Il est ressuscité !

N° 257 – Juillet-Août

Rédaction : Frère Bruno Bonnet-Eymard


CAMP NOTRE-DAME DE FATIMA 2023

L’Évangile de Jésus-Marie (9) 
Résurrection - Ascension

JÉSUS est ressuscité, « selon les Écritures ». C’est la grande preuve de la vérité historique d’un événement auquel personne n’a assisté, mais qui a eu lieu en accomplissement de prophéties millénaires. C’est pourquoi, aux disciples d’Emmaüs, Jésus administre une grande leçon d’Écriture sainte : « Commençant par Moïse et parcourant tous les prophètes, Jésus leur interpréta dans toutes les Écritures ce qui le concernait. » (Lc 24, 27)

De retour à Jérusalem, « ils trouvèrent réunis les Onze et leurs compagnons, qui dirent : C’est bien vrai ! le Seigneur est ressuscité et il est apparu à Simon ! » Et aussitôt « il se tint au milieu d’eux et leur dit : Paix à vous ! ” [...] Puis il leur dit :Telles sont bien les paroles que je vous ai dites quand j’étais encore avec vous : il faut que s’accomplisse tout ce qui est écrit de moi dans la Loi de Moïse, les Prophètes et les Psaumes. ” Alors, il leur ouvrit l’esprit à l’intelligence des Écritures, et il leur dit : Ainsi est-il écrit que le Christ souffrirait et ressusciterait d’entre les morts le troisième jour, et qu’en son Nom le repentir en vue de la rémission des péchés serait proclamé à toutes les nations, à commencer par Jérusalem. De cela, vous êtes témoins. ” » (Lc 24, 33-48)

C’est donc à partir des Écritures que tous les événements de la vie de Jésus dévoilent leur sens. Les paroles de Jésus en sont l’illustration continuelle, comme dans son “ Discours sur le Pain de vie ” où il évoque la figure de la manne :

« “ En vérité, en vérité, je vous le dis, non, ce n’est pas Moïse qui vous a donné le pain qui vient du Ciel ; mais c’est mon Père qui vous le donne, le pain qui vient du Ciel, le vrai ; car le pain de Dieu, c’est celui qui descend du Ciel et donne la vie au monde. ” »

« Ils lui dirent alors :Seigneur, donne-nous toujours ce pain-là. ” Jésus leur dit : “ « Je suis le pain de vie. ” » (Jn 6, 32-35)

« Je suis », en grec, egô eimi évoque le nom divin révélé à Moïse, par lequel Jésus s’identifie à son Père qui l’a envoyé nous donner la vie.

« Car je suis descendu du Ciel pour faire non pas ma volonté, mais la volonté de Celui qui m’a envoyé. Or, c’est la volonté de Celui qui m’a envoyé que je ne perde rien de tout ce qu’il m’a donné, mais que je le ressuscite au dernier jour. Oui, telle est la volonté de mon Père, que quiconque voit le Fils et croit en lui ait la vie éternelle, et je le ressusciterai au dernier jour. » (Jn 6, 38-40)

Parce qu’il doit mourir pour ressusciter lui-même d’abord, Jésus est aussi identifié à l’Agneau par saint Jean-Baptiste : « Voici l’Agneau de Dieu. » (Jn 1, 37)

Par le sang de l’Agneau, les fils d’Israël ont été préservés de l’ange exterminateur au moment de quitter l’Égypte : le sang de la victime, marquant la porte des maisons des Hébreux, les préserva de la dixième plaie d’Égypte qui décima tous les premiers-nés et obligea Pharaon à laisser partir les Hébreux conduits par Moïse.

En voyant venir vers lui Jésus, « à Béthanie au-delà du Jourdain où il baptisait », Jean le Précurseur dit : « Voici l’agneau de Dieu, qui enlève le péché du monde. » (Jn 1, 29)

En référence au Serviteur dont Isaïe prophétisait que « Yahweh a fait retomber sur lui nos fautes à tous. Maltraité, il s’humiliait, il n’ouvrait pas la bouche, comme l’agneau qui se laisse mener à l’abattoir... Après les épreuves de son âme, il verra la lumière et sera comblé. Par ses souffrances, mon Serviteur justifiera des multitudes en s’accablant lui-même de leurs fautes. » (Is 53, 6-11)

Plus tard, Jean revoit dans le Ciel « debout entre le trône des quatre Vivants et les Vieillards » cet Agneau qui a été immolé pour le salut du monde et devant lequel se prosternent les quatre Vivants et les vingt-quatre Vieillards, « tenant chacun une harpe et des coupes d’or pleines de parfums, les prières des saints » (Ap 5 , 8). Le titre d’Agneau est donné à Jésus une trentaine de fois dans l’Apocalypse. Ainsi, d’un bout à l’autre de la sainte Écriture, la passion et la résurrection du Christ sont « le grand secret de toutes les prophéties », selon saint Pierre :

« Sur ce salut ont porté les investigations et les recherches des prophètes, qui ont prophétisé la grâce à vous destinée. Ils ont cherché à découvrir quel temps et quelles circonstances avait en vue l’Esprit du Christ, qui était en eux, quand il attestait à l’avance les souffrances du Christ et les gloires qui les suivraient. » (1 P 1, 10-11)

LE TEMPS DES TÉMOINS OCULAIRES

« Simon Pierre entra dans le tombeau. Il voit les linges, gisant à terre, ainsi que le suaire qui était sur sa tête ; non pas gisant avec les linges, mais roulé à part, en un seul lieu. Entra aussi l’autre disciple, arrivé le premier au tombeau. » (Jn 20, 6-8)

Le Père Silly commente : « Jamais on n’a appliqué tant de rigueur à la description d’un fait qu’en cette circonstance-là. Peut-être même cette précision est-elle restée depuis lors inégalée. Qui inférerait de ces versets que les témoins ont eu le dessein de tromper leur monde ? Qui peut dire qu’ils ont été victimes d’une hallucination ? Ils se sont contentés de proclamer ce qu’ils ont vu. Le contraste entre l’immensité cosmique de l’événement et la concision des traces qu’il laisse s’explique chez ses témoins par un souci de vérité qui va jusqu’au scrupule. » (Dictionnaire Jésus, p. 952-953)

Il n’y a pas de témoin de l’événement lui-même : l’âme de Jésus remontant des enfers et reprenant possession de son corps glorifié. Loin de prendre modèle sur la concision remarquable des témoins, le Père Silly « construit » ce qu’il appelle « le témoin idéal », en vrai disciple du Père Xavier Léon-Dufour : « Ce que prouve la disposition des linges, c’est que le cadavre (sic !) qui se trouvait à l’intérieur s’est volatilisé. » (ibid.)

Malheureusement, avec cette théorie du Père Silly, le fait de la résurrection perd toute consistance historique, il se “ volatilise ” lui aussi !

D’abord, il n’y a jamais eu de « cadavre », parce que le corps de Jésus, même séparé de son âme par sa cruelle mort, reste uni à la divinité du Fils de Dieu qui prit cette chair dans le sein de la Vierge Marie. La Vierge Marie, elle, le sait bien. C’est pourquoi elle ne monte pas au tombeau avec les saintes Femmes au matin de Pâques pour ensevelir le Corps de Jésus, sachant qu’il n’a pas besoin d’être embaumé pour échapper à la corruption.

La vérité est que la Résurrection de Jésus ouvre...

... UNE NOUVELLE CRÉATION.

