Le christianisme est-il un humanisme?
LE Christianisme est la Religion révélée instituée par Jésus-Christ, fils de Dieu fait homme, pour le salut de tous les hommes, c’est-à-dire leur rédemption acquise par le Verbe incarné, crucifié pour tous, source de grâce, et leur sanctification au sein de la société instituée par Lui, l’Église catholique. Elle enseigne la vérité révélée que les chrétiens embrassent avec foi et elle leur communique la vie divine par les sacrements, pour que tous, à l’aide de la grâce et dans l’obéissance aux commandements de Dieu, puissent mener une vie surnaturelle en ce monde, afin de gagner la vie éternelle dans l’autre.
La vie chrétienne étant toute centrée sur Dieu, le bonheur d’une vie éternelle en sa présence, le Christ enseigne que pour y atteindre, il faut se renoncer, prendre sa croix. Le Christianisme semble donc être une déclaration de guerre à la chair, à la terre, à la vie présente, une lutte de l’homme contre lui-même, le monde et Satan, le Prince de ce monde... Est-ce pour autant un antihumanisme ?
La raison d’être de cette religion étant le salut de tous les hommes, il y est question de vérité, de bien, de paix, de joie, de bonheur à trouver ou retrouver, à recevoir de la bonté Dieu, de l’amour et de la grâce du Christ, dans la communion de l’Esprit. Il s’agit donc bien aussi du bonheur de l’homme : total, durable, éternel, de son âme et de son corps, de chacun et de tous, de toute la famille humaine (...) ; car en conséquence des bienfaits de la grâce divine répandue et communiquée dans tous les secteurs de l’activité humaine, il résulte une certaine prospérité matérielle et morale, un art de vivre, de sentir et de penser entre gens “ civilisés ” : Bienfait de la civilisation promise par le Christ à une condition : « Cherchez d’abord le Royaume de Dieu et le reste vous sera donné par surcroît. » (Mt 6, 33)
L’HUMANISME n’a pas de définition. C’est un intérêt extrême porté à l’homme, à l’humain, à l’humanité, avec une nuance de sélection, de conflit, voire d’exclusivité ; c’est une option pour l’homme considéré comme valeur première, suprême, comme à lui-même sa propre fin et réalisation de son destin par lui-même. L’homme étant un vivant supérieur, qui nait, grandit, s’accomplit dans l’espace d’une seule existence, l’humanisme se présente donc comme la recherche pour l’homme de la plus grande et de la plus parfaite plénitude à atteindre par lui-même et pour lui-même durant ce laps de temps, quitte à mettre tout le monde à son service. C’est un anthropocentrisme qui veut tout pour l’homme, sur terre, selon la nature, maintenant et tout de suite !
Ici une enquête s’impose, faute de définition, sur les trois principaux humanismes qui ont été célébrés ou se sont déclarés comme tels.
1. L’Humanisme de l’antiquité gréco-latine ; L’absence ou l’éloignement d’un Dieu unique, d’une révélation universelle, lui ayant donné la réputation, vraie ou usurpée, d’avoir été l’époque par excellence de l’homme, de son libre épanouissement, de son exaltation, en tout domaine.
2. L’humanisme de la Renaissance ; La redécouverte des Anciens, par leurs œuvres littéraires a certes provoqué l’émancipation d’une élite intellectuelle du joug de la civilisation chrétienne, dogme, morale, discipline. Il ne s’agit donc plus d’un libre épanouissement, mais d’une libération hardie, toutefois heureuse, car finalement assumée et assimilée par l’Église.
3. L’humanisme de la Pensée et du Monde modernes, disons-le tout de suite, n’a rien à voir avec l’humanisme hardi de la Renaissance, car c’est très délibérément que philosophes, moralistes et politiques, ont voulu et veulent toujours détruire le christianisme au nom de la Liberté, tout un chacun devant accéder, libérés de toute entrave ou aliénation à la plénitude de leur être d’hommes et de peuples. Cette fois, c’est un défi prométhéen, antichrist, une guerre contre l’Église et son prolongement temporel, la Chrétienté.
