26 SEPTEMBRE 2021
Douceur et sévérité de Jésus dans l’Évangile
CE passage de l’Évangile de saint Marc nous montre que Jésus n’est ni un disciple de Tolstoï ni un non-violent. Notre-Seigneur parlant au nom de son Père du Ciel, il connaît le fond de toutes choses. Il parle avec tranquillité et fermeté, sans aucune atténuation, parce que c’est vrai et que cette vérité est tragique. À côté de cela, il montre pour les êtres humains une infinie bonté qui transparaît dans l’Évangile que l’Église nous donne à méditer ce matin :
« Celui qui n’est pas contre nous est pour nous. Celui qui donnera un verre d’eau fraîche à l’un de ces petits à titre de disciple, je vous le dis : en vérité, il ne perdra pas sa récompense. »
Ce verset m’a souvent impressionné. N’auriez-vous donné qu’un verre d’eau à un homme assoiffé, parce qu’il est disciple, ou pour le rendre disciple ou pour faire plaisir à Jésus, vous n’iriez pas dans l’enfer éternel puisque Jésus a dit que vous recevriez une récompense.
Toutefois, le verset suivant est d’une fermeté extrême :
« Celui qui est une occasion de chute pour un seul de ces petits qui croient en moi, mieux vaudrait pour lui qu’on lui attache au cou une de ces meules que tournent les ânes, et qu’on le jette à la mer. »
Jésus, si gentil envers celui qui reçoit un enfant chez lui par amour pour Lui, mais sachant l’affreuse gravité que le scandale peut provoquer dans une âme d’enfant, pour ainsi dire “ perd toute mesure ”.
Avec cet exemple, vous voyez que Notre-Seigneur peut avoir des sentiments très contrastés : à la fois d’émotion, de miséricorde, d’attachement aux petits enfants, aux petites gens, aux âmes perdues... et par le fait même, de fureur, d’une sainte colère contre ceux qui sont capables de faire périr ces âmes d’enfants !
Je voudrais bien que cela paraisse dans les journaux chrétiens dans ces temps où on ne nous parle que de violences faites sur des enfants. C’est toujours une horreur car il s’agit d’innocents. Notre-Seigneur sait que les innocents sont faits pour aller au Ciel. L’important est qu’ils restent dans le troupeau du Christ, et pour cela il faut éviter de les scandaliser, et se méfier de soi-même.
« Si ton pied est pour toi un une occasion de chute, coupe-le. Mieux vaut pour toi entrer dans la vie éternelle estropié que d’être jeté dans le feu éternel avec tes deux pieds. »
Évidemment, la comparaison est faite pour choquer. Dans nos travaux, nos mains et nos pieds nous sont des organes très utiles. Mais si avec ces membres utiles nous commettons des crimes, nous irons au feu éternel ! Et saint Marc est sans équivoque sur la vie éternelle. Il a écouté Jésus, et il Le répète : « Si ton œil est pour toi une occasion de chute, arrache-le. Mieux vaut pour toi entrer borgne dans le Royaume de Dieu que de t’en aller dans le feu éternel avec tes deux yeux. »
Quand j’étais aumônier des religieuses aveugles qui élevaient des petites aveugles à Paris, certaines n’avaient jamais vu, étant aveugles de naissance ; d’autres avaient vu, mais leurs yeux malades s’étaient éteints. Quelquefois, je leur demandais si elles aimeraient retrouver leurs yeux ; les avis étaient partagés. Les plus pieuses disaient préférer rester aveugles pour ne pas risquer de perdre leur âme dans toutes les curiosités, et elles souhaitaient que leurs yeux s’ouvrent sur le Ciel. C’est tout à fait l’esprit de ce passage d’Évangile !
Celui qui a mauvais esprit objectera que c’est une chose folle de dire cela... mais n’empêche qu’il y a beaucoup de choses que nous nous attribuons en propriété, ou des êtres humains que nous nous asservissons pour notre contentement, et qui compromettent notre salut éternel. “ Tu es avec une femme qui n’est pas ta femme ? À quoi cela te servira-t-il quand tu arriveras au Jugement ? L’important c’est qu’elle aille au Ciel, et toi aussi ! ”
C’est avec ces rudesses que Notre-Seigneur dit la vérité hardiment, parce qu’il sait que c’est la vérité et qu’il en apprécie toutes les conséquences qui peuvent être tragiques. C’est ainsi que l’Évangile a sauvé notre civilisation jusqu’à ce jour.
L’esprit de Notre-Seigneur est dérangeant, mais aussi attachant. On ne s’attache qu’à celui qui nous dérange, parce que s’il nous dérange, c’est pour nous mener à un état meilleur et obtenir ainsi le bonheur éternel du Ciel, « l’unique but de tous nos travaux » (sainte Thérèse de l’Enfant-Jésus).
Abbé Georges de Nantes
Extrait du sermon du 9 août 1998