L'Évangile de saint Marc
XI. La Passion de Notre Seigneur (III)
Mes bien chers frères,
Nous méditons le récit de la Passion avec au cœur le sentiment de la force de Notre Seigneur. Le Dieu qui est en lui est enthousiaste de la tâche à laquelle il s’applique, de l’œuvre qu’il est en train d’accomplir. Après un moment d’angoisse, d’effroi, il se relève avec courage, désire souffrir par amour pour nous avec un très grand zèle. Certes, Jésus va vraiment souffrir et c’est à ces souffrances que nous devons notre salut. [...] Mais en même temps, il trouvait que le grand prêtre faisait précisément ce qu’il fallait pour qu’il puisse donner son grand témoignage à la face du peuple juif. Il devait être content d’être outragé par la soldatesque, d’avoir ainsi un contact avec elle pour la toucher. C’est l’Évangile qui continue. Jésus accomplit ce pour quoi il est venu sur la terre et il l’accomplit en vainqueur.
La première partie de cette séance se conclut par un point mort, il n’y a pas l’accord de témoins.
60 Se levant alors au milieu, le Grand Prêtre interrogea Jésus : Caïphe est un homme détesté, et chaque fois que Pilate aura eu des actes jugés comme sacrilèges à la religion des Juifs, il s’aplatira devant l’occupant. Donc là, il trône au milieu de l’assemblée et il interroge Jésus. – “ Tu ne réponds rien ? Qu’est-ce que ces gens attestent contre toi ? ” – Il cherche à ce que l’accusé s’accuse lui-même pour pouvoir le condamner sur ses propres aveux, ce qui est tout à fait illégal.
61 Mais lui se taisait et ne répondit rien. De nouveau le Grand Prêtre l’interrogeait, et il lui dit : “ Tu es le Christ, le Fils du Béni ” – [...] Cette accusation capitale va signer son arrêt de mort avec deux questions. La première est : “ Es-tu le Christ ? ”. Après tout Jésus pourrait l’être et si le Grand Prêtre disait que c’est un imposteur, il faudrait le prouver. Seulement, vis-à-vis des Romains, il est l’ennemi, le rebelle, parce qu’il se prétend le roi des Juifs. Quant à “ le Fils du Béni ”, c’est un blasphème. Le Béni, c’est Yahweh, celui dont on ne prononce pas le nom. Jésus a cette parole très propre à lui “ Je suis ”. C’est le Nom même de Yahweh.
62 “ Je le suis, dit Jésus, et vous verrez le Fils de l’homme siégeant à la droite de la Puissance et venant avec les nuées du ciel. ” – [...] C’est la reprise de cette prophétie de Daniel, le secret de Jésus à la fois messianique et divin. Les juifs sont convoqués à deux confrontations : l’une sera lorsque le Christ ressuscitera et affirmera son triomphe sur ses ennemis par l’Église et, l’autre, lorsqu’il viendra les juger tous à la fin des temps.
63 Alors le Grand Prêtre déchira ses tuniques et dit : “ Qu’avons-nous encore besoin de témoins ? 64 Vous avez entendu le blasphème ; – Jésus a dit qu’il était le Fils de Dieu. Par de nombreuses controverses et par de nombreux signes, il les avait convaincus qu’il avait l’autorité de le dire. Aussi, dans le psaume 110, il y avait motif à penser que le Messie aurait une relation toute particulière avec Dieu. Par ses miracles, par son don de prophétie, il avait le droit d’éclairer la Bible, de parfaire la Révélation. Donc, il s’est très bien expliqué et le Grand Prêtre refuse volontairement la lumière qui leur a été donnée – que vous en semble ? ” – C’est une illégalité flagrante, le Grand Prêtre se permet de condamner l’accusé sur ses seules déclarations et il contraint tout le monde à marcher avec lui. – Tous prononcèrent qu’il était passible de mort.
PREMIERS OUTRAGES
65 Et quelques-uns se mirent à lui cracher au visage, à le gifler et à lui dire : “ Fais le prophète ! ” Et les valets le bourrèrent de coups. – [...] Tous ces Sanhédrites se permettent d’avoir une conduite ignoble.
