Sacré-Cœur 2022
à la Visitation de Paris
Introduction
L’ORDRE de la Visitation naquit, en 1610, par la volonté du Sacré-Cœur, de l’union de deux âmes, celles de saint François de Sales, évêque de Genève, et de sainte Jeanne-Françoise de Chantal, sa fille spirituelle.
Cette nouvelle famille religieuse n’obtint pas la permission de visiter les pauvres et les malades. Comme tous les ordres féminins de l’époque, elle dut être contemplative et cloîtrée. Ce qui n’empêcha pas les sœurs de se vouer à l’éducation des jeunes filles, le pensionnat étant à l’intérieur de la clôture.
En 1618, Mgr de Sales se rendit à Paris où il fit une entrée triomphale. Le Roi, la Reine, la cour et les Parisiens le tenaient pour l’un des plus grands prédicateurs en France.
Pourtant, Paris ne s’ouvrit pas entièrement à sa spiritualité, toute de tendresse et de dévotion envers Jésus et Marie. Pour y remédier, le saint évêque envoya mère de Chantal établir un monastère de la Visitation. Quatre autres fondations suivirent dans la capitale, la dernière à la rue du Bac, en 1673.
À l’occasion du quatrième centenaire de la mort de saint François de Sales 1 (28 décembre 1622), les visitandines de Paris nous racontent 2 ces quatre siècles de fidélité à leurs saints fondateurs, pour le règne du très unique Cœur de Jésus-Marie. D’abondants miracles récompensèrent leur courage et leur constance à travers les révolutions, les persécutions, les épidémies et les guerres.
Comme l’expliquait notre Père en 1961, « les religieux et les religieuses sont des sources de courage, ils sont des exemples vivants de paix et de joie inaltérable. Au lieu de nous égaler à eux, aimons-les, admirons-les, désirons marcher sur leurs traces. Ainsi triomphe l’Église. » (Lettres à mes amis, no 30)
La consécration de la Russie au Cœur Immaculé de Marie, accomplie le 25 mars dernier, nous laisse espérer ce proche “ triomphe de l’Église ”.
En ce mois de juin, nous prierons particulièrement pour les religieux et le clergé, en premier lieu pour le pape François. Qu’il soit le docile instrument de Notre-Dame, pour hâter le règne de son Cœur Immaculé uni au Divin Cœur de son Fils.
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Mercredi 1er juin
UNE VISITATION À PARIS
LE 1er mai 1619, la foule se pressait autour de la petite maison du faubourg Saint-Marceau. L’évêque de Genève, Mgr François de Sales, célébrait la Messe pour la fondation du premier monastère, à Paris, de la Visitation Sainte-Marie.
Mère de Chantal et ses six premières Filles furent bien accueillies par la noblesse parisienne. Cependant, la fondation se fit dans une extrême pauvreté. Aucune aide extérieure ne leur était apportée, car le bruit courait qu’elles étaient très riches !
En réalité, « tout manquait, habits, linge, meubles, jusqu’à la nourriture même. Nous avons juste ce qu’il faut pour ne pas mourir de faim. Plusieurs d’entre nous sont réduites à s’asseoir par terre, faute de siège.
« Durant les froids rigoureux, nous passons le jour sans feu, et la nuit sans couverture pour nous réchauffer. Quelques-unes couchent dans les greniers où elles ont pour lit un tas de fagots. Elles se retrouvent quelquefois couvertes de neige à leur réveil ! »
Saint François de Sales exhortait ses Filles à aimer cette pauvreté, malgré ses rigueurs :
« La Croix vient de Dieu, il ne faut pas seulement la regarder, mais l’accepter », pour consoler le Cœur Immaculé de Marie.
Colorier saint François de Sales (en soutane violette).
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Jeudi 2 juin
L’APPRENTISSAGE DES VERTUS
PEU après l’installation de la petite communauté, deux riches bienfaitrices vinrent à son secours. Leurs larges aumônes permirent aux sœurs d’emménager dans une maison plus convenable. Elles y intronisèrent le Saint-Sacrement.
Mais la pauvreté persistait. Il n’y avait dans le couvent que deux écuelles d’étain, réservées à la supérieure et à la sœur assistante. Les autres visitandines mangeaient dans des écuelles de terre.
Or, une jeune novice prit un jour pour elle l’écuelle d’étain. À la récréation, mère Jeanne-Françoise lui demanda :
« Ma Fille, pourquoi n’avez-vous pas servi l’écuelle d’étain à ma sœur assistante ?
– Ma Mère, c’est qu’elle est habituée à la mortification. Mais moi, qui n’ai quitté le monde que depuis peu, je n’ai jamais mangé dans de la terre, cela me répugne. »
Cette simplicité fit sourire la sainte fondatrice !
Pour consoler le Cœur de Jésus, cherchons à faire plaisir aux autres d’abord, avant de penser à nous-mêmes :
« Ce que j’aime surtout, c’est la douceur de cœur, la pauvreté d’esprit et la simplicité de vie. »
Colorier le jardin de la Visitation.
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Vendredi 3 juin – premier vendredi du mois
« DIEU LES ÉLÈVERA »
EN l’année 1620, une terrible épidémie de peste sévit à Paris. Plusieurs visitandines tombèrent malades, dont mère Jeanne-Françoise. Cette dernière refusa tout traitement particulier : « L’abstinence et les choses les plus communes sont bonnes pour ma santé », affirma-t-elle, avec sa gaieté habituelle.
La communauté puisait force et courage auprès de son saint fondateur qui réconfortait ses Filles :
« On dit qu’en Grèce, il y a un fleuve dans lequel les poissons paraissent être en or. Mais, lorsqu’ils sont hors de cette eau, qui est leur lieu d’origine, ils ont la couleur des autres poissons.
« Les afflictions sont comme cela : si nous les regardons hors de la Volonté de Dieu, elles ont leur amertume naturelle. Mais celui qui les considère comme étant le bon plaisir de Dieu les trouve tout en or, aimables et précieuses. »
Les familles atteintes par la peste, qui habitaient autour du monastère, ne pouvaient plus l’aider de leurs aumônes ordinaires. Une seule bienfaitrice continuait ses dons. Elle rendit compte à Mgr de Sales de l’extrême misère des sœurs. Il lui répondit :
« Madame, ne vous étonnez point, Dieu les élèvera. Il fera croître ce petit institut qui se multipliera. Il répandra partout sa bonne odeur, comme la violette. »
Cette prophétie ne tarda pas à s’accomplir.
