24 JUIN 2022
Entrer dans le Cœur de Jésus
EN ce jour où nous fêtons le Sacré-Cœur de Jésus, il nous est bon de nous mettre à l’école de la princesse Louise-Adélaïde de Bourbon-Condé, en religion mère Marie-Josèphe de la Miséricorde, qui fonda les “ Bénédictines du Temple ”, vouées à « la Réparation au moyen de l’Adoration perpétuelle du forfait que commit la France en brisant le pacte sacré qui la liait à Dieu ». Que cette méditation nous aide à pratiquer le culte intérieur du Sacré-Cœur que Notre Seigneur a demandé avec tant d’insistance à Mère Marie du divin Cœur.
« Ce qu’il y a de plus important dans la dévotion au Sacré-Cœur, c’est de ne pas attendre les grands événements pour recourir au Sacré-Cœur de Jésus ; dans les petites contrariétés qui se renouvellent si souvent, dans les moments de sécheresse ou de froideur, dans les sujets d’impatience, d’ennui, de dégoûts, dans ceux surtout où notre amour-propre se trouve blessé et humilié, descendons promptement au fond de notre cœur et appelons-y celui de l’adorable Ami, puisque c’est là qu’il daigne venir nous trouver quand nous le désirons vraiment. Il ne s’agit pas pour cela d’articuler une longue prière, encore moins d’ouvrir tel ou tel livre : il entend un soupir, un désir, un sentiment : une minute de recueillement peut nous procurer le bonheur de l’attirer en nous. Alors là, sur l’autel de notre cœur, offrons-lui un sacrifice qu’il ne rejettera jamais, quelque léger qu’il soit ; ou bien implorons-le pour obtenir ou les forces ou les consolations ; enfin, les secours dont nous avons besoin dans cet instant, soit pour éviter une faute, soit pour nous en relever, soit pour pratiquer quelques vertus, soit pour nous préserver de ce que nous pouvons craindre, soit pour nous obtenir ce qui nous est nécessaire...
« Je le répète, pour tout cela il ne faut qu’un soupir, une larme répandue sur le Cœur adorable de Jésus, qui ne peut jamais y être insensible. Nous voyons dans le saint Évangile quel fut le succès de la confiance qu’inspirait le bord de ses vêtements... “ Si je touche seulement la frange de sa robe, je serai guérie ! ” Ah ! pourrions-nous moins espérer de son Cœur ? Tenons-nous-y constamment attachés, et pour cela, quelles que soient nos occupations, renouvelons d’heure en heure et plus souvent, s’il est possible, notre union avec le Cœur de Jésus : demandons-lui qu’il veuille bien suppléer à ce qu’il y a en nous de faible et d’imparfait, et offrons à tout moment les actes d’amour et de toutes les autres vertus qu’il produit sans cesse dans le très Saint-Sacrement ; car alors nous aurons le bonheur de présenter à Dieu des hommages dignes de lui...
« Persuadons-nous bien que cette intime et confiante familiarité avec le Sacré-Cœur de Jésus, qui ne nuit en rien au profond respect que la créature doit à son créateur, est un puissant moyen pour parvenir réellement à l’union sainte qui seule peut donner quelque prix à nos sentiments, à nos paroles, à nos actions, à nos pensées, à nos vertus mêmes.
Pour sentir l’importance et l’avantage de cette conduite, pénétrons-nous de la pensée qu’au jour du jugement, le Père éternel ne nous reconnaîtra pour ses enfants que revêtus des mérites de son Fils, et unis à lui, de cœur, d’affection et surtout d’imitation ; car voilà la plus sûre manière de se revêtir de ses mérites. Pour y parvenir, mettons tous nos soins à la pratique du recueillement intérieur, et demandons-le avec toute l’ardeur possible ; c’est une grâce qui conduit, pour ainsi dire, à la réception de toutes les autres. On peut le comparer au roc sur lequel l’homme sage a bâti sa maison. Et l’esprit de dissipation, au contraire, au sable mouvant sur lequel l’insensé bâtit la sienne. Jésus, plus sage que tous les hommes sans nul doute, ne se bâtira donc point une demeure sur le sable, mais bien sur le roc ; rapprochons-nous le plus souvent possible de son Sacré-Cœur, et élevons vers lui nos pensées et nos sentiments. Appuyons-nous sur lui, attachons-y notre propre cœur, et espérons ainsi de nous rendre semblables à ces jeunes vignes qui, s’entrelaçant à un arbre beaucoup plus solide et plus élevé qu’elles, parviennent presque à la même hauteur, et font voir leurs fruits entremêlés avec ceux de l’arbre même.
« Ne nous lassons jamais, non jamais, de le prendre pour appui et pour modèle. Ne voyons-nous pas à chaque page du saint Évangile, tantôt que ce divin Sauveur leva les yeux au ciel avant de parler ou d’agir, tantôt qu’il se retirait pour prier en secret, tantôt qu’il s’adressa à son Père publiquement, le glorifia et déclara n’être venu que pour accomplir sa volonté ? Ne voyons-nous pas enfin qu’à son dernier soupir il remit son âme entre ses mains ? Ah ! n’attendons pas le nôtre pour nous abandonner entièrement au Cœur adorable de notre Rédempteur, de notre divin Ami, et pour former avec lui une union qui seule peut donner quelque prix à une vie momentanée, que le Ciel ne nous a accordée qu’en vue de mériter celle où il nous sera permis à jamais et éternellement de nous abîmer dans cette fournaise d’amour, où nous chanterons et célébrerons éternellement les grandes miséricordes du Seigneur. Amen !
Frère Bruno de Jésus-Marie
Extrait du sermon du 20 juin 2004