Ps 2 : Le Sacre du Roi Messie,
Fils de Dieu, Fils de Marie
L E psaume premier ouvre le recueil des 150 psaumes, comme le premier volet d'une préface, dont le second volet est le psaume deuxième. Ce diptyque exprime déjà toute la foi et l'espérance messianiques, c'est-à-dire royalistes, ainsi qu'un très pur amour de Dieu auquel se réchauffe le nôtre aujourd'hui, sept fois le jour, au rythme de l'office divin.
- Pourquoi les nations frémissent-elles et les peuples murmurent-ils un néant ?
- Les rois de la terre prennent position et les princes forment une union contre Yahweh et contre son Oint :
- « Allons, brisons leurs entraves, faisons sauter leur joug ! »
- Celui qui siège dans les cieux s'en amuse, Adonaï les tourne en dérision.
- Puis il leur parle avec colère, et avec sa fureur il les épouvante :
- « Moi, j'ai sacré mon roi sur Sion, ma Montagne sainte. »
- Je publierai le décret de Yahweh. Il m'a dit : « Tu es mon Fils. Moi, aujourd'hui, je t'ai engendré.
- « Demande-moi et je te donnerai les nations pour héritage, et pour domaine les extrémités de la terre.
- « Tu les paîtras avec un sceptre de fer, et comme vase de potier tu les martèleras. »
- Et maintenant, rois, soyez intelligents. Instruisez-vous, juges de la terre.
- Servez Yahweh avec crainte, et tressaillez de joie.
- Baisez le Fils de peur qu'il ne s'irrite et que vous ne perdiez votre chemin, car sa colère s'enflamme d'un coup ; bienheureux ceux qui s'abritent en Lui !
Le psaume deuxième expose dans toute son ampleur cosmique le combat sans merci qui oppose les justes et les méchants. Au même moment où ils se moquent des justes sur terre, les méchants sont en réalité en guerre contre Dieu et son Messie, le Christ-Roi.
Le premier verset oppose à l'homme qui « murmure » la Loi de Yahweh jour et nuit, loué par le psaume premier (Ps 1, 2), ces peuples qui « murmurent »... quoi ? « Rien » ! rîq. En face de la Loi de Yahweh, sagesse d'Israël, il n'y a que néant !
1. Pourquoi les nations frémissent-elles et les peuples murmurent-ils un néant ?
Le verset 2 décrit une coalition symétrique, et parallèle à celle du « conseil » que tiennent les impies au début du psaume premier, assis au « banc des rieurs » (Ps 1, 1) :
2. Les rois de la terre prennent position et les princes forment une union contre Yahweh et contre son Oint.
« Les rois et les princes » : la même expression désigne les autorités de la Terre sainte dans le livre des Proverbes. La Sagesse personnifiée y prend la parole et dit : « Par moi règnent les rois, et les princes décrètent le droit, et tous les juges de la terre [sainte]sont ennoblis. » (Pr 8, 15) Le psaume décrit donc une révolte de ces autorités contre le Messie, fils de David.
De qui s'agit-il ici ? L'histoire d'Israël est remplie de ces ligues de rois et de princes voisins de Jérusalem, généralement fomentées par le roi de Samarie, capitale du royaume schismatique du Nord, nouant des alliances étrangères contre le successeur légitime de David, roi de Jérusalem, « Oint » de Yahweh, en hébreu « Messie », en grec « Christ », fils de David. Comme au temps du roi Josaphat lorsque, assailli par une horde d'envahisseurs, celui-ci implora Yahweh : « Toi qui es Dieu dans les cieux, toi qui domines sur tous les royaumes des nations » ; il s'entendit répondre par la voix d'un lévite : « Juda et Jérusalem, ne craignez pas, ne vous effrayez pas, partez demain à leur rencontre et Yahweh sera avec vous. » (2 Ch 20, 6 et 17)
De même, le chapitre 7 du livre d'Isaïe raconte une coalition des rois de Damas et de Samarie, en 734 avant Jésus-Christ. Pour rendre courage à Jérusalem, et à son « Oint », le roi Achaz, Yahweh envoya le prophète Isaïe lui annoncer qu'une Vierge concevrait un enfant merveilleux, auquel elle donnerait le nom d'Emmanuel, « Dieu avec nous » (Is 7, 14).
