Sacré-Cœur 2021 en Nouvelle-France

Introduction

LE 1er août 1639, le gouverneur de Montmagny,  successeur de Samuel de Champlain, mort quatre ans auparavant, attend sur la grève l’arrivée des nouveaux venus de France. Il n’est pas seul. La population de Québec au complet est là, au comble de la joie, mais... cela ne représente pas deux cents personnes.

Marie de l’Incarnation

Ce petit monde s’apprête à accueillir quatre jésuites, trois religieuses hospitalières et trois jeunes ursulines : mère [1] Marie de l’Incarnation, mère Marie de Saint-Joseph, et mère Cécile de Sainte-Croix. Ces dernières sont accompagnées de madame Madeleine de La Peltrie, leur bienfaitrice.

En débarquant, leur premier geste est de baiser le sol de cette Nouvelle-France qu’ils ont bien failli ne jamais connaître. Sans un miracle, attesté par l’équipage, tous auraient péri en mer : le bateau allait se fracasser contre un immense iceberg qu’il ne pouvait éviter. Tandis que le Père Vimont donnait l’absolution générale, le navire se retrouva, on ne sait comment, de l’autre côté du bloc de glace !

Pour la petite colonie, l’arrivée de ce renfort est une bénédiction et un grand soutien moral. Les hospitalières ont été envoyées par la duchesse d’Aiguillon, nièce de Richelieu, et la reine de France a voulu recevoir les ursulines avant leur départ !

Mère Marie de l’Incarnation est saisie d’une violente émotion lorsqu’elle gravit le raidillon menant à l’église. Elle reconnaît le chemin vu dans le songe qui décida de sa vocation missionnaire, à Noël 1633 :

« J’étais avec une jeune dame séculière que j’avais rencontrée par je ne sais quelle voie. Elle et moi quittâmes le lieu de notre demeure ordinaire. Au bout de notre chemin, nous trouvâmes une belle place, à l’entrée de laquelle il y avait un homme solitaire, vêtu de blanc. Il était le gardien de ce lieu. » Il leur montrait une église.

« Sur cette petite église, la Sainte Vierge était assise, le faîte étant disposé en sorte que son siège y était placé, et elle tenait son petit Jésus entre ses bras sur son giron. Ce lieu était très éminent, d’où en un moment, je pus voir un grand et vaste pays, plein de montagnes, de vallées et de brouillards épais qui remplissaient tout, excepté une petite maisonnette, qui était l’église de ce pays-là, que j’entrevis quasi tout enfoncée dans ces ténèbres inaccessibles et affreuses... La Sainte Vierge, Mère de Dieu, regardait ce pays autant pitoyable qu’effroyable...

« Elle regardait son béni Enfant auquel, sans parler, elle faisait entendre quelque chose d’important à mon cœur. Il me semblait qu’elle lui parlait de ce pays et de moi, et qu’elle avait quelque dessein à mon sujet... »

Le même songe se renouvela quelques mois plus tard, et Notre-Seigneur lui révéla :

« C’est le Canada que je t’ai fait voir ; il faut que tu y ailles faire une maison à Jésus et à Marie. »

Pressée d’accomplir la volonté de Dieu, notre sainte désirait partir : « Il n’y avait plus de pays pour moi que le Canada. » Elle s’enthousiasmait de pouvoir ainsi éduquer les petites Françaises et Indiennes du Nouveau Monde, pour les gagner à Jésus et Marie.

En ce 1er août 1639, la voici à pied d’œuvre. C’était bien à Québec que Notre-Seigneur la voulait, au cœur de cette Colonie d’où devait rayonner sur tout le continent la civilisation chrétienne et française, refoulant d’autant la domination de Satan.

Pendant ce mois du Sacré-Cœur, suivons ces religieuses dans leur apostolat [2], ces « grandes filles vêtues de noir qui, pour l’amour de nous, sont venues en ce pays », comme disaient les Indiens.

Mardi 1er juin

LE LOUVRE !

LES ursulines s’installèrent dans un humble logis de  trois pièces. La chapelle servait de réfectoire et de salle de classe. Le moindre recoin était utilisé, chaque meuble avait plusieurs usages. C’était très ingénieux... mais aussi très pénitent.

Mère Marie de Saint-Joseph, d’une gaieté perpétuelle, lança l’idée saugrenue de nommer leur nouvelle maison “ le Louvre ”, nom du palais du roi de France ! Amusées, les Sœurs acceptèrent : n’y avaient-elles pas trouvé les trésors qu’elles étaient venues chercher, c’est-à-dire les âmes à sauver ?

Deux jours après leur arrivée, un Indien leur confia sa fille de dix ans, baptisée la veille, et trois compagnes un peu plus âgées. Elles arrivèrent nues, couvertes de vermine. Première opération : la toilette ! Puis, les religieuses confectionnèrent rapidement les premiers vêtements. Mais, les petites les déchirèrent et s’enfuirent !

« J’avais toujours eu dès l’enfance une inclination pour le salut des âmes, écrivit mère Marie de l’Incarnation. Mais, après les caresses de la Vierge, mon esprit fut tout hors de moi, il volait par tout le monde pour chercher les âmes rachetées du Sang du Fils de Dieu. Je portais dans mon âme un feu qui me consumait. »

Zèle du Cœur de Jésus, dévorez mon cœur !

Colorier une religieuse arrivant en Nouvelle-France.

Mercredi 2 juin

NOUS NE DANSERONS PLUS !

FINALEMENT amadouées, nos Indiennes, reconduites  par leurs parents, se montrèrent dociles et apprirent bien le catéchisme. Il semble que nous soyons leurs mères naturelles ; elles viennent se jeter dans nos bras quand elles ont quelque affliction.

Leur récompense est la classe de chant et de musique que donne notre mère Marie de Saint-­Joseph. Danser à la mode du pays est, pour elles, la meilleure des récréations, à condition d’en avoir la permission.

L’ayant demandée un vendredi, on leur rappela que Jésus était mort en ce jour. Il n’en fallut pas davantage pour les arrêter :

« Nous ne danserons plus ce jour-là, nous serons tristes, puisque Jésus est mort un vendredi. »

Les Sœurs accueillaient les enfants, le plus souvent gratuitement. « Leur cœur est plus grand que leur avoir », disaient les jésuites au sujet des ursulines.