L’ÉGLISE CONFRONTÉE À L’HUMANISME
1. L’HUMANISME GRÉCO-LATIN
Il y a eu un “ miracle grec ”, c’est indéniable. L’homme s’est élevé par ses propres forces, par son génie, à des sommets d’intelligence, d’art et de sciences, à une délicatesse de civilisation que jamais rien d’autre n’égalera ou ne surpassera, qui d’une manière ou d’une autre n’en provienne et ne s’en inspire (...). Le miracle grec n’a pas duré, mais « Rome d’Athènes en fleur a récolté le fruit, Beauté, raison, vertus, tous les honneurs de l’homme... » Et Rome en établissant l’ordre politique, en inventant le Droit, en imposant la Loi, a rendu possible l’extension à l’univers et la conservation pendant des siècles, de la Sagesse, de la Beauté, de la civilisation grecque. C’est vrai que Rome a rendu cet Humanisme plus prosaïque, moins fascinant, moins dangereux pour nous (...).
Les Pères de l’Église qui avaient d’abord gouté à la Sagesse grecque, et participé à la gloire de Rome, ont compris que Dieu était, dans sa Providence, l’inspirateur et le conservateur de cette civilisation, pour préparer le monde à la venue de son Seigneur et de son Sauveur. C’est le Verbe divin qui se révélait aux philosophes grecs, et c’est plus froidement la Puissance divine qui gouvernait Rome et l’amenait à la domination du monde (...). Donc cette civilisation, cette sagesse et cet ordre appartiennent bien à l’Église du Verbe incarné (...). Elle en disposera en maitresse souveraine, sachant discerner le grain d’or du divin, de la paille, de la bale de l’humain (...). Les Pères de l’Église ont aussi explicitement dénoncé le venin de ces grandeurs et splendeurs païennes... et c’est avec les pierres de ses idoles brisées que l’Église a construit ses sanctuaires, au grand dam des esthètes....
Oui Athènes et Rome, sont les mères de notre civilisation, mais Jésus-Christ est Seigneur des seigneurs et Roi des rois. Athènes et Rome ont disparu, mais Jésus-Christ demeure, et son Église demeurera éternellement ! Il nous faut savoir, comme les Pères de l’Église, concilier ces fidélités, plutôt que d’aller rêver sur le Parthénon ou sur la voie sacrée à Rome, de je ne sais quelle reconstruction du paganisme antique, dans l’apostasie du Seigneur Jésus-Christ, Sauveur et Souverain Juge de l’humanité (...).
2. L’HUMANISME DE LA RENAISSANCE (XVe - XVIe siècleS)
Cette Renaissance, il ne faut pas nous étonner qu’elle n’ait pas été une cassure dans l’histoire de l’Église ni qu’elle n’ait jamais paru une monstruosité. Elle n’a pas interrompu définitivement le fil de l’histoire, comme la chute de Jérusalem pour le peuple juif jusqu’à ce qu’il se convertisse, ou comme la chute de l’école d’Athènes qui n’a jamais été remplacée par aucune sagesse païenne, ou encore comme la chute de l’Empire romain qui n’a jamais été remplacé par aucun empire terrestre (...)
Cette Renaissance, chrétienne tout d’abord influencée par le message des saintes Écritures et des Pères de l’Église, était tout à la fois la renaissance d’Athènes, de Rome, mais aussi la renaissance de Jérusalem, des saintes Écritures. Préoccupée de toutes les grandeurs humaines et divines (...) la Renaissance a lentement mûri dans le sein de l’Église, puis peu à peu la gloire de l’homme a offusqué la gloire de Dieu (...).
L’aberration des hommes de la Renaissance, c’est d’avoir cru que leur humanisme était une civilisation qui, mûrie dans le sein de l’Église, n’avait plus qu’à s’en détacher pour fonder une autre religion. Une religion de l’homme et de la nature, qui par la force même de son humanisme engendrerait une nouvelle civilisation, qui n’aurait plus besoin de l’Église (...). C’est alors que la débauche, la corruption, la violence se sont emparées de Rome et de toute l’Europe (...).
L’Église, avec un génie, une inspiration très sainte, n’a jamais condamné l’humanisme ni fait chorus avec les contempteurs de la Renaissance : Savonarole, Luther, Calvin etc. (...). Car avant même la crise de l’humanisme, les saints avaient entamé une réforme de l’Église, qui œuvrait tout à la fois pour la gloire de Dieu, l’expansion de la civilisation catholique et la glorification de l’homme (...). Nous en avons un exemple qui, pour moi, est l’objet de méditation continuelle, celui de saint Thomas More (...). Ayons sa vie à l’esprit pour comprendre notre jugement sur la Renaissance et l’humanisme.