En ce premier vendredi, supplions le Cœur de Jésus de faire miséricorde à la France, ravagée par la pire des pestes, celle de l’impiété des âmes.
Cœur de Jésus, que votre Règne arrive ! Convertissez la France !
Colorier la banderole “ Aimez-moi ”.
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Samedi 4 juin – premier samedi du mois
« INCOMMODÉE D’UNE JAMBE »
LA communauté se remit de l’épidémie. Le nombre de postulantes ne cessait d’augmenter. Fallait-il accepter les estropiées ? demanda mère de Chantal. François de Sales l’y encouragea :
« Qu’on ne cesse jamais de recevoir dans la Congrégation les filles infirmes, telle celle qui a perdu l’usage de ses jambes. Car, sans jambes elle pourra faire tous les exercices essentiels de la Règle, obéir, prier, chanter, garder le silence, coudre, manger et surtout avoir la patience avec les sœurs qui la porteront. Ces difformités extérieures ne sont rien devant Dieu. »
Ainsi sœur Marie-Anastasie, amputée d’une jambe, fut reçue à la Visitation. Quand elle apprit que beaucoup de monde assisterait à sa profession religieuse, elle avoua :
« Ah ! Monseigneur, que je serai rouge de timidité et comme je tremblerai d’émotion en faisant ma profession !
– Eh bien, ma Fille, vous parlerez toute rouge et toute tremblante ! »
Plus tard, sœur Marie-Anastasie sera nommée supérieure de la Visitation du Mans, lors de sa fondation en 1634.
Accomplissons les exercices du premier samedi pour réparer les offenses faites au Cœur Immaculé de Marie.
« Doux Cœur de Marie, soyez mon salut ! »
Colorier sœur Marie-Anastasie et les deux sœurs.
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Dimanche 5 juin – Pentecôte
LA VRAIE CHARITÉ
MÈRE de Chantal reçut cet autre avis de son Père : « Si l’on persévère à faire la charité à celles qui ont ces imperfections corporelles, Dieu en fera venir beaucoup de belles et agréables. »
La prédiction se vérifia. En 1621, plusieurs jeunes filles issues d’illustres familles entrèrent à la Visitation parisienne. Ainsi de mademoiselle Hélène-Angélique Lhuillier, fille du secrétaire du Conseil d’État et des Finances.
Un autre jour, arriva une « jeune fille d’une rare beauté, animée du désir de n’avoir d’autre époux que Jésus-Christ ».
Mais la vocation de cette postulante rencontrait la vive opposition de ses parents. Sa mère obtint du Parlement un arrêt ordonnant à sa fille de quitter le couvent. La dame se présenta au parloir avec messieurs les députés. Devant tous, sœur Marie-Charlotte affirma sa volonté de demeurer religieuse, puis se cacha dans le monastère ! Sa mère se retira si affligée qu’elle tomba malade et mourut.
Nommée première maîtresse du pensionnat récemment fondé, cette sœur eut soin de l’éducation de plusieurs demoiselles de haute noblesse ; parmi elles, les princesses de Nemours. L’une devint duchesse de Savoie et l’autre reine du Portugal. En effet, la Visitation accueillait des pensionnaires de toutes conditions. Leurs maîtresses veillaient à les prémunir contre les dangers du monde et à les établir dans une vie profondément chrétienne.
Offrons notre communion pour les prêtres et religieux, afin qu’ils restent fidèles à leur vocation.
Colorier les visitandines dans le jardin.
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Lundi 6 juin
« AIMEZ VOTRE CHÈRE ÉPOUSE »
DÈS sa fondation, la Visitation s’avéra un havre de paix pour Anne d’Autriche. Une de ses demoiselles d’honneur, Louise de La Fayette, y entra. Le roi Louis XIII avait pour elle une amitié toute surnaturelle.
Saint Vincent de Paul était alors chargé, par Mgr de Sales, de la direction spirituelle des visitandines. Il encouragea sœur Louise-Angélique à recevoir le Roi lorsqu’il venait au monastère.
Lors de ses visites, la jeune religieuse l’entretenait de la Chrétienté, de la misère du peuple. Par-dessus tout, elle tenait à inspirer à Louis XIII une sainte et cordiale affection pour la Reine. Espérant toujours que Dieu bénirait leur union en leur accordant un enfant, elle l’encourageait à se réconcilier avec elle : « Majesté, aimez-la comme votre chère et légitime épouse. »
Le 5 décembre 1637, un orage éclata au cours de leur parloir. Sœur Louise-Angélique conseilla au Roi de ne pas poursuivre sa route, mais bien plutôt d’aller retrouver Anne d’Autriche au palais du Louvre. Ce qu’il fit. Neuf mois plus tard, jour pour jour, naissait Louis “ Dieudonné ”, le futur Louis XIV.
Pensons souvent à cette parole de sainte Jeanne de Chantal : « Le couvent est la maison de Dieu et la porte du Ciel. »
Colorier l’entrée du couvent et la sœur portière.
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Mardi 7 juin – apparition de saint Joseph à Cotignac
« AIMEZ CETTE BONNE RELIGIEUSE »
QUAND son fils eut atteint ses cinq ans, Anne d’Autriche ne manqua pas de le présenter à sœur Louise-Angélique. Elle recommanda alors au jeune prince : « Aimez bien cette bonne religieuse, car je lui dois beaucoup. »
Les visitandines eurent ensuite l’honneur de baiser la main de l’enfant royal. Comme aucune n’osait le regarder, la Reine demanda à la supérieure : « Ma Mère, ordonnez à vos Sœurs de ne pas se mortifier en ne regardant pas le Roi ! »
Lorsque mère de Chantal venait à Paris, Anne d’Autriche sollicitait de la rencontrer au Louvre. Durant l’un de ses séjours, la sainte supérieure opéra un éclatant miracle. Sœur Élisabeth-Cécile souffrait d’une inflammation des ligaments de la mâchoire. Les chirurgiens l’avaient déclarée incurable.