Doux Cœur de Jésus, soyez mon amour !

Colorier une religieuse arrivant en Nouvelle-France.

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Jeudi 3 juin – Fête-Dieu

ÉVANGELISER ET FRANCISER

MADELEINE Amiskoveiam, âgée de dix-sept ans, se  tient comme une Française. Douce, obéissante et pieuse, elle est un modèle pour ses compagnes. Il ne peut se voir une enfant plus affectueuse, on lui fait faire ce qu’on veut. C’est un petit ange en innocence, et la jeune Ursule aussi.

Madeleine corrige les autres quand elles font quelque caprice, mais avec tant de gentillesse que pas une ne s’en offusque. Si quelqu’une n’est pas bien habillée, la jeune fille l’avertit : « Prenez garde que votre bon ange ne vous quitte ! »

Toutes sont très capables de politesse. Elles sont grandement adroites à faire tous les ouvrages et les travaux du ménage qu’on leur enseigne.

Marie Negabamat devient tous les jours plus accomplie. Son grand plaisir est d’entendre expliquer les mystères de notre foi par des images. Elle porte une telle dévotion envers la Sainte Vierge que la seule vue de son portrait la fait tressaillir de joie. Elle l’appelle sa mère, l’embrasse et la chérit uniquement. Après avoir prié Dieu en sa langue avec ses compagnes, la petite rejoint les Françaises pour continuer à prier.

Doux Cœur de mon Jésus, faites que je vous aime de plus en plus !

Colorier une religieuse arrivant en Nouvelle-France.

Vendredi 4 juin – premier vendredi du mois

LE « BON PLI DE LA VERTU »

IL ne se passe jamais plus de quinze jours  sans que nos pensionnaires ne demandent à se confesser. Elles font leur examen de conscience tous les soirs, s’aidant les unes les autres à se rappeler leurs manquements :

« Ma Sœur, vous ne vous souvenez pas de telle faute : demandez-en pardon à Dieu. »

Ce procédé ne les offense point, parce que toutes s’entendent très bien.

La petite Marie-Madeleine, ayant été avertie d’une infidélité dont elle ne s’apercevait pas, fut saisie d’une tristesse qui parut sur son visage jusqu’à sa confession. La douleur d’avoir offensé Dieu la touchait plus que la confusion et la honte d’avoir failli.

Les jeunes filles apprenaient la lecture, l’écriture et le calcul, mais les Sœurs leur inculquaient surtout comment vivre en parfaites chrétiennes, leur donnant « le bon pli de la vertu ».

En ce premier vendredi du mois, récitons la Prière Apostolique de mère Marie de l’Incarnation, qui se trouve à la fin de ce carnet.

Colorier Madeleine Amiskoveiam.

Samedi 5 juin – premier samedi du mois

RECEVOIR JÉSUS-HOSTIE

DEUX de nos filles, âgées de huit à neuf ans,  ont supplié leur maîtresse pendant presque un an de les admettre à la première Communion.

Se voyant refusées, elles s’adressèrent à moi, me demandant avec beaucoup de caresses de leur accorder cette faveur. Je leur répondis qu’elles étaient trop jeunes. Elles ne perdirent pas courage.

Pendant l’Avent, le révérend Père Vimont vint chez les ursulines pour les instructions. Se jetant à ses pieds, les petites le conjurèrent de leur donner Notre- Seigneur, au moins à Pâques. Le Père leur promit qu’elles jouiraient de ce bonheur si elles étaient bien instruites.

Il n’est pas croyable combien cette réponse les a réjouies. Cependant, la peur de ne pas bien répondre à l’examen de catéchisme les porta à venir me trouver tous les jours, pour me prier, à mains jointes, de les enseigner !

En ce premier samedi du mois, tâchons de consoler le Cœur Immaculé de Marie en répétant souvent cette invocation :

Cœur Sacré de Jésus, je me donne à vous par Marie.

Colorier Marie Negamabat.

Dimanche 6 juin – Solennité de la Fête-Dieu

FERVENTE PRÉPARATION

CES petites prenaient un plaisir indicible à méditer  le mystère de l’Eucharistie, alors qu’elles n’ont pas plus de douze ans. Leur ferveur nous étonne beaucoup.

Agnès faisait hier un caprice. On lui dit que cela faisait de la peine au Bon Dieu. Fondant en larmes, elle s’écria : « On ne me fera pas communier à cause que j’ai fâché Dieu ! »

L’enfant ne s’apaisa que lorsqu’on l’assura que cela ne l’empêcherait pas de recevoir Jésus-Hostie.

Une autre fillette désirait communier avant de retourner chez ses parents. Mais, un jour, elle prit en cachette un Agnus Dei appartenant à l’une de ses compagnes. Sa maîtresse l’ayant surprise la reprit :

« Vous êtes indigne de la communion. Allez, confessez-vous ! Vous devriez jeûner pour un si gros péché. »

Contre toute attente, l’enfant obéit, puis dit à la religieuse :

« J’ai fait ce que vous m’aviez ordonné. Que faut-il faire encore afin que je ne sois point privée de la communion ? »

« La source de toute douceur et tout le soutien de notre cœur, c’est Jésus au Saint-Sacrement. Adorons-le et embrassons-le, protestons-lui que nous sommes à lui malgré nous-mêmes, et qu’il fasse de nous ce qu’il lui plaira. » (saint Charles Garnier, jésuite martyr)

Colorier Agnès, à genoux près de la religieuse.

Lundi 7 juin – apparition de saint Joseph à Cotignac

NE JAMAIS OFFENSER DIEU

LE jour de leur communion approchant, leur  maîtresse prépara les enfants à la confession générale. Elles s’accusèrent avec beaucoup de tendresse pour Jésus crucifié, et de contrition d’avoir blessé son Divin Cœur. Toutes heureuses, nos petites déclarèrent ensuite :

« Il n’y a plus rien dans notre cœur, tout le mal est en dehors, c’est à ce coup que Jésus y viendra ! »

Elles jeûnèrent la veille du grand jour, coutume qu’elles observent désormais avant chaque communion.