L’HUMANISME DES SAINTS
1) Le saint, si humaniste qu’il soit, sait que tout est suspendu à la foi, à la mystique catholique ; que les arts, leur trésor d’inspiration, trouvent leur principe dans l’Évangile ; que les arts humains, les lettres et la philosophie humaine sont soumis et subordonnés comme des moyens par rapport à leur fin qui est la vie spirituelle, l’amour du Christ. La faute de l’humanisme commence à partir du moment où il dédaigne les sources religieuses de son inspiration et croit trouver l’équivalent dans les belles lettres ou dans les arts du paganisme antique et de sa mythologie de “ carton-pâte ” (...).
2) Ces saints ont toujours été fidèles à l’autorité du Pape et à l’autorité du roi. Ce sont les pouvoirs monarchiques dans l’Église et dans la société qui restent, même au travers les pires aberrations et désordres, le principe du salut. On peut s’étonner des débordements de Rome, ils sont dus à la faiblesse des Papes. Il n’empêche que ces Papes légitimes et sacrés, s’ils se sont laissé aller pendant un temps, ils se sont repris, puis ils ont fait triompher une nouvelle réforme fidèle à la volonté de Dieu, au sein même du catholicisme...
3) Les saints dans ces pires désordres sont restés des hommes sereins, appréciant la faiblesse de l’humanité à sa vraie mesure. Ils n’ont pas condamné l’humanité, mais ils l’ont convertie. Ils ont entraîné derrière eux les foules, les âmes dont ils avaient la charge, mais ils ne se sont pas dressés en accusateurs de l’Église. Ils n’ont pas perdu la foi, ils ne se sont pas séparés de la grande civilisation chrétienne, ils ont vécu la synthèse de l’humain et du divin sur la mesure même de Jésus-Christ (...).
Une fois corrigés ses abus, la Renaissance a produit cette magnifique civilisation classique qui est désormais inoubliable, et à laquelle peuvent boire toutes les nations. Il y a une littérature et des arts classiques ; une méthode scientifique, une métaphysique, désormais accessibles à tous les hommes de l’univers pour qu’ils se cultivent et grandissent en civilisation, pour qu’ils connaissant les grandeurs de l’univers, et pour qu’ils louent la gloire de Dieu qui est son Créateur et du Christ qui est son Sauveur. Voilà ce que Dieu a voulu pour l’homme (...). Comment cela s’est-il corrompu ?
3. L’HUMANISME MODERNE, ANTICHRIST
L’humanisme moderne malgré ses prétentions ne vient ni de Grèce ni de Rome, il n’est pas davantage issu de l’humanisme de la Renaissance. Il est humaniste par manière de négation, de revendication, de révolution, c’est une façon de dire qu’il est athée. Il est moderne par manière de dire qu’il rejette l’ancien, le passé, la tradition : « du passé faisons table rase ! » Son exaltation de l’homme est un abaissement de Dieu, du Christ et de l’Église, sa libération de l’homme est une destruction de la société, de tout ordre, de toute autorité.
Mais lui-même d’où vient-il ? de quelle autorité ? de quelle conjuration ? de quel passé, de quelle contrée ?
« C’est évident. Il vient de Luther et de Calvin, d’Henri VIII et d’Élisabeth d’Angleterre. C’est un « non possumus » lancé à l’Église de Rome, et une haine séculaire, barbare, raciste, de l’exemplaire Monarchie française, de la Contre-Réforme Catholique et de la civilisation classique.
Le lieu de naissance de cette philosophie, c’est l’Angleterre orangiste et hanovrienne, fondatrice de la Franc-Maçonnerie, c’est aussi l’Allemagne des Illuminés de Bavière, et les Juifs d’Europe centrale subventionnant toutes les révolutions antiromaines ; c’est encore pour finir les grands ancêtres de la Révolution américaine qui viendront soutenir la française...
