SAINTE MARGUERITE-MARIE

VIII. L'intercession pour les âmes du Purgatoire

APRÈS avoir obtenu le salut des âmes de sa Communauté en s’offrant comme victime expiatrice à la sainteté de justice, sainte Marguerite-Marie connaît maintenant les rigueurs de la sainteté de miséricorde.

Claude La Colombière
Saint Claude La Colombière

Mais ce “ Souverain de mon âme ” prodigue aussi “ de très grandes consolations ” en lui envoyant le secours d’amitiés tout à fait remarquable, comme celle du Père La Colombière :

« Mon Souverain Maître me promit, quelque temps après m’être consacrée à lui, qu’il m’enverrait un sien serviteur (…) pour me rassurer dans Sa voie et pour lui départir de grandes grâces de Son Sacré Cœur : qui les répandrait abondamment dans nos entretiens. »

La mystique est immédiatement comprise, éclairée et réconfortée par ce saint jésuite. Le Père La Colombière, nommé chapelain de la reine Marie-Béatrice d’Este, épouse de Jacques II, part pour Londres où il continue d’encourager sa petite sœur spirituelle : « … vous devez marcher avec confiance et ne songer qu’à être reconnaissante de la conduite que Dieu tient sur vous ».

Arrêté le 24 novembre 1678, il est enfermé en prison malgré de nombreuses crises de phtisie et rentre à Paray où il meurt, dans la nuit du 15 février 1682.

Avertie, sainte Marguerite-Marie répond « d’une voix très triste : “ Priez et faites prier partout pour lui ” ». Quelques heures après, elle écrivait un billet : « Cessez de vous affliger, invoquez-le, ne craignez rien. Il est plus puissant pour vous secourir que jamais ! » Cette amitié fut une des grandes consolations de notre sainte.

Mère Greyfié, sa supérieure, malgré une apparente mésestime à son égard, lui manifesta aussi une amitié sincère : « Votre âme est chère à la mienne », lui écrit-elle un jour. Et une autre fois : « Il faut que l’union de nos deux cœurs en Jésus-Christ dure tout le temps de nos vies ». On voit naître petit à petit dans ses billets la dévotion au Sacré-Cœur et on comprend que notre sainte se soit attachée à elle !

On sait aussi l’affection qui l’unit à Mademoiselle de L’Yonne. Cette jeune fille très élégante et très orgueilleuse de Paray, depuis longtemps sollicitée par la grâce, fut conquise par l’Époux divin grâce au Père La Colombière qui l’interrogea un jour avec un air tout céleste : « Si Jésus-Christ vous demandait pour son épouse, le refuseriez-vous, ma fille ? »

Un an après, elle hésitait encore, retenue par sa mère. Sainte Marguerite-Marie demande alors à Mère Greyfié un entretien avec Mademoiselle de L’Yonne : « Ma Mère, Notre-Seigneur veut cette âme ! Il m’a dit : “ Je la veux, Je la veux à quelque prix que ce soit  ».

La jeune fille céda et, « faisant un effort surhumain » elle franchit la porte de la clôture « avec l’impression qu’elle aimerait mieux se jeter tout de suite au purgatoire », mais « à peine avait-elle franchit la porte qu’elle entrait dans une joie qui ne l’a plus jamais quittée. »

Sainte Marguerite-Marie témoigna toute sa vie d’une véritable affection pour cette religieuse qui lui devait sa vocation et qui vécut et mourut saintement.

Marguerite-Marie
Sainte Marguerite-Marie

Notre sainte s’est interposée devant la sainteté de justice pour obtenir le salut de ses persécutrices. Sa puissance d’intercession est particulièrement visible lors de la mort, très impressionnante de la sœur de Sirot, en 1684 : « Après sa mort, il ne se passa guère de temps avant que l’âme de cette malheureuse vint hanter la sœur qu’elle avait le plus méprisée (…) : “ Le Cœur de Jésus me voit souffrir sans compassion parce que je n’avais pas pitié de ceux que je voyais souffrir ” ». Mais enfin, elle est sauvée, grâce à sa compagne.

L’humble visitandine souffre aussi, mais de manière beaucoup plus consolante, par charité pour les âmes du purgatoire, dans une sainteté d’amour et de miséricorde : c’est la communion des saints qui s’exerce. Elle est ainsi appelée à prier et se sacrifier pour l’âme du Père La Colombière et pour plusieurs autres religieux : 

Une défunte « gît sur un lit de flammes à cause de sa paresse et de ses négligences à observer la Règle. (…) “ Ah ! Que je voudrais, gémit la défunte, que toutes les âmes consacrées me pussent voir dans cet horrible tourment ! Sans doute qu’elles marcheraient avec une autre ardeur dans l’exacte observance et se garderaient bien de tomber dans les défauts qui me font tant souffrir. ” (…) Après que la sainte eût fait pour elle la communion demandée, la malheureuse religieuse l’avertit que ses supplices étaient bien diminués… »

Notre sainte est aussi invitée à prier pour des personnes séculières :

« Un gentilhomme, père d’une novice – Marguerite-Marie en est alors la directrice – étant décédé, le monastère pria pour lui et sa fille, quelque jours plus tard, implora tout spécialement les suffrages de la sainte. » Celle-ci assura la jeune novice que son père était au Ciel, à cause d’une action qui  « lui a rendu le jugement de Dieu favorable ». S’étant réconcilié avec un de ses ennemis juste avant sa mort, il s’est rendu le “ maître absolu du Cœur de Dieu ” qui ne peut rien refuser à ceux qui pardonnent pour son amour, tant cet acte Lui rappelle celui de Son Fils mourant sur la Croix.

À plusieurs reprises, le Divin Maître permet à des âmes défuntes de recourir à la trésorière de ses grâces pour faire l’appoint, souffrant « une peine à peu près comme la leur, ne trouvant de repos ni jour ni nuit » pour atténuer les souffrances de ces pauvres âmes, abréger leur purgatoire et les conduire au Ciel.