Enfin, Notre-Seigneur s’empara de leurs âmes et leur donna son premier baiser.

« Plût à Dieu, avouait l’une, que Celui qui m’est venu voir demeurât toujours avec moi.

– Oh ! que j’ai ressenti un grand désir de ne jamais l’offenser ! disait l’autre.

– Fût-il ainsi, ajoutait sa compagne, que jamais je ne retournasse aux cabanes des sauvages, j’ai trop peur de fâcher Dieu. »

Règne du Cœur de Jésus, établissez-vous dans mon cœur !

Colorier une partie de la frise.

Mardi 8 juin

TROP PETITE !

COMME le Père Pijard instruisait ces trois fillettes,  une autre, âgée de six ans, se présenta et demanda à recevoir elle aussi la sainte communion.

« Tu es trop petite, lui répondit notre jésuite.

– Mon Père, ne me rebutez pas parce que je suis petite, car je deviendrai grande aussi bien que mes compagnes ! »

Il la laissa écouter les leçons. Elle les retint si bien qu’elle étonnait ceux qui l’interrogeaient. Néanmoins, il ne lui accorda pas tout de suite le Pain des forts.

Sa mère la visita au même moment. L’enfant lui parla des mystères de notre foi. Elle lui montra des images et lui apprit à prier.

Pour lui témoigner sa joie d’apprendre à lire, la petite prit un livre et épela les lettres de chaque mot. Sa mère, ravie, les répétait après sa petite fille.

« Comme j’aurais aimé connaître Dieu aussi tôt que vous, avoua la femme aux religieuses. Je suis extrêmement contente de voir ma fille avec vous autres. Quand nous la reprendrons, elle nous instruira, son père et moi, car nous avons tous deux un grand désir d’être baptisés. Elle nous enseignera à prier Dieu. »

Cœur de Jésus dans l’Eucharistie, doux compagnon de mon exil, je vous adore et je vous aime.

Colorier l’enfant montrant les lettres à sa mère.

Mercredi 9 juin

« SE CACHER »

C’EST notre coutume de nous retirer huit ou dix  jours pour faire retraite. Les sauvages disent alors que “ nous nous cachons ”. Une petite Huronne voulut aussi se “ cacher ”.

Elle fabriqua une espèce de cabane et y passa une bonne partie de la journée en prière. L’une de ses compagnes lui en demanda la raison :

« Je me cache comme les Mères, expliqua la fillette, pour prier Dieu pour moi, pour vous, pour les Français et pour les sauvages. »

L’enfant en parla aux autres pensionnaires qui accoururent aussitôt. Chacune se bâtit une maison de feuillages. Elles s’y enfermèrent, gardant le silence, employant une bonne partie de leur temps à prier, réciter le chapelet, avec autant de sérieux que des adultes.

Miséricorde du Cœur de Jésus, pardonnez aux pécheurs !

Colorier la mère écoutant son enfant.

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Jeudi 10 juin

DÉVOTION MARIALE

OUTRE les prières ordinaires et l’examen du soir,  certaines emploient encore un bon espace de temps à prier en leur particulier, avant de se coucher. Ces prières s’adressent d’ordinaire à la Sainte Vierge. C’est une grande espérance pour leur salut que de leur donner cette dévotion.

« Ma Mère, disent-elles, je parle fort souvent à Dieu dans mon cœur. Je prends grand plaisir à prononcer les saints noms de Jésus et Marie. »

Nos petites, très facilement touchées du remords de leurs péchés, les avouent simplement à leurs maîtresses. Elles n’ont aucun repos tant qu’elles ne s’en sont pas confessées.

Avant de commencer leurs travaux, toutes invoquent bien haut le nom de Dieu ou de la Vierge, ou de quelque saint qu’elles veulent honorer.

Vierge Immaculée, priez pour nous le Cœur de Jésus !

Colorier une partie de la frise.

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Vendredi 11 juin – fête du Sacré-Cœur

LA “ SAINTE AUX DEUX ÂMES ”

MÈRE Marie priait pour l’accomplissement des  desseins du Sacré-Cœur sur la Nouvelle-France. Elle présentait toutes ses intentions au Père Éternel en passant par le Cœur de Jésus, comme Il le lui avait lui-même recommandé plusieurs années auparavant :

« Demande-moi par le Cœur de Jésus, mon très aimable Fils. C’est par lui que je t’exaucerai et t’accorderai tes demandes. »

Sans révéler ce secret, mère Marie de l’Incarnation répandait autant que possible la dévotion au Sacré-Cœur, peu connue à cette époque.

Cette bonne Mère enseignait aussi à honorer l’Enfant-Jésus, se gardant bien de préciser qu’elle l’avait contemplé dans les bras de sa Mère !

L’évangélisation des païens retenait toute son attention. Les jésuites la visitaient au parloir avant leur départ en mission. Sur des cartes ils lui montraient, pour sa plus grande joie, où se situaient les villages qu’ils allaient visiter. Notre sainte les assurait de ses prières et entretenait avec eux une correspondance suivie :

« Notre clôture ne me permet pas d’accompagner les ouvriers de l’Évangile, mais il me semble que Notre-Seigneur me lie si fortement à eux que je les suis partout et travaille avec eux en de si nobles conquêtes. »

Les Pères surnommaient Marie de l’Incarnation “ la sainte aux deux âmes ”. « Deux âmes, expliquaient-ils, dont l’une est aussi unie à Dieu que si elle n’eût autre chose à faire que de le contempler, et l’autre, aussi attachée aux affaires extérieures que si elle s’y fût occupée tout entière. »

Charité universelle du Cœur de Jésus, je m’unis à vous.

Colorier le Cœur et la Croix de Jésus.

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Samedi 12 juin

ÊTRE RELIGIEUSE !

UNE jeune femme, mariée depuis peu de temps, fit  sa première Communion chez les ursulines, avec d’autres compagnes. À cette occasion, les Sœurs leur offrirent un petit festin.