« Au commencement était le Verbe. » (Jn 1, 1) Il faut entendre, « au commencement » du monde « était » au sens d’un éternel présent : « Est le Verbe » dont l’existence pleine et entière est « tournée vers Dieu ». Quelqu’un, distinct de Dieu, mais en tout égal à lui et, pour tout dire : Lui-même, lui aussi, Dieu.

Il en est ainsi « au commencement », mais aussi maintenant, et toujours, et dans les siècles des siècles ! « Tout arriva par lui, et rien sans lui ne serait arrivé de tout ce qui arriva. » (Jn 1, 3) On ne peut mieux dire que le monde est relatif au Verbe.

Après sa résurrection, omniprésent, il s’y montre à ses créatures quand il veut, où il veut, dans les conditions d’un Corps glorieux, dont les propriétés nous sont inconnues en ce monde !

C’est comme un recommencement de l’incarnation : naguère, trente ans auparavant, l’ange apparut à plusieurs reprises à Joseph pour lui dire de ne pas craindre et lui annoncer la bonne nouvelle de la conception du Sauveur ; ainsi, de même aux saintes Femmes, au jour de sa résurrection. La joie succède à la crainte ici et là. Et la prosternation des mages au temps de sa naissance se renouvelle dans celle des saintes Femmes rencontrant le Sauveur ressuscité et se jetant à ses pieds, Marie-Madeleine la première. Ses tendres effusions nous montrent que la résurrection de Jésus est la preuve et la suite de son Incarnation.

Au matin de Pâques, elle courut au tombeau pour embaumer le corps de Jésus avec les autres saintes Femmes. Celles-ci retournent prévenir les Apôtres que le tombeau est ouvert et vide. Mais elle remonte, elle, le cœur débordant d’amour. Elle ne sait qu’aimer, elle cherche le corps de son Bien-Aimé, un peu comme Thomas demande à mettre ses doigts dans les trous que les clous ont faits dans les mains de Jésus. Mais elle, ce n’est pas par incrédulité, mais par amour. En parfaite et fidélissime amante, elle se sait aimée et destinée à l’union totale. Elle reste auprès de lui, et c’est lui qui ne peut y résister :

« Marie se tenait près du tombeau, au-dehors, en pleurs. Or, tout en pleurant, elle se pencha vers l’intérieur du tombeau et elle voit deux anges, en vêtements blancs, assis là où avait reposé le corps de Jésus, l’un à la tête et l’autre aux pieds.

« “ – Pourquoi pleures-tu ? lui disent-ils.

“ – Parce qu’on a enlevé mon Seigneur, et je ne sais où on l’a mis. ”

« Ayant dit cela, elle se retourna, et elle voit Jésus qui se tenait là, mais elle ne savait pas que c’était Jésus.

“ – Femme, pourquoi pleures-tu ? Qui cherches-tu ?

« Le prenant pour le jardinier, elle lui dit : Seigneur, si c’est toi qui l’as emporté, dis-moi où tu l’as mis, et je l’enlèverai.

– Marie...

– Rabbouni ! ” » (Jn 20, 11-16)

Elle se jette à ses pieds et s’en empare, non pas pour vérifier qu’il est ressuscité, mais pour couvrir de baisers les saints stigmates qu’elle découvre glorieux, après avoir contemplé les cruelles plaies des pieds cloués à la croix. Elle veut retenir Jésus tout à elle, mais il la repousse gentiment : « Cesse de me retenir, car je ne suis pas encore monté vers le Père. Va plutôt trouver mes frères et dis-leur : Je monte vers mon Père et votre Père, vers mon Dieu et votre Dieu. »

Donc, pour l’heure, il est toujours de ce monde, ici-bas.

Depuis que Jésus a consommé son sacrifice, disant à Marie, sa Mère : « Voici votre fils » en désignant Jean, ses disciples ne sont plus seulement des serviteurs, ni même des amis, mais des fils de son Père comme de sa Mère, et donc des « frères », fils de Marie et fils de Dieu comme Lui.

Alors, pour mettre un terme aux effusions de Marie-Madeleine et se dégager de ses bras qui, tendrement, le tiennent embrassé, il lui donne une mission. Elle le lâche et y court :

« Marie de Magdala vient annoncer aux disciples : J’ai vu le Seigneur. ” » (Jn 20, 17-18)

Or « le soir, ce même jour, le premier de la semaine, et les portes étant closes, là où se trouvaient les disciples, par peur des juifs, Jésus vint et se tient au milieu d’eux, et leur dit : Paix à vous ! Ayant dit cela, il leur montra ses mains et son côté. » (Jn 20, 19-20)

« Les disciples furent remplis de joie à la vue du Seigneur. » À la vue des glorieux stigmates, c’est la joie de la certitude de la résurrection du Seigneur, qui renoue, après l’épreuve, avec les mystères joyeux des commencements, de la naissance et de l’enfance de Jésus.

« Il leur dit de nouveau : Paix à vous ! Comme le Père m’a envoyé, moi aussi je vous envoie ”. » C’est que l’heure est venue de récolter le fruit de son sacrifice rédempteur.

« Ayant dit cela, il souffle sur eux et leur dit : Recevez l’Esprit-Saint. Ceux à qui vous remettrez les péchés, ils leur seront remis ; ceux à qui vous les retiendrez, ils leur seront retenus. ” »

Cette parole marque l’accomplissement de celle de saint Jean-Baptiste annonçant que Jésus serait le rédempteur du monde : « Voici l’Agneau de Dieu, qui enlève le péché du monde. » (Jn 1, 29) Le Précurseur avait ensuite vu l’Esprit descendre du Ciel comme une colombe, et reposer sur Jésus au jour de son baptême. « Et moi, j’ai vu et je témoigne que celui-ci est l’Élu de Dieu. » (Jn 1, 34)

« C’est lui qui baptise dans l’Esprit-Saint », promettait-il. Et l’on peut dire que tout le quatrième Évangile est marqué par cette attente du Saint-Esprit. Mais après la résurrection de Jésus, le souffle de sa bouche de Verbe incarné est porteur de l’Esprit-Saint promis. Il transmet ainsi aux Apôtres le pouvoir qui était le sien et dont il a usé pendant sa vie mortelle, de remettre les péchés et de les « retenir » : pouvoir de juge pour pardonner et pour condamner, et qui donnait à son enseignement toute sa puissance et sa fécondité. Cependant, au cours de sa vie publique il parlait à des sourds, parce que l’Esprit ne leur avait pas encore été donné, Jésus n’ayant pas été glorifié.

C’est à l’incrédulité de Thomas que nous devons la révélation du prix du pardon. Parce qu’il n’était pas présent lors de cette apparition de Jésus. Aussi, lorsque les autres lui dirent : « Nous avons vu le Seigneur ! » il leur dit : « Si je ne vois pas dans ses mains les marques des clous, si je ne mets pas mon doigt dans la marque des clous, et si je ne mets pas ma main dans son côté, je ne croirai pas. » (Jn 20, 25)

Ainsi, nous apprenons que Jésus a été fixé à la croix par des clous ! Depuis lors, le chrétien puise dans la contemplation du Christ sur sa croix force et vigueur surnaturelle. Avec le couronnement d’épines, la mise en croix de l’Agneau innocent achève de le mettre sur son trône de Christ-Roi, vainqueur de toutes les forces de l’Enfer et transfiguré par la Résurrection, et chef de l’Église.