La malade reçut l’inspiration de demander sa guérison par l’intercession de Mgr François de Sales. Elle avala une cuillerée de vin dans laquelle mère de Chantal avait versé une goutte du sang de leur Père. Le soir, les douleurs de la sœur augmentèrent. Elle était au plus mal quand, durant la nuit, elle se sentit pressée de retirer la bande qui maintenait sa bouche fermée. Elle était guérie !
Cœur Sacré de Jésus, obtenez que les vocations religieuses se multiplient dans la Sainte Église, pour le salut des âmes !
Colorier la Reine et le Dauphin avec sœur Louise-Angélique.
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Mercredi 8 juin
VIENNE !
APRÈS les somptueuses fêtes de béatification de mère de Chantal, l’impératrice d’Autriche sollicita du roi de France deux religieuses de la Visitation de Paris. Le départ des sœurs eut lieu en juillet 1752. « L’équipage était une berline à six chevaux, si bien conditionnée qu’elle a soutenu ce long voyage sans qu’il arrivât aucun accident à nos chères sœurs. »
En 1756, quatre autres visitandines rejoignirent Vienne, avec bien des fatigues et surtout beaucoup de frayeurs, « soit d’être noyées dans les eaux du Rhin, soit d’être perdues dans les mauvais chemins de la Souabe. Les affreux et continuels cahots de leur voiture les faisaient frissonner à tout moment.
« Mais ce fut particulièrement aux approches de la Forêt-Noire que leurs craintes redoublèrent : la peur d’être égorgées par les voleurs s’empara tellement d’elles que leur conducteur se crut obligé de demander au ministre de l’Impératrice douairière un petit détachement de hussards pour les escorter dans cette forêt qui leur paraissait si redoutable. »
Récitons l’acte de consécration de la bienheureuse Marie du Divin Cœur (A 7).
Colorier une partie de la frise.
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Jeudi 9 juin
CAMILLE DE SOYECOURT
EN 1766, monsieur et madame de Soyecourt estimèrent le moment venu pour leur dernière fille, Camille, de rejoindre ses sœurs, pensionnaires au couvent de la Visitation. En effet, ils savaient que les enseignements chrétiens reçus dans l’enfance sont ceux qui marquent les âmes de façon plus durable et plus profonde !
Mais cette séparation nécessaire déchirait autant le cœur des parents que celui de la petite. Le père ne céda pas aux supplications de sa fille qui ne voulait pas quitter les siens. Cependant, c’est à sa femme qu’il laissa le courage de conduire Camille au monastère. Ce courage, elle ne l’eut elle-même qu’à demi.
« Allons rendre visite à vos sœurs », lui avait-elle dit. Une fois à la Visitation, elle se retira subrepticement, la laissant entre les mains des bonnes religieuses.
Toute la nuit, la nouvelle élève, qui n’avait que neuf ans, pleura et trépigna. Les sœurs se relayèrent vainement pour essayer de l’endormir.
« Ô Divin Cœur de Jésus, je vous conjure de vivre et de régner dans tous les cœurs et de les consumer de votre pur amour. » (sainte Marguerite-Marie)
Colorier le couvent.
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Vendredi 10 juin
DOUCEUR ET TENDRESSE
LE lendemain matin, pour obéir au règlement, les religieuses voulurent couper ses magnifiques boucles. L’enfant cria, se débattit, repoussa les ciseaux et le bonnet de pensionnaire qui lui semblait si laid ! Soudain, lorsque la supérieure lui passa au cou la croix d’uniforme, le petit voile de Marie et le cordon de saint François de Sales, la paix descendit en elle.
Camille aima beaucoup ces quatre années passées auprès de ces éducatrices de premier ordre. Austérité, autorité, fermeté : pour petit-déjeuner, on ne servait à ces jeunes pensionnaires qu’une tranche de pain sec et un verre d’eau.
Mais nos visitandines étaient pleines de douceur et de tendresse, selon les conseils de leur fondateur. Avec amabilité, elles s’ingéniaient à mortifier les mauvais penchants des enfants, tout en fortifiant leurs vertus.
« Ô Jésus, vous vous donnez à moi, je me donne à vous sans réserve, je me consacre à vous pour toujours ! » (invocation de Camille, lorsqu’elle sera religieuse)
Colorier une partie de la frise.
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Samedi 11 juin
APPEL À LA VIE RELIGIEUSE
CONFIANTE, Camille s’abandonna et se laissa façonner. Son âme s’en trouva si bien qu’à onze ans, on la jugea digne de recevoir, prématurément, le sacrement de Confirmation.
Ce jour-là, elle entendit l’appel à la vie religieuse, appel qui ébranla toute son âme. Dès lors, Camille s’astreignit de plus près à l’obéissance qui mortifiait son orgueil. Elle abandonna ses colifichets de fillette et distribua les trésors de sa tirelire à ses compagnes.
Elle se dévoua au-delà de ses forces. Sa santé fragile s’en ressentit. Une affection douloureuse des yeux l’obligea à rester dans la pénombre, l’inaction, la solitude. Une religieuse, que sa faiblesse éloignait aussi, s’occupa de Camille et lui tint compagnie. Par sa bonté et sa joyeuse résignation, elle éleva cette petite âme au niveau de la sienne.
Ai-je, moi aussi, le désir d’aimer Jésus et de lui consacrer un jour ma vie pour convertir beaucoup d’âmes ?
Colorier le blason de la Visitation.
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Dimanche 12 juin
VŒU AU SACRÉ-CŒUR
DURANT l’hiver 1783-1784, Paris connut soixante- neuf jours consécutifs de gel. Charretiers et voituriers devaient transporter les amas de neige et de glaçons hors de la ville !
La Visitation comptait alors soixante-quatre religieuses et quarante-six pensionnaires. Impuissantes à se procurer du bois à quelque prix que ce fût, les sœurs et les enfants vivaient dans un froid intense et persistant.
Leur inquiétude grandit encore quand le dégel tant désiré arriva, car il provoqua de terribles inondations. L’eau menaçait d’envahir leurs caves où étaient entreposées toutes leurs provisions... Une visitandine eut l’idée d’y placer une statue de la Sainte Vierge. Dès lors, « nos caves furent préservées tandis que nos voisins éprouvèrent le sort que nous craignions pour les nôtres ».
En décembre 1788, une épidémie de grippe frappa durement la Visitation. Les sœurs firent un vœu au Sacré-Cœur pour demander la guérison des malades et la préservation de la communauté. Vœu qui fut aussitôt exaucé.