Or, notre communiante ne cessait de pleurer pendant que les autres se réjouissaient. Interrogée, elle avoua au Père :

« Je suis triste de ce que vous m’avez mariée ! Je vois ces bonnes religieuses chez lesquelles j’ai été instruite, et j’aurais bien voulu vivre comme elles ! Maintenant, c’est trop tard !

– Mais ne vous ai-je pas demandé si vous désiriez être religieuse ? Ne m’avez-vous pas répondu que vous vouliez vous marier ?

– Vous m’avez bien demandé si je voulais être religieuse. Je ne vous ai pas répondu que je voulais être mariée ; mais bien que je ne pensais pas pouvoir faire comme ces bonnes Filles vierges [c’est ainsi que les Indiens nommaient les religieuses]. Voilà le sujet de ma douleur, de ce que je n’ai pas assez d’esprit pour vivre comme elles. »

Volonté du Cœur de Jésus, disposez de mon cœur.

Colorier la religieuse instruisant les petites filles.

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Dimanche 13 juin – Solennité du Sacré-Cœur

ASPIRANTE HURONNE

EN mai 1650, les religieuses hospitalières reçurent  une pensionnaire d’environ huit ans, fille d’un des principaux chefs hurons. La petite s’appliqua si bien à apprendre le français qu’en moins d’un an, elle le maîtrisa parfaitement.

Les Sœurs lui apprirent également à lire et à écrire, et l’enfant surpassa toutes ses compagnes, même les Françaises.

Son esprit n’avait rien de sauvage. Lorsqu’elle commettait une faute, notre aspirante le reconnaissait immédiatement. Son excellent caractère l’inclinait à excuser les autres, ne pouvant supporter qu’on accusât ses compagnes. Aussi, toutes l’aimaient particulièrement.

Pour la maintenir dans un esprit de soumission, on la mit à la cuisine. Elle s’y comporta avec beaucoup d’humilité, ne se plaignant jamais.

Rappelons-nous la parole de Notre-Dame de Fatima, le 13 juin 1917 : « Jésus veut établir dans le monde la dévotion à mon Cœur Immaculé. » Récitons notre chapelet pour hâter le triomphe du Cœur de Marie, afin que règne le Sacré-Cœur de Jésus sur tous les peuples.

Colorier les paroles du Père Éternel à mère Marie de l’Incarnation : Demande-moi par le Cœur de mon Fils.

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Lundi 14 juin

ENTRÉE AU POSTULAT

SON grand désir d’être religieuse lui faisait trouver  tout facile, quoique nous l’éprouvions par toutes sortes de moyens. Pendant sept ans, son désir de demeurer avec nous augmenta. Elle appréhendait plus que la mort de retourner dans sa tribu.

Le jour de l’Annonciation de la Très Sainte Vierge, de l’année 1657, la jeune fille entra au postulat. Elle édifiait par son humilité, sa sincérité, sa douceur, et par sa tendre dévotion à l’Immaculée Mère de Dieu.

Elle allait croissant dans ces vertus, donnant de grandes espérances pour le futur.

Elle cherchait à imiter mère Marie de l’Incarnation qui se réservait toujours les travaux les plus pénibles, afin d’en soulager les autres Sœurs.

Une des devises favorites de la sainte supérieure était : “ Brièveté de travail, éternité de repos ! 

Or, notre postulante tomba malade. Une fièvre lente la consomma de telle sorte qu’elle s’affaiblit à vue d’œil. Une fluxion, accompagnée d’une grosse toux, détruisait peu à peu ses poumons.

Cœur Sacré de Jésus, consolation des affligés et des malades, ayez pitié de nous.

Colorier une partie de la frise.

Mardi 15 juin

UNE MALADE EXEMPLAIRE

LE mal augmentant, la postulante dut s’aliter. La  Sœur infirmière témoigna que sa malade agissait comme une parfaite religieuse de France, ne manifestant que douceur et soumission.

Notre Sœur demanda un Crucifix qu’elle ne quitta plus, le caressant sans cesse. Elle n’omit jamais ses prières, encore moins son chapelet, quoique son oppression fût violente. Quand on lui disait que cela la faisait souffrir davantage, elle arrêtait immédiatement :

« Ma Mère, je ferai tout ce qu’il vous plaira ; mais cela seul est ma consolation et mon divertissement. »

Force du Cœur de Jésus, soutenez mon cœur.

Colorier la couronne d’épines autour du Sacré-Cœur.

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Mercredi 16 juin

GENEVIÈVE-AGNÈS DE TOUS LES SAINTS

SON état de santé déclinait. On lui remit le saint  habit le jour de la Toussaint et elle reçut le nom de Sœur Geneviève-Agnès de Tous les Saints.

Le même jour, un Père lui administra le saint Viatique. Notre Sœur demanda pardon à toute la communauté présente, avec des sentiments d’une véritable fille de la miséricorde.

« Désirez-vous prononcer les vœux de la sainte Profession ? lui demanda sa Prieure.

– Cela me serait une grande grâce, mais je ne la mérite pas, et n’oserai pas la demander. Mais, ma Mère, si vous me l’accordiez, ma joie serait complète. »

Pensant qu’elle avait encore du temps à vivre, la supérieure préféra attendre. Mais, le lendemain, voyant que la fin était proche, elle l’interrogea de nouveau :

« Ma chère Sœur, désirez-vous proférer les Vœux ?

– Ah ! que j’ai de passion pour ce privilège, répondit avec empressement la mourante. »

La supérieure les lui fit prononcer. Au même instant, la malade entra en agonie.

Amour du Cœur de Jésus, embrasez mon cœur.

Colorier une partie de la frise.

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Jeudi 17 juin

SAINTE MORT

LA communauté fut réunie autour de la mourante, et  elle assista avec admiration à ses ardents élans pour Notre-Seigneur. Notre Sœur priait pour madame la duchesse d’Aiguillon, notre chère fondatrice, et pour la conversion de ceux de sa nation.

Enfin, cette âme angélique quitta la terre dans ce saint exercice, rendant son esprit à Celui qui ne l’avait créé que pour Lui.