À la lumière de ces événements anciens, le psalmiste éclaire une situation nouvelle mais parallèle.
3. « Allons, brisons leurs entraves, faisons sauter leur joug ! »
Les « entraves » que les coalisés veulent briser sont les « liens d'amour » par lesquels Yahweh conduisait son peuple lorsqu'il était enfant, avant le schisme des dix tribus, selon le prophète Osée : « J'apprenais à marcher à Éphraïm [personnification des dix tribus qui firent sécession après Salomon], je les prenais dans mes bras. » Alors, Israël était comme un enfant dans les bras de Dieu. « Je les menais avec de douces attaches, avec des liens d'amour. » (Os 11, 4) Ce sont ces « douces attaches » que les coalisés veulent aujourd'hui briser comme des « entraves » à leur liberté !
Et voici pour le « joug » qu'ils font profession d'abhorrer : « Éphraïm est une génisse bien dressée, aimant à fouler l'aire ; eh bien ! moi, je ferai passer le joug sur son cou magnifique, j'attellerai Éphraïm, Israël labourera, Jacob traînera la herse. »
Pour cultiver quoi ? La justice : « Faites-vous des semailles de justice, moissonnez une récolte de bonté ; défrichez-vous des terres nouvelles : il est temps de chercher Yahweh, jusqu'à ce qu'il vienne répandre sur vous la justice. » (Os 10, 11-12)
Mais si l'on fait sauter les « entraves », l'attelage et le « joug », il n'y a plus de récolte possible !
Cent ans après Osée, Jérémie appliquera les mêmes images à Jérusalem elle-même : « Oui, depuis longtemps tu as brisé ton joug, rompu tes liens ; tu as dit : “ Je ne servirai pas. ” » (Jr 2, 20) Le psalmiste reprend les termes de Jérémie s'en prenant particulièrement aux « grands », c'est-à-dire aux autorités : « Je vais donc aborder les grands et leur parler, car ils connaissent, eux, la voie de Yahweh et le droit de leur Dieu ! Or, eux aussi avaient brisé le joug, rompu les liens ! » (Jr 5, 5) Comment ne pas remarquer l'actualité de ces oracles prophétiques et des psaumes, dans notre France contemporaine, « tribu de Juda de la Nouvelle Alliance », comme l'appelait saint Pie X !
Un jour, Yahweh donna cet ordre à Jérémie : « Fais-toi des cordes et un joug et mets-les sur ta nuque », et Dieu l'envoya délivrer son oracle aux rois d'Édom et de Moab, au roi des Ammonites, aux rois de Tyr et de Sidon : « La nation ou le royaume qui ne se soumettra pas à Nabuchodonosor, roi de Babylone, et n'offrira pas sa nuque au joug du roi de Babylone, c'est par l'épée, la famine et la peste que je visiterai cette nation. » (Jr 27, 8)
En définitive, ces « rois » et ces « princes » en rébellion contre Yahweh et contre son Oint, au temps de la rédaction du psaume deuxième, sont tout à la fois ceux de Samarie et ceux de Jérusalem, et leurs voisins. Déjà au temps d'Isaïe, Achaz se montra lui-même rebelle, comme une génisse rétive au joug, en refusant le « signe » que Dieu voulait lui donner de sa protection :le signe de la Vierge qui devait enfanter (Is 7, 14). C'est exactement ce que nous revivons aujourd'hui.
4. Celui qui siège dans les cieux s'en amuse, Adonaï les tourne en dérision.
Le Père de Foucauld goûtait un grand réconfort à voir Dieu s'amuser de cette coalition de peuples !