LE TEMPS DE L’ÉGLISE

Avant de remonter au Ciel auprès de son Père, Jésus mime par avance ce que sera le temps de l’Église, par un retour aux premiers temps de sa vie publique en Galilée.

« Simon Pierre, Thomas, appelé Didyme, Nathanaël, de Cana en Galilée, les fils de Zébédée et deux autres de ses disciples se trouvaient ensemble. Simon Pierre leur dit : Je m’en vais pêcher. ” Ils lui dirent : Nous venons nous aussi avec toi. ” Ils sortirent, montèrent dans le bateau et, cette nuit-là, ils ne prirent rien.

« Or, le matin venu, Jésus se tint sur le rivage ; pourtant les disciples ne savaient pas que c’était Jésus. Jésus leur dit : Les enfants, vous n’avez pas du poisson ?Ils lui répondirent : Non !Il leur dit : Jetez le filet à droite du bateau et vous trouverez. ” Ils le jetèrent donc et ils n’avaient plus la force de le tirer, tant il était plein de poissons. Le disciple que Jésus aimait dit alors à Pierre : C’est le Seigneur !À ces mots : C’est le Seigneur !Simon Pierre mit son vêtement – car il était nu – et il se jeta à l’eau. » (Jn 21, 2-7)

Jean avait été le premier à discerner le « signe » du Suaire dans le tombeau vide : « Et il crut. » Il est encore le premier à saisir le “ signe ” de la pêche miraculeuse. Mais si Jean est le plus rapide, Pierre conserve la primauté : il entre le premier au tombeau ; il se jette à l’eau pour arriver le premier auprès de Jésus.

« Les autres disciples, qui n’étaient pas loin de la terre, mais environ à deux cents coudées, vinrent avec la barque, traînant le filet de poissons. Une fois descendus à terre ils aperçoivent, disposé là, un feu de braises, avec du poisson dessus, et du pain. »

Ainsi, pendant qu’ils travaillent, Notre-Seigneur leur prépare de la nourriture : il a allumé du feu, mis le pain à cuire et fait griller du poisson... qu’il s’est procuré... où ? Tout ce mystère annonce l’avenir. Tandis que peinent ses Apôtres, Jésus pourvoit, comme un père et une mère, à leurs besoins matériels, mais le pain est surtout la figure de son propre Corps dont il nourrira son Église au long des siècles par le sacrement de l’Eucharistie.

Les premiers chrétiens verront dans le poisson lui-même, déjà à l’honneur lors de la multiplication des pains, un symbole du mystère total de « Jésus-Christ, Fils de Dieu Sauveur », en grec : Jèsus Christos Théou Huios Sôter, cinq mots dont les initiales forment le mot icthus qui est un mot grec signifiant « poisson ». Grillé sur le feu, c’est la figure du sacrifice par lequel Jésus s’est offert sur la croix en “ holocauste ”, un sacrifice qui, dans la liturgie mosaïque, consistait en une destruction totale de la victime par le feu. Le Saint-Sacrifice de la messe accomplit lui-même cette figure par la transsubstantiation où le pain disparaît complètement pour laisser la place au Corps du Christ, notre nourriture.

« Jésus leur dit :Apportez-moi de ces poissons que vous venez de prendre. ” »

Comme si les Apôtres devaient se nourrir du corps de Jésus sacrifié pour eux ainsi que de tous les corps des gros poissons pêchés dans leurs filets qui n’ont pas rompu. « Cela signifie, disait notre Père, que non seulement l’Apôtre, mais Dieu lui-même se nourrit de tous les saints qui viennent s’attacher à ce Corps pour être une seule Hostie, une seule Victime avec Jésus, un seul Cœur avec lui dans leur sacrifice, unis au Christ. C’est la nourriture des Apôtres, et c’est la nourriture de Dieu. »

« Simon Pierre monta dans le bateau et tira à terre le filet, plein de gros poissons : cent cinquante-trois ; et quoiqu’il y en eût tant, le filet ne se déchira pas. Jésus leur dit : Venez déjeuner. ” » (Jn 21, 8-12)

C’est à Pierre qu’il appartient de lever le filet hors de l’eau et de le détacher du bateau sans le rompre, ce qui n’alla pas sans peine. Le filet où l’on prend les poissons, et qui ne se rompt pas, symbolise l’Église qui doit demeurer une, si nombreux que soient les fidèles.

En présence de cette apparition inouïe de Jésus dans un Corps glorieux, ils restent sans voix. Ils l’ont reconnu par l’intuition du cœur, au ton de la voix, au maintien... et tout.

Après la leçon donnée à Thomas à Jérusalem, en voilà une nouvelle : Il sera toujours avec ses disciples d’une manière invisible, tout au long des siècles, tandis qu’il demeurera dans la gloire de son Père. Il ne quitte pas d’une semelle son Église en la personne de Pierre devenu pêcheur d’hommes dont le grand nombre et la diversité n’empêchent pas leur unité à la table du Seigneur. Jésus s’occupe des siens, et Pierre est son ministre. Il en est ainsi depuis vingt siècles. Et même si le Seigneur favorise une voyante très aimée de lumière particulière, ou envoie sa propre Mère bien-aimée, pour faire connaître la volonté de bon plaisir de son très chéri Père Céleste, l’obéissance à cette demande passe par Pierre.

JÉSUS ET SON VICAIRE.

« Quand ils eurent déjeuné, Jésus dit à Simon Pierre :Simon, fils de Jean, me chéris-tu plus que ceux-ci ? Il lui répondit :Oui, Seigneur, tu sais que je t’aime. ” Jésus lui dit :Pais mes agneaux. ” » (Jn 21, 15)

Nous allons voir Pierre réparer son triple reniement par une triple profession de foi et d’amour.

En réponse à la première question de Jésus, il n’ose pas reprendre le verbe « chérir » (agapein). Sa réponse est dénuée de toute présomption. Mais il en appelle à la science de Jésus : « Tu le sais. » Alors qu’il avait largement mis en doute la prescience de Jésus, lorsque celui-ci avait annoncé la dispersion du troupeau : « Même si tous succombent, du moins pas moi ! » (Mc 14, 29 ; Mt 26, 33)

« Il lui dit à nouveau, une deuxième fois : Simon, fils de Jean, me chéris-tu ?

 Oui, Seigneur, lui dit-il, tu sais que je t’aime.

 Pais mes brebis. »

Le Seigneur ne l’invite plus à se comparer aux autres. Mais il confirme sa prééminence de Pasteur suprême, à la place du Christ qui doit remonter vers son Père, et ne sera plus visible, quoique toujours présent. Les Apôtres eux-mêmes rentrent dans le troupeau. En effet, en changeant les « agneaux » en « brebis », Jésus montre qu’il confie à Pierre tout le troupeau.

« Il lui dit pour la troisième fois : Simon, fils de Jean, m’aimes-tu ?Pierre fut peiné de ce qu’il lui eût dit pour la troisième fois : M’aimes-tu ? ”, et il lui dit : Seigneur, tu sais tout, tu sais bien que je t’aime !Jésus lui dit ;Pais mes brebis. ” » (Jn 21, 16-17)

Cette fois, le verbe “ chérir ” a disparu ! Et à ce troisième coup, Pierre, humilié, efface son triple reniement et est investi de la charge de « confirmer ses frères », maintenant qu’il est « revenu » de son reniement dont Jésus l’avait prévenu : « Simon, Simon, voici que Satan vous a réclamés pour vous cribler comme le froment ; mais moi, j’ai prié pour toi afin que ta foi ne défaille pas. Toi donc, quand tu seras revenu, affermis tes frères. » (Lc 22, 31-32)

Jésus continue : « En vérité, en vérité, je te le dis, quand tu étais jeune, tu mettais toi-même ta ceinture, et tu allais où tu voulais. »  Impulsif et présomptueux que tu étais !