Sœur Geneviève-Agnès était de fort belle taille, bien agréable de visage et d’un naturel excellent. Tous vinrent la voir revêtue de notre saint habit. Elle les ravissait, parce qu’elle était d’une beauté charmante.

Jésus, doux et humble de cœur, rendez mon cœur semblable au vôtre !

Colorier quelques rayons autour du Sacré-Cœur.

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Vendredi 18 juin

LA “ PETITE THÉRÈSE 

DEUX Hurons avaient passé l’hiver à Québec. Le  zèle d’une jeune pensionnaire, leur compatriote, les poussa à embrasser la foi de Jésus-Christ.

Cette adolescente, âgée de quatorze ans, leur parla de Dieu et de la grandeur de nos mystères avec tant d’éloquence et d’affection, qu’elle les toucha. Leur plus grand plaisir était de la visiter.

Un Père écrivit à la Mère qui instruisait la jeune fille : « J’espère que Dieu bénira votre petite Thérèse. Nos Hurons sont revenus enthousiastes de leurs entretiens avec elle. Ils sont remontés tellement édifiés de la vertu et de la sainteté qu’ils ont remarquées là-bas, et principalement en votre maison, qu’il y a grand plaisir à les entendre sur ce sujet, et notamment sur les louanges de Thérèse.

« Elle est, disent-ils, si constante, si bien instruite, si aimée, si fervente en la foi, qu’à la voir on ne dirait pas qu’elle fût Huronne. Celle qui l’a instruite est sans doute un des plus grands esprits de France !

« En un mot, ce qu’ils ont vu parmi les chrétiens de Québec leur fait condamner la folie des Hurons. Ils bénissent Dieu de les avoir éclairés du flambeau de la foi. J’espère qu’ils continueront à bien faire. »

Cœur de Jésus, suppliant qu’on l’aime, je vous aime et je vous adore.

Colorier Thérèse écoutant la religieuse.

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Samedi 19 juin

CAPTIVE DES IROQUOIS

OR, les Iroquois capturèrent Thérèse, en même temps que le Père Jogues. Son oncle, Joseph, fut fait prisonnier avec eux et parvint à s’échapper. Il donna ainsi des nouvelles aux ursulines :

« Elle ne rougit pas de sa foi, leur dit-il. Elle prie Dieu ouvertement et se confesse souvent au Père Jogues. Elle m’obéissait en tout. Je l’exhortais souvent à bien faire, et à ne pas perdre courage. Je vous suis bien obligé, mes Mères, continuait le pauvre homme, des bonnes instructions que vous lui avez données. Elle se souvient très bien de ce que vous lui avez enseigné. Elle parle au Père Jogues toutes les fois qu’elle le voit.

« Cela n’empêche pas qu’elle soit très triste, vivant parmi nos cruels ennemis. Elle a bien souffert du froid et des incommodités de l’hiver. Elle a été très malade, mais Dieu lui a rendu la santé. Je lui disais souvent : Aie courage, cette vie est courte, tes travaux prendront fin, et tu seras bienheureuse au Ciel, si tu persévères.

« Elle n’a point de chapelet, mais se sert de ses doigts pour le dire, ou de petites pierres qu’elle met à terre à chaque Ave Maria. Elle me parlait souvent de vous. Hélas, disait-elle, si les Filles vierges me voyaient en cet état parmi ces méchants Iroquois qui ne connaissent pas Dieu, comme elles auraient pitié de moi ! »

Cœur Sacré de Jésus, j’ai confiance en vous !

Colorier une partie de la frise

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Dimanche 20 juin

LE PARADIS DU CLOÎTRE

UNE de nos fillettes sortit du pensionnat l’automne  dernier, pour hiverner avec ses parents qui la réclamaient. Le printemps venu, cette pauvre enfant pria les Mères de la reprendre. Ces dernières refusèrent, car ses parents ne lui avaient pas permis de les quitter.

Elle pleura, voulant rester malgré tout. Les religieuses la renvoyèrent pourtant. La petite repassa peu après, les Sœurs la refusèrent derechef. Une troisième fois, l’enfant revint et se posta auprès de la porte du couvent, suppliante :

« Je veux être instruite, insistait-elle, ayez pitié de moi, je n’ai que faire de mes parents pour ce sujet ! »

La pluie survint, la fillette ne bougea pas. Elle serait restée dehors toute la nuit si ses larmes n’avaient obligé les Mères à lui ouvrir la porte de la maison, où elle entra comme dans un paradis !

Patience du Cœur de Jésus, ne vous lassez point de mon cœur !

Colorier le couvent des ursulines.

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Lundi 21 juin

ATTAQUE DU DÉMON

UN sauvage, baptisé depuis quelque temps, confia à  l’un de nos jésuites : « Mon Père, il faut que je vous raconte ce qui s’est passé cette nuit en ma cabane.

« Comme j’étais endormi, il m’a semblé qu’un démon s’est approché de moi. Je le voyais, je l’entendais, il se moquait de ma façon de réciter le chapelet. Il me contrefaisait avec des gestes ridicules. Il tâchait de me dégoûter de la prière, voulant me persuader qu’elle était trop difficile et ennuyeuse.

« Dès que je l’ai vu, j’ai fait le signe de la Croix, mais il ne s’est pas enfui. Au contraire, plus je le faisais, plus il me contrefaisait. Enfin, voyant son opiniâtreté, j’ai fait un effort qui m’a réveillé, je me suis mis à lui dire des injures :

« “ Va-t’en, misérable esprit, malheureux et méchant, c’est toi qui trompes les hommes et qui les précipites dans les feux où tu brûles toi-même sans espoir d’en jamais sortir. Tu voudrais me tromper et me rendre compagnon de ta perfidie et de tes supplices. Retire-toi, maudit et malheureux, j’obéirai à Dieu toute ma vie. Il t’a chassé de sa maison pour ton orgueil, va-t’en et éloigne-toi de ceux qui croient en lui. 

« Il m’a semblé disparaître en un moment. Je suis demeuré tout plein de consolation. Je doutais néanmoins si je m’étais bien comporté, car je ne sais ce qu’il faut faire en ces rencontres !