Ces puissantes organisations, sataniques dans leur essence, ont inventé de toutes pièces, pour séduire les catholiques, un humanisme qui puisse être un cheval de bataille acceptable. On lutterait pour l’homme humilié, pour les droits de l’homme opprimé, pour sa liberté en invoquant sa dignité. Et ainsi émancipés de Dieu et des rois, les peuples pourraient accéder à une vie nouvelle – non une civilisation – un monde de liberté, d’égalité et de fraternité (...) !
UN ANTIHUMANISME
On sait ce qu’il a ruiné par une suite de révolutions : l’Ancien régime, la civilisation française louis-quatorzième, et l’Église catholique elle-même, réduite en servitude, ses élites peu à peu séduites par le libéralisme démocratique, bientôt ralliées à ce monde nouveau, et désireuses finalement depuis Vatican II d’en assurer l’animation spirituelle...
On voit mal ce que ce prétendu humanisme moderne a créé, sinon d’ordre matériel : finance, industrie, guerres, exploitation des ressources mondiales, productivité régulièrement accélérée de richesses matérielles de plus en plus élémentaires, vulgaires. Cela peut paraître une vie qui fait éclater tous ses cadres anciens, mais c’est bien plutôt est une fureur de casse, qui aboutit en trois temps trois mouvements à une destruction et subversion de tout ordre humain.
La Révolution française a tout détruit de l’ordre ancien dans une fureur sanglante antimonarchique, anticléricale et spoliatrice du patrimoine de l’Église, génocidaire aussi vis-à-vis des plus pauvres gens du peuple chrétien.
Dans un deuxième temps, et sans autre légitimité que maçonnique et capitaliste l’empire des deux Napoléon, puis la république bourgeoise de Thiers vont consolider et imposer les acquis de la Révolution. C’est l’ère des grandes dynasties bourgeoises, leur prétention à créer un nouveau style, un nouvel art, une nouvelle philosophie, politique, éducation... De ce « stupide XIXe » (Daudet) des élites dirigeantes, il ne reste que boursouflure et laideur d’une exécution mercenaire.
Dans un troisième temps, à défaut de triompher dans l’ordre naturel, encore trop marqué par la présence de Dieu et de sa loi, ce sera la recherche non seulement voulue mais imposée par la République maçonnique et anticléricale du contre nature dans les arts, les lois, l’Éducation nationale, les mœurs, etc (...). On y arrive ! C’est une puissance satanique, impressionnante... (...) !
Depuis que le démon nous gouverne par la République au nom : « liberté, égalité, fraternité, soyez vous-mêmes, soyez humanistes ! etc. » on n’a jamais vécu sous autant de contraintes. Au nom de la liberté, on supprime les libertés ; au nom de l’égalité et de la fraternité, on creuse l’écart entre les classes, on leur apprend à s’entre-déchirer, à s’entre-détruire (...). Comment se fait-il que, au bout de deux cents ans et plus, l’homme moderne n’ait pas encore identifié l’esprit infernal qui flatte son orgueil afin de l’opposer à Dieu qui est non seulement la source de son être, mais aussi son Sauveur et son Ami ?
L’ATTITUDE DE L’ÉGLISE FACE À L’HUMANISME MODERNE
À cette tentation diabolique qui substitue le culte de l’homme au culte de Dieu, l’Église hiérarchique, des papes Pie VI au bienheureux Pie IX, s’est opposée de toute la force de sa foi, alors même que serpentait en elle un esprit de ralliement au monde moderne, et qu’il gravissait petit à petit les degrés de la hiérarchie. Cet esprit libéral s’est imposé avec Léon XIII, et il aurait ruiné la chrétienté tout entière si son successeur, saint Pie X, n’avait vigoureusement réagi en appliquant sa devise : « Tout restaurer dans le Christ ».
LE CRIME DES GENS D’ÉGLISE
Après saint Pie X, les souverains Pontifes vont céder au libéralisme, allant toujours plus loin dans la conciliation, les accommodements avec les puissances anticatholiques. Dès lors un parti de la trahison existe dans l’Église comme au sein de la droite dans tous nos pays latins : les Ralliés à la République puis les démocrates-chrétiens. Depuis la libération-révolution de 1944, l’Église et nos Nations catholiques sont serves de la Franc-Maçonnerie internationale, et elles accomplissent tous ses plans : Dieu est renié, effacé, oublié, et l’humanité retourne à la barbarie corrompue et bestiale ici, sauvage et cruelle là. Crier « Mort à Dieu ! à mort le Christ !, c’est vraiment crier « Vive la mort des hommes »...
