Introduction à la théologie totale
INTRODUCTION
LES hommes ont toujours eu par différents canaux : religions, traditions immémoriales ou même raisonnements philosophiques, une certaine connaissance de l’existence de Dieu et de ce qu’Il est (...). Cette connaissance intuitive, confuse dans le paganisme, va se préciser avec l’intervention objective, tangible de Dieu dans l’histoire et par la religion de l’Alliance qui en est résultée : religion juive accomplie par la chrétienne qui est la religion de la nouvelle et éternelle alliance, soit : la religion catholique, c’est-à-dire universelle.
Par la raison, le théologien catholique va rendre témoignage des Mystères de la foi en Jésus-Christ fils de Dieu, les expliciter comme aussi les défendre des mauvaises interprétations. Ce travail d’élaboration rationnelle initié par les apôtres fut surtout développé ensuite par les Pères de l’Église ; il trouvera son apogée au Moyen-âge. Parmi les grands théologiens et docteurs de l’Église, saint Augustin (354-430) et saint Thomas d’Aquin (1225-1274) ont élaboré deux théologies (...), deux manières d’expliquer le mystère de Dieu. Ce qui les distingue, c’est la réponse à la question capitale suivante :
La théologie, science (ou plutôt : communication) de la sagesse de Dieu, est-elle œuvre de raison naturelle ou de foi surnaturelle ? Les deux évidemment. Mais la raison vient-elle d’abord, couronnée ensuite par la foi ? C’est ainsi que procéda saint Thomas d’Aquin ; ou bien la foi est-elle première, la raison venant ensuite pour expliquer et... contrôler la foi ? Saint Augustin passe tout de suite à la foi, sans pour autant révoquer la raison. Ainsi ferons-nous (...). 1
Dans le prolongement et le développement organique de notre doctrine métaphysique, apologétique, morale et politique, notre théologie sera dite aussi “ totale ” en ce sens qu’elle vise à un véritable progrès du dogme et de son exposition, opérant ainsi, à la manière du bon scribe disciple du royaume des Cieux (cf. Mt 13, 52), une synthèse supérieure et innovante dans la fidélité mais aussi le dépassement des grandes théologies classiques.
LA THÉOLOGIE NATURELLE DE SAINT THOMAS D’AQUIN
La théologie de saint Thomas est un effort de la raison guidée par la Révélation qui vise à répondre à deux questions : Dieu existe-t-il ? Et s’il existe, qui est-il ?
1. Pour démontrer que Dieu existe, saint Thomas part de l’existence des êtres et de notre connaissance de la nature de l’univers et de ses grandes lois physiques : mouvement, contingence, causalité, finalité, ordre. À partir de là il bâtit cinq voies, il construit cinq raisonnements qui seront cinq preuves de l’existence de Dieu (...). 2
2. Dieu existe, mais qui est-il, comment est-il ? On dénomme cet Être : « Dieu », car c’est le langage usité par tous les hommes ; mais ce n’est pas une définition ! (...) Dans les premières questions de la SOMME THÉOLOGIQUE et tous les livres parallèles, saint Thomas met au point un certain nombre de définitions de Dieu ou de perfections divines qui n’approfondissent que cette idée d’“être ”, sans du tout penser à mettre Dieu en relation avec ses créatures (...). Du moment que Dieu existe, saint Thomas en tire qu’Il est Simple, autre que le monde, Parfait, (Questions 3, 4, 5, 6), Infini, Immuable, Éternel, UN (...).
Il remarque ensuite que Dieu a beau être ainsi transcendant (au-delà de tout, tout à fait autre que l’univers), c’est tout de même Lui qui a créé l’univers ! Or entre l’artisan et le travail qu’il fait, il y a toujours une proportion, quelque chose qui est passé de l’artisan dans l’œuvre (...). Et donc en voyant les œuvres de Dieu, on peut arriver à se faire une idée de Dieu, comprendre sa psychologie.
C’est ce qu’on a appelé LE TRAITÉ DES NOMS DIVINS. Saint Thomas est admirable dans ce Traité, car il y a trouvé et utilisé l’instrument opératoire de cette connaissance de Dieu à partir de la création : l’analogie de proportionnalité – (...). Saint Thomas nous apprend à considérer quelles sont les perfections des créatures pour, en ce qu’elles ont de pures perfections, les attribuer à Dieu (théologie positive) ; mais en ce que ces perfections sont limitées (car humaines), il nous faut détruire la limite et la nier de Dieu (théologie négative).