Récitons les litanies du Sacré-Cœur (D 8).
Colorier une partie de la frise.
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Lundi 13 juin
« DES RELIGIEUSES CALMES »
À la veille de la Révolution, les sœurs notaient : « L’incrédulité, l’esprit d’irréligion, l’affaiblissement de la foi et l’indifférence d’un grand nombre rendent les vocations de plus en plus rares.
« Les principes nouveaux d’indépendance, la convocation des États généraux semblent annoncer qu’on marche vers l’abîme. »
Les premiers troubles éclatèrent en avril 1789, près de la Visitation de la rue Saint-Antoine. Les révolutionnaires incendièrent « deux manufactures du quartier, au milieu d’un affreux tumulte accompagné de meurtres et de pillage ».
Le 17 juin 1789, Louis XVI, oubliant qu’il était le lieutenant du Christ, accepta officiellement la souveraineté du peuple ! C’était un outrage envers Notre-Seigneur, cent ans, jour pour jour, après le refus opposé par Louis XIV aux demandes du Sacré-Cœur de lui consacrer son Royaume. Cela annonçait le malheur sur la France.
Un mois plus tard, le 14 juillet, les insurgés envahirent l’église du monastère en criant :
« Sonnez le tocsin, sonnez le tocsin, Paris est perdu ! »
Ils menacèrent les sœurs de les massacrer si elles ne déverrouillaient pas les portes. Elles consentirent à ouvrir les premières, sans toucher aux secondes, pour ne pas enfreindre la clôture. Cependant, devant les insultes et les menaces, elles durent céder. Or, les soldats qui semblaient des tigres prêts à dévorer leur proie devinrent soudain doux et honnêtes. Ils se dirent les uns aux autres :
« Tiens, regarde comme ces pauvres religieuses restent calmes au milieu de tant de dangers ! »
Dans les épreuves, rappelons-nous que nous sommes entre les mains de Dieu. À notre tour, redisons souvent :
« Cœur Sacré de Jésus, j’ai confiance en vous ! »
Colorier l’ange de gauche.
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Mardi 14 juin
L’OFFICE DIVIN AVANT TOUT !
TOUT au long de cette terrible journée, les assaillants se mirent à l’abri sous le portail du couvent pour pointer leurs canons vers la Bastille. Les balles et la mitraille pleuvaient dans l’enclos où trônait une statue de Notre-Dame de la Garde. Une charge d’artillerie brisa les vitraux de l’église.
La communauté chantait les vêpres quand un boulet de canon tomba dans le chœur ! Il roula quelques secondes le long des stalles ! Sans interrompre l’office, les sœurs se rapprochèrent de leur prieure. Lorsque le boulet s’arrêta, elles regagnèrent leurs places, doucement et sans bruit.
Sœur Thérèse-Joséphine, qui se trouvait au pupitre, recula simplement d’un pas pour laisser passer le projectile meurtrier. Sans omettre une seule syllabe, elle poursuivit la lecture comme si rien n’était arrivé.
Les pensionnaires ne se troublèrent pas. Seule l’une d’elles s’évanouit. Toutes récitèrent un De Profundis pour les victimes de cette triste journée. Ensuite, les leçons continuèrent normalement.
Pour ressembler un peu à ces religieuses, nous réciterons notre chapelet en restant calmes et recueillis.
Ô Jésus, c’est pour votre amour, en réparation des offenses au Cœur Immaculé de Marie, pour la conversion des pauvres pécheurs et pour le Saint-Père !
Colorier sœur Thérèse-Joséphine et le pupitre.
Mercredi 15 juin
« J’AIME MIEUX PERDRE MA PEAU... »
APRÈS la prise de la Bastille, les révolutionnaires décidèrent de mettre le feu à toutes les maisons voisines, et donc à la Visitation... Heureusement, d’autres combats plus urgents les accaparèrent et les forcèrent à changer d’avis.
Toutefois, ils soupçonnèrent les religieuses de cacher des armes. Tandis que la populace encerclait le cloître, trente hommes, sabre à la main et pistolets à la ceinture, fouillèrent le couvent de la cave au grenier.
Ils résolurent d’incendier le monastère lorsqu’ils découvrirent les moules du Cœur de Jésus et de Marie, qu’ils crurent être... des moules pour fabriquer des balles !
Nos visitandines subirent un long et pénible interrogatoire. Toutes trouvèrent les mots les plus forts pour exprimer l’amour de leur sainte vocation et leur joie d’être les épouses de Jésus.
Bon gré mal gré, les commissaires transcrivirent leurs réponses, y compris celle de cette novice qui s’était exclamée : « J’aime mieux perdre ma peau que mon saint habit » !
Admirons le courage de cette novice, fidèle à Jésus malgré les menaces. Récitons notre chapelet pour tous les martyrs, si nombreux de nos jours.
Colorier une partie de la frise.
Jeudi 16 juin – Fête-Dieu
TENIR BON
UN jour, un prêtre célébra la Messe chez les sœurs. Il avait prêté le serment acceptant la Constitution civile du clergé. Les religieuses l’ignoraient. Quand elles l’apprirent, elles le congédièrent sur-le-champ. Celui-ci s’empressa de les dénoncer.
Brimades et vexations s’ensuivirent. Mère Anne-Madeleine tint bon : « Nous aimons mieux ne pas entendre la Messe que d’assister à celle d’un apostat. »
En mars 1791, Paris recevait son nouvel évêque constitutionnel, Jean-Baptiste Gobel 3, membre actif du club des Jacobins. On demanda aux visitandines de sonner le tocsin en l’honneur de son installation. La vaillante supérieure refusa net. Le lendemain, cinq cents révolutionnaires déchaînés envahirent le monastère, criant avec fureur : « Nous venons fouetter les dévotes et massacrer les prêtres ! » Les fidèles présents dans l’église prirent la fuite par une porte dérobée.
Prions pour que s’accomplissent les promesses du Sacré-Cœur par le Cœur Immaculé de Marie :
« Je régnerai malgré mes ennemis et tous ceux qui voudront s’y opposer. Satan sera vaincu, lui et tous ses adhérents. »
Colorier les deux canons.
Vendredi 17 juin
MIRACLE DE NOTRE-DAME
NAPOLÉON s’empara du pouvoir et consolida la Révolution. Il ravagea l’Europe par ses guerres insensées et meurtrières. En 1815, les armées russes et européennes envahirent la France et entrèrent dans Paris.