« Quand tu auras vieilli, tu étendras les mains, et un autre te ceindra et te mènera où tu ne voudrais pas. »

Cette fois, Jésus lui-même annonce à Pierre, en termes voilés, qu’il le suivra jusqu’à la mort de la croix, mais dans l’obéissance, et non pas dans l’élan de sa spontanéité naturelle !

« Il signifiait, en parlant ainsi, le genre de mort par lequel Pierre devait glorifier Dieu. Ayant dit cela, il lui dit : Suis-moi ! ” » (Jn 21, 17-19)

Jésus parle d’expérience. N’avait-il pas « étendu les mains » en croix, docilement, sans un geste pour se débattre, et le bourreau ne l’avait-il pas ceinturé pour l’élever en croix, le menant là où la nature ne voudrait pas, comme lui-même l’avait éprouvé au jardin de l’agonie : « Père, s’il est possible, éloigne de moi ce calice. » (Lc 22, 42) Mais c’est en buvant ce calice pour obéir à son Père que Jésus sauve le monde, et Pierre à sa suite, et tous les martyrs de l’Église jusqu’à nos jours.

C’est un secret, un mystère que nous rappelle le troisième secret de Fatima.

LE DERNIER REPAS DE JÉSUS 
AVANT SON ASCENSION

Nous avons vu que les chapitres 13 à 17 de l’Évangile selon saint Jean, qui racontent le dernier repas de Jésus avant sa Passion, contiennent en fait de longs fragments de discours qui ont été en fait prononcés après la résurrection, certainement au cours du dernier repas avant l’Ascension (cf. Ac 1, 4). C’est donc maintenant qu’il nous faut les étudier, en constatant qu’ils se comprennent parfaitement dans ce contexte, et en admirant comment Jean a su retenir et transmettre si précisément les entretiens de ce dernier repas. Certainement la Vierge Marie y est-elle pour beaucoup dans cette intelligence et cette tradition fidèle des paroles du Seigneur, qu’Elle conservait avec soin dans son Cœur.

LE CHEMIN DU CIEL.

« Jésus, sachant que son heure était venue de passer de ce monde vers son Père, ayant aimé les siens qui étaient dans le monde, les aima jusqu’à la fin. » (Jn 13, 1)

Et il dit : « Maintenant, le Fils de l’homme a été glorifié – par sa Résurrection – et Dieu a été glorifié en lui. Si Dieu a été glorifié en lui, Dieu aussi le glorifiera en lui-même – en le ramenant auprès de Lui, dans son Sein – et c’est tout de suite. » (Jn 13, 31-32)

Nous sommes donc bien dans les derniers instants avant que Jésus ne quitte ses Apôtres pour monter au ciel.

« Je vous donne un commandement nouveau : aimez-vous les uns les autres. Oui, comme je vous ai aimés, aimez-vous les uns les autres. À ceci, tous vous reconnaîtront pour mes disciples : pour cet amour que vous avez les uns pour les autres. » (Jn 13, 34-35)

Le mot commandement est faible par rapport au terme grec entolè qui signifie plus largement une “ voie ”, la douce indication de ce qu’il faut faire pour avoir la vie. C’est la condition pour obtenir la plus merveilleuse récompense :

« Dans la maison de mon Père, il y a de nombreuses demeures ; je vais vous préparer une place. Et quand je serai allé et que je vous aurai préparé une place, à nouveau je viendrai et je vous prendrai près de moi, afin que, là où je suis, vous aussi, vous soyez. » (Jn 14, 1-3)

Le Ciel, la maison de notre Père, est donc réellement un lieu, où Jésus se rend et d’où il reviendra, d’où il descend à chacune de nos messes ! Sans pour autant quitter son Père auprès duquel il a un séjour permanent : c’est « là où je suis ».

« “ Et du lieu où je vais, vous savez le chemin. ” Thomas lui dit : Seigneur, nous ne savons pas où tu vas. Comment saurions-nous le chemin ? Jésus lui dit : Je suis la Voie, la Vérité et la Vie. Nul ne vient au Père que par moi. ” » (Jn 14, 4-6)

Jésus est la Voie, le chemin pour venir, revenir à son Père et notre Père.

Il est la Vérité, la plénitude de la révélation divine en tout son être, ses Paroles, ses moindres gestes. « Nul n’a jamais vu Dieu, mais un Dieu Fils unique, lui, l’a révélé. » (Jn 1, 18)

Il est Lui-même cette Vie, sans laquelle les hommes meurent depuis le péché originel, et il la communique par le don nuptial de son Corps livré, « le Pain de Dieu, qui descend du Ciel et qui donne la vie aux hommes » (Jn 6, 33).

“ L’IMAGE DU DIEU INVISIBLE ”.

« Philippe lui dit : Seigneur, montre-nous le Père et cela nous suffit. ” Jésus lui dit : Voilà si longtemps que je suis avec vous, et tu ne me connais pas, Philippe ? Qui m’a vu a vu le Père. Comment peux-tu dire : Montre-nous le Père ? ” » (Jn 14, 8-10)

Notre Père ne cessait de répéter que de telles paroles ne pouvaient jaillir d’une intelligence humaine. Il faut que ce soit le Fils de Dieu qui les ait conçues et prononcées, que son apôtre Jean les ait entendues de ses oreilles, et que le Saint-Esprit l’ait encore assisté pour qu’il s’en souvienne et les transmette exactement.

Qui m’a vu a vu le Père. Cette phrase nous donne à comprendre l’importance de l’humanité de Jésus, Verbe de Dieu incarné dans le sein de la Vierge Marie. Il fallait que ce Corps fasse le lien entre nous, pauvres êtres de chair, et Dieu notre Créateur, qui s’est manifesté avec tant de miséricorde dans l’Ancien Testament, comme un Époux empressé de convertir, racheter et aimer sa créature. Il a maintenant une bouche pour parler et embrasser, des mains pour relever et soigner, un Cœur battant pour nous manifester son Amour, et surtout une Chair pure et vulnérable pour souffrir le châtiment de nos péchés, un Précieux Sang à verser pour nous...

« Ne crois-tu pas que je suis dans le Père et que le Père est en moi ? »

Mystère de cette amoureuse inhabitation mutuelle qui est la perfection de la relation, et que Jésus vient nous donner en partage dans l’Eucharistie : « Qui mange ma Chair et boit mon Sang demeure en moi et moi en lui. » (Jn 6, 56)

Cette relation commande toute l’existence ; il n’est pas de meilleure confirmation et illustration de la métaphysique relationnelle de notre Père que l’Évangile selon saint Jean. En effet, si Jésus est Dieu lui-même, consubstantiel à son Père, il n’en demeure pas moins que « le Père est plus grand que moi, c’est pourquoi, si vous m’aimiez, vous vous réjouiriez de ce que je vais vers le Père » (Jn 14, 28).

Ce n’est pas la comparaison de sa nature humaine à la nature divine de son Père qui place Jésus en situation d’infériorité : c’est sa relation filiale. Un bon fils aime à reconnaître sa dépendance, sa subordination : il doit tout à son Père.