« S'oublier soi-même dans la joie de votre gloire, c'est ce que nous apprennent les premiers versets de ce psaume. » (Méditations sur les Psaumes, nouvelle cité, 2002, p. 46)
Soixante ans plus tard, l'abbé de Nantes écrivait à ses amis : « Ce psaume explique mieux le désordre fou des événements que le journal du matin. Les hommes sans Dieu s'affrontent, les chefs de la France chrétienne même sont tous ennemis de l'Église ! Ce joug qu'ils entendent secouer, c'est celui dont Jésus disait : “ Apprenez de moi que je suis doux et humble de cœur ; prenez sur vous mon joug, car il est doux et mon fardeau léger. ” » (Lettre à mes amis n° 2, novembre 1956)
Dans le psaume deuxième, les rôles sont renversés par rapport au psaume premier où ceux qui sont « assis » sont les railleurs, les impies qui se moquent des justes. Ici, c'est Adonaï qui « siège » sur son trône, rit et se moque des entreprises des méchants. Le Nouveau Testament nous apprendra que cette révolte le fait souffrir, jusqu'à en mourir. Mais nous n'en sommes pas encore là. Nous sommes au quatrième siècle avant Jésus-Christ, comme nous allons le dire. Dieu se moque, comme la Sagesse personnifiée nargue ceux qui méprisent ses conseils et ses remontrances (Pr 1, 26).
5. Puis il leur parle avec colère, et avec sa fureur il les épouvante :
Il ne faut pas traduire, comme la Bible de Jérusalem, « dans sa colère », « dans sa fureur », puisqu'on vient de dire que Dieu « rit » ! Dieu ne change pas d'humeur comme nous... C'est seulement pour leur parler qu'il emploie le ton de la colère, c'est au moyen de sa fureur qu'il les frappe d'épouvante. Thème traditionnel, ici expression de l'amour jaloux de Yahweh pour Jérusalem : « Ainsi parle Yahweh Sabaot : j'éprouve pour Sion une ardente jalousie et en sa faveur une grande colère. Ainsi parle Yahweh Sabaot. Je reviens à Sion et veux habiter au milieu de Jérusalem. Jérusalem sera appelée Ville de Fidélité, et la montagne de Yahweh Sabaot, Montagne sainte. » (Za 8, 2-3)
Et que leur dit-il sur le ton de la colère ?
6. « Moi, j'ai sacré mon roi sur Sion, ma Montagne sainte. »
C'est la réponse divine aux rois coalisés qui projetaient de monter contre Juda et d'y faire roi un usurpateur :
« Montons contre Juda pour l'épouvanter et nous en emparer, et nous y ferons roi le fils de Tabéel. Ainsi parle le Seigneur Yahweh : “ Cela ne tiendra pas ; cela ne sera pas. ” » (Is 7, 6-7).
Telle est encore aujourd'hui la réponse de Dieu à tous les “ présidents ” de la planète révoltés contre lui : Vous ne réussirez jamais à faire votre Société des Nations en dehors du Christ. Au projet politique des rois de Samarie et de Damas, Dieu opposait jadis le « signe » de la Vierge qui devait enfanter « Emmanuel », « Dieu avec nous » (Is 7, 14), signe de la victoire de Dieu sur tous ses ennemis. Le psalmiste poursuit le parallèle avec l'oracle d'Isaïe. Mais, selon son oracle nouveau, l'enfant naît de Dieu, ce qui n'est pas contradictoire avec la parthénogenèse, au contraire. Et c'est cet Enfant divin qui parle :
7. Je publierai le décret de Yahweh.
Il m'a dit : « Tu es mon Fils. Moi, aujourd'hui, je t'ai engendré.