Les militaires tirèrent à boulets rouges sur le couvent. Ils croyaient, à tort, que ce grand bâtiment était la demeure d’un personnage important du gouvernement napoléonien !
Dans ce péril, « nos sœurs se rappelèrent Notre-Dame de la Garde et eurent recours, par un vœu, à leur céleste Protectrice. Sa statue se trouvait précisément au milieu du jardin, exposée à tous les tirs. »
Une fois l’assaut terminé, quelle ne fut pas la surprise des officiers allemands de voir apparaître non pas des militaires en tenue, mais une visitandine en habit !
Apprenant qu’aucune religieuse n’avait été tuée ni même blessée, et voyant qu’il n’y avait aucune trace de leur mitraille sur les murs, ils s’exclamèrent :
« Oh ! Comment avez-vous pu demeurer ici, vos bâtiments ne devraient plus exister ! »
Des boulets furent déposés en ex-voto au pied de l’autel de Notre-Dame de la Garde, avec des débris d’autres projectiles de gros calibre.
« Voulons-nous que la Vierge nous exauce ? Exauçons-la ! Voulez-vous qu’elle vous écoute ? Écoutez-la ! Elle vous demande de tout son Cœur et en échange de son affection que vous soyez obéissants serviteurs de son Fils. » (saint François de Sales)
Colorier trois des cinq boulets mis en ex-voto.
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Samedi 18 juin
LA VRAIE VOIE
LES visitandines conservèrent la même sérénité lorsque les hordes révolutionnaires se déchaînèrent contre l’Église et la monarchie, renversant le roi Charles X.
Notre-Dame de la Garde veillait, détournant les balles qui pleuvaient sur le couvent. De plus, cette révolution de 1830 contraignit nos visitandines à se disperser.
Lorsqu’elles purent reformer leur monastère, elles appelèrent mère Chappuis afin de retrouver la parfaite fidélité à l’esprit de saint François de Sales.
Le Sacré-Cœur avait préparé à sa mission cette supérieure de la Visitation de Troyes. À son arrivée, le mardi de Pâques 1833, elle dit à une jeune professe :
« Voilà six ans que je vous connais ! Oui, il y a six ans que le Bon Dieu m’a montré votre âme et quelques autres pour lesquelles il m’appelait ici, afin de leur indiquer la vraie voie qui conduit à Dieu. »
Quelle est cette “ vraie voie ” ? Mère Chappuis nous la révèle : « J’ai vu qu’il fallait se débarrasser de soi entièrement et je me suis quittée tout simplement. J’ai vidé ma tête des inclinations de mon esprit propre. J’ai dit : Puisque tout cela m’embarrasse, je n’en veux plus. »
Renouvelons notre consécration au Cœur Immaculé, notre « refuge et le chemin qui nous conduira jusqu’à Dieu ».
Colorier la statue de Notre-Dame de la Garde.
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Dimanche 19 juin – Solennité de la Fête-Dieu
ATTACHÉE A LA CROIX
L’ÂME de mère Marie de Sales Chappuis était toujours sur la croix, et ses communications divines toujours liées au sacrifice de ses goûts, de ses inclinations, de son jugement personnel. Elle appelait cela « être attachée à la Croix. Il ne faut pas en descendre, disait-elle. On ne serait plus avec le Sauveur. »
Cette supérieure ne ménagea ni les instructions ni les avertissements, lisant dans l’âme de ses Filles. L’une d’elles vivait dans un état de scrupules et de peines intérieures dont personne n’avait pu la tirer. Mère Chappuis lui dit simplement :
« Allez et écoutez ce que le Sauveur vous dira. »
La jeune religieuse, en prière à la chapelle, entendit très distinctement ces paroles : « Suivez-moi. »
Aussitôt, ses peines cessèrent. Il lui sembla qu’elle suivait Jésus partout, jusqu’au jour où Il l’entraîna aux noces éternelles.
En cette fête de Jésus-Hostie, méditons cette pensée de sœur Lucie :
« Le Cœur Immaculé de Marie fut le premier ostensoir de Jésus ; c’est le Cœur Immaculé qui a fourni au Fils de Dieu sa vie et son être naturel. Et c’est de cette vie, puisée dans le Cœur de Marie, que nous recevons tous grâce sur grâce. »
Colorier l’ange de droite.
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Lundi 20 juin
NOUS DONNER À JÉSUS SAUVEUR
MÈRE Marie de Kostka Lepan rendit ce témoignage : « Notre mère Marie de Sales a été au milieu de nous comme le Sauveur au milieu du peuple qui le suivait, faisant du bien à tous. Elle était toujours radieuse, soulevant les âmes, les volontés, rendant tout facile. Elle savait nous amener à l’oubli de nous-mêmes pour nous donner au Sauveur, étudier sa vie, ses vertus, dépendre de Lui, vivre avec Lui. Tout tendait à cela. »
Elle affectionnait surtout les âmes simples. Évoquons sœur Marie-Agathe, converse, qui faisait oublier son peu de force par plus de docilité et de soumission. Malgré son naturel craintif et scrupuleux, elle était devenue si obéissante qu’elle s’en remettait de tout à sa supérieure. Aussi, Dieu adoucit-il l’amertume de ses derniers moments.
« Oh ! qu’il est doux de mourir, confiait-elle.
– Ce n’est pas mourir, c’est retourner à Dieu », lui répondit mère Marie de Sales. Comme il était tard et que les sœurs avaient besoin de repos, elle ajouta :
« Sœur Marie-Agathe, attendez-nous pour aller à Dieu. »
L’humble religieuse se soumit. Elle rendit son dernier soupir à 4 heures du matin, avec une douceur inexprimable, après en avoir reçu la permission de sa supérieure. La bonne Mère la citait souvent en exemple : « Une âme obéissante peut tout sur le Cœur de Dieu. »
Cœur Sacré de Jésus, Maison de Dieu et Porte du Ciel, bénissez-nous !
Colorier une partie de la frise.
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Mardi 21 juin
DE SAINTES VOCATIONS
KATE Danson naquit à Liverpool, en Angleterre, en 1803. Ses parents, pourtant anglicans, la confièrent aux visitandines. À l’âge de trente-trois ans, Kate se convertit au catholicisme et entra à la Visitation de Paris.