Piégés par la rhétorique abstraite et généreuse qui entoure le mythe des Droits de l’Homme, l’Église enseignante et hiérarchique s’est depuis le concile Vatican II, mise au service d’une “ machine de guerre ” antichrist, dont le but est d’émanciper les individus de toutes les autorités légitimes et protectrices : du père de famille, du chef de l’État (considéré comme dictateur), du Pape et donc l’autorité de Dieu lui-même.
ET LES DROITS DE DIEU ?
Pour achever de désorienter l’intelligentsia catholique, les intégristes ne trouvèrent rien de mieux pour contrer les Droits de l’Homme, que de leur opposer « les Droits de Dieu ». Et voilà comment l’intégrisme vint à la rescousse de la Franc-maçonnerie pour achever de persuader les peuples du monde entier qu’entre Dieu et l’homme, il y a un combat, et qu’il s’agit de savoir si c’est Dieu qui a des droits ou si c’est l’homme ? Mais alors, Dieu est-il vraiment le maître qui écrase l’homme et qui le renvoie au néant ?! En ce cas, c’est la négation de toute notre histoire, comme de toute la Sagesse de Dieu ?!
Mais non, il ne s’agit ni de droits ou de devoirs, de Dieu ou de l’homme ! Il s’agit du Vrai, du Bien, du Beau commun à tous, venus de Dieu, donnés aux hommes pour en jouir ! et par là faire leur salut éternel (...).
C’est entendu, il faut condamner cette civilisation moderne, il faut condamner cet humanisme moderne comme une chose satanique dans son essence, c’est-à-dire comme une chose qui va contre Dieu, qui est le plus précieux de nos biens, mais qui va contre l’homme par le fait même. Car entre Dieu et l’homme, il n’y a pas de combat, il n’y a pas d’opposition possible. C’est Satan qui a fait cette œuvre (...). L’Église ne s’y est pas trompée, et elle n’a pas utilisé les rigueurs de son inquisition à l’encontre des artistes et des novateurs de la Renaissance, mais elle l’a exercée contre les Savonarole, les Luther, les Calvin, etc, contre tous ces mécontents de l’alliance entre le divin et l’humain, qui veulent la mort de l’homme sous prétexte d’exalter un Dieu qu’ils détestent.
UN HUMANISME INTÉGRALEMENT CHRÉTIEN
DOSTOÏEVSKI (1822-1881), SOLOVIEV (1853-1900),
PROPHÈTES DE LA RENAISSANCE À VENIR.
Ces deux grands penseurs russes, tout à fait en dehors de notre orbe de civilisation et de religion, ont connu cet engouement pour la philosophie allemande, kantienne, hégélienne, marxiste. Ces deux convertis, chacun à sa manière, ont vu quelle révolution totale, diabolique, allait déclencher dans le monde le rationalisme athée, avec son savoir absolu avide d’un pouvoir absolu. Ils ont compris qu’une seule force au monde pourrait en guérir et en sauver l’homme : la Religion chrétienne. Pour eux la piété russe, la religion slave, l’amour du peuple russe pour le Christ et la Vierge Marie...
Soloviev, ami et disciple de Dostoïevski, est un penseur de génie, à l’intelligence immensément vaste. Au principe de son système intégral : la Théandrie, l’affirmation que Dieu et l’homme ne font qu’un dans le Christ. Ce qui doit donc s’accomplir au cours de l’histoire, c’est la récapitulation de tout le monde créé dans le Dieu fait homme (...). Cherchant comment poursuivre cette construction humano-divine, chrétienne et humaine, déjà largement avancée, Soloviev a été conduit à préconiser l’union avec Rome, la réintégration de l’orthodoxie dans l’Église catholique, et cent autres vues religieuses, politiques et sociales toutes proches de celles que nous avons consignées dans les 150 Points de notre doctrine catholique, royale, communautaire (...), véritable charte d’un nouvel humanisme chrétien.