Cet « aujourd'hui » est le « Jour de Yahweh », « Jour de Colère » (So 1, 14-18 ; Jl 2, 1-2), considéré comme présent et coïncidant avec l'avènement du Messie royal annoncé par les prophètes Isaïe et Michée. Car, chose nouvelle, révélée par le Scribe inspiré, auteur du Livre des Proverbes, cet « aujourd'hui » est déjà là depuis le commencement de la création : « Dès l'éternité, je fus sacrée, dès le commencement, dès les origines de la terre » (Pr 8, 23), dit la Sagesse personnifiée, préexistante auprès de Dieu créateur.
Depuis des siècles, l'Église met cette prosopopée dans la bouche de la Vierge Notre-Dame.
« Je fus sacrée », c'est-à-dire marquée de l'onction de l'Esprit de Dieu, dit-elle après s'en être attribué les Sept Dons de sagesse et d'intelligence, de conseil et de force, de science, de crainte et de piété (cf. Is 11, 2 ; Pr 8, 12-14).
Nous savons, en effet, que la Sainte Vierge est le sanctuaire, le réceptacle des dons du Saint-Esprit.
Pour parler comme saint Paul (Hb 1, 5), auquel des rois de Juda Dieu a-t-il jamais dit : « Tu es mon Fils, aujourd'hui je t'ai engendré » ? Mais à la Sagesse personnifiée et préexistante, il a dit : Tu es ma Fille, puisqu'elle le proclame : « Quand les abîmes n'existaient pas, je fus enfantée. » (Pr 8, 24) Quel mystère !
Grâce à la Sagesse, demeure vive l'espérance messianique du psalmiste, c'est-à-dire sa foi “ royaliste ”, dans un temps où il n'y a plus de roi en Israël. Toute la ferveur des fidèles yahwistes de Jérusalem se reporte sur cette Sagesse préexistante auprès de Dieu, mystérieuse, qui n'est autre que la Vierge qui doit enfanter annoncée par le prophète Isaïe.
Le décret de Yahweh continue, à l'adresse de son Oint, de son Messie, de son Christ :
8. « Demande-moi et je te donnerai les nations pour héritage, et pour domaine les extrémités de la terre.
Le roi Achaz, dans sa rébellion contre Yahweh, avait refusé de demander le signe que lui proposait le prophète Isaïe : « Je ne demanderai rien, je ne tenterai pas Yahweh. » (Is 7, 12) De la même manière, le Pape refuse aujourd'hui d'obéir au Ciel par la consécration de la Russie au Cœur Immaculé de Marie, seule capable de mettre fin à la guerre internationale.
Le Fils, lui, demande et obtient de Yahweh son Père, son héritage, non seulement Israël, héritage traditionnel de Yahweh depuis les débuts de l'Alliance, mais les « nations ». Ce changement notable avait été annoncé par l'Inconnu de l'Exil dans le deuxième chant du Serviteur :
« C'est trop peu que tu sois pour moi un serviteur pour relever les tribus de Jacob et ramener les survivants d'Israël. Je fais de toi la lumière des nations pour que mon salut atteigne aux extrémités de la terre. » (Is 49, 6)
9. « Tu les paîtras avec un sceptre de fer, et comme vase de potier tu les martèleras. »
Pour houlette le Messie reçoit « un sceptre de fer », insigne de sa royauté, comme Juda le reçut en héritage de son père Jacob : « Le sceptre ne s'éloignera pas de Juda, ni le bâton de chef d'entre ses pieds, jusqu'à la venue de Celui à qui il est, à qui obéissent les peuples. » (Gn 49, 10)
Donc, le roi viendra bien de la Judée, selon la prophétie de Michée citée par les scribes d'Hérode lors de la visite des mages : « Il fera paître son troupeau par la puissance de Yahweh. » (Mi 5, 3)
Ce Roi paîtra son troupeau dans l'équité :
« Il jugera les faibles avec justice, il rendra une sentence équitable pour les humbles du pays. Il frappera le pays du sceptre de sa bouche, et du souffle de ses lèvres fera mourir le méchant. » (Is 11, 4)
« Tu les martèleras » : le psalmiste reprend ici, pour l'appliquer au Messie, l'oracle du livre de Jérémie sur Israël, marteau de Yahweh :
« Tu fus un marteau à mon usage, une arme de guerre. Avec toi j'ai martelé des nations, avec toi j'ai détruit des royaumes. » (Jr 51, 20 sq.) Détruits... « comme vase de potier », c'est-à-dire de manière irréparable ; car « ainsi parle Yahweh Sabaot : “ Je vais briser ce peuple et cette ville comme on brise le vase du potier, qui ne peut plus être réparé. ” » (Jr 19, 11)
C'est donc très sérieux. Les juifs qui récitaient ces psaumes étaient bien avertis. Aussi le Messie lance-t-il un avertissement solennel :