Apprenant cette nouvelle, sa jeune sœur, Jane, se durcit dans sa foi anglicane. Dans le secret espoir de détourner son aînée des “ erreurs papistes ”, elle alla jusqu’à demander de passer quelques jours en clôture. C’était le jour de la fête du Sacré-Cœur.
Touchée par la grâce, Jane abjura le protestantisme et devint religieuse, sous le nom de Marguerite-Marie ! Emma, la benjamine, les imita si bien qu’elle se convertit et prit l’habit, elle aussi.
En 1858, le monastère accueillit Sabine, fille de la comtesse de Ségur. Elle reçut le nom de sœur Jeanne-Françoise :
« Quelle grâce et quel bonheur pour toi d’abord, et puis pour nous ! lui écrivit son frère [Mgr de Ségur, le saint évêque aveugle]. Notre-Seigneur unit quand il paraît séparer, et c’est tout simple, puisqu’il est lui-même le centre de toute vraie union... Quel bon rendez-vous que Jésus-Christ ! »
En 1868, sœur Jeanne-Françoise gravement malade fut tentée de découragement. Mère Chappuis la conduisit par sa “ vraie voie ” de l’abandon à Dieu. Quelques mois plus tard, la religieuse mourut comme une sainte, en prononçant ces paroles : « Jésus, mon amour ! »
« Divin Cœur de Jésus et Marie, je veux vous aimer. »
Colorier les deux derniers obus mis en ex-voto.
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Mercredi 22 juin
LA GUERRE DE 1870
QUAND éclata la guerre entre la France et l’Allemagne, mère Chappuis connut, par des lumières divines, que les Visitations de Paris n’auraient rien à craindre.
Elle implorait sans cesse le secours de Dieu pour les soldats, et sa miséricorde pour ceux qui mouraient au combat. Elle s’inclinait sous la main de Dieu, voyant en chaque désastre le châtiment des péchés de la France : « Nous l’avons mérité ! » Puis elle se recueillait dans la prière.
Un jour, des soldats prussiens escaladèrent le mur de clôture à l’endroit où se trouve la statue de Notre-Dame de la Garde. Un de leur chef les fit redescendre aussitôt, sans que les sœurs eussent à intervenir ! Il avait vu une belle Dame blanche au-dessus du mur, protégeant le monastère !
Le pensionnat servit d’ambulance sous la conduite des frères de Saint-Jean-de-Dieu. Mère Jeanne-Charlotte soignait les blessés, s’intéressait à leurs peines. Prompte à saisir toutes les occasions de raviver leur foi, souvent bien endormie sinon tout à fait morte, elle entretenait la piété au sein de cette infirmerie improvisée :
« On y faisait à haute voix la prière du matin et du soir, racontent les visitandines. Notre Mère récitait elle-même le Bénédicité, présidait les repas et disait les grâces. Le dimanche, elle venait chercher les convalescents pour les conduire à la Messe ou à d’autres exercices. »
En récitant le chapelet, prions le Cœur Immaculé de Marie pour la conversion des pauvres pécheurs.
Colorier les deux bouquets de fleurs sur l’autel.
Jeudi 23 juin – Fête-Dieu
ME CONFESSER ?
LA veille de Noël, tous les blessés souhaitèrent se confesser, sauf l’un d’eux, Claude. Ce dernier résistait à la grâce. Le 24 décembre, il répondit au bon religieux qui l’interpellait sur ce sujet brûlant : « Me confesser ? Je n’y pense même pas. »
La nuit vint. Toujours prêt à rendre service, Claude monta de la lumière à monsieur le curé. Il arriva à la chapelle en même temps que le prêtre qui s’exclama : « Ah ! Vous venez enfin vous confesser ! »
Interdit, notre homme balbutia, hésita, puis tomba à genoux. Il ne se releva que pour se rendre à la messe de Minuit !
« Ô quel triomphe au Ciel et quelle douceur en la terre ! Que nos cœurs soient où est leur trésor, et que nous vivions au Ciel puisque notre vie est au Ciel ! » (saint François de Sales)
Colorier l’autel de la Sainte Vierge.
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Vendredi 24 juin
PROMESSE AU SACRÉ-CŒUR
DURANT le siège de Paris, le Sacré-Cœur continua à protéger les visitandines. Elles avaient accroché ses images aux murs du grenier, et même au dôme de l’église. Plusieurs canons projetèrent leurs obus sur le monastère, sans aucun dommage !
Les troupes rebelles stationnaient à la porte. Mère Jeanne-Charlotte promit au Sacré-Cœur une année de dévotion en son honneur et un redoublement de fidélité, s’Il empêchait la destruction du monastère.
Le 15 mai 1871, les insurgés attaquèrent en pleine nuit, menaçant d’enfoncer les portes du couvent. L’intrépide sœur Louise-Marie commença par leur tenir tête :
« Qui qu’est là ? demanda-t-elle.
– Ouvrez la porte, répondirent-ils.
– Quoi qu’vous voulez ?
– Ouvrez tout de suite.
– C’est pas à cet’heure-là qu’on vient chez les gens.
– Qui ouvre la porte ?
– Celle qu’a les clés.
– Qui a les clés ?
– Celle qu’ouvr’la porte. »
Finalement, il fallut les laisser entrer. Quatre sentinelles, dont le chef qui se vanta d’avoir été au séminaire, inspectèrent le couvent. Pour éviter la profanation du Saint-Sacrement, sœur Claire-Agnès le portait sur elle. Mère Jeanne-Charlotte refusa de leur communiquer l’adresse de leur confesseur.
Puisons chez ces visitandines l’exemple de la fermeté dans la foi et l’attachement à notre vie religieuse et phalangiste, établie par notre fondateur, l’abbé de Nantes.
Colorier l’arceau fleuri autour de Notre-Dame.
Samedi 25 juin
MARIE-AUXILIATRICE
LES sœurs apprirent que leur arrestation était immi- nente. Du 21 au 24 mai, le couvent se trouva pris dans les tirs, entre les communards et l’armée régulière.
Une balle entra par la fenêtre d’une cellule et frappa le lit d’une visitandine qui venait de se lever ! Une autre se fixa dans le mur, sans faire de blessé.