LA CIVILISATION DE L’AMOUR : CATHOLIQUE, ROYAL, COMMUNAUTAIRE
Si Dieu est Dieu, si le Fils de Dieu s’est fait homme, si l’Église est son Corps... alors tout doit être chrétien, la vie doit être imprégnée de divin, de chrétien. Non contre l’humain, mais pour le préserver de la chute, l’inspirer, le renouveler sans cesse. Ce qui a manqué à Athènes, ce qui a été inspiré à Rome magnifiquement, ce qui a fait la suprématie de la Monarchie française pendant mille ans, c’est l’ordre politique et la paix. C’est dans ce milieu propice, vivifié par la vie divine communiquée par l’Église, qu’au sein des communautés humaines s’est épanoui un art de vivre humaniste multiforme, ayant ses principes propres, mais toujours ami de l’Église (...).
Pour qu’une nouvelle renaissance chrétienne et humaine prenne la suite de celles des IVe, VIIIe, XIIe, XVIe siècles, Il faut donc commencer par retrouver la vraie mystique chrétienne, catholique, rappeler sans cesse que Dieu aime sa création, et qui plus est comme un amoureux aime son amoureuse, disait saint Louis-Marie Grignion de Montfort. Il aime tellement l’homme qu’il est prêt à toutes les faiblesses, que dis-je, à toutes les souffrances pour se le réconcilier, tirer de son cœur un peu de repentance, de foi, de charité, afin de le combler de tous les dons, et l’amener ainsi à l’égalité avec lui, dès ici-bas en vue de la gloire du Ciel. Ah ! le jour où on prêchera comme cela, tous comprendront que l’humanisme est un chapitre de l’Incarnation, Dieu s’étant fait homme pour que l’homme soit fait Dieu. Cette “ divinisation ” est une transformation progressive des individus et des peuples par la grâce, c’est-à-dire la vérité, la vie et l’amour de Dieu communiqués par les sacrements de l’Église, et par laquelle l’homme baptisé devient image de Dieu (...).
C’est ainsi que malgré les conséquences catastrophiques du péché originel à travers les générations, il faut dire que Dieu ayant créé l’homme et la femme « à son image et ressemblance » (Gn 1, 27), Il s’applique sans cesse à leur bonheur, qui est leur salut éternel. Ce salut se manifeste d’abord par leur épanouissement spirituel et leur sainteté, puis ensuite par une certaine prospérité, une certaine exubérance, celle de la civilisation résultant des bienfaits de la grâce divine répandue et communiquée dans tous les secteurs de l’activité humaine.
CONCLUSION
Un mot bien moderne va finalement caractériser notre humanisme. Il est et il sera totalitaire ! Ce qui est inacceptable dans le totalitarisme moderne, c’est qu’il est à dominante inhumaine et satanique. Qui dirige tout depuis 1789 ? Des indignes, d’abord des gens d’argent, puis des intellectuels rationalistes ou des illuminés, et enfin des bourreaux cruels, haineux, inassouvis, les Lénine, Staline, Hitler, etc.
Notre totalitarisme est chrétien, et nous savons par l’exemple du Moyen-Age et de la Renaissance qu’il est protecteur de l’homme, de la civilisation, de la pensée, des arts, des lois et des sciences... Nous avons appris de l’histoire que l’humanisme créé ou restauré dans et par l’Église, quand il lui échappe, risque fort de tourner à la démesure de l’orgueil et à la corruption de la luxure et de la cruauté.
L’humanisme fut l’œuvre des clercs au Moyen-âge, puis d’une élite catholique aristocratique ou populaire à l’époque classique, mais point d’humanisme digne de ce nom à l’époque moderne ; car que peut-il sortir de bon, d’humain, d’une bourgeoisie d’argent, d’une culture de masse, d’un fonctionnariat ?
Il est vrai que les sciences et les techniques dont les objets sont étroitement limités à un secteur de la matière sont autonomes et neutres : il n’y a pas une chimie chrétienne différente de la chimie athée ou musulmane, ou pareillement une astronomie... Mais dès que les sciences et les techniques, et évidemment les arts et les sagesses touchent par quelques conséquences à la vie humaine, ou bien quand elles-mêmes relèvent entièrement de l’homme, de sa pensée, de sa vie morale, alors il est vrai que tout cet « humain » devra être essentiellement dicté ou inspiré, ou du moins contrôlé par « le chrétien », faute de quoi, il desservira très probablement la grande cause de l’humanisme.
Abbé Georges de Nantes
PC 23 : Le christianisme est-il un humanisme ?