LA VIGNE FÉCONDE.

« Je suis la vigne véritable, et mon Père est le vigneron. » (Jn 15, 1)

Dans l’Ancien Testament, la vigne du Seigneur, c’est Israël (Is 5, 1-7). Et Yahweh Dieu se plaint de la voir ne produire que « du verjus » !

Mais Jésus, qui est la voix de son Père, se déclare lui-même la vigne véritable qui produit le vin changé en Sang rédempteur par le Saint-Sacrifice de la Croix, réitéré à chaque messe. La parabole est donc polémique, comme était celle du Bon Pasteur (Jn 10), manifestant la déchirure qui sépare la nouvelle Église de l’ancienne Synagogue. Au moment de remonter au Ciel, Jésus voit s’établir la division irrémédiable entre ses disciples et le vieux peuple juif qui va être dispersé après la destruction de son temple, pour n’avoir pas voulu reconnaître son Messie.

« Tout sarment en moi qui ne porte pas de fruit, il le retranche, et tout sarment qui porte du fruit, il l’émonde, pour qu’il porte encore plus de fruit. » (Jn 15, 2) Jésus parle ici d’expérience, pour avoir enduré le premier cette taille sur la Croix...

Une parole adressée par Lui aux femmes rencontrées sur le chemin du Calvaire, « qui se frappaient la poitrine et se lamentaient sur lui », exprime cette allégorie au moment même où Jésus la vivait à la lettre :

« Filles de Jérusalem, ne pleurez pas sur moi ! pleurez plutôt sur vous et sur vos enfants ! Car voici venir des jours où l’on dira : Heureuses les femmes stériles, les entrailles qui n’ont pas enfanté, et les seins qui n’ont pas nourri ! Alors on se mettra à dire aux montagnes : Tombez sur nous ! Et aux collines : Couvrez-nous ! Car si l’on traite ainsi le bois vert, qu’adviendra-t-il du sec ? » (Lc 23, 28-31)

Le bois vert, c’est Jésus : « la vigne véritable ». Et les sarments sont ses disciples. « L’échalas est dressé, le cep plein de sève y est lié sans rien briser de sa ramure essentielle. Puis, pour qu’il produise du fruit en abondance, le vigneron va l’émonder, le greffer, l’entailler profondément de cinq plaies d’où coulera le sang vermeil dans la douleur. C’est ainsi que Dieu jette son Fils unique dans la fournaise de la souffrance et de la mort, son Fils qui est sa vigne de prédilection, Vinea mea electa ! Et dans la suite des siècles, voilà quel sera aussi le sort des sarments, taillés court, blessés à mort de plaies qui donnent la vie : “ Il fallait que le Christ souffrît pour entrer dans sa gloire, ne le saviez-vous pas ?

« “ Il fallait ! Il fallait ! ” Mot terrible. Un ordre général domine notre destinée et règle toute chose avec nombre, poids et mesure, même le prix de nos crimes. Révolte, malice, vices de toute sorte sont des injures à Dieu qui pèsent lourd dans ses justes balances. Pour que revienne la paix, il faut que le péché soit réparé, il y faut une rédemption. » (Page mystique 22, Si l’on traite ainsi le cep plein de sève.)

Mais les hommes pécheurs ne sont pas capables de réparer leur péché. C’est un fait d’expérience de toute l’histoire de l’humanité, depuis Adam et Ève. C’est pourquoi le Fils de Dieu s’est fait homme et s’est courbé lui-même sous cette loi selon laquelle il n’y a pas ici-bas de rémission sans effusion de sang, pas d’oblation méritoire sans immolation, et pas de fruit sans enfantement dans la souffrance.

Notre Père glose la parole de Jésus : « Filles de Jérusalem, soyez épouvantées à la vue de ce châtiment qui tombe sur l’innocent, mais admirez quel en est le fruit, c’est par ses plaies que nous serons guéris si nous le voulons. Élevé en croix, le voici lié, torturé, taillé comme une vigne. Mais le salut du monde est sa fleur, sa grappe c’est l’Église et les myriades de grains sont les élus. »

Et le bois mort ?

« Ah ! qu’il est affreux le sort de ceux qui périssent loin de vous et s’en vont souffrir pour l’éternité d’inutiles tourments. Car vous pleurez sur tous, ô Jésus, tous ceux qui se perdent loin de vous : “ Si quelqu’un ne demeure pas uni à moi, le voilà jeté dehors comme le sarment desséché, puis on les ramasse et on les jette au feu et ils brûlent. ” (Jn 15, 6)

« Ô Fils de l’homme, hanté par la réalité de l’Enfer et son horreur, vos paroles me révèlent qu’il existe pire que la mort sur la croix, puisqu’il devra tomber dans le feu éternel, sans espoir et sans fruit, celui qui se sépare de vous. Je ne veux plus pleurer sur vous, ô divin Crucifié, tant que je ne me serai pas arraché au péché. Je pleurerai sur moi, je me prendrai en pitié, moi, le bois mort, exposé à pire passion que la vôtre. Mais par grâce, ô Jésus mon Sauveur, accordez-moi en ce monde non la consolation, mais la désolation, non la facilité et les douceurs, mais la douleur et la souffrance, celle du moins que le Père Céleste accorde à ses élus, comme un bois viril et fécond, car à quoi me servirait de souffrir si ce n’est pas avec Vous, pour mon salut et celui de mes frères ? »

COMMUNION RÉPARATRICE.

En 1925, Jésus est revenu actualiser ce même mystère de communion des saints et de souffrance rédemptrice pour sauver le bois sec des flammes éternelles. Il est venu, accompagné de sa Sainte Mère, pour s’adresser à Lucie leur confidente dans son couvent des dorothées de Pontevedra.

Elle raconte : « L’Enfant-Jésus me dit :Aie compassion du Cœur de ta très Sainte Mère entouré des épines que les hommes ingrats lui enfoncent à tout moment, sans qu’il y ait personne pour faire acte de réparation afin de les en retirer. ”

« Ensuite, la très Sainte Vierge me dit : Vois, ma fille, mon Cœur entouré d’épines que les hommes ingrats m’enfoncent à chaque instant par leurs blasphèmes et leurs ingratitudes. Toi, du moins, tâche de me consoler et dis que tous ceux qui, pendant cinq mois, le premier samedi, se confesseront, recevront la sainte Communion, réciteront un chapelet, et me tiendront compagnie pendant quinze minutes en méditant sur les quinze mystères du Rosaire, en esprit de réparation, je promets de les assister à l’heure de la mort avec toutes les grâces nécessaires pour le salut de leur âme. ” » C’est-à-dire pour échapper à l’Enfer, et aller au Ciel ! Rien de moins...

« Après cette grâce je désirais souffrir tous les martyres pour offrir réparation au Cœur Immaculé de Marie, ma très chère Mère, et lui retirer une à une toutes les épines qui la déchirent, mais je compris que toutes ces épines sont le symbole des nombreux péchés qui se commettent contre son Fils, et se communiquent au Cœur de sa Mère. Oui, parce que par eux beaucoup d’autres de ses fils se perdent éternellement. »

Comme des sarments qui ne portent pas de fruit et que le vigneron retranche... Comment dire plus clairement que le schisme mène en enfer ? Effroyable malédiction, terrible à entendre, propre à nous faire prier et nous sacrifier pour la conversion de la Russie qui passe par celle du pape François !