Prenons un exemple : puisque nous sommes intelligents et que c’est la meilleure part de nous-mêmes, nous tenons cette perfection de Dieu. Donc, Dieu est intelligent. Mais attention ! Il l’est sans commune mesure avec l’intelligence humaine (qui, elle, commet des erreurs d’appréciation : Errare humanum est), bien au-delà ! Donc, Dieu ne peut se tromper (...).
LES INCONVÉNIENTS DE LA THÉOLOGIE NATURELLE THOMISTE
Au terme de ces logiques enchainements de raison, le sublime effort intellectuel de saint Thomas bon disciple d’Aristote (384-322 av. J. -C.) en arrive cependant à ne faire de Dieu « qu’une substance, un être immobile, sans passion ni activité autre que d’ “ être ” depuis toujours, et pour toujours enfermé dans sa transcendance, autosuffisant. Dieu a toutes les perfections, mais il est si loin qu’il ne faut pas imaginer qu’il puisse avoir un rapport avec nous ! Il n’a pas besoin de nous, il est heureux de lui-même, en lui-même et pour lui-même ! Sa béatitude ? C’est de s’aimer lui-même (...). 3 Prisonnier de la logique du système substantialiste et essentialiste du philosophe grec, saint Thomas en vient à “ oublier ” son existentialisme, et finit par prétendre que Dieu (...) n’est pas en relation réelle avec nous ses créatures, mais en une simple relation de raison. (cf. Somme Théologique, Ia, q. 13, art. 7). (...)
FACE À L’ATHÉISME, L’URGENCE D’UNE THÉOLOGIE TOTALE
Après Descartes (1596-1650) et dans la ligne rationaliste de son Discours de la méthode (1637), les philosophes se sont émancipés de la foi... tout en continuant à faire de la théologie naturelle ! Raisonnant de plus en plus a priori à partir « d’idées claires et distinctes » et devenant de plus en plus idéalistes (...), ils nient aujourd’hui que l’on puisse tenir un discours rationnel sur Dieu, et ils s’acharnent à détruire la notion première que la philosophie grecque (et surtout la scolastique) nous avaient pourtant léguée : Dieu existe, Dieu est l’Être (...). C’est un plongeon sensationnel dans l’irrationnel. Quelle chute ! (...).
Il faut donc de toute urgence bâtir une connaissance de Dieu (une théologie) qui soit totale, retenant de saint Thomas son existentialisme, mais refusant de « considérer à la suite du thomisme aristotélicien “ Créateur et créatures ” comme des “ substances ” accessoirement liées par des relations de pure forme. ». Pour m’encourager dans cette entreprise, je recevais sur les entrefaites le dernier ouvrage de mon ancien professeur dominicain Dominique Dubarle : « DIEU AVEC L’ÊTRE, DE PARMÉNIDE À SAINT THOMAS. ESSAI D’ONTOLOGIE THÉOLOGALE ». C’est l’appui dont j’avais besoin pour oser développer mon argumentation, d’autant plus qu’il me révélera que ce faisant, je renouais avec le plus pur de la sagesse philosophique, théologique et mystique de saint Augustin.
LES TROIS PRINCIPES CONDUCTEURS JUSTIFIANT
LA NOUVEAUTÉ D’UNE THÉOLOGIE TOTALE
1. L’INTUITION DE DIEU COMME SOURCE DE L’ÊTRE
Notre métaphysique totale, sans récuser la philosophie réaliste d’Aristote et de saint Thomas, ne procède pas comme elle par la voie de la causalité pour en arriver à prouver, au terme d’un raisonnement, l’existence de Dieu, cause première des êtres de l’univers. Elle nous met tout de suite, intuitivement, en présence de l’Esse : de l’ “ être ” des êtres du monde.