RENIEMENTS DE PIERRE
66 Comme Pierre était en bas dans la cour, arrive une des servantes du Grand Prêtre. – [...] Nous passons de la lumière aux ténèbres, de ce triomphe de Jésus devant le Sanhédrin à la lâcheté de ce malheureux Pierre. 67 Voyant Pierre qui se chauffait, elle le dévisagea et dit : “ Toi aussi, tu étais avec le Nazarénien Jésus. ” 68 Mais lui nia en disant : “ Je ne sais pas, je ne comprends pas ce que tu dis. ” Puis il se retira dehors vers le vestibule et un coq chanta.
69 La servante, l’ayant vu, recommença à dire aux assistants : “ Celui-là en est ! ” 70 Mais de nouveau il niait. Peu après, à leur tour, les assistants disaient à Pierre : “ Vraiment tu en es ; et d’ailleurs tu es Galiléen. ” 71 Mais il se mit à jurer avec force imprécations : “ Je ne connais pas cet homme dont vous parlez. ” – [...] Quel pauvre type, ce Pierre ! Pourtant il est devenu chef de l’Église, il est mort martyr d’une manière absolument héroïque au Vatican ! Pour le jeune romain qui entend cela, il en résulte une foi plus profonde, avec une émotion puissante pour la force de la grâce, la force de l’Esprit Saint qui est capable de prendre des gens sans valeur, des gens lâches capables de se renier ainsi et puis les porter jusqu’à l’héroïsme du martyre. Quelle leçon ! – 72 Et aussitôt, pour la seconde fois, un coq chanta. Et Pierre se ressouvint de la parole que Jésus lui avait dite : “ Avant que le coq chante deux fois, tu m’auras renié trois fois. ” Et il éclata en sanglots.
DEVANT PILATE
151 Et aussitôt, le matin, les grands prêtres préparèrent un conseil avec les anciens, les scribes, et tout le Sanhédrin ; puis, après avoir ligoté Jésus, ils l’emmenèrent et le livrèrent à Pilate. [...]
2 Pilate l’interrogea : “ Tu es le roi des Juifs ? ” – Les Juifs ont donc traduit Jésus à Pilate sous cette accusation. Seulement, d’habitude, les fiers patriotes d’un pays ne livrent pas un dissident à la puissance occupante. Il y a quelque chose d’anormal. – Jésus lui répond : “ Tu le dis. ” – [...] Cela implique chez lui une nuance. Il ouvre le dialogue et veut dire à Pilate : “ Oui, c’est vrai que je le suis mais pas au sens où tu l’entends ”. Pilate se rend tout de suite compte que Jésus se prétend le roi des Juifs dans un but religieux, dans une acception qui n’est pas celle que les Grands Prêtres voudraient bien lui faire croire et celle à laquelle il est habitué quand on lui défère un agitateur qui se prétend le messie.
3 Et les grands prêtres multipliaient contre lui les accusations. 4 Et Pilate de l’interroger à nouveau : “ Tu ne réponds rien ? Vois tout ce dont ils t’accusent ! ” 5 Mais Jésus ne répondit plus rien, si bien que Pilate était étonné. – [...] Jésus se tait et montre ainsi qu’il mène les choses, a une autorité, un prestige royal, contrairement à l’accusé qui cherche à se défendre, sachant ce qu’il peut lui en coûter : la flagellation et la mort. Là-dessus, autre scène : 6 à chaque Fête, il leur relâchait un prisonnier, celui qu’ils demandaient. 7 Or, il y avait en prison le nommé Barabbas, arrêté avec les émeutiers qui avaient commis un meurtre dans la sédition. – Le peuple juif révolté contre son Messie, fils du Père, va demander la libération et va s’amouracher pour un émeutier, un faux messie s’il en est et qui s’appelle, dérision suprême, intersigne, fils du père ! Il fallait l’inventer.