– Tu as fort bien combattu, lui assura le Père. »

Notre homme retourna dans sa cabane, rempli d’allégresse.

Doux Cœur de Marie, soyez mon salut !

Colorier une partie de la frise.

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Mardi 22 juin

LE SANG DES MARTYRS...

UNE escouade de Français et de sauvages captura des  Iroquois. Parmi eux se trouvait le bourreau du Père Jogues. La troupe mena le prisonnier à Trois-Rivières, puis à Québec pour le livrer à Monsieur le Gouverneur. Ce dernier l’envoya chez un capitaine sauvage, avec ordre de ne pas le tourmenter trop longtemps.

Afin qu’il mourût chrétien, on l’instruisit, lui parlant du Ciel et de l’Enfer. Il comprit la bonté de Dieu qui a donné son Fils pour sauver tous les hommes. En vertu du Sang de Jésus, lui, pécheur, pouvait être lavé de ses crimes et entrer au Ciel.

À ces paroles, l’homme crut et demanda pardon à Dieu de ses offenses :

« Oui, je crois, affirmait-il, je veux aller au Ciel. Je suis marri d’avoir fâché Celui qui a tout fait : Jésus, pardonne-moi ; Jésus, pardonne-moi, répétait-il en sa langue.

« Ne doutez point, ajouta-t-il, que je ne croie de tout mon cœur ce que vous m’enseignez. Avant de paraître devant Dieu, je déclare que ma bouche dit ce que mon cœur croit et que je ne mens pas ! »

Ces bonnes dispositions attendrirent tous les assistants. On le baptisa et lui donna le nom d’Isaac.

Le martyre du Père Jogues portait ses fruits. Le saint missionnaire n’avait-il pas écrit :

« Il faut que mon corps souffre le feu de la terre pour délivrer ces pauvres âmes des flammes de l’Enfer, il faut qu’il meure d’une mort passagère pour leur procurer une Vie éternelle. »

Colorier le jardin des sœurs.

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Mercredi 23 juin

« ELLES ONT TANT DE CHARITÉ ! »

UNE femme chrétienne, ayant donné naissance à des  jumelles, demanda à un Père de la Compagnie : « Les ursulines ne voudraient-elles pas prendre l’un de mes enfants ? Je n’ai pas le moyen de nourrir les deux.

– Ton bébé est bien trop petit. Il est encore au maillot ! repartit le missionnaire.

– Il est vrai, répondit-elle, que les religieuses n’ont point de lait, mais elles ont tant de charité et tant d’esprit qu’elles trouveront bien le moyen de lui sauver la vie. »

Voici un autre trait amusant :

Un Français, désireux d’apprendre l’algonquin, pressait un Indien de l’instruire. Ce dernier le fit avec beaucoup de dévouement. Comme ils ne se comprenaient pas bien l’un l’autre, le Français cassait la tête de l’Indien, lui répétant sans cesse : « Je ne te comprends pas ! » Aussi, notre sauvage, impatienté, voulut-il être délivré et cria d’une voix forte :

« Tu ne pourras jamais me comprendre : tu as des oreilles françaises, et j’ai une langue sauvage ! Le moyen que tu m’entendes ? Coupe tes oreilles, et prends celles de quelque sauvage, et alors tu m’entendras fort bien ! »

Science du Cœur de Jésus, enseignez mon cœur.

Colorier les flammes du Sacré-Cœur.

Jeudi 24 juin

LA PLUS AFFLIGEANTE DES CROIX

EN 1650, Québec apprit la destruction de Sainte-Marie-  des-Hurons et le martyre des jésuites. Mère Marie de l’Incarnation nota que ce fut « la plus affligeante des croix que j’aie souffertes... Ah ! que ce coup me fut extrême ! C’était une chose plus pitoyable qu’aucune qui fût encore arrivée en cette nouvelle Église. »

Sans illusion, elle écrivit : « Si la France nous manque, il faudra ou quitter ou mourir. »

Elle resta extraordinairement paisible : « Tout ce que j’entends dire ne m’abat pas le cœur... Nous agissons comme si rien ne devait arriver. »

Cette attitude contribua à sauver la colonie en maintenant le courage des habitants de Québec qui refusèrent de rembarquer pour la France.

Cependant, dans l’octave de Noël, un autre drame la frappa plus directement. L’étourderie d’une novice mit le feu au monastère, en pleine nuit.

Les religieuses eurent juste le temps de sauver les enfants, les papiers importants et quelques habits. Mère Marie de l’Incarnation sortit la dernière de la maison, au moment où la charpente s’écroulait !

Toute la communauté se retrouva au grand complet, avec les enfants, en chemise de nuit, pieds nus dans la neige, regardant le désastre.

« Je ne ressentis pas un mouvement de peine, de tristesse, ni d’ingratitude, mais je me sentais intimement unie à l’Esprit et à la main qui permettait et qui faisait en nous cette circoncision. La nuit était fort sereine, le ciel bien étoilé, le froid très grand, mais sans vent. »

Notre sainte s’exclama : « Ô très adorable Volonté de Dieu, que vous m’êtes aimable ! » Comme l’expliqua notre Père, elle reçut cette épreuve « comme un signe de l’amour de son Dieu ».

Jésus-Hostie soutenait ses fidèles épouses, Lui qui le premier avait voulu souffrir pour elles le froid, la fatigue, la faim. Là était le secret de leur courage dans de si éprouvantes conditions.

Colorier une partie de la frise.

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Vendredi 25 juin

TE DEUM !

À genoux dans la neige, les sœurs offrirent leur  sacrifice à Notre-Seigneur d’un cœur si paisible que les Français et les sauvages, accourus de toutes parts, ne purent retenir leurs larmes. Elles entonnèrent le Te Deum.

Les ursulines n’avaient plus rien. Parmi les colons, c’était à qui se priverait pour les aider et les garder ! « Vous savez la pauvreté du pays, écrivit une des religieuses à une correspondante, mais la charité y est encore plus grande. »

Les colons décidèrent la reconstruction que mère Marie de l’Incarnation dirigea. La bienheureuse supérieure bénéficiait d’une aide extraordinaire : la Sainte Vierge en personne lui indiquait ce qui n’allait pas ou ce qu’il était temps de faire !