Impossible ?

« Si vous demeurez en moi et que mes paroles demeurent en vous, demandez ce que vous voudrez, et vous l’aurez. » (Jn 15, 7)

Heureuses bénédictions, merveilleuses à entendre ! « Mes paroles » désignent non seulement les discours de Jésus et les miracles de sa vie publique, mais aussi les paroles de la consécration par lesquelles le pain et le vin sont transsubstantiés, changés en Corps et en Sang de Jésus par un prêtre légitime, dans la communion de l’Église catholique romaine. Celui qui demeure dans le Corps mystique de l’Église-Épouse reçoit de lui ce baiser nuptial de l’Eucharistie, par lequel il vient en tous pour être le Pain qui les nourrit, le Vin qui les enivre et les féconde.

OBEDIENTIA IN DILECTIONE.

« Comme le Père m’a aimé, moi aussi je vous ai aimés. » (Jn 15, 9)

Notre Père commentait : « Pesez, mes fils, pesez que c’est que cet amour du Père qui va à son Fils éternel, Bien-aimé, son Verbe, sa Parole, son Image éternelle. L’amour qui coule du Père dans le Fils comme un torrent, de Cœur à Cœur, cet amour coule du Cœur sacré de Jésus et de Marie dans nos cœurs. »

« Demeurez dans mon amour. » Cet amour répandu dans les cœurs comme la sève monte dans la vigne, c’est l’Esprit-Saint dont l’effusion produit la vie et la joie. Comment obtenir un tel Don ?

« Si vous gardez mes commandements, vous demeurerez en mon amour, comme moi j’ai gardé les commandements de mon Père et je demeure en son amour. Je vous dis cela pour que ma joie soit en vous et que votre joie soit complète. »

Telle est la joie chrétienne : joie d’être aimé, et de répondre à cet amour par l’obéissance. Cette alliance faisait déjà l’allégresse de Jean-Baptiste, qui se disait « ravi de joie à la voix de l’Époux » (Jn 3, 29).

« Vous êtes mes amis si vous faites ce que je vous commande, et mon commandement le voici : vous aimer les uns les autres comme je vous ai aimés »

C’est-à-dire ?

« Nul n’a plus grand amour que celui qui livre sa vie pour ses amis. » (Jn 15, 13-14)

LA HAINE DU MONDE.

« Si le monde vous hait, sachez que moi, il m’a pris en haine avant vous. » (Jn 15, 18) Jusqu’à le clouer sur une Croix... « Si vous étiez du monde, le monde aimerait son bien, mais parce que vous n’êtes pas du monde, puisque mon choix vous a tirés du monde, pour cette raison, le monde vous hait. Rappelez-vous la parole que je vous ai dite : le serviteur n’est pas plus grand que son maître. »

Remarquable confirmation de l’hypothèse qui nous a conduits à distinguer les deux discours. Cette parole se trouve en effet au chapitre 13, verset 16, dans le premier discours prononcé quarante jours auparavant, avant la Passion. Les Apôtres ne l’ont pas comprise alors, et tous ont trahi face à la persécution. Mais ici, Jésus leur redit, pour l’avenir :

« S’ils m’ont persécuté, vous aussi ils vous persécuteront ; s’ils ont gardé ma parole, la vôtre aussi ils la garderont. Mais tout cela, ils le feront contre vous, à cause de mon Nom, parce qu’ils ne connaissent pas Celui qui m’a envoyé. »

Les Juifs ont rejeté et tué leur Messie, objet de l’espérance millénaire de leur peuple. Leur endurcissement est tel qu’ils n’auront de cesse de mettre à mort ses disciples, dont la seule existence témoigne de leur perfidie.

« Si je n’étais pas venu et ne leur avais pas parlé, ils n’auraient pas de péché ; mais maintenant, ils n’ont pas d’excuse à leur péché. » (Jn 15, 20-22)

Que dire alors de notre génération apostate, de nos Pontifes qui ont voulu rallier l’Église à ce monde persécuteur, en trahissant l’enseignement du Christ et méprisant deux millénaires d’Histoire sainte que Lui-même a conduite ?

L’ESPRIT DE VÉRITÉ.

« Cependant je vous dis la Vérité : c’est votre intérêt que je parte ; car si je ne pars pas, le Paraclet ne viendra pas vers vous ; mais si je pars, je vous l’enverrai. » (Jn 16, 7)

Ce Paraclet est l’Esprit de Vérité, il est en fait l’autre Paraclet donné par le Père (cf.  Jn 14, 16-17). Ce mot grec désigne celui qu’on appelle à son secours dans un procès. Jésus et l’Esprit-Saint jouent donc l’un et l’autre ce rôle d’assistant, d’avocat, d’intercesseur pour nous pauvres pécheurs. Depuis son Baptême dans le Jourdain, l’Esprit demeure en Jésus, et quand il remontera au Ciel, il enverra ce même Esprit pour qu’il demeure de la même manière en ses disciples.

Il faut bien noter, en nos temps où règne l’illuminisme, que l’Esprit-Saint s’applique à éclairer, à répandre et faire comprendre la révélation du Christ : « Il vous enseignera et vous rappellera tout ce que je vous ai dit. » (Jn 14, 26) Il ne produit pas de “ surprises ”, il ne révèle pas de choses nouvelles dans le cœur des masses, fussent-elles “ peuple de Dieu ”...

« Le Paraclet, une fois venu, confondra le monde en fait de péché, en fait de justice et en fait de jugement. » (Jn 16, 8)

Il ne s’agit pas d’une condamnation publique et universelle, de Jugement dernier, mais d’avènement du Paraclet dans les âmes, pour s’y dresser en procureur contre les méchants et y démontrer que la cause du Christ est juste.

« De péché, parce qu’ils ne croient pas en moi. »

Le péché du monde est de ne pas croire en Jésus, de refuser la lumière de sa vérité. C’est le crime des juifs perfides de son temps et des chrétiens perfides du nôtre. Mais aujourd’hui comme alors, le Paraclet met au cœur de ses fidèles une fermeté d’acier pour dénoncer ce péché d’apostasie et garder une foi inébranlable à Jésus-Christ, seul Sauveur du monde.

« De justice, parce que je vais vers le Père et que vous ne me verrez plus. »

La justice de l’Innocent répond au péché des impies, et le Père va la rendre manifeste dans quelques instants en glorifiant son Fils par une Ascension prodigieuse, après l’avoir ressuscité d’entre les morts. Le Paraclet gardera inébranlable dans le cœur de ses disciples la conviction du bon droit de Jésus-Christ, de sa sainteté et de sa souveraineté sur le monde entier. Cet Esprit-Saint fait aussi sentir leur culpabilité à ceux qui refusent de se soumettre à Jésus, et les appelle à se tourner vers Lui et sa Divine Mère afin d’être sauvés.

« De jugement, parce que le Prince de ce monde est jugé. » (Jn 16, 11)

Lui, le Diable, est déjà damné, sans retour, et par sa Croix, Jésus l’a jeté dehors (Jn 12, 31).

MÉDIATRICE DE LA RÉVÉLATION.