8 La foule étant montée se mit à demander la grâce accoutumée. [...] 9 Pilate leur répondit : “ Voulez-vous que je vous relâche le roi des Juifs ? ” – Il le dit sur un ton ironique pour contenter tout le monde. “ Certains croient qu’il est votre roi, voulez-vous que je vous le relâche. D’autres sont contre : regardez comme je souris ! Bien sûr que non, ce n’est pas un roi des Juifs. Et puis peut-être passé entre mes mains et devoir sa grâce au procurateur, cela suffira à apaiser la sédition. ” Malgré cela, il ne rencontre que fureur :
10 Il se rendait bien compte que c’était par jalousie que les grands prêtres l’avaient livré. 11 Cependant, les grands prêtres excitèrent la foule à demander qu’il leur relâchât plutôt Barabbas. 12 Pilate, prenant de nouveau la parole, leur disait : “ Que ferai-je donc de celui que vous appelez le roi des Juifs ? ” 13 Mais eux crièrent de nouveau : “ Crucifie-le ! ” 14 Et Pilate de leur dire : “ Qu’a-t-il donc fait de mal ? ” Mais ils n’en crièrent que plus fort : “ Crucifie-le ! ” – En fait de mal, d’accusation, c’est tout simplement la haine, la passion mauvaise et qui maintenant devient cruelle, ils veulent son sang. 15 Pilate alors, voulant contenter la foule, leur relâcha Barabbas et, après avoir fait flageller Jésus, il le livra pour être crucifié.
NOUVEAUX OUTRAGES : COURONNEMENT D’ÉPINES
16 Les soldats l’emmenèrent à l’intérieur du palais, – Jésus est flagellé par les Romains, et par un nombre de coups de fouets innombrables. Il est vraiment réduit au rang des esclaves. Et les soldats l’emmènent en prison – qui est le Prétoire, et ils convoquent toute la cohorte. Ils le revêtent de pourpre, puis, ayant tressé une couronne d’épines, ils la lui mettent. – [...] On a serré cette couronne sur sa tête, le sang coule et c’est très douloureux. Saint Marc raconte cela avec une sorte d’impassibilité qui est due au fait que saint Pierre et Marc sont tout fervents parce qu’ils voient Jésus souffrir avec la joie de souffrir parce que c’est la rédemption du monde qui s’accomplit. Le dolorisme est bien dans un certain temps, mais il y a d’autres sentiments qui doivent aller avec, c’est la fierté que Jésus a de souffrir ainsi. Il est le roi et il a mérité cette couronne qui touchera les hommes à travers les temps.
18 Et ils se mirent à le saluer : “ Salut, roi des Juifs ! ” – Tout cela est criant de vérité.
19 Et ils lui frappaient la tête avec un roseau et ils lui crachaient dessus, et ils ployaient le genou devant lui pour lui rendre hommage. – Tout cela est horrible, mais en même temps, ils lui rendaient hommage. Est-ce que Jésus n’a pas dit dans son discours eschatologique que les disciples seraient traînés devant les tribunaux, les gouverneurs et les rois, pour qu’ils puissent livrer leur témoignage devant ces gens-là ? Jésus est en train de le faire. Voici la première prédication de Jésus aux païens.
20 Puis, quand ils se furent moqués de lui, ils lui ôtèrent la pourpre et lui remirent ses vêtements. – [...] Jésus se tait sous ces insultes et en se taisant, il réalise mot à mot la prédiction du poème du Serviteur au chapitre 50 verset 4 à 9 :
[...] 6 J’ai tendu le dos à ceux qui me frappaient,
et les joues à ceux qui m’arrachaient la barbe ;
je n’ai pas soustrait ma face aux outrages et aux crachats. [...]
– Il s’agit du Messie, qui est le Serviteur de Yahweh, l’intime de Yahweh, celui qui doit accomplir ses desseins avec docilité. Jésus réalise les prophéties en acceptant les outrages, en se fiant à Dieu, son Père qui le mène et qui le sauvera à cette heure. [...]
SUR LE CHEMIN DU GOLGOTHA
Ils le mènent dehors afin de le crucifier. – en dehors des limites de la ville. Dans la parabole des vignerons homicides, chapitre 12, v. 8, les vignerons tuent le fils et le jettent hors de la vigne. Là, ils l’ont livré aux païens pour être crucifié et les soldats romains sur l’ordre des Juifs conduisent Jésus hors de Jérusalem. Il faut qu’il meure hors de la vigne comme cela a été écrit par les prophètes. Mais nous sommes le vendredi qui est le 14 nisan, qui est le jour où tous ces milliers de pèlerins se pressent dans les rues et montent vers le Temple, où chaque famille doit acheter un agneau qui sera immolé dans l’après-midi. Jésus sort de l’Antonia qui est l’épicentre de tout le tumulte puisque cela domine le Temple, portant sa croix.