« Je la sentais auprès de moi, sans la voir, m’accompagnant dans les allées et venues qu’il me convenait de faire dans le bâtiment. Chemin faisant, je m’entretenais avec Elle, lui disant Allons ma divine Mère, allons voir nos ouvriers. ” »

Forte d’un tel soutien, la sainte mena les travaux à leur terme en un an seulement... La reconstruction avait coûté trente mille livres. Or, la religieuse économe ne sut jamais d’où étaient venus les quatre cinquièmes de cette somme !

À un moment, la communauté se trouva vraiment au bord de la faillite. Dans sa détresse, sainte Marie de l’Incarnation recommanda l’affaire à Notre-Dame. Peu de jours après, elle reçut de la reine de France une enveloppe qu’elle déposa au pied de la statue de la Sainte Vierge avant de l’ouvrir. La lettre annonçait un don : l’exacte somme absolument nécessaire !

Mère Marie de l’Incarnation priait le Père Éternel de lui permettre de bâtir rapidement cette maison « où il serait loué et adoré, avec Jésus et Marie, et qu’il n’en séparât point le grand saint Joseph. »

Ô Cœur Immaculé de Marie, avec le Cœur de Jésus le plus doux et le plus tendre des cœurs, embrasez nos cœurs du divin Amour dont vous brûlez !

Colorier la plaie du Sacré-Cœur.

Samedi 26 juin

« MARIE, LA SAINTE FILLE »

MÈRE Marie de Saint-Joseph vécut ses derniers mois  pendant la reconstruction du couvent. Dans la petite maison provisoire, il était impossible de procurer calme et repos à la chère malade.

Celle-ci ne s’en plaignait pas, assurant dans un sourire qu’elle était heureuse de mourir ainsi, au milieu de sa communauté.

Sa faiblesse l’empêchait de recevoir ses bien-aimés Hurons. Inconsolables, ils déposaient à la porte le produit de leur chasse, disant :

« C’est pour Marie, la sainte Fille, afin qu’elle mange et qu’elle vive pour nous instruire encore ! »

Malgré leurs touchantes attentions, mère Marie de Saint-Joseph mourut bientôt, comme une sainte.

Quelques jours après, elle apparut en songe à une Sœur de Tours, environnée de gloire.

Ô Cœur Immaculé de Marie, refuge et chemin qui nous conduit à Dieu, embrasez nos cœurs du divin Amour dont vous brûlez !

Colorier une partie de la frise.

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Dimanche 27 juin

RETOURNER CHEZ LES FRANÇAIS !

LES premières Iroquoises confiées aux religieuses  ursulines arrivèrent avec deux Françaises captives de cette tribu depuis dix ans. À la vue du portrait de mère Marie de Saint-Joseph, l’une des deux se troubla.

Questionnée, la jeune Française avoua avec confusion qu’avec les années, la vie païenne menée par les Iroquois l’avait séduite. À l’arrivée des Français au village, elle s’était enfuie dans la forêt. Elle entendit soudain une voix l’appeler : une religieuse posait sur elle un regard triste et sévère et lui ordonnait de retourner vivre parmi les Français. Saisie de frayeur, la rebelle avait obéi, et voici qu’elle reconnaissait en ce portrait la sœur inconnue !

À ce récit, mère Marie de l’Incarnation eut la très douce certitude que sa bien-aimée compagne continuait du Ciel à l’assister dans leur rude mission.

Mère Marie de l’Incarnation soutenait l’action des explorateurs pour étendre le territoire de la Nouvelle-France vers le Sud et l’Ouest avant les Anglais : « Plantez la croix et les fleurs de lys à la face des Anglais ! » s’exclamait-elle, remplie de ferveur religieuse et patriotique.

Colorier quelques rayons autour du Sacré-Cœur.

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Lundi 28 juin

PARTICIPATION A LA CROIX DE JESUS

LES années passaient, et la fondatrice des ursulines  de Québec sentait son heure approcher. À ses maux de reins, s’ajoutait une maladie de foie qui lui rendait toute nourriture insupportable ; elle ne prenait plus que le quart d’une portion normale. De pénibles otites l’éprouvaient aussi fréquemment.

Une nuit, Jésus lui apparut tout souffrant. Il cherchait une âme fidèle pour le soulager dans ses extrêmes douleurs. Elle s’offrit à Lui.

Dès lors, la sainte religieuse comprit que ses infirmités étaient une part que Jésus lui donnait de sa Croix et elle les aima. D’où son héroïque patience.

« Allons donc au nom de Dieu goûter les délices du paradis dans les croix qui se trouvent belles et grandes dans la Nouvelle-France », avait-elle écrit.

Madame de La Peltrie mourut d’une pleurésie, le 18 novembre 1671. Les Indiens regrettèrent beaucoup celle qu’ils appelaient « la gentille dame française ».

Réparation du Cœur de Jésus, je m’unis à vous.

Colorier une partie de la frise.

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Mardi 29 juin

LA CONFRERIE DE LA SAINTE-FAMILLE

LE bilan de ses trente années en terre canadienne est  impressionnant. La communauté comptait vingt-deux religieuses, ce qui était beaucoup pour un monastère aussi pauvre.

On estime à huit cents le nombre de jeunes auto­chtones qui sont passées chez les ursulines du vivant de Marie de l’Incarnation.

Chose remarquable : toutes sont restées très attachées aux Sœurs. Huit resteront plus longtemps avec les religieuses et deviendront de “ vraies Françaises ”. L’une d’elles épousera Pierre Boucher et tous deux fonderont une des plus belles familles canadiennes-françaises.

Marie de l’Incarnation réussit fort bien avec les Françaises qui, à son arrivée, avaient grand besoin d’être prises en main. Après leur mariage, elles venaient régulièrement au parloir demander conseil. Chaque dimanche, elles recevaient une petite instruction. Mgr de Laval officialisa ces petites réunions en fondant la confrérie de la Sainte-Famille.