« J’ai encore beaucoup à vous dire, mais vous ne pouvez le porter à présent. Mais quand il viendra, lui l’Esprit de Vérité, il vous introduira dans la Vérité tout entière ; car il ne parlera pas de lui-même, mais ce qu’il entendra, il le dira et il vous dévoilera les choses à venir. » (Jn 16, 12-13)

Le Saint-Esprit n’a pas de bouche pour parler. Comment donc a-t-il accompli sa mission ? Par la médiation des Apôtres, par leur prédication orale, mais aussi écrite, leurs épîtres et l’Apocalypse, qui constituent le Nouveau Testament. Ces écrits témoignent d’une pénétration du mystère de Jésus bien supérieure à celle qu’ils manifestent dans l’Évangile, au cours de sa vie publique.

Mais à eux, comment l’Esprit-Saint s’est-il adressé ?

Jean, seul Apôtre demeuré fidèle jusqu’au pied de la Croix, y a reçu la Vierge Marie pour Mère et, « dès cette heure-là, il l’accueillit chez lui » (Jn 19, 27), non seulement sous son toit, mais dans son cœur. De plus, nous venons d’entendre Jésus reprocher à Philippe de ne pas le connaître, malgré tant de temps passé ensemble (Jn 14, 10).

La Vierge Marie, Elle, contemple son Fils depuis le jour de sa naissance, Elle médite son mystère révélé dans les Écritures depuis sa plus tendre enfance. Depuis le jour où il lui a dit, au Temple de Jérusalem, « Ne saviez-vous pas qu’il me faut être chez mon Père ? » Elle fut avec saint Joseph la première dépositaire du mystère de la relation de ce Fils avec son Père, mystère sans cesse évoqué dans le quatrième Évangile. Tout l’Évangile de saint Jean s’explique évidemment par ce colloque incessant entre la Mère, porte-parole du divin Paraclet dont Elle est le Temple (Lc 1, 35), et le fils adoptif. C’est Elle qui a introduit saint Jean dans la Vérité tout entière.

On peut alors lui appliquer la suite du discours de Notre-Seigneur : « Elle me glorifiera, car c’est de mon bien qu’Elle recevra et Elle vous le dévoilera. Tout ce qu’a le Père est à moi. Voilà pourquoi je vous ai dit que c’est de mon bien qu’Elle reçoit et Elle vous le dévoilera. » (cf. Jn 16, 14-15)

Par Marie, grâce à Elle, l’œuvre de l’Esprit n’est pas une simple illumination de l’intelligence : en Elle, il est pour les disciples « un autre Paraclet » prolongeant, renouvelant, actualisant et approfondissant dans leur cœur la présence de Jésus et, avec la présence du Fils, celle du Père (Jn 14, 31 et 23). Ainsi ne sont-ils pas orphelins (Jn 14, 18) ; étant nés d’en haut (Jn 3, 7), ils sont enfants de Marie.

ACTION DE GRÂCES FILIALE

« Ainsi parla Jésus, et levant les yeux au ciel, il dit : Père, l’heure est venue, glorifie ton fils, afin que ton fils te glorifie et que, selon le pouvoir que tu lui as donné sur toute chair, il donne la vie éternelle à tous ceux que tu lui as donnés.  ” » (Jn 17, 1-2)

L’heure est venue du retour au Ciel. Jésus demande à son Père de faire, avec Lui, en Lui, le dernier miracle qui sera son triomphe aux yeux de ses disciples : l’élever en son Corps dans les airs, jusqu’à ce qu’Il disparaisse à leurs yeux, pour siéger éternellement à Sa droite.

S’il disparaît aux yeux des hommes, Jésus ne les quitte pas, puisque de Là-haut, il donnera la vie éternelle à ceux que le Père attire à Lui, comme il l’a mérité par son Sacrifice sur la Croix.

« Or la vie éternelle c’est qu’ils te connaissent, toi le seul véritable Dieu, et celui que tu as envoyé, Jésus-Christ. »

La vie éternelle n’est pas de la terre, mais elle commence dès ici-bas et s’accomplira par la résurrection des corps : cette vie consiste en une connaissance pleine d’amour, selon le sens du mot “ connaître ” en hébreu (Os 2, 21-22). Jésus parle de lui-même à la troisième personne et saint Jean, de sa propre inspiration, a ajouté son Nom : Jésus-Christ.

« Je t’ai glorifié sur la terre, en menant à bonne fin l’œuvre que tu m’as donné de faire. »

Par sa constante obéissance, Jésus a glorifié son Père, il l’a fait aimer par sa Parole, par tout son être et surtout, par son sacrifice, ayant remis l’esprit, il a achevé d’accomplir l’Écriture (Jn 19, 30). Maintenant que, ressuscité, il a affermi la foi des ses Apôtres, il demande à rentrer à la Maison :

« Et maintenant, Père, glorifie-moi auprès de toi de la gloire que j’avais auprès de toi, avant que le monde fût. »

C’est comme un enfant qui se jette dans les bras de sa Mère. Il y a un tel élan dans ces paroles.

« J’ai manifesté ton Nom aux hommes, que tu as tirés du monde pour me les donner. Ils étaient à toi et tu me les as donnés et ils ont gardé ta parole. » (Jn 17, 6)

Mystère de prédestination : c’est Dieu qui donne à ses élus la vie éternelle, en commençant par les tirer du monde. Il est seulement demandé à ces prédestinés du Père, que Jésus reçoit pour les sauver, de garder sa parole, d’entrer dans ce mystère de grâce et de prédestination, pour se confondre en Action de grâces d’avoir été ainsi choisis, dégagés de ce monde pécheur dont le Démon est le Prince.

Et les autres ? Loin de toute objection de la raison orgueilleuse, la seule réponse à cette angoissante question est de partir en mission pour qu’ils puissent recevoir eux aussi la grâce d’être retirés du monde et confiés à Jésus. C’est bien ce que vont faire les Apôtres, sur l’ordre de leur Maître :

« Allez par le monde entier, proclamer la Bonne nouvelle à toute la création. Celui qui croira et sera baptisé sera sauvé ; celui qui ne croira pas sera condamné. » (Mc 16, 15-16)

FERMETURE AU MONDE.

« C’est pour eux que je prie ; je ne prie pas pour le monde, mais pour ceux que tu m’as donnés, car ils sont à toi... » (Jn 17, 9)

Le drame du Calvaire divise l’humanité : d’une part l’Église, dont le Cœur est la Vierge compatissante aux souffrances de son Fils, qui donne la vie et l’amour du Rédempteur à ses enfants, et d’autre part l’anti-Église, le monde, représenté en ce temps-là par les sanhédrites et les grands prêtres qui ont voulu la mort de Jésus et qui vont persécuter ses disciples. Puisque ces juifs ont refusé le salut qu’il leur apportait, le monde que Dieu a tant aimé, qu’il voulait sauver (cf. Jn 3, 17), n’est plus l’objet de sa bienveillance.

Toute la tendresse du Père et du Fils se reporte sur leurs élus :

« Car ils sont à toi, et tout ce qui est à moi est à toi, et tout ce qui est à toi est à moi, et je suis glorifié en eux. » (Jn 17, 10)

C’est un langage d’amour qui révèle merveilleusement ce qu’est la relation du Père à son Fils, de don de tout ce qu’il est, de tout ce qu’Il a, et en retour, d’offrande reconnaissante du Fils à son Père.

« Je leur ai donné ta parole et le monde les a haïs, parce qu’ils ne sont pas du monde, comme moi je ne suis pas du monde. Je ne te prie pas de les enlever du monde, mais de les garder du Mauvais. » (Jn 17, 14-15)

Jésus prie pour son Église, et ses paroles nous en révèlent la condition séculaire : elle est dans le monde, mais sans en être, et sans cesse en proie aux assauts du Mauvais, Satan, sans que ce combat l’empêche de mener à bien sa mission de salut des âmes.