Qu’est-ce que cette intuition de Dieu comme source de l’ “ être ” ? C’est une saisie immédiate de l’ “ être ” des êtres du fait de l’existence de toutes les choses contingentes, mentalement dégagé de leurs limites et manières d’être naturelles, qui conduit infailliblement l’esprit à l’Être nécessaire, unique et simple, infini et parfait, source de l’existence universelle : JE SUIS. Or, la Bible nous apprend que c’est Dieu Lui-même qui s’est nommé ainsi : « Je Suis Celui qui Suis ». Il est la source de tous les êtres, et de toutes les personnes humaines en relation d’origine, constituante avec LUI (...). Émerveillement que de penser que par sa relation unique à Dieu et à l’humanité qui l’ont concurremment appelé à être, toute personne humaine, si chétive soit-elle apparemment, est riche tout à la fois d’un destin historique et d’une immortalité qui font toute sa grandeur dans le monde et devant Dieu (...). 4
Cette intuition de l’existence, contrairement à ce que pensait Jacques Maritain, n’est pas réservée à une élite (...). On peut en faire l’apprentissage, y être sensibilisé pour peu qu’on aie une âme de disciple, et entrer ainsi progressivement dans la nouvelle vision du monde qu’elle nous offre (...).
« Cette considération métaphysique de l’existence est simple et paisible, tout en accueil d’un mystère qui la dépasse et l’enveloppe. Notre intuition existentielle est ouverture, proche de la contemplation esthétique de la Beauté. Elle est consentement à l’être, émerveillement en présence du surgissement de la réalité (...), mais d’un émerveillement tel qu’il faudrait redire et chanter à l’envi avec Didier Decoin : « pour moi, il fait Dieu comme pour d’autres il fait jour » (...). Cette intuition admet bien sûr à côté d’elle, mais comme complémentaire, la saisie abstractive des essences (ou natures) sur lesquelles la raison s’exerce intensément et se construit des représentations scientifiques des choses... car c’est dans cet exercice qu’il arrive parfois au savant de se renfermer et de se perdre. Jusqu’à se croire l’inventeur génial de ses idées, partant : le génial créateur de son univers ! » 5. Cette démesure le pose en rival prométhéen ridicule, grotesque, de « Je Suis » ; les grands Tragiques grecs l’avaient depuis longtemps pressenti : « Jupiter livre à la démesure (Ubris) ceux qu’il veut perdre ».
RÉVOLUTION COPERNICIENNE
Ainsi depuis Descartes, et littéralement depuis « L’introduction à la critique de la raison pure » d’Emmanuel Kant, chacun prétend à sa “ modeste ” et glorieuse « révolution copernicienne ». Or, paradoxe ! À force de faire ainsi de tout ce qui l’entoure autant d’ « idées » qui gravitent autour de lui, chaque homme en vient à se prendre pour le centre du monde ! Ce qui revient finalement à dire que l’univers tourne autour... de la terre. Eh bien, non ! Cette évasion dans l’idéalisme n’étant qu’une décadence moderne de l’intelligence, nous tenons avec réalisme que... le monde tourne bel et bien autour du soleil !
Ma révolution réellement copernicienne tiendra donc en deux mots : avant moi ( !), les penseurs tenaient le monde pour bien connu, et DIEU pour inconnu (voire inconnaissable, ou peu connu, ou mal). Après moi ( !), les penseurs tiendront DIEU pour bien connu, sans problèmes, et ses créatures pour... incroyablement difficile à admettre, à connaître, à expliquer, encore moins à justifier. Et pourtant, elles sont !
C’est qu’il y a, à la base de cette révolution, une intuition intellectuelle simple, immédiate, absolue, contraignante, nourrie de tout, comme la pointe de la pyramide où vont aboutir toutes les arêtes du monument : c’est « Je Suis ». Il y a des intuitions sensibles, psychologiques et mentales qui nous contraignent à “ réaliser ” que les choses sont et nous-mêmes sommes... sans nul doute, nous sommes ! Mais plus on y réfléchit, plus cela paraît anormal, extraordinaire, inintelligible, aux confins de l’absurde, qu’en plus ( !), ou à côté (!), en dehors (!) de « Je Suis Celui qui Suis », il y ait des petits “ je suis ” contingents (...). Il nous faut prendre en comparaison la mesure de notre rien, d’être, de nature, donc d’intelligence : c’est l’intuition de notre “ non-valeur ” à nous. On a certes une existence : je suis né, moi, il y a quelques années ; mais avant, je n’existais pas et bientôt mon corps va tomber mort et ça durera je ne sais pas combien de temps. Je ne suis pas le maître de moi-même, je ne me connais même pas moi-même ! Et il suffira que j’aie un petit caillou ou un virus mal placés sans que je le sache pour mourir et disparaitre, comme “ n’étant plus ”. (...) Voilà pourquoi notre théologie totale sera d’humble sentiment de l’inexplicable réel concret (...).