21 Et ils requièrent, pour porter sa croix, Simon de Cyrène, le père d’Alexandre et de Rufus, qui passait par là, revenant des champs. – [...] Il est certain que Jésus a été délié et que c’est Simon de Cyrène qui a porté le patibulum à sa place. Jésus était donc dans un état d’exténuation tel que les soldats avaient peur qu’il n’ait pas la force de monter jusqu’au lieu du supplice et qu’il meure avant d’être crucifié. Leur devoir était de le crucifier.
22 Et ils amènent Jésus au lieu-dit Golgotha, ce qui se traduit lieu du Crâne. [...] 23 Et ils lui donnaient du vin parfumé de myrrhe, mais il n’en prit pas. – Ce vin parfumé de myrrhe était légèrement anesthésiant, Jésus le refuse, il veut souffrir. Là encore, il est maître des circonstances, il n’est pas du tout un pauvre homme qui se laisse traîner en gémissant ou en se révoltant, il ne veut pas être endormi.
CRUCIFIEMENT
24 Puis ils le crucifient et se partagent ses vêtements en tirant au sort ce qui reviendrait à chacun. – C’est la réalisation littérale du psaume 22 au verset 19. La chose nous saute aux yeux, saint Marc n’a même pas besoin de nous le faire remarquer. [...]
25 C’était la troisième heure quand ils le crucifièrent. – [...] Jeudi, les Grands Prêtres étaient pressés parce qu’il fallait s’être purifié depuis midi pour pouvoir manger l’agneau pascal. Le soir tout cela s’était jugé, ils étaient retournés auprès de Pilate pour avoir son billet d’exécution, dès le matin du vendredi, et on s’est mis en marche à neuf heures. Saint Marc donc a raison dans ce détail de rien du tout, mais qui prouve la véracité de ce témoin.
26 L’inscription qui indiquait le motif de sa condamnation était libellée : “ Le roi des Juifs. ” – Pilate avait tout à fait conscience d’avoir abandonné un innocent à ses ennemis en flagrant délit d’injustice et de viol de l’ordre romain. Du moins, le motif qu’il s’est dit : “ Le roi des Juifs ” est digne de condamnation pour un Romain. Seulement, Jésus n’était pas le roi des Juifs dans le sens où les Romains le condamnaient.
27 Et avec lui ils crucifient deux brigands, l’un à sa droite, l’autre à sa gauche. – Isaïe, au chapitre 53 verset 12, dit que sa mort sera au milieu des malfaiteurs, ce qui est une réalisation d’une prophétie tout à fait étonnante. Mais pourquoi est-ce que Pilate l’a fait ? Parce que la cour dérisoire de ce roi des Juifs était deux brigands ! Cela fait écho au chapitre X verset 37 où Jean et Jacques voulaient être à la droite et à la gauche de Jésus. Non, deux brigands ont pris leur place. Voilà la cour de Jésus, du roi des Juifs dans l’heure la plus importante de sa vie.
JÉSUS RAILLÉ ET INSULTÉ
29 Les passants l’injuriaient en hochant la tête et disant : “ Hé ! toi qui détruis le Sanctuaire et le rebâtis en trois jours, 30 sauve-toi toi-même en descendant de la croix ! ” – [...] Tout se noue d’une telle manière qu’il est absolument impossible de douter de l’historicité de l’Évangile. Ces gens voient Jésus crucifié et disent : “ Alors, toi qui disais que tu vas détruire le Temple et trois jours après tu vas le rebâtir ”. Ils témoignent que Jésus avait dit qu’il y a un temple qui sera détruit et qu’au bout de trois jours, il se faisait fort de le rebâtir. Or c’est ce qui va arriver. Le Temple de son Corps est détruit, il va mourir et dans trois jours, il le rebâtira. Les Juifs eux-mêmes le savent très bien.
31 Pareillement les grands prêtres se gaussaient entre eux avec les scribes et disaient : “ Il en a sauvé d’autres et il ne peut se sauver lui-même ! – Extraordinaire aveu ! Ces gens reconnaissent que Jésus a multiplié les miracles, sauvé les gens de la maladie et même ressuscité des morts !
