Ps 19 : L'Immaculée Conception
- Au maître de chant, psaume à David.
- Les cieux publient la gloire de Dieu, et l’ouvrage de ses mains, le firmament le raconte.
- Le jour au jour fait jaillir un discours, la nuit à la nuit révèle une connaissance.
- Discours ? non point ! Paroles ? non point ! on n’entend pas leur voix.
- Par toute la terre est sorti leur cordeau, et jusqu’à l’extrémité du monde leurs mots.
- Pour le soleil, il a dressé une tente par eux.
- Et lui, comme un époux sortant de sa chambre nuptiale, il se réjouit, comme un preux, pour courir le sentier.
- D’une extrémité des cieux à l’autre son lever et sa révolution, et rien n’est caché à sa chaleur.
IMMACULÉE
- La Loi de Yahweh est parfaite, convertissant l’âme. Le témoignage de Yahweh est véridique, sagesse du simple.
- Les préceptes de Yahweh sont droits, joie du cœur, le commandement de Yahweh est pur, lumière des yeux.
- La crainte de Yahweh est pure, inébranlable à jamais. Les jugements de Yahweh sont vérité, justes ensemble.
- Désirables plus que l’or et que le plus fin, massif, et plus doux que le miel, et que le suc des rayons.
- Aussi votre serviteur s’en instruit ; à les garder, grand profit.
- Qui comprendra des égarements ? De ce qui est caché, innocentez-moi.
- Et des orgueilleux préservez aussi votre serviteur ; qu’ils ne dominent pas sur moi. Alors, je serai parfait et innocent du crime majeur.
- Que soient en faveur les paroles de ma bouche et les murmures de mon cœur devant votre Face, Yahweh, mon rocher, mon rédempteur !
VERSET 2. « Les cieux » sont la première création de « Dieu » (Gn 1, 1).
Selon le psaume troisième, la « gloire » de Dieu rayonnera du Messie comme elle rayonnait de la face de Moïse lorsqu’il redescendait de la montagne du Sinaï (Ps 3, 4), malgré les outrages des « enfants des hommes » dont il sera victime (Ps 4, 3).
Ici, la « gloire de Dieu », £el, nom divin du Créateur selon le premier récit de la création (Gn 1 - 2, 3), rayonne des cieux où brillent « la lune et les étoiles que vous fixâtes », disait le psaume huitième (Ps 8, 4).
Selon ce psaume, « l’ouvrage de ses mains » est la communauté messianique de la restauration à venir, «œuvre de mes mains faite pour être belle », dit Yahweh (Is 60, 21 ; cf. Ps 8, 7).
« Le firmament le raconte », en vertu de l’oracle divin : « Lève les yeux au ciel et dénombre les étoiles si tu peux les dénombrer », dit Yahweh à Abraham dans une vision. « Et il lui dit : “ Telle sera ta postérité ”. » (Gn 15, 5)
VERSET 3. Le « discours » que « le jour fait jaillir » est celui du Créateur : « Dieu dit : “ Que la lumière soit ” et la lumière fut. Dieu vit que la lumière était bonne, et Dieu sépara la lumière et les ténèbres. Dieu appela la lumière “ jour ” et les ténèbres “ nuit ”. Il y eut un soir et il y eut un matin : premier jour. » (Gn 1, 3-5)
Ainsi va le « discours » que « le jour fait jaillir », du premier au « sixième jour » (Gn 1, 31). À qui s’adresse-t-il ?
VERSET 4. À personne ! C’est seulement une “ conception ” de Dieu. Au commencement de tout, il y a ce que Dieu conçoit, et cela est. Point de « parole » audible, point de bruit de « voix ».
VERSET 5. « Leur cordeau », qawam, désigne ici la ligne d’horizon considérée comme traçant les limites du ciel et de la terre.
Par quels « mots » ? Voici : « Dieu dit : “ Qu’il y ait des luminaires au firmament du ciel pour séparer le jour et la nuit ; qu’ils servent de signes, tant pour les fêtes que pour les jours et les années ; qu’ils soient des luminaires au firmament du ciel pour éclairer la terre ”, et il en fut ainsi. Dieu fit les deux luminaires majeurs. » (Gn 1, 14-16)
Dans ce récit, le soleil et la lune, divinisés par la mythologie mésopotamienne, ne sont même pas nommés ; ils sont réduits à de simples « luminaires » qui éclairent la terre et fixent le calendrier. En revanche, le psalmiste n’hésite pas à personnifier le soleil. Aux cieux, Dieu a dressé une tente pour lui. L’astre s’y repose la nuit, quand on ne le voit plus.
VERSET 6. Le soleil, qui sort le matin des portes de l’Orient, figure Yahweh en personne dont le prophète Sophonie chante la présence au sein de Sion en « preux sauveur » (So 3, 17), au moment de l’Exil.
« Le sentier » est celui « de la vie » (Ps 16, 11).
VERSET 7. « Son lever », littéralement : « sa sortie ». « Sa chaleur » est aussi irradiée par l’épouse, la Sulamite « qui surgit comme l’aurore » (Ct 6, 10). L’époux sort de sa chambre nuptiale, pour courir quelle carrière ? Loin d’être un autre poème, contrairement à la conjecture de nombreux exégètes, la deuxième partie du psaume répond à cette question.
