6 JUIN 2021 - SAINT-SACREMENT

La communion, couronnement de l’œuvre divine

LE couronnement de l’œuvre de réhabilitation divine opérée par la Communion, c’est d’établir une union constante entre Dieu et nous. Si Dieu nous aime jusqu’à se donner à nous, il veut que nous répondions à cet amour par une union de vie, et il nous en apporte la grâce et la puissance. L’amour qui resterait dans les paroles serait bien imparfait.

Saint Pierre-Julien EymardVoilà pourquoi Notre-Seigneur ne se contente pas de cette union d’amitié, qui existe déjà entre lui et nous du fait de l’état de grâce. Dans l’Eucharistie il est substantiellement présent, et c’est par sa substance qu’il vient s’unir à nous.

L’Eucharistie, qui nous donne Jésus-Christ pour le faire vivre et opérer en nous, étend, en quelque sorte, l’Incarnation à chaque homme en particulier. En s’incarnant en Marie, le Verbe avait en vue l’Eucharistie ; et dès lors la Communion est le complément du Saint-Sacrifice de la messe ; sans elle il manquerait d’une partie intégrante.

Quelle merveille d’amour que cette union eucharistique ! Notre corps est uni à celui de Jésus-Christ, notre âme à son âme ; sa divinité les sanctifie aussi l’un et l’autre.

Quelle réalité magnifique que cette union du corps du Fils de Dieu, ressuscité et glorieux, à notre misérable corps ! Dieu et les Anges sont témoins de cette merveille ; nos yeux terrestres ne la voient pas : c’est un spectacle du Ciel ! En réalité, Jésus-Christ vient rendre notre corps participant, en quelque sorte, des prérogatives de son corps glorieux : il lui donne une affinité spéciale qui persiste même quand les espèces sacramentelles sont consumées ; notre corps acquiert, peu à peu, la grâce, la délicatesse, les mœurs de celui de Jésus-Christ ; il vit par cette sève surnaturelle, il se spiritualise.

Ne sentez-vous pas, après la Communion, vos passions amorties ? Ne goûtez-vous pas la paix des membres ? Jésus est là. Notre-Seigneur guérit l’ardeur de notre concupiscence par la pureté de son corps virginal. De même qu’un peu de ferment travaille sur toute la masse à laquelle il est mêlé, ainsi le corps de Jésus-Christ, lorsqu’il vient en nous, nous change en lui ; c’est le contrepoison qui se répand dans tout notre corps et le ramène à la modération nécessaire au salut. Laissons donc notre corps se refaire dans ce moule divin, se façonner en lui pour l’immortalité bienheureuse.

Mais l’âme ? Notre-Seigneur va droit à elle, car c’est elle surtout qui est le but qu’il veut atteindre en nous ; elle est pour lui comme une épouse avec laquelle il vient conclure une union qui devrait être indestructible. Le corps n’est qu’une antichambre ; il est le premier honoré, mais Notre-Seigneur y passe seulement. L’âme reçoit vraiment Jésus et entre en communication avec sa vie divine ; elle est comme fondue en lui. Les esprits s’unissent bien plus parfaitement que les corps.

Notre-Seigneur, avant de rien demander à l’âme, commence par lui donner un sentiment de sa bonté qui la pénètre. C’est comme le soleil du matin, au lever duquel tout revit et s’épanouit. Cette grâce de douceur et ce sentiment de bonheur sont immédiats si l’on se met bien dans la bonté de Notre-Seigneur, si on ne voit qu’elle. Ensuite Jésus est heureux de pouvoir se communiquer plus abondamment, mais chacun ne reçoit ses grâces que selon ses dispositions. Il donne à l’âme fervente une vie si forte qu’elle la détermine à lui rester fidèle jusqu’à la mort. Cette âme cherche ce qu’il aime, ce qui peut lui faire plaisir ; elle reçoit en retour, elle acquiert le sens de Jésus-Christ, ce sens si délicat qui lui fait tout apprécier au point de vue divin. La délicatesse est la fleur de l’amour.

Aussi Notre-Seigneur lui donne-t-il en outre la grâce de l’oubli de soi, de l’entier abandon du moi. Une âme qui n’est pas délicate se recherche en tout, et même dans la Communion, elle ne pense qu’aux douceurs qu’elle pourra tirer de Notre-Seigneur. Non ! il faut que l’âme, assidue à la sainte Table, aime Jésus pour lui-même.

Allons, donnez tout à Notre-Seigneur : vos œuvres, vos mérites, votre cœur avec ses attaches les plus permises, les plus légitimes. C’est difficile, c’est une agonie ; mais quand on pense à qui l’on donne et ce qu’il mérite, oh ! que le choix est vite fait !

La Communion est encore le moyen par lequel Notre-Seigneur lie, en quelque sorte, son divin Père à notre égard. Notre-Seigneur a fait de nous ses amis, ses frères, ses membres par la grâce, et par la Communion il vient rendre encore plus profonde la société de vie qui existe entre lui et nous. Ainsi le Père Céleste ne peut nous séparer de lui. S’il a couronné la tête, il couronnera aussi les membres ; s’il a glorifié le Sauveur, il glorifiera aussi les trophées de sa victoire.

Comprenez-vous comment Notre-Seigneur sait allier son bonheur dans le Ciel à notre élévation sur la terre ? Comprenez-vous cette merveille d’amour du Fils pour son Père et pour nous ? Quelle ineffable industrie pour nous faire glorifier Dieu ici-bas et mériter, là-haut, une plus grande récompense !

Que la Communion soit donc le centre de votre vie et de vos actions. Vivez pour communier et communiez pour vivre saintement. Ainsi vous rendrez gloire à Notre-Seigneur et, un jour, il vous béatifiera pour l’éternité.

(Saint Pierre-Julien Eymard, sermon publié in La sainte Communion, p. 101-109.)

Frère Bruno de Jésus-Marie
Extraits de l’Heure sainte de Moure du 18 mars 2008
Sermon de saint Pierre-Julien Eymard, prêché à Paris, le 27 juin 1867