32 Que le Christ, le Roi d’Israël, descende maintenant de la croix, pour que nous voyions et que nous croyions ! ” – Ils devraient se rappeler que lorsqu’ils lui demandaient un signe dans le ciel, Jésus leur avait dit : “ À cette génération, il ne sera pas donné de signe ”. Pour le moment, ils se moquent, mais si nous croyons le psaume 2 qui est un peu terrible : Dieu se rit, Dieu se moque des gens qui se révoltent contre lui. Alors on ne se moque pas de Dieu. Pas de signe pour cette génération, mais la prochaine verra la destruction du Temple de Jérusalem qui ne se relèvera jamais. – Même ceux qui étaient crucifiés avec lui l’outrageaient. – Saint Luc mentionne que l’un était le bon larron et l’autre le mauvais. Mais enfin, saint Marc raconte les choses sans aucune atténuation, c’est vraiment l’horreur, l’anéantissement, tout ce qu’a prévu le psaume 22 ou bien Isaïe 53.
DERNIERS INSTANTS
33 Quand il fut la sixième heure, l’obscurité se fit sur la terre entière jusqu’à la neuvième heure. – [...] Ces ténèbres correspondent à ce que les prophètes ont annoncé. Joël, Amos, Isaïe, Jérémie ont dit : les ténèbres sont le signe du châtiment de Dieu. 34 Et à la neuvième heure Jésus clama en un grand cri : “ Elôï, Elôï, lema sabachthani ”, ce qui se traduit : “ Mon Dieu, mon Dieu, pourquoi m’as-tu abandonné ? ” – C’est le début du psaume 22. [...] Toute la première partie du psaume est très impressionnante par le détail de toutes les souffrances de cet homme qui est le Fils de Dieu et qui semble abandonné par Dieu contrairement aux justes de l’Ancien Testament. Il s’en plaint doucement à son Père tout en gardant confiance, et la deuxième partie est son action de grâce pour Dieu son Père qui l’a délivré. Donc c’est le cri qui correspond aux souffrances du Christ : il se sent dans tout son être physique, moral, abandonné par Dieu et il l’est vraiment puisqu’il faut qu’il paye pour le péché du monde entier. Mais cet abandon ne le livre pas au désespoir comme disent nos ennemis, il garde sa foi d’homme, et sa confiance de Fils en son Père. C’est le mystère de l’Incarnation. Il sait que le triomphe va venir bientôt, mais il est le paroxysme de l’immolation et de la souffrance.
35 Certains des assistants disaient en l’entendant : “ Voilà qu’il appelle Élie ! ” 36 Quelqu’un courut tremper une éponge dans du vinaigre et, l’ayant mise au bout d’un roseau, il lui donnait à boire en disant : “ Laissez ! que nous voyions si Élie va venir le descendre ! ” 37 Or Jésus, jetant un grand cri, expira. – Jésus a été au bout de son rôle, tout était accompli. Ce grand cri est une chose stupéfiante de la part d’un homme atteint de tétanie générale ne pouvant plus expirer. Eh bien ! cependant il expire en un grand cri, ce qui suppose une puissance tout à fait miraculeuse.
APRÈS LA MORT DE JESUS
38 Et le voile du Sanctuaire se déchira en deux, du haut en bas. – C’était l’abrogation du culte ancien et l’ouverture du sanctuaire à tous les hommes.
39 Voyant qu’il avait ainsi expiré, le centurion, qui se tenait en face de lui, s’écria : “ Vraiment cet homme était fils de Dieu ! ” – [...] Les gentils commencent à tourner les yeux vers leur Sauveur. Ce centurion est un Romain sincère, il est là, en face de la croix. Cet homme qui se prétend le Fils de Dieu, il l’a peut-être insulté, giflé et flagellé le matin même ou la veille et puis il le voit mourir comme cela. Pour lui, il n’y a pas de doute, c’est un saint. Et il reprend le mot que Jésus s’est attribué à lui-même : c’est le Fils de Dieu ! Au moment où les Juifs s’endurcissaient jusqu’à se moquer de leur victime expiant pour leurs péchés sur la croix, le Romain étranger était introduit dans le mystère du Christ et y adhérait. À peine les ténèbres se sont appesanties sur le monde juif, que la lumière commence à renaître pour le monde romain.
Abbé Georges de Nantes
S 90 : L'Évangile selon saint Marc, retraite automne 1986