C’était le 24 mai, fête de Marie-Auxiliatrice. Nos vaillantes religieuses confectionnèrent une petite niche et y placèrent sa statue, surmontée de cette sentence :
« Nous criions vers Vous, ô Sainte Mère de Dieu, et par Vous nous vint le secours du Seigneur. »
Le 26 mai, sœur Geneviève-Stéphanie apprit le martyre de son oncle jésuite, le Père Jean Caubert :
« Ma vocation est de prier et de souffrir pour le salut des âmes, avait-il écrit de sa prison. J’implore les bénédictions de Dieu sur Paris et sur la France. La Sainte Vierge se charge de présenter nos prières à son Fils Notre-Seigneur Jésus-Christ et nous provoque ainsi à une confiance sans bornes. »
Onze jours plus tard, l’armée régulière triomphait des communards. Les visitandines accomplirent leur promesse au Sacré-Cœur.
« Bataillons sous l’étendard de la très Sainte Vierge, notre vaillante Capitainesse ! » (saint François de Sales)
Colorier la banderole “ Ô Marie, vous êtes terrible... ”
Dimanche 26 juin
« UNE NOMBREUSE PHALANGE »
EN mai 1872, au jour anniversaire de la délivrance, la Visitation de Paris organisa une magnifique procession en l’honneur de la Sainte Vierge.
Le 7 octobre, fête du Saint-Rosaire, toute la France s’associa à cette action de grâces, par un « grand pèlerinage national aux pieds de Notre-Dame de Lourdes. Chaque diocèse avait été invité à s’y faire représenter par une bannière. » La Visitation y participa, en la personne de la tourière, sœur Françoise-Rosalie.
Ce même jour, Mgr de Ségur présida la prise d’habit de sœur Marie-Luce Veuillot, fille du journaliste. La cérémonie se déroula au milieu d’une assistance bien inaccoutumée. En effet, Louis Veuillot avait invité tous les directeurs de la presse de Paris.
« Ils viendront au moins une fois à l’église dans leur vie », se félicitait le célèbre polémiste catholique et légitimiste.
Trois ans plus tard, en 1875, Pie IX consacra l’Église au Sacré-Cœur. Cet acte fut pour la Visitation de Paris la semence d’une « nombreuse et vivante phalange » : huit postulantes se présentèrent entre janvier et août !
Si nous avons la grâce d’entendre l’appel à la vie religieuse, aimons Jésus et Marie et, dès maintenant, vivons dans une plus grande intimité avec Eux.
Colorier le Sacré-Cœur et saint Pie X.
Lundi 27 juin
AUGUSTA ET MARIA DROSTE
LE 20 août 1875, à Darfeld en Allemagne, Augusta Droste zu Vischering écrivit à une amie : « Nos bonnes religieuses de la Visitation de Münster vont partir le mois prochain pour Paris, chassées qu’elles sont par le gouvernement [de Bismarck].
« C’est vraiment trop terrible. Nous sommes tous tristes ; les vilains Prussiens ne savent que faire pour fâcher les catholiques. »
Les soixante-cinq visitandines de Paris accueillirent donc neuf religieuses de Münster. Sœur Sophie-Angélique, âgée de trente-cinq ans, infirme et aveugle, se distingua par ses vertus :
« Elle s’attacha tous nos cœurs par sa cordiale sérénité et un don si particulier d’adresse et d’intuition pour toutes choses. Peu après son arrivée, elle nous reconnaissait alors qu’elle ne nous avait jamais vues. Elle se dirigeait presque seule dans le monastère et pouvait déjà s’exprimer en français. »
Cinq élèves allemandes avaient suivi leur maîtresse à Paris. Aux vacances de Pâques de 1876, quelle ne fut pas la joie de l’une d’elles, Augusta, de recevoir la visite de ses parents, le comte et la comtesse Droste, et de sa petite sœur Maria, alors âgée de treize ans !
En février 1878, Augusta assista au triduum célébré à l’occasion de la proclamation, par le pape Pie IX, de saint François de Sales comme Docteur de l’Église.
Récitons la prière de l’Ange de Fatima pour garder la foi et intercéder pour les pauvres pécheurs.
Colorier sœur Sophie-Angélique.
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Mardi 28 juin
WILHELMINA GABRIELLI
AU pensionnat, Augusta rencontra Wilhelmina Gabrielli. D’origine anglaise et de religion protestante, cette adolescente de treize ans avait été confiée par sa mère aux visitandines dans le seul but de changer son caractère infernal, que les sœurs avaient rapidement constaté !
À force de bonté et de patience, elles gagnèrent le cœur de la jeune fille. Les exercices de la retraite de première Communion la trouvèrent recueillie et attentive. La veille du grand jour, “ Mina ” s’écria :
« Je veux faire ma première Communion ! »
Le lendemain, il fallut la surveiller de près pour l’empêcher de suivre ses compagnes, car elle était toujours protestante.
Ses parents craignirent que leur enfant se convertisse et vinrent la rechercher. “ Mina ” confia alors son chapelet à la première maîtresse du pensionnat et lui dit :
« Gardez-le jusqu’à ce que je revienne me faire religieuse. »
En 1884, au jour de sa majorité, Wilhelmina traversa la Manche. Elle reçut l’habit sous le nom de sœur Marie-Wilhelmine.
« La douceur et l’humilité sont les bases de la sainteté. Toutes les fois que vous trouverez votre cœur hors de la douceur, ne faites que le prendre tout doucement avec le bout des doigts pour le remettre à sa place. » (saint François)
Colorier Augusta et Wilhelmina.
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Mercredi 29 juin
LA VISITATION MENACÉE
EN 1901, la Visitation et tous les ordres religieux subirent la haine de la République. Une nouvelle loi donnait le droit de les dissoudre ou de les fermer.
Mère Joseph-Augustine promit de dédier un oratoire à la Sainte Famille si la communauté n’était pas contrainte à l’exil. Toutes les sœurs renouvelaient quotidiennement leurs promesses et consécrations au Sacré-Cœur.
Le 1er octobre 1904, mère Jeanne-Charlotte reçut le décret tant redouté... Comme la loi ne concernait pas encore les congrégations hospitalières, leur aumônier eut l’idée de déclarer les sœurs « autohospitalières ». Les constitutions établissent, en effet, que la Visitation reçoit aussi « les infirmes imbéciles et débiles, ainsi que les personnes âgées ou de faible complexion ».
