Vendredi 26 juin

Sœur Marie-Cléophas

TRANSFORMÉS en hôpital, les pavillons du jardin colonial de Paris accueillirent jusqu'à 4 513 soldats indigènes d'Afrique. Sœur Marie-Cléophas, l'une des sœurs Blanches qui s'occupaient d'eux, s'attira un jour cette réflexion :

« Fille de ta Patrie, tu es meilleure que mon père et que ma mère ; tu iras droit au Ciel ! Dis la formule : “ Dieu est Dieu, et Mahomet est son prophète. ”

Cela jamais, ma religion me le défend, protesta l'infirmière.

Ce serait pourtant dommage que tu n'ailles pas au Ciel, reprenait le pieux Marocain, mais Dieu est bon, et t'y fera entrer quand même. »

Dans une autre occasion, la conversation s'engagea sur le mariage :

« Ma sœur, tu n'es pas mariée ?

– Non, et je ne me marierai pas, car Dieu me suffit.

– Ma sœur, ce n'est pas bien !

– Dans votre religion, peut-être, mais chez nous, c'est plus parfait.

Cela, je ne le comprends pas, s'exclame l'interlocuteur intrigué.

Dis-moi, reprend la religieuse, au Maroc, que deviennent les enfants qui n'ont plus de mère ? Et les pauvres vieillards ? Nous sommes les mères des enfants et des vieillards. Si nous étions mariées, nous n'aurions pas le temps de vous soigner, vous et tant de pauvres Arabes qui êtes dans nos hôpitaux !

Andek el hak ! Tu as raison, ma sœur. Pardon, si nous avons dit que tu n'avais pas bien fait : maintenant nous comprenons, c'est très beau ! »

« Dieu me suffit. » Il n'en est sans doute pas ainsi de nous, tellement attachés à notre confort, nos affaires, nos habitudes et nos loisirs. Ne pourrions-nous pas au moins nous détacher de telle ou telle chose, à défaut de nous dévouer aux pauvres et aux malades ?

Colorier sœur Marie-Cléophas se dirigeant vers le pavillon de la Tunisie.