2. LE CONSENTEMENT À DIEU, ACTE DE FOI NATURELLE
« Je Suis Celui qui Suis », ainsi perçu intuitivement comme à travers les êtres, au-delà d’eux tous et de tout, est invisible aux yeux et il est indicible, ineffable, saint, à la raison. En ce sens, l’homme peut fort bien le refuser. Il peut ne pas avouer cette intuition de l’être des êtres, et donc la conséquence de l’existence de Dieu (ou la conséquence de la création par Celui-ci de tous ceux-là). Comme on pourra toujours choisir de refuser de croire un témoin oculaire (ou intellectuel), de choses non vues ou non démontrées par soi-même.
Car pour appliquer son intelligence à cette intuition, Il faut de l’esprit un acte de consentement synonyme d’humilité et de générosité : acte de « foi naturelle », où l’homme accepte d’être submergé, surplombé par Dieu (l’être des êtres), en tous sens et en toute pensée. Et je crois que cette soumission est une véritable révolution copernicienne en théologie (...).
Cet acte de foi, qui est consentement à l’être, sera aussi par conséquent une ouverture sur ses révélations, et déjà une adhésion au testament du Dieu de la Bible : « Je Suis Celui qui Suis »... autant dire : un engagement de reconnaissance et de servitude envers cet Être enveloppant, dépassant, créant toutes choses et nous-mêmes ! Voilà pourquoi bien des esprits, subodorant cette cascade de lumières successives pour l’intelligence, refusent de faire le premier pas intuitif dans « l’engrenage », non par incapacité... mais par refus des implications surnaturelles où leur raison ne serait plus, en bout de course, l’autorité suprême qui décide de tout.
Dans un premier temps pourtant, cet acte de foi est bel et bien naturel, car il se fait sans parole divine donnant matière nouvelle à notre intelligence, sans motion divine ou charismatique échauffant notre cœur, et sans choix singulier nous mettant à part et nous valant lumière et force personnelles venues d’En Haut (...).
RÉPONSE À DEUX OBJECTIONS
« - N’y a-t-il pas tout d’abord danger de confusion entre cet acte de « foi naturelle » et l’acte de foi de la religion biblique ? »
Oui, parce que tous deux introduisent l’homme dans une « alliance »... mais elles se distinguent : la première est toute métaphysique et originelle, tandis que la seconde est surnaturelle et historique ! Ainsi ces « Alliances », loin de se confondre ou de s’exclure, s’emboîtent parfaitement l’une dans l’autre, et d’autres encore les continueront et achèveront (...). Mais il n’empêche que la première « alliance dans l’être » demeurera toujours le berceau de toutes les autres alliances, de Noé jusqu’à celle de Jésus-Christ fils de Dieu, nouvelle et éternelle Alliance (...).
À ce stade de notre développement, il nous faut bien comprendre que comme pour la Morale, notre Théologie totale s’établit sur le fondement métaphysique, antérieur à la nature comme à la surnature, de la relation créatrice (...). Le Dieu créateur, son don gratuit de l’être et son amour sont à la fois antérieurs et coexistants, car Il est « intimior intimo meo, superior summo meo » : « plus intime que l’intime de moi-même et plus élevé que les cimes de moi-même » (Saint Augustin : Confessions III, 6, 11) 6
Dieu fait déjà alliance avec l’homme dans et par l’acte créateur. C’est Lui l’autonome, le libre donateur, qui fait ce qu’Il veut. Il révèle ses bienfaits et exige en retour : reconnaissance, coopération, amour et œuvres... Moi, métaphysicien, moraliste, apologète, théologien, je n’offre donc pas à l’homme autonome une Loi à pratiquer ou une vérité à croire ; je ne les lui impose pas au nom de sa nature ou de sa raison comme s’il était d’abord et depuis toujours ce qu’il est maintenant, libre ou non de faire et de penser, comme un “ self-made-man ” venu de nulle part et qui ne doit rien à personne ! Mais je lui fais entendre en son centre la Voix de Dieu créateur. Il l’entend, comme je l’entends (...) : DIEU EST ; et en Lui nous vivons, nous nous mouvons, nous avons l’être. Cette écoute est déjà l’acte élémentaire, naturel, de foi, d’espérance et de charité (...).