10. Et maintenant, rois, soyez intelligents. Instruisez-vous, juges de la terre.
Ce qui est demandé aux rois, c'est de comprendre le dessein de Dieu, d'être « intelligents ». Aujourd'hui, on le répéterait en vain à nos chefs d'État démocratiques ! Le verbe hébreu signifie l'intelligence des choses divines, promise au Messie par le prophète Jérémie : « Voici venir des jours – oracle de Yahweh – où je susciterai à David un germe juste qui régnera en vrai roi et sera intelligent. » (Jr 23, 5)
Les « juges de la terre » étaient des “ charismatiques ” : non pas des juges rendant la justice, mais des “ dictateurs ” gouvernant le peuple par une grâce, un charisme reçu pour une mission temporaire, au temps où il n'y avait pas encore de rois en Israël ; par exemple Gédéon, Samson, Déborah. Mais ici, sachant que le psalmiste écrit après le retour de l'Exil, dans un temps où il n'y a plus de roi (cf. notre commentaire du Psaume premier, Il est ressuscité no 18, janvier 2004, p. 25), qui cela vise-t-il ? Des hommes de Dieu tels que Zorobabel, Esdras, Néhémie ?
La seule réponse utile à faire à cette question est de considérer que cet oracle antique est, dans la bouche de notre sainte Mère l'Église, un avertissement à notre monde présent d'avoir à se convertir avant qu'il ne soit trop tard, comme le rappelait notre Père, dans un sermon de Noël, en 1992 :
« Car, en Dieu, la colère de sa Sainteté outragée, la Miséricorde de son Cœur toujours fidèle, pour ainsi dire se battent à savoir laquelle triomphera de l'autre : la Justice dans toute sa rigueur ou la Miséricorde dans toute sa douceur. Ce prophète s'interroge et, nous allons le deviner, il parle au nom du Christ. »
11. Servez Yahweh avec crainte, et tressaillez de joie.
À l'opposé du “ non serviam ” des rois de la terre ligués contre Yahweh (v. 3), les « juges de la terre » sont invités à joindre à la crainte de Yahweh un tressaillement d'allégresse contraire au frémissement des païens (v. 1), conforme à la joie messianique proclamée par le prophète Zacharie :
« Exulte avec force, fille de Sion ! Crie de joie, fille de Jérusalem ! Voici que ton roi vient à toi : il est juste et victorieux, humble, monté sur un âne, sur un ânon, le petit d'une ânesse. » (Za 9, 9)
L'oracle de Zacharie est généralement daté de la conquête d'Alexandre, interprétée par le prophète comme une action de Yahweh préludant à l'ère messianique.
Les Évangélistes racontent comment les Apôtres ont vu se réaliser cet oracle le jour des Rameaux.
12. Baisez le Fils de peur qu'il ne s'irrite et que vous ne perdiez votre chemin, car sa colère s'enflamme d'un coup ; bienheureux ceux qui s'abritent en Lui !
La conclusion rejoint celle du psaume premier : « La voie des impies aura une fin. » (Ps 1, 6) Le psalmiste insiste pour que nous choisissions bien, afin de ne pas terminer mal, comme les impies ou les nations révoltées contre Dieu, encourant la colère divine qui les fera disparaître définitivement.