IMMACULÉE
8. La Loi de Yahweh est parfaite, convertissant l’âme. Le témoignage de Yahweh est véridique, sagesse du simple.
La « Loi » (torah) est constituée par les cinq premiers livres de la Bible. Elle commence par le récit de la création que le psalmiste vient d’évoquer par les « cieux », le « jour », la « nuit », le « firmament », le « soleil ». Elle est ici personnifiée et qualifiée de « parfaite », sans tache, sans reproche. Elle est d’avant le péché ; le latin dit bien : immaculata, « immaculée ».
Yahweh est le nom divin du Créateur selon le second récit de la création (Gn 2, 4-25). C’est lui qui a conçu la « Torah » et l’a révélée. Il en est le témoin, et son « témoignage » est de première main, comme la révélation infaillible de la vérité.
À ce « témoignage » répond la « sagesse » qu’il communique à qui est « simple ».
9. Les préceptes de Yahweh sont droits, joie du cœur, le commandement de Yahweh est pur, lumière des yeux.
Il s’agit du commandement que Yahweh fit à l’homme après l’avoir placé dans le jardin d’Éden pour le cultiver et le garder : « Tu peux manger de tous les arbres du jardin. Mais de l’arbre de la connaissance du bien et du mal, tu ne mangeras pas. » (Gn 2, 16-17)
« Lumière des yeux » : c’est la réponse à la prière du psalmiste (Ps 13, 4).
10. La crainte de Yahweh est pure, inébranlable à jamais. Les jugements de Yahweh sont vérité, justes ensemble.
La « crainte » naît du « commandement » de ne pas manger de l’arbre de la connaissance du bien et du mal, « car, le jour où tu en mangeras, tu mourras certainement » (Gn 2, 17).
Les « jugements » de Yahweh sont les sentences prononcées en châtiment de la faute (Gn 3, 16-17).
11. Désirables plus que l’or et que le plus fin, massif, et plus doux que le miel, et que le suc des rayons.
« L’or fin » est le métal dont est faite la tête de l’Époux (Ct 5, 11 ; cf. Ps 16, 1), en or « massif » (rab ). Le « miel » et les « rayons » sont sa nourriture (Ct 5, 1).
12. Aussi votre serviteur s’en instruit ; à les garder, grand profit.
Qui est ce « serviteur » ? Sans doute celui qu’annonce le psaume précédent : David, et le Messie dont il est le père et la figure (Ps 18, 1). La suite va nous le confirmer.
13. Qui comprendra des égarements ? De ce qui est caché, innocentez-moi.
David a connu de ces « égarements » : ses amours avec Bethsabée, qui l’ont conduit à l’assassinat d’Urie. Mais avant lui, Adam et Ève, nos premiers parents, après les « égarements » de l’ambition de « comprendre », de « connaître le bien et le mal », d’ « acquérir l’entendement » (Gn 3, 5-6), « se cachèrent devant Yahweh Dieu parmi les arbres du jardin » (Gn 3, 8).
Comment retrouver l’innocence ?
14. Et des orgueilleux préservez aussi votre serviteur ; qu’ils ne dominent pas sur moi. Alors, je serai parfait et innocent du crime majeur.
David connut aussi dans sa gloire cet autre « égarement », celui de l’orgueil, lorsqu’il voulut dénombrer son peuple (2 S 24). Mais le « grand péché » fut d’abord celui des origines, celui de vouloir être « comme Dieu » (Gn 3, 5). Et les bâtisseurs de la tour de Babel (Gn 11, 4) furent de ces « orgueilleux » dont le « serviteur » de Yahweh demande à être tenu à l’écart afin de ne pas tomber dans l’orgueil, le pire des « crimes ».
15. Que soient en faveur les paroles de ma bouche et les murmures de mon cœur devant votre Face, Yahweh, mon rocher, mon rédempteur !
« Mon rédempteur ». Le mot désigne Dieu libérateur de son peuple déporté à Babylone : « Ne crains pas, Jacob, pauvre larve, chétif vermisseau. Moi, je viens à ton secours, – oracle de Yahweh ! – le Saint d’Israël est ton rédempteur. » (Is 41, 14 ; cf. 43, 14 ; 44, 6 et passim).
CONCLUSION
Le psaume premier, qui ouvre le psautier, magnifie le juste « qui prend son plaisir dans la Loi de Yahweh, et murmure sa Loi jour et nuit » (Ps 1, 2). Le psaume dix-neuvième est un appel à Yahweh afin que se lève le Roi-Messie comme « le soleil », sur une création rénovée par la « Torah immaculée », antérieure au péché, et rédemptrice. Dans cette introduction à son deuxième livret, le psalmiste personnifie la Torah.
Comme si, à la question du Père Kolbe : « Qui êtes-vous Immaculée ? » Elle répondait elle-même par avance, inspirant le psalmiste :
« Je suis du Ciel » (v. 2), temple du soleil de justice (v. 5), épouse du grand Roi (v. 6), médiatrice universelle de son ardeur (v. 7). Mieux que la Torah et ses préceptes, je suis, par mes petites demandes, la conversion des âmes, la sagesse des simples (v. 8), la joie des cœurs, la lumière des yeux (v. 9).
« La dévotion à mon Cœur Immaculé est le chemin qui mène jusqu’à Dieu. »
« C’est de moi que naîtra le Rédempteur, lors de son premier avènement. Et c’est par moi qu’il reviendra. »
Frère Bruno de Jésus-Marie
Il est ressucité ! n° 88, décembre 2009 p. 27