Le jour de l’expulsion arriva donc... sans que les visitandines fussent chassées. Mais le liquidateur, monsieur Ménage [ !], se présenta et inventoria tout, jusqu’aux quarante arbres du jardin !
Un agent fiscal revint plus tard et fit saisir les meubles :
« Les chaises de la chapelle, le confessionnal, les tables, les bancs, la chaire du réfectoire, quelques vieux meubles furent transportés dans la voiture. Ne leur ayant pas donné d’échelle, les gens montaient sur les épaules des uns et des autres pour atteindre quelques crucifix ou tableaux sans valeur ! »
En 1906, le tribunal de cassation déclara la Visitation définitivement « autohospitalière ». Victoire du Sacré-Cœur qui permit à la communauté de rester dans son couvent !
Récitons les litanies de la très Sainte Vierge, notre refuge et perpétuel secours (E 6).
Colorier mère Jeanne-Charlotte.
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Jeudi 30 juin
« ALLONS COURAGE ! »
EN 1910, les visitandines s’apprêtaient à célébrer le troisième centenaire de leur fondation. À cette occasion, le Sacré-Cœur opéra un éclatant miracle en faveur de sœur Marie-Antoinette.
Âgée de trente-cinq ans, cette religieuse souffrait d’une tumeur au foie. Elle écrivit ce billet qu’elle glissa dans la robe de mère Jeanne-Charlotte qui venait de mourir :
« Ma bonne Mère, maintenant que vous êtes au Ciel, vous voyez le triste état dans lequel je me trouve physiquement et moralement. Je vous supplie de m’en faire sortir par n’importe quel moyen. »
Deux mois passèrent. Les souffrances de la malade augmentaient. Un jour de mai, le médecin annonça qu’elle vivait ses dernières heures.
L’abbé Bégué lui administra l’extrême-onction. Durant la nuit, une douce lumière tira sœur Marie-Antoinette de sa torpeur :
« J’ai vu Notre-Seigneur au pied de mon lit. Il m’a dit : “ Je viens à toi parce que tu es cette petite chose désespérée de laquelle je me plais à faire l’œuvre de ma Miséricorde et de mon Amour ! ”
« Et j’ai vu en cet instant, toutes les actions de ma vie, elles tombaient comme dans un gouffre, les unes restaient au fond, d’autres s’élevaient tantôt plus haut, tantôt moins, et aucune n’allait jusqu’à Notre-Seigneur. J’ai compris que ce n’était pas l’action elle-même, mais surtout la pureté d’intention qui les faisait monter à Lui.
« À ce moment, sa main gauche s’est un peu écartée et, dans le vêtement, j’ai vu son Cœur rouge couronné d’épines et de flammes.
« J’ai très bien vu des rayons lumineux comme un faisceau composé de trois rayons distincts, sortir de son Cœur et tomber sur la partie malade [le foie] sans la pensée d’être guérie, absorbée que j’étais par Notre-Seigneur.
« Puis, Notre-Seigneur a disparu et mère Jeanne-Charlotte est arrivée, semblable à ce qu’elle était, mais jeune, alerte, rayonnante. Elle me dit :
« “ Ah ! Ma Fille, ma Fille, que Notre-Seigneur a donc été bon pour vous. Remerciez-le bien. Et maintenant, il ne s’agit pas d’être à Lui à moitié. Allons courage ! Commencez à devenir une vraie religieuse : l’humilité et l’obéissance, voilà tout ce qu’il vous faut ! ”
« Alors, elle s’est approchée davantage, m’a fait une petite croix sur le front, et elle est repartie joyeusement et empressée à la suite de Notre-Seigneur. »
Le lendemain, le médecin, non catholique, constata que sœur Marie-Antoinette était vivante, véritablement guérie !
« Cœur Immaculé de Marie, que votre règne arrive ! »
Colorier sœur Marie-Antoinette dans son lit.
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La Résurrection par l’Immaculée
EN 1898, la bienheureuse Marie du Divin Cœur avait écrit au pape Léon XIII : « Notre-Seigneur veut que l’on donne une nouvelle splendeur au culte de son Divin Cœur. Il m’a dit : “ Les peuples et les nations seront illuminés de cette splendeur et embrasés de ses ardeurs. ” Son Divin Cœur a faim et soif, il désire embraser le monde entier de son amour et de sa miséricorde... »
Ce Pape libéral n’en fit pas cas. En revanche, saint Pie X, qui lui succéda, prit pour devise : “ Tout instaurer dans le Christ. ” Ainsi, le pontificat de ce saint Pape retarda de cinquante ans l’apostasie et la ruine de la Chrétienté.
Saint François de Sales n’imaginait pas qu’un concile, (Vatican II, 1962-1965), modifierait les constitutions de son ordre et provoquerait la chute des vocations, la fermeture de Visitations, le départ de nombreuses religieuses. Cette dévastation toucha aussi la Visitation de Paris : démolition du chœur, de l’autel et de la chaire, suppression du dôme d’exposition du Saint- Sacrement et des statues.
En 1978, le Sacré-Cœur vint au secours de son Église en lui accordant un saint Pape qui voulait obéir à Notre-Dame de Fatima : Jean-Paul Ier. Sous son court règne, plusieurs jeunes filles entrèrent à la Visitation de Paris.
En revenant à la fidélité à leurs fondateurs, les ordres religieux seront à nouveau florissants. Et ils retrouveront l’amour de Marie qui les conduira à Jésus.
À l’école de saint François de Sales et de notre bienheureux Père, comprenons qu’à travers les siècles, ce sont les missionnaires et les religieux qui ont le plus œuvré pour l’avancée du Règne de Dieu.
La religieuse est remplie d’un saint zèle et d’un immense enthousiasme. Elle donne tout son temps et use ses forces à travailler au triomphe des Saints Cœurs de Jésus et de Marie, à la résurrection de l’Église, à la défense de la foi. C’est son bonheur et sa gloire.
(1) Notre Père, l’abbé de Nantes, nous prêcha, en 1995, une retraite sur cet évêque de la Contre-Réforme catholique au seizième siècle.
(2) Dans leurs Annales que nous citons largement dans ce carnet.
(3) Il sera guillotiné en 1794, un an après avoir renoncé à ses fonctions et à sa prêtrise, « pour l’amour du peuple », avait-il dit...