« Ils ne sont pas du monde, comme moi je ne suis pas du monde. Sanctifie-les dans la vérité, ta parole est vérité. » (Jn 17, 16-17)

Sanctifier signifie séparer, mettre à part, pour Dieu. Jésus demande à son Père de mettre ses disciples encore davantage à part du monde, mais dans la Vérité, qui est la Parole de Dieu, qui est Jésus lui-même. Notre Père disait que pour ce dernier repas, le Christ avait de nouveau célébré son Eucharistie, Il demeurait donc en eux, dans le cœur de ses Apôtres, des saintes Femmes et de la Vierge Marie, et c’est par ce moyen qu’ils étaient sanctifiés.

« Comme tu m’as envoyé dans le monde, moi aussi je les ai envoyés dans le monde. Pour eux, je me sanctifie moi-même, afin qu’ils soient, eux aussi, sanctifiés dans la vérité. » (Jn 17, 18-19)

Par son Incarnation, par son labeur de Rédemption, et suprêmement dans son Eucharistie, Jésus s’est sanctifié, Il s’est glorifié et a glorifié son Père. Dans un instant, son œuvre terrestre va s’achever par son retour dans le sein de son Père, ultime sanctification qui annonce et qui a pour but la sanctification de ses disciples, de ses enfants.

CŒUR À CŒUR EUCHARISTIQUE.

« Je ne prie pas pour eux seulement, mais aussi pour ceux qui, grâce à leur parole, croiront en moi, afin que tous soient un. » (Jn 17, 20-21)

Nous voilà tous inclus dans cette prière de Jésus, nous qui, grâce à la fidélité de l’Église à la tradition apostolique, avons connu la vérité et reçu le baptême. Et la volonté de notre Seigneur et Sauveur, dont Il fait sa prière, c’est que, tous, nous soyons un...

« Je leur ai donné la gloire que tu m’as donnée, pour qu’ils soient un comme nous sommes un : moi en eux et toi en moi, afin qu’ils soient consommés dans l’unité... » (Jn 17, 22-23)

Cette unité des chrétiens entre eux et avec la Sainte Trinité est le fruit de la Communion eucharistique, où Jésus vient demeurer en nous et nous en Lui, où Il travaille à nous sanctifier, nous consumer pour que nous ne fassions qu’un seul Corps unis dans un même Esprit, une Épouse qui lui soit fidèle et aimante, à l’exemple et par la médiation de la Vierge Marie.

« ...  et que le monde reconnaisse que tu m’as envoyé et que je les ai aimés comme tu m’as aimé ».

La charité réelle, qui découle de ce don divin, témoigne aux yeux du monde que l’Église est bien l’œuvre de Jésus, Fils de Dieu incarné, et qu’Il nous a aimés, pauvres pécheurs, avec autant d’amour que son Père l’a aimé, Lui !

 Au terme de sa prière, sa demande manifeste encore la grâce sublime qu’il veut nous faire :

« Père, ceux que tu m’as donnés, je veux que là où je suis, eux aussi soient avec moi, afin qu’ils contemplent ma gloire, que tu m’as donnée parce que tu m’as aimé avant la fondation du monde.

« Père juste, le monde ne t’a pas connu. » C’est la cause de la tristesse de Notre-Seigneur et de sa Sainte Mère, mais pour laquelle ils veulent réparer, consoler notre très chéri Père céleste : « Mais moi je t’ai connu et ceux-ci ont reconnu que tu m’as envoyé. Je leur ai fait connaître ton Nom – Père – et je le leur ferai connaître, pour que l’Amour dont tu m’as aimé soit en eux et moi en eux. » (Jn 17, 23-26)

L’ASCENSION

Après quoi « il les emmena jusque vers Béthanie et, levant les mains, il les bénit. Et il arriva, comme il les bénissait, qu’il se sépara d’eux et fut emporté au Ciel. Pour eux, s’étant prosternés devant lui, ils retournèrent à Jérusalem en grande joie, et ils étaient constamment dans le Temple à louer Dieu. » (Lc 24, 50-54)

Ainsi saint Luc conclut-il son Évangile, en attendant son “ deuxième tome ”, dans lequel il racontera l’histoire de cette Église naissante.

Saint Marc, quant à lui, conclut : « Or le Seigneur Jésus, après leur avoir parlé, fut enlevé au ciel et il s’assit à la droite de Dieu. Pour eux, ils s’en allèrent prêcher en tout lieu, le Seigneur agissant avec eux et confirmant la Parole par les signes qui l’accompagnaient. » (Mc 16, 19-20 ) Ainsi qu’il leur avait promis :

« Tout pouvoir m’a été remis au ciel et sur la terre. Allez donc, de toutes les nations faites des disciples, les baptisant au Nom du Père, du Fils et du Saint-Esprit, et leur apprenant à observer tout ce que je vous ai prescrit. Et voici que je suis avec vous jusqu’à la fin du monde. » (Mt 28, 18-20)

“ JE REVIENDRAI VERS VOUS. ”

Dès la première messe célébrée par les Apôtres, certainement au soir de la Pentecôte, Jésus a accompli sa promesse de demeurer avec ses disciples : Il est redescendu du Ciel réellement, en son Corps, son Sang, son Âme et sa divinité, faisant siennes les apparences du pain et du vin. Dès lors, Il continua sans cesse son labeur de rédemption du monde en réitérant son Sacrifice, de sanctification et d’union des âmes par la Communion, et de prédication de sa Vérité par la bouche de ses Apôtres.

Quel amour peut-il donc susciter tant de bonté, un si aimable dévouement ?

Saint Louis-Marie Grignion de Montfort répond :

« Jésus ne peut quitter Marie, tant l’amour qui les lie est fort. C’est pourquoi, peu devant sa mort, il établit l’Eucharistie, pour, après son Ascension, être ici-bas sa consolation. »

Comme au jour de l’Annonciation, cette union de Jésus et de Marie est l’accomplissement parfait de l’union que Dieu veut établir avec sa créature, le modèle des épousailles mystiques pour laquelle Il a fait toute sa création. C’est pourquoi le Cœur Immaculé de Marie est, pour ainsi dire, notre “ modèle unique ” de communion réparatrice, comme l’expliquait notre Père.

« La Sainte Vierge qui communie, c’est merveilleux, puisque c’est Elle. Sa communion devait lui rappeler mille et mille choses, mille et mille expériences : elle l’a eu dans son sein, dans son chaste sein pendant neuf mois... ensuite, quand il est né, elle l’a eu dans les yeux, elle l’a eu dans les bras donc elle l’a caressé, elle l’a embrassé. Elle voyait le Fils de Dieu dans ce Corps ! et se souvenant qu’elle lui avait donné son lait, qui était devenu le Sang de ce Corps, qu’elle avait vu ce Sang couler sur la Croix, elle y pensait. Aidez-moi, Très Sainte Vierge, à avoir les sentiments d’ardeur que vous aviez, les mêmes sentiments que vous aviez quand vous le teniez dans les bras, et même avant sa naissance, pendant sa vie, sur la Croix, s’élevant au Ciel... Donnez-moi des sentiments semblables aux vôtres. »

 frère Bruno de Jésus-Marie.