« - Mais enfin : cette “ écoute ” est équivoque, et donne à penser que vous versez dans un excès de surnaturalisme ! »
La réponse est simple et de grande conséquence : lorsque les métaphysiques classiques en arrivent à la démonstration de l’existence de Dieu et à la découverte de ses Noms divins, (autrement dit de ses attributs ou perfections), elles ont déjà un matériel énorme de connaissance des essences naturelles et de leurs degrés de perfection ; il s’agit de transférer méthodiquement tout ce monde d’idées à Dieu dans la mesure où la raison peut en certifier la convenance (théologie positive, puis analogique).
Lorsque notre métaphysique existentielle et relationnelle, prenant le chemin court, commence par connaître Dieu comme l’Etre avant toute chose, et que toute chose est alors créée, contingente, inintelligible, incompréhensible... il sera, tout au contraire de la démarche classique, comme impossible de rien attribuer des essences et propriétés des êtres créés à leur créateur, car « Je Suis Celui qui Suis » excède toute définition (...).
La situation est bloquée, sans issue sauf une. En effet, l’obstacle disparait si à cette première « révélation d’alliance » naturelle vient succéder une surnaturelle (ou historique) Révélation d’Alliance en forme de “ sur-création ”, dont le message venu de Dieu assume lui-même par inspiration et inerrance l’exactitude du langage philosophique et, par lui, la vérité intrinsèque. Alors, mais dans la Foi surnaturelle, l’on pourra articuler, mais religieusement, beaucoup de vérités sur Dieu... C’est Lui qui non seulement viendra au secours d’une intelligence naturelle affaiblie par le péché, mais qui lui apportera sur le mystère qui la faisait achopper : soit des vérités qu’elle avait pressenties (mais sans force suffisante pour les mettre en œuvre), soit des vérités dont elle rêvait (mais sans aucun appui dans sa raison pour les affirmer). (...)
3. ANTÉRIORITÉ ET SOUVERAINETÉ CONSÉQUENTES DE LA THÉOLOGIE DONNÉE (RÉVÉLÉE)
SUR LA THÉOLOGIE CONSTRUITE (RATIONNELLE)
Cette primauté de la Source de l’être (« Je Suis Celui qui Suis ») sur les êtres implique donc la priorité à la fois : de leur relation constituante sur leurs déterminations naturelles, et de la volonté divine en action sur l’effet produit par elle. Toute manifestation de cette Volonté souveraine l’emportera sur les élaborations philosophiques à base de sciences physiques. Celles-ci paraîtront si risquées et si hypothétiques que, soit dans leurs affirmations, soit dans leurs interdictions, elles chercheront des garanties souveraines dans la Révélation première de l’intuition créatrice, puis dans les Révélations divines postérieures éclairant par l’Incréé (se définissant et manifestant lui-même, comme lors du Buisson ardent, Ex. 3, 14) les Noms à Lui attribués à partir du créé, et les définitions de ce créé lui-même. Ainsi la théologie naturelle sera-t-elle subordonnée à la théologie biblique, autrement dit chrétienne (...).
L’écoute de la Parole de Dieu ne viendra donc pas en appui de notre déduction rationnelle, (comme un quitus que procurerait un corps étranger), mais elle se présentera en trame de “ langage-communication ” pour notre tapisserie rationnelle et empirique. Afin que tous, « interpelés » par les vérités que les expériences de la vie et le foisonnement de l’être fournissent de toute part à l’intelligence humaine, nous soyons toujours enclins à « être et agir » selon Dieu, invités par Lui à y lire le secret mystérieux de son Être qui s’y dévoile, pour désirer sortir de notre ignorance de son Dessein, et progresser ainsi dans son Alliance (...). C’est dans cette docte “ ignorance-connaissance ”, que nous allons scruter le mystère de Dieu selon notre Credo.
Abbé Georges de Nantes
Extrait de la conférence du 29 septembre 1986
[1] CRC n° 226, octobre 1986, p. 24
[2] Voir dans l'article Métaphysique totale. I-L'Être des êtres les avantages et inconvénients de cette approche (CRC n° 171, novembre 1981, p. 7).
[3] Il est Ressuscité !, n° 206, février 2020, p. 6
[4] Point 2 : Notre très chéri Père Céleste
[5] CRC n° 182, octobre 1982.