« Elle était, lorsqu’elle nous recevait, d’humeur très agréable, et quoique la présence de Dieu, qu’elle avait continuelle, lui donnât quelque chose de céleste et qui imprimait le respect, on n’était jamais embarrassé ni gêné avec elle. Elle avait un goût ingénieux, une simplicité noble, aussi une solidité de jugement. » (Témoignage d’un Français)

Cœur de Jésus et de Marie, soyez connu, soyez aimé, soyez imité.

Colorier quelques rayons autour du Sacré-Cœur.

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Mercredi 30 juin

MAGNIFICAT !

EN janvier 1672, Marie de l’Incarnation consomma  de la viande avariée, ce qui entraîna une violente crise hépatique. Elle ne se plaignit pas, mais répétait seulement : « Je suis attachée à la Croix de Jésus-Christ. »

Inconsolables, les sœurs multiplièrent prières et pénitences pour obtenir sa guérison. L’aumônier commanda à la mourante de prier aussi. Retarder encore l’entrée au Ciel ? Par obéissance, elle murmura :

« Mon Seigneur et mon Dieu, si vous me jugez encore utile à cette petite communauté, je ne refuse ni la peine ni le travail, que votre volonté soit faite. »

Durant trois mois, elle supporta de terribles souffrances. Elle s’éteignit doucement le 30 avril 1672. Son visage prit alors une beauté resplendissante, les religieuses en furent ravies et malgré leur tristesse, entonnèrent le Magnificat !

Je vous aime, ô Marie, Cœur de la plus tendre des mères, ma Mère et l’espérance de mon dernier pardon. À l’heure de notre mort, souvenez-vous !

Colorier une partie de la frise.

Prière apostolique

Durant toutes ces années d’activités apostoliques au Canada, consolée ou accablée, chaque soir sainte Marie de l’Incarnation récitait cette prière :

C’EST par le Cœur de mon Jésus, ma voie, ma  vérité et ma vie, que je m’approche de vous, ô Père Éternel. Par ce Divin Cœur, je vous adore pour ceux qui ne vous adorent pas, je vous aime pour ceux qui ne vous aiment pas, je vous reconnais pour tous les aveugles volontaires qui, par mépris, ne vous reconnaissent pas.

Je veux, par ce Divin Cœur, satisfaire au devoir de tous les mortels. Je fais en esprit le tour du monde pour chercher toutes les âmes rachetées du Sang très précieux de mon divin Époux, afin de vous satisfaire pour toutes par ce Divin Cœur ; je les embrasse pour vous les présenter par lui et par lui je vous demande leur conversion.

Eh quoi ! Père Éternel, voulez-vous bien souffrir qu’elles ne reconnaissent pas mon Jésus, et qu’elles ne vivent pas pour lui, qui est mort pour tous ? Vous voyez, ô divin Père, qu’elles ne vivent pas encore ; ah ! faites qu’elles vivent par ce Divin Cœur.

Sur cet adorable Cœur, je vous présente tous les ouvriers de l’Évangile, afin que, par ses mérites, vous les remplissiez de votre Esprit-Saint.

Sur ce Cœur Sacré, comme sur un autel divin, je vous présente en particulier telle intention....

Vous savez, ô Verbe Incarné, Jésus mon Bien-Aimé, tout ce que je veux dire à votre Père, par votre Divin Cœur et par votre sainte Âme.

Je vous le dis en le lui disant, parce que vous êtes en votre Père et que votre Père est en vous ; faites donc tout cela avec lui. Je vous présente toutes ces âmes, faites qu’elles soient une même chose avec vous.

Ainsi soit-il.

Cette prière apostolique annonce les petites prières que l’Ange du Portugal apprendra aux trois enfants de Fatima, trois siècles plus tard.

De même, en même temps qu’une ardente dévotion au Divin Cœur de Jésus, sainte Marie de l’Incarnation manifeste son amour du Cœur de Marie par cette prière :

QUE vous rendrai-je, ô mon divin Époux, pour l’excès  de votre charité en mon endroit ? C’est par votre divine Mère que je vous veux rendre mes actions de grâces.

Je vous présente son Sacré Cœur comme je présente le vôtre à votre Père. Souffrez que je vous aime par ce même Cœur qui vous a tant aimé. Je vous offre ses sacrées mamelles qui vous ont allaité et son sein virginal qui vous a logé. Je vous l’offre en action de grâces de tous vos bienfaits sur moi, tant de grâce que de nature. Je vous l’offre pour l’amendement de ma vie et pour la sanctification de mon âme. Je vous le présente afin qu’il vous plaise de me donner la grâce de la persévérance finale dans votre service et dans votre amour.

Je vous rends grâces, ô mon divin Époux, de ce qu’il vous a plu choisir cette très Sainte Vierge pour votre Mère, de ce que vous avez voulu être enfermé neuf mois dans son sacré sein et qu’il vous a plu nous la donner pour Mère.

J’adore l’instant de votre Incarnation en elle et tous les divins moments de votre vie voyagère sur la terre. Je vous en rends grâces et de ce que vous vous êtes voulu faire non seulement notre vie exemplaire par vos divines vertus, mais encore notre vie méritoire dans tous vos travaux et dans l’effusion de votre Sang précieux.

Je ne veux ni vie ni mouvement que par votre vie. Purifiez donc ma vie impure et défectueuse par la pureté et perfection de votre vie divine et par la sainte vie de votre divine Mère.

Lorsque l’Église du Canada retrouvera le kérygme évangélique en suivant l’exemple de ses saints fondateurs, elle sera aussitôt à l’unisson des demandes de Fatima et de Paray-le-Monial, gage de la bénédiction divine et de la renaissance, cette fois pour la conversion totale de ce pays « autant pitoyable qu’effroyable ».

(frère Pierre de la Transfiguration)


[1] Chez les ursulines, le titre de “ mère ” ne désigne pas seulement la supérieure, mais aussi les religieuses de chœur.

[2] Tous les récits de ce carnet sont extraits des Relations ou des écrits de mère Marie de l’Incarnation. Pour en savoir plus, lire les articles de frère Pierre de la Transfiguration, dans la Renaissance Catholique, ou sur le site CRC. Cf. aussi le site VOD.