« Baisez le Fils ». La recommandation du psalmiste embarrasse les exégètes qui ne comprennent pas ! Il faut reconnaître qu'elle est surprenante, car la Bible n'est pas riche en effusions de ce genre ! C'est en réalité un geste d'adoration, d'hommage, de révérence envers le Messie, c'est un rite liturgique, semblable au baiser de paix que les frères de la communauté donnent à un nouveau novice le jour de sa prise d'habit. Ce « baiser » fait partie du cérémonial du sacre du Messie. Samuel baisa ainsi Saül après l'avoir oint de la part de Yahweh « comme chef sur son héritage. » (1 S 10, 1) À ce baiser aspire plus encore la Bien-Aimée du Cantique des cantiques : « Ah ! que ne m'es-tu un frère, allaité aux seins de ma mère ! Te rencontrant dehors, je pourrais t'embrasser sans que les gens me méprisent. » (Ct 8, 1)
C'est pourquoi, la béatitude de « ceux qui s'abritent en lui » est vraiment le dernier mot du psaume, semblable à la bénédiction de Ruth la Moabite par Booz :
« Que Yahweh te rende ce que tu as fait et que tu obtiennes pleine récompense de la part de Yahweh, le Dieu d'Israël, sous les ailes de qui tu es venue t'abriter ! » (Rt 2, 12)
CONCLUSION
DIVINE ORTHODROMIE
Le contact avec la deuxième partie du livre de Zacharie permet de dater ce psaume de la conquête d'Alexandre, après la bataille d'Issus (333), qui ébranla les peuples de la région. Les royaumes du Nord fomentèrent alors une révolte schismatique contre Jérusalem, qui aboutit à l'érection du temple samaritain sur le mont Garizim en 328 avant Jésus-Christ.
Cette révolte des Samaritains peut être mise en parallèle avec celle des princes de Damas et de Samarie, trois cents ans auparavant. Elle offre au psalmiste l'occasion de réveiller l'espérance de l'avènement du Messie promis à Jérusalem, même s'il n'y a plus de roi de la lignée de David, et malgré la défection des faux frères, à cause de la promesse faite par Isaïe à Achaz : « Voici, la Vierge est enceinte, elle enfantera un Fils et lui donnera le nom d'Emmanuel. » (Is 7, 14) Ce nom signifie « Dieu avec nous. » Et parce que « Dieu est avec nous », les peuples révoltés contre Dieu et son Oint sont avertis de leur défaite certaine : « Faites un projet, il est brisé ; faites un discours, il est inconsistant, car “ Dieu est avec nous ”. » (Is 8, 10)
Le projet de « briser » les « entraves » de Yahweh et de son Oint (v. 2), formulé dans « un discours inconsistant » (v. 3), sera lui-même brisé par le « sceptre de fer » du Messie et l'oracle de Yahweh d'autant plus inébranlable que le Messie, le “ fils de David ” à venir, est révélé par le scribe inspiré devoir être le propre “ Fils de Dieu ”, Dieu lui-même, « Dieu avec nous ».
Cet oracle s'accomplira littéralement lors du Baptême, qui fut le Sacre de Notre-Seigneur Jésus-Christ dans les eaux du Jourdain. « Et une voix partit du ciel : “Tu es mon Fils ; moi, aujourd'hui je t'ai engendré ”. » (Lc 3, 21-22) Saint Jean-Baptiste a cru un moment que Jésus allait venir avec sa masse de fer pour écraser toutes les nations. Il a été surpris de la douceur et de la miséricorde de son cousin. Si Dieu lui donne les nations avec pouvoir d'exercer la justice divine, mais non pas dans un carnage épouvantable, c'est qu'Il a un autre dessein, qui est de Rédemption et de Salut.
Frère Bruno de Jésus
Il est ressuscité ! tome 4, n° 19, février 2004, p. 7-10