par bonté. Ainsi, même lorsqu’il sera condamné par les méchants, on pourra conserver la vision de cette sérénité, de cette mansuétude pleine de majesté, et demeurer ainsi persuadé de sa victoire.
Mais pourquoi vous faire méditer avec saint Augustin sur le Cœur de Jésus le jour des Rameaux ? Parce que ma vieille expérience me montre que toutes ces cérémonies religieuses, qui sont bien modestes quant à la foule qui y participe, reçoivent leur sens par le sérieux du curé, par la majesté de sa fonction, par sa foi. Le prêtre représente Jésus-Christ et doit avoir le sentiment de la majesté du Christ qu’il représente et en même temps le sentiment de la grande compassion du Christ pour cette petite foule qui l’acclame.
C’est dérisoire, et cependant Jésus aime cette cérémonie... et à cause de sa bonté qui accepte de si petites choses, nous conservons l’assurance qu’à travers l’épreuve de la vie il nous promet la victoire. Voilà pourquoi nous devons être heureux de participer à cette petite cérémonie d’aujourd’hui, et être satisfaits des hommages que nous avons adressés à notre Sauveur. Nous avons dit à Notre-Seigneur qu’il est encore aujourd’hui notre Roi, que nous avons confiance en lui, que nous l’aimons et que nous voulons lui être fidèles malgré tout.
Dans les terribles années que nous vivons et qui sont des années d’apostasie, nous devons rester très fidèles à ces cérémonies de l’Église, les faire avec le plus grand sérieux, ne jamais en rire, ni non plus en avoir honte ou les trouver dépassées... Ces cérémonies ne sont pas grand-chose, mais il n’empêche que le Cœur de Dieu en est tout ému et consolé.
Nous acclamons le Christ, il est notre Roi, notre chef aujourd’hui comme il y a 2000 ans. Il est à notre tête et nous savons qu’à travers sa Passion et sa mort il nous conduira à la Résurrection. Nous avons la certitude qu’à travers la passion actuelle de son Église et sa mort apparente, c’est sa renaissance qui est programmée. À Fatima la Sainte Vierge nous assure que les épreuves n’auront qu’un temps, car « à la fin mon Cœur Immaculé triomphera ! »
Je vous invite donc à prendre la résolution de bien suivre nos cérémonies de la Semaine Sainte en vous disant que notre bon Dieu les regarde avec infiniment de compassion, et à cause d’elles il nous sauvera de l’heure mauvaise, gardera la foi de nos enfants et nous mènera jusqu’à la victoire du ciel.
Abbé Georges de Nantes
Extrait du sermon du 12 avril 1987