POLITIQUE TOTALE
Introduction
DEPUIS que nous avons communiqué au monde entier les idéaux de la RÉVOLUTION dite FRANÇAISE, celui-ci vit dans une sorte de chaos qui ne peut se terminer que par l’apocalypse (...).
L’ignorance des masses concernant la politique est entretenue par une désinformation orchestrée par de grands groupes de pression ou des sociétés secrètes. LA TRILATÉRALE est la plus connue, puissance judéo-maçonnique, mais aussi puissance industrielle et bancaire formidable, pour laquelle les frontières n’existent pas, ni d’ailleurs les différences de religions (...). Plus séducteur que le communisme, le capitalo-socialisme dont elle fait la promotion mène sa révolution dans le monde entier pour détruire les États-nations, et tout particulièrement ceux qui sont encore catholiques.
Par quel raisonnement bâtard, par quelle mécanique criminelle ? C’est ce que nous allons d’abord expliquer pour comprendre dans quel désordre des esprits nous sommes, afin de nous débarrasser de ces considérations aberrantes sur la politique et justifier l’édifice nouveau de notre POLITIQUE TOTALE.
PREMIÈRE PARTIE :
URGENCE D’UNE SAGESSE POLITIQUE TOTALE
LES TROIS FAUX PRINCIPES DE LA POLITIQUE MONDIALE
1) Le premier principe : LA LUTTE CONTRE LES DICTATURES, moyen en vue d’une fin : LE RENVERSEMENT DES ÉTATS (...). Par exemple, lutter contre la dictature de Marcos paraît une sainte et morale action, religieuse même, très catholique. En fait, on lutte contre l’État philippin qui résiste à la poussée soviétique (...). Ce qu’il y a eu de très intéressant pour le politologue, pendant tout l’été 1983, cela a été la mise en parallèle constante du Chili (Pinochet) et de la Pologne (Jaruzelski) (...). Parallèle rigoureux, absolument dénué de tout fondement, à moins que l’on ne traite les deux cas selon la dialectique hégélo-marxiste du maître et de l’esclave (...). Ce qui suppose que les gens de droite comme les gens de gauche acceptent le principe universel de la contestation de l’autorité politique et du pouvoir de l’État quand il est dictatorial (...).
2) Deuxième principe : La DÉMOCRATIE est le meilleur régime politique, car par l’observation des DROITS DE L’HOMME elle respecte la liberté et la dignité de l’homme. La Déclaration des droits de l’homme étant le fondement de toute société moderne et le critère de sa légitimité, il en résulte que :
- a) La violation des Droits de l’homme, où que ce soit, quels qu’en soient les motifs, par quiconque, est une condamnation suffisante et nécessaire du régime que l’on déclare alors dictatorial, fasciste, nazi. Une nation qui viole les Droits de l’homme perd toute légitimité, et contre elle, on peut déchaîner toutes les violences (...).
- b) En revanche, tout État qui proclame son respect des Droits de l’homme acquiert sa légitimité par cette seule proclamation (...). Même si ces pays (URSS, Chine, Albanie, etc.) ne respectent pas les Droits de l’homme, on le leur pardonne. Puisque leur Constitution déclare respecter les Droits de l’homme, ces pays gardent tout de même leur légitimité, et le monde entier les reconnaît comme vraies démocraties (...).
3) Troisième principe : LE RESPONSABLE DE LA VIOLENCE. Dans les conflits politiques et sociaux actuels, les DICTATURES sont au principe de la violence, théoriquement, a priori ! Les DÉMOCRATIES ne font que répondre à la violence par la violence. Quand des grenades à fragmentation éclatent dans un concours de beauté aux Philippines, celui qui a lancé ces grenades n’est pas un terroriste, c’est un démocrate qui se trouve pris dans la “ spirale de la violence ” et qui a répondu par la violence à la violence du chef de l’État. C’est donc le président Marcos LE coupable. Il n’y a pas besoin de faire enquête ! C’est forcément lui, puisque c’est lui le dictateur (...) !
C’est d’une logique hégélienne, c’est-à-dire d’une logique formelle impeccable, qui séduit les esprits. Gens d’étude ou gens d’Église, tous sont frappés par la logique du système et répètent à l’envi que la démocratie est la seule forme de vie possible pour les peuples d’aujourd’hui. Tel est la loi suprême de la politique moderne (...).
CONCLUSION
- Dans la mesure où un État national, mises à part les grandes ploutocraties dont on ne parle jamais parce qu’elles sont au-dessus de la critique, prétend défendre l’ordre intérieur et sa paix extérieure par rapport aux autres nations (...), et dès qu’il invoque le bien commun comme raison de son action, il piétine la démocratie, puisqu’il avoue que la raison suprême de son action, c’est la défense du pays et non la liberté des citoyens. Il va donc faire contre lui l’union de toutes les résistances : communiste, socialiste, démocrate-chrétienne, libérale... Ces “frères ennemis” uniront leur force contre le dictateur, pour la défense des Droits de l’homme.
- Dans la mesure où un État, ou une guérilla ou un parti ou une Église invoque comme raison suprême de son action les principes démocratiques, c’est-à-dire la Déclaration des droits de l’homme, il jouit aussitôt du support international de toutes les forces démocratiques. Cela lui donne une puissance incroyable. La conscience humaine, l’opinion mondiale est avec lui. D’où il suit qu’il n’y a de salut pour un État que dans l’invocation des principes démocratiques (...).
DEUXIÈME PARTIE :
URGENCE D’UNE SCIENCE POLITIQUE
CONTRE LA MORALE DES DROITS DE L’HOMME
Les Droits de l’homme, disait Auguste Comte, ne sont qu’une variante de la révolution ou de l’insurrection de l’individu contre l’espèce (...). Si on réclame ses droits, c’est contre l’autorité qui est au-dessus de soi, politique ou religieuse. C’est l’individu qui s’érige en maître, en roi, en dieu, contre toute communauté, toute société, tout ordre, toute autorité.
A preuve, l’origine de la “ Ligue des Droits de l’homme ” fondée à la fin du dix-neuvième siècle pour défendre le capitaine Dreyfus, accusé de trahison par l’armée française et reconnu tout d’abord coupable par toutes les instances de la justice française (...).
« Si Dreyfus est innocent et qu’on l’a condamné, périsse la France, périsse l’armée, périsse la justice, mais que son innocence soit reconnue ! » C’est un jugement qui est rentré dans la tête des Français en 1898, et qui n’en est plus sorti. Mais enfin : il y a là un cercle vicieux ! Qui vous dit qu’il est innocent ? On a usé de toutes les institutions possibles pour savoir s’il était innocent ou non, et finalement, ces institutions les plus hautes – il n’y en a pas de plus haute sur terre – l’ont jugé criminel. Alors, vous, vous allez juger au-dessus des institutions de votre pays ? C’est ce que disait Bernard Lazare : « un Juif est toujours en dehors et au-dessus des institutions du pays où il habite ».
C’est depuis cette fin du dix-neuvième siècle que date cet antagonisme théorique absolu entre d’une part les Droits de l’homme, et d’autre part le bien commun d’une nation, l’ordre public, les institutions de défense de cette nation contre l’anarchie. Les droits de l’homme sont toujours un appel à la justice au-delà de toute justice humaine. Finalement, cet appel à la justice au-delà de toute justice, c’est l’appel à MA justice qui m’érige, moi, en juge contre la justice et les institutions de ma nation.
CHARLES MAURRAS – MICHEL VILLEY
Charles Maurras et son mouvement, l’Action française ont lutté contre les Droits de l’homme (...). Disciple de l’Action française, la Contre-Réforme Catholique mène ce combat contre les Droits de l’homme et pour la souveraineté de l’État, comme Maurras, non seulement au nom de l’expérience de la raison, mais aussi et surtout au nom de la foi catholique, au nom de nos familles, au nom de nos communes, de nos provinces, de nos métiers, au nom de notre Nation. Nous privilégions l’idée de Nation chrétienne, de Chrétienté, sur celle abstraite d’Homme (...).
Après presque cent ans d’un ralliement à la République imposé par Léon XIII et une succession de Papes démocrates – à la seule exception de saint Pie X –, plus personne n’ose récriminer contre les Droits de l’homme ni affirmer que c’est un germe de corruption de toute société politique ou religieuse, quelle qu’elle soit. Nous étions seuls ! J’ai donc salué avec beaucoup d’enthousiasme le livre de Michel Villey, aux Presses Universitaires Françaises, qui a paru au début de l’été 1983 : LE DROIT ET LES DROITS DE L’HOMME (...).
LES DROITS DE L’HOMME : PIRES QUE TOUT... MAIS OPÉRATOIRES ?!
Voici, extraites du chapitre I : « Le langage des droits de l’homme est dépourvu de signification ; il n’a aucun sens praticable. C’est un produit de l’époque moderne, antidote à l’excès du totalitarisme de l’État », une suite de citations de Villey : « Les Déclarations des droits de l’Homme furent, je le répète, une arme défensive ; en 1789, contre l’absolutisme prétendu de la monarchie capétienne [il n’est pas sûr qu’elle méritait ce qualificatif !], ou en 1948 contre le fantôme d’Hitler [ou encore] contre les dictatures de tous bords. Généralement, [c’est] un remède à l’inhumanité d’un droit qui a rompu ses amarres avec la justice. » – « Les Droits de l’Homme seraient le recours. En fait, ils ne le sont pas. Ils sont ineptes, malfaisants. Pie VI les qualifiait de « contraires à la religion et à la société. » La papauté ne s’est départie que tout récemment (depuis Jean XXIII et Paul VI) de cette réprobation. » Ils sont ineptes, selon Croce. Irréels, décevants, indécents, faussement prometteurs, indéterminés, inconsistants. Ils ne sont pas « droits », mais idéals, bons sentiments, bonnes intentions. Contradictoires et par conséquent, cause d’injustice. Quel aveu !
« Nous n’oublions pas que les Droits de l’Homme sont « opératoires » ; qu’ils sont utiles aux avocats d’excellentes causes, protègent des abus du gouvernement et de l’arbitraire du « droit positif ». De qui se moque-t-il ? Il poursuit : « Si, par impossible, on rayait ce terme de notre vocabulaire, encore faudrait-il le remplacer par un autre moins adéquat. Nous ignorons lequel. Tel est notre problème. » (p. 14)
UNE JUSTICE ET UN DROIT SANS DIEU NI MAÎTRE
Au-delà de la très concrète jurisprudence du droit romain, selon laquelle les juges résolvent les procès ordinaires qui leur sont soumis, il y a des lois non écrites, un certain absolu qui provient de valeurs supérieures qui imposent aux hommes un certain respect d’exigence morale (...). Innombrables sont les passages de son livre où Villey évoque, tant pour la société grecque que pour la société romaine ou chrétienne, ces fameuses lois non écrites, que l’on a toujours déclarées de Droit divin, et qui s’imposaient inconditionnellement aux hommes, aux États, aux juges (...).
Mais les temps ayant changé, Villey en prend acte : « le christianisme une fois mort, disparue la sagesse antique » ; « le vingtième siècle a besoin de rêve » ; « il importe de restituer à nos sociétés postindustrielles un substitut de religion : la religion des droits de l’homme. » Et voilà comment faisant fi de toute la démonstration de son livre, Villey en vient à justifier finalement la déclaration des droits de l’homme. (...)
Plutôt que de revenir à la sagesse antique ou biblique et à la religion catholique, le juriste Villey ne peut tolérer le « cléricalisme » selon lequel « les théologiens s’arrogent un pouvoir de haute surveillance sur la science du droit » (p. 127).
Que le christianisme soit une source supérieure, proprement divine, du Droit ;
Que la Justice humaine soit une des institutions subalternes du Règne social du Fils de Dieu fait homme pour nous sauver, c’est bien ce que le monde moderne ne peut supporter non plus. Villey, tout catholique qu’il se prétende au fin fond intime de sa conscience d’homme privé, n’accepte pas en tant que magistrat et professeur de droit civil (...) cette subordination du droit à une Foi, à une Loi, à un Roi (...) !
L’ÉLABORATION D’UNE POLITIQUE TOTALE
Tout au long des cours de cette année, nous répondrons à Michel Villey en revenant à la loi de Dieu, à la métaphysique de la création des individus par Dieu et de leur destin au sein du monde. Nous donnerons ainsi à la politique maurrassienne (...) la justification religieuse et métaphysique qui lui manquait. C’est cette absence qui handicape aujourd’hui encore les régimes autoritaires en leur donnant un “ je ne sais quoi ” de mauvaise conscience en face de la Déclaration des droits de l’homme. C’est lorsque nous aurons fondé l’ordre humain sur la loi divine, que cet ordre humain pourra développer son caractère vraiment consistant de civilisation, d’ordre, de prospérité, d’autorité, parce qu’il sera solidement fondé sur la loi de Dieu, sur l’Église catholique et sur la métaphysique relationnelle qui met l’individu au service de la communauté, au même moment où il recherche sa perfection.
Vous voyez en conclusion comment nous sommes sortis de cette dialectique barbare entre l’autorité politique considérée comme dictature d’un côté, et l’anarchie proclamée au nom des Droits de l’homme de l’autre, pour retrouver grâce à Maurras et Villey, mais avec tout l’apport de notre philosophie et de notre théologie chrétiennes, la véritable et totale politique de l’ordre humain.
Abbé Georges de Nantes
Extraits de la conférence